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L’apport de la loi BADINTER de 1985 interprété par la Cour de cassation en 2021   (Cass.civ., 2e civ, 6 mai 2021, n°20-14.551) En l’espèce, une femme se déplaçant en fauteuil roulant électrique a été victime d’un accident de la circulation. L’assureur du véhicule ayant percuté cette femme a refusé de l’indemniser au motif qu’elle a commis une faute exclusive de son dommage. La loi Badinter de 1985 à créé un régime de réparation inégalitaire en fonction de la qualité de la victime. En effet, la faute de la victime n’est pas appréciée de la même manière selon qu’elle soit conductrice ou non d’un véhicule terrestre à moteur (ci-après « véhicule »).   Les victimes non conductrices d’un véhicule Les victimes non conductrices d’un véhicule sont considérées comme des victimes privilégiées. En effet, la loi a posé un principe : « les victimes, hormis les conducteurs de véhicules terrestres à moteur, sont indemnisées des dommages résultant des atteintes à leur personne qu’elles ont subis, sans que puisse leur être opposée leur propre faute ». Les piétons, cyclistes ou encore les passagers d’un véhicule sont concernés. Néanmoins, il existe 2 exceptions. La faute de la victime peut lui être opposée dès lors qu’elle a commis une faute inexcusable qui a été la cause exclusive de l’accident ou lorsqu’elle a volontairement recherché le dommage qu’elle a subi. La Cour de cassation admet strictement l’existence de ces hypothèses et visent notamment les situations où la victime a tenté de se suicider. Il convient tout de même de préciser que dans certains cas, la faute de la victime ne peut jamais lui être opposée même si celle-ci a volontairement recherché le dommage qu’elle a subi. Est visée l’hypothèse où les victimes sont âgées de moins de seize ans ou de plus de soixante-dix ans, ou lorsque, quel que soit leur âge, elles sont titulaires, au moment de l’accident, d’un titre leur reconnaissant un taux d’incapacité permanente ou d’invalidité au moins égal à 80 p. 100.   Les victimes conductrices d’un véhicule Lorsque la victime est conductrice d’un véhicule, sa faute peut lui être opposée et ainsi réduire voire exclure son droit d’être indemnisé. Dans sa décision du 6 mai 2021, la problématique était de savoir si un fauteuil roulant électronique, circulant sur le sol doit être considéré comme un véhicule. Dans l’affirmative, la faute de la victime serait prise en compte et entrainerait une incidence sur le montant de son indemnisation. La Cour de cassation a donc tranché en considérant qu’un fauteuil roulant électrique est un dispositif médical destiné au déplacement d’une personne en situation de handicap. Par conséquent, ce n’est pas un véhicule terrestre à moteur au sens de la loi du 5 juillet 1985.
La victime d’un dommage causé par une chose inerte peut demander la réparation de son préjudice si la chose était anormal (2e civ, 7 avr. 2022, n°20-19.746)   En l’espèce, un individu s’est assis sur le rebord d’une fenêtre de 80 cm de haut, situé au 5ème étage d’un immeuble et à 42 cm du sol de l’appartement. Cette fenêtre ne comportait aucun garde-corps susceptible d’empêcher une chute. Après s’être assis sur le rebord cette fenêtre, l’individu a basculé dans le vide et est décédé. La question qui se posait était celle de savoir si la chose présentait un caractère anormal permettant ainsi aux ayants-droits d’obtenir une indemnisation du préjudice subis. L’article 1242 alinéa 1er du Code civil prévoit qu’on est responsable du dommage causé par les choses que l’on a sous sa garde. Doit-il s’agir d’une chose dangereuse ? La chose est entendue largement par le législateur et il n’est pas nécessaire qu’elle présente certaines caractéristiques. Ainsi, il peut s’agir d’une chose dangereuse ou inoffensive, mobilière ou immobilière, actionnée ou non par la main de l’Homme, en mouvement ou encore inerte. Cependant, la chose doit avoir joué un rôle actif dans la survenance du dommage. Comment prouver ce rôle actif ? En principe, la démonstration de cette preuve incombe à la victime. Cependant, dans l’hypothèse où une chose en mouvement est entrée en contact avec le siège du dommage, il existe une présomption de rôle actif qui entraîne un renversement de la charge de la preuve. Il appartient donc au propriétaire de démontrer que la chose n’a joué aucun rôle dans la survenance du dommage. Dans les autres hypothèses, c’est-à-dire lorsque la chose en mouvement n’est pas entrée en contact avec le siège du dommage ou lorsqu’une chose inerte est entrée en contact avec le siège du dommage, il appartient à la victime de démontrer ce rôle actif. Ce rôle actif doit résider dans le caractère anormal de la chose (position, comportement, défectuosité, fragilité…). C’est ainsi que la Cour de cassation a pu considérer que présente un caractère anormal une fenêtre situé au 5ème étage d’un immeuble, à 42 cm du sol de l’appartement dépourvu de garde-corps susceptible d’empêcher une chute malgré l’étage élevé de l’appartement. Si ces conditions sont réunies, le gardien de la chose sera tenu d’indemniser la victime. Il convient de préciser qu’il existe une présomption de garde à l’égard du propriétaire de la chose. Ainsi, s’il n’avait pas la garde de la chose au moment de la survenance du dommage, il lui appartient d’apporter cette preuve.
Le nouvel article 222-23-1 du Code pénal   La loi n° 2021-478 du 21 avril 2021 visant à protéger les mineurs des crimes et délits sexuels et de l’inceste a facilité l’engagement de la responsabilité pénale de l’auteur d’un viol sur un mineur de 15 ans. Cette loi a introduit le nouvel article 222-23-1 dans le Code pénal selon lequel « Hors le cas prévu à l’article 222-23, constitue également un viol tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit, ou tout acte bucco-génital commis par un majeur sur la personne d’un mineur de quinze ans ou commis sur l’auteur par le mineur, lorsque la différence d’âge entre le majeur et le mineur est d’au moins cinq ans ». A la différence de l’article 222-23 relatif au viol général, la victime n’a pas à démontrer l’usage de violence, menace, contrainte ou surprise pour caractériser l’infraction. L’absence de son consentement est donc présumée.   Quelles sont les conditions exigées par le nouvel article 222-23-1 du Code pénal ? Plusieurs éléments doivent être démontrés par la victime pour pouvoir invoquer ce nouvel article :   L’existence d’un acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit ou d’un acte bucco-génital L’acte doit avoir été commis sur la victime ou sur l’auteur des faits par la victime La victime doit être un mineur de 15 ans La différence d’âge entre le majeur et le mineur est d’au moins cinq ans   Exemple : si une victime âgée de 13 ans a eu une relation sexuelle avec une personne de 18 ans, le nouvel article 222-23-1 peut être invoqué. Cependant, l’alinéa 2 de l’article 222-23-1 du Code pénal précise que la condition de différence d’âge n’est pas exigée si les faits ont été commis en échange d’une rémunération, d’une promesse de rémunération, de la fourniture d’un avantage en nature ou de la promesse d’un tel avantage.   Cet article est-il applicable pour les faits commis avant son entrée en vigueur ? En vertu du principe de la non-rétroactivité de la loi pénale plus sévère prévu à l’article 112-1 du Code pénal, cette nouvelle disposition ne peut être invoquée pour les faits commis avant son entrée en vigueur.   Quelles sont les peines applicables ? Aux termes de l’article 222-23-3 du Code pénal, ce viol est puni de 20 ans de réclusion criminelle.
Sur le principe de l’indisponibilité de notre propre corps Cass. Crim., 25 juin 2019, 18-84.200 La Chambre criminelle a jugé « L’infraction de violence ne disparaît pas lorsque la victime est consentante ». Ainsi, les violences constituent une infraction quand bien même la victime y aurait consentie. Cette décision reste nuancée par l’arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme qui avait considéré « Le droit pénal ne peut en principe intervenir dans le domaine des pratiques sexuelles consenties, qui relèvent du libre arbitre des individus, sauf des raisons particulièrement graves ». (CEDH, KA c/ Belgique, 25 février 2005)
ON PEUT ETRE CONDAMNE POUR VOL D’INFORMATIONS POURTANT EN LIBRE ACCES SUR LE RESEAU INFORMATIQUE D’UNE ENTREPRISE Arrêt de la Chambre Criminelle de la Cour de Cassation en date du 28 Juin 2017, n°16-87.189 Un avocat avait accédé au réseau informatique en libre accès du cabinet pour copier toute la correspondance de son associée avant de la remettre au Bâtonnier. Malgré le libre accès à ces informations pour les membres du cabinet, les juges l’ont condamné pour vol.
La distinction entre un vol, une escroquerie et une extorsion   Le vol, l’escroquerie et l’extorsion sont trois atteintes aux biens qui peuvent être confondues par les justiciables. Il convient donc de les analyser successivement.   I) Le vol 1. La définition Aux termes de l’article 311-1 du Code pénal « Le vol est la soustraction frauduleuse de la chose d’autrui ».   Une chose Le vol nécessite donc qu’une chose ait été soustraite. La chose est entendue largement par le législateur et par la Cour de cassation. Cette dernière a affirmé que « la loi punit la soustraction d’une chose, quelle qu’elle soit, si elle appartient à autrui » (Cass. crim, 14 mai 1957). Néanmoins, la chose ne peut concerner qu’un bien mobilier.   Une chose appartenant à autrui Pour caractériser un vol, il est nécessaire que la chose objet du vol appartienne à autrui. Cependant, il n’est pas nécessaire de connaître le propriétaire de la chose. La mauvaise foi du prévenu pourra être caractérisée dès lors qu’il s’approprie une chose qu’il sait ne pas lui appartenir (Cass. crim, 11 mars 1942). Ainsi, les choses abandonnées et les choses sans maître ne peuvent pas faire l’objet d’un vol.   Une soustraction La chose doit avoir été soustraite frauduleusement par le prévenu. La chambre criminelle a d’ailleurs considéré que « pour soustraire, il faut prendre, enlever, ravir », « la soustraction constitutive du délit de vol implique l’appréhension, l’enlèvement d’une chose qui se trouvait hors de la détention du coupable au moment où elle s’opère ». Ainsi, le vol ne saurait être constitué d’une part, si l’individu s’approprie frauduleusement une chose qu’il a en sa possession et d’autre part, si la chose lui a été remise volontairement. Dans cette seconde hypothèse, l’escroquerie ou l’extorsion pourront toutefois être envisagées.   2.La peine  Selon l’article 311-3 du Code pénal, le vol est puni de 3 ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende.   II) L’escroquerie 1.La définition L’escroquerie est prévue à l’article 313-1 du Code pénal. Cet article dispose que « L’escroquerie est le fait, soit par l’usage d’un faux nom ou d’une fausse qualité, soit par l’abus d’une qualité vraie, soit par l’emploi de manœuvres frauduleuses, de tromper une personne physique ou morale et de la déterminer ainsi, à son préjudice ou au préjudice d’un tiers, à remettre des fonds, des valeurs ou un bien quelconque, à fournir un service ou à consentir un acte opérant obligation ou décharge ».   Un mensonge L’escroquerie ne peut être caractérisée que dans 3 hypothèses :   L’usage d’un faux nom ou d’une fausse qualité Exemples : changer de nom en vue de faire croire à sa solvabilité, se présenter sous le nom réel d’autrui, même avec son accord (ce dernier étant alors complice), faire usage de la fausse qualité d’agent commercial…   L’abus d’une qualité vraie Le simple fait d’avoir fait usage d’une qualité vraie ne permet pas de facto de caractériser l’escroquerie. Il est nécessaire que l’agent en ait fait un usage abusif. La Cour de cassation a précisé que l’abus d’une qualité vraie constitue une manœuvre frauduleuse lorsque cette qualité est de nature à imprimer à des allégations mensongères l’apparence de la sincérité et à commander la confiance de la victime (Cass. crim, 25 juin 1931 ; Cass. crim, 1er oct. 1981). Exemple : un avocat qui se fait remettre de l’argent en affirmant faussement à sa victime qu’il convient de corrompre un administrateur judiciaire pour obtenir de la juridiction commerciale des décisions favorables.    L’usage de manœuvres frauduleuses  Dans cette hypothèse, le simple mensonge ne suffit pas à caractériser l’escroquerie. Celui-ci doit être appuyé d’éléments extérieurs (ex : intervention d’un tiers, mise en scène…). Exemples : intervention d’un notaire donnant force et crédit à de fausses déclarations faites par l’une des parties pour déterminer la signature de l’acte authentique, intervention d’un comptable dont le témoignage personnel confirme l’exactitude d’un bilan cependant faux.   La remise d’une chose A la différence du vol, la chose doit être remise volontairement par la victime. Il peut s’agir de fonds, de valeurs ou encore d’un bien quelconque. En outre, l’escroquerie peut porter sur un bien immeuble (Cass. crim, 28 sept. 2016, n°15-84.485).   Un préjudice Il est nécessaire de démontrer que la victime a subi un préjudice. La Cour de cassation a précisé que le préjudice est établi dès lors que les remises ou versements n’ont pas été librement consentis mais ont été extorqués par des moyens frauduleux (Cass. crim, 7 mars 1936).   2.La peine L’article 313-1 alinéa 2 du Code pénal prévoit que l’escroquerie est punie de 5 ans d’emprisonnement et de 375 000 euros d’amende.   III) L’extorsion 1.La définition L’extorsion est définie à l’article 312-1 du Code pénal « L’extorsion est le fait d’obtenir par violence, menace de violences ou contrainte soit une signature, un engagement ou une renonciation, soit la révélation d’un secret, soit la remise de fonds, de valeurs ou d’un bien quelconque ».   L’usage de violence, menace de violences ou contrainte Pour caractériser l’extorsion, l’agent doit avoir fait usage de violence, avoir menacé de violences ou avoir fait usage d’une contrainte. Cette dernière peut être physique ou morale.   Objet de l’extorsion Après avoir fait usage de l’un de ces procédés, l’auteur des faits doit avoir obtenu de la victime : Une signature Un engagement ou une renonciation La révélation d’un secret La remise de fonds, de valeur ou d’un bien quelconque   2.La peine L’article 312-1 du Code pénal dispose que l’extorsion est punie de sept ans d’emprisonnement et de 100 000 euros d’amende.