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La Cour de cassation a jugé que les articles autorisant l’accès aux données de connexion en enquête de flagrance et en enquête préliminaire sont contraires au droit de L’Union européenne (Cass. crim, 12 juill 2022, n° 21-83.710)     Dans le cadre d’une enquête, les enquêteurs peuvent procéder à des réquisitions afin d’accéder aux données de connexion d’un individu et notamment aux fadettes (facture détaillée mentionnant les appels téléphoniques émis et reçus ainsi que la position GPS au moment des émissions et des réceptions de ces appels).   La communication des données de trafic ou de localisation conservées par les opérateurs de télécommunication peut faire l’objet de réquisitions :   Lors d’une enquête de flagrance : en application des articles 60-1 et 60-2 du code de procédure pénale, par un officier de police judiciaire ou par un agent de police judiciaire agissant sous son contrôle.   Lors d’une enquête préliminaire : ces réquisitions sont effectuées sur le fondement des articles 77-1-1 et 77-1-2 du même code et sur autorisation du procureur de la République.   Lors d’une information judiciaire : ces réquisitions sont effectuées en application des articles 99-3 et 99-4 de ce code par un officier de police judiciaire autorisé par commission rogatoire du juge d’instruction.     En ce qui concerne la légalité de l’accès à ces données, la CJUE a considéré dans une décision du 2 mars 2021 que l’accès ne peut être autorisé que sous certaines conditions et notamment s’il est soumis au contrôle préalable d’une juridiction ou d’une autorité administrative indépendante (CJUE, 2 mars 2021, aff. C-746/18, H.K./Prokuratuur).   A ce titre, elle a considéré dans une décision du 5 avril 2022 qu’un fonctionnaire de police ne constitue pas une juridiction et ne présente pas toutes les garanties d’indépendance et d’impartialité requises (CJUE, 5 avr. 2022, Commissioner of An Garda Siochana).   La CJUE rappelle qu’il est essentiel que l’accès des autorités nationales compétentes aux données conservées soit subordonné à un contrôle préalable effectué soit par une juridiction, soit par une entité administrative indépendante, susceptible d’assurer un juste équilibre entre, d’une part, les intérêts liés aux besoins de l’enquête dans le cadre de la lutte contre la criminalité grave, et, d’autre part, les droits fondamentaux au respect de la vie privée et à la protection des données à caractère personnel.   Sous l’influence de la jurisprudence de la CJUE, la Cour de cassation a considéré dans son arrêt du 12 juillet 2022 que « les articles 60-1, 60-2, 77-1-1 et 77-1-2 du code de procédure pénale sont contraires au droit de l’Union uniquement en ce qu’ils ne prévoient pas un contrôle préalable par une juridiction ou une entité administrative indépendante » (Cass. crim., 12 juillet 2022, n° 21-83.710).       En revanche, le juge d’instruction est habilité à contrôler l’accès aux données de connexion étant donné que d’une part, il n’est pas une partie à la procédure mais une juridiction qui statue notamment sur les demandes d’actes d’investigation formées par les parties, lesquelles disposent d’un recours en cas de refus. D’autre part, il n’exerce pas l’action publique mais statue de façon impartiale sur le sort de celle-ci, mise en mouvement par le ministère public ou, le cas échéant, la partie civile.     Quelles sont les conséquences d’une telle décision ?   La nullité d’une telle mesure peut donc être invoquée. Étant une nullité d’ordre privé, certaines conditions doivent être remplies. La Cour de cassation a précisé dans son arrêt du 12 juillet que la juridiction saisie d’une requête ou d’une exception de nullité doit d’abord rechercher si le requérant a intérêt à demander l’annulation de l’acte, puis, s’il a qualité pour la demander et, enfin, si l’irrégularité alléguée lui a causé un grief.   Pour déterminer si le requérant a qualité pour agir en nullité, la juridiction doit examiner si la formalité substantielle ou prescrite à peine de nullité, dont la méconnaissance est alléguée, a pour objet de préserver un droit ou un intérêt qui lui est propre (Cass. crim., 7 sept. 2021, n° 21-80.642).   Ensuite, la personne mise en examen ou poursuivie n’est recevable à invoquer la violation de cette exigence en matière d’accès aux données de connexion que si elle prétend être titulaire ou utilisatrice de l’une des lignes identifiées ou si elle établit qu’il aurait été porté atteinte à sa vie privée, à l’occasion des investigations litigieuses (Cass. crim., 6 fév. 2018, n° 17-84.380).   Enfin, en application des dispositions de l’article 802 du code de procédure pénale, la nullité ne pourra être prononcée que si l’irrégularité elle-même a occasionné un préjudice au requérant, lequel ne peut résulter de la seule mise en cause de celui-ci par l’acte critiqué (Cass. crim., 7 septembre 2021, n° 21-80.642).   Or, l’irrégularité fait nécessairement grief au requérant, lorsque la méconnaissance de la règle a irrévocablement affecté les droits de celui-ci par exemple si l’acte a été accompli par une autorité qui n’était pas compétente ou lorsque l’acte n’a pas été motivé par l’autorité compétente (Cass. crim, 8 juil. 2015, n° 15-81.731).
ABUS DE CONFIANCE ET ESCROQUERIE, QUELLE DIFFERENCE ?   Les infractions d’abus de confiance et d’escroquerie, portant atteinte aux biens, peuvent se ressembler et être confondues par les justiciables. Il s’agit en réalité de deux infractions bien distinctes, aux enjeux différents. La question est de savoir comment se différencient ces deux infractions ? L’abus de confiance L’abus de confiance tout d’abord est définie par l’article 314-1 du Code pénal comme : « le fait par une personne de détourner, au préjudice d’autrui, des fonds, des valeurs ou un bien quelconque qui lui ont été remis et qu’elle a acceptés à charge de les rendre, de les représenter ou d’en faire un usage déterminé ». En ce qui concerne les éléments matériels, l’abus de confiance nécessite plusieurs éléments : La remise de fonds, valeurs ou biens ; Un détournement de leur destination (un usage déterminé, une représentation ou une restitution) ; Un préjudice qui résulte de ce détournement. Un agent A doit donc avoir remis des fonds, valeurs ou biens à un agent B qui devait les rendre ou en faire un usage déterminé, or parce qu’il ne l’a pas fait, il a créé un préjudice à l’agent A. En ce qui concerne l’élément moral, celui qui s’est vu remettre des fonds, valeurs ou biens doit les avoir détournés avec une intention frauduleuse. Il a donc la volonté consciente de contrevenir aux droits du propriétaire légitime des biens. L’escroquerie L’escroquerie est quant à elle définie par l’article 313-1 du Code pénal comme : « le fait, soit par l’usage d’un faux nom ou d’une fausse qualité, soit par l’abus d’une qualité vraie, soit par l’emploi de manœuvres frauduleuses, de tromper une personne physique ou morale et de la déterminer ainsi, à son préjudice ou au préjudice d’un tiers, à remettre des fonds, des valeurs ou un bien quelconque, à fournir un service ou à consentir un acte opérant obligation ou décharge ». En ce qui concerne les éléments matériels, l’escroquerie est caractérisée dès lors que sont réunis les éléments suivants : L’abus de qualité ou de faux nom ou l’emploi de manœuvres frauduleuses ; Le caractère trompeur de ces moyens ; La remise de fonds, valeurs ou biens ou la fourniture d’un service ou d’un acte par l’utilisation de ces moyens ; Un préjudice pour la personne trompée. Un agent A doit donc avoir trompé un agent B dans l’unique but que ce dernier lui remette des biens ou lui fournisse un service. Ces manœuvres doivent également avoir engendré un préjudice pour l’agent A. En ce qui concerne l’élément moral, celui qui aura trompé doit l’avoir fait avec une intention frauduleuse. Il convient de noter que la négligence ou l’absence de précautions ne suffisent pas à caractériser l’intention frauduleuse. Une confusion liée aux similitudes entre ces infractions Ces deux infractions peuvent être confondues par les justiciables, car elles comportent des similitudes. La première étant que ces infractions ont pour objectif de protéger la propriété de chacun. Il s’agit en effet dans les deux cas d’un bien matériel ou immatériel, propriété d’un individu, qui perd ses droits de propriété dessus en raison de l’action d’un autre individu. Leur similitude tient également au fait que, contrairement au vol, le bien a été remis par le propriétaire à un individu. Le propriétaire doit ainsi avoir confié sa propriété. Des infractions toutefois tout à fait distinctes Il faut noter que ces infractions exigent toutefois des conditions bien distinctes, réprimant des comportements en réalité différents. Comme énoncé, l’abus de confiance peut débuter sur une relation saine, mais par le détournement du bien qui aura lieu postérieurement à la remise, la relation est entachée et l’infraction est constituée. Cette solution a été retenue très tôt par les magistrats, comme le démontre l’arrêt de la chambre criminelle de la Cour de cassation du 12 juin 1978 (n°76-91.932). Il est important de noter que le simple retard dans la remise ne constitue pas un détournement au sens de l’article 314-1 du Code pénal, car il faut réellement la volonté de détourner le bien au préjudice d’autrui (cass. crim., 2 mars 1994, n°93-82.232). L’escroquerie quant à elle trouve son fondement dans une relation biaisée dès le départ. C’est par les manœuvres d’un individu que le propriétaire sera amené à remettre le bien. En effet, la chambre criminelle de la Cour de cassation l’a rappelé à de nombreuses reprises, et notamment le 3 novembre 1994 (n°93-83.491), la remise est nécessairement postérieure aux manouvres frauduleuses. L’un des exemples emblématiques de l’infraction d’escroquerie est l’escroquerie à la TVA. En l’espèce, il s’agissait pour les délinquants de créer un circuit fictif composé de fausses factures justifiant des demandes de versement de la TVA sous couvert d’une comptabilité inexacte, constitutif de manœuvres frauduleuses (pour exemple, cass. crim., 14 novembre 2007, n°07-83.208).   Bien que les peines soient similaires (5 ans d’emprisonnement délictuel et 375 000 euros d’amende), l’intention initiale n’est donc pas la même. L’escroquerie implique une volonté préalable de tromper le propriétaire, ce qui a justifié que la peine soit supérieure à celle de l’abus de confiance durant plusieurs années. En effet, avant la loi n°2020-1672 du 24 décembre 2020, l’abus de confiance était puni de 3 ans d’emprisonnement et 375 000 euros d’amende, soit deux années de moins que l’escroquerie. Cette modification de la peine a été réalisée en conformité avec l’ordonnance n° 2019-963 du 18 septembre 2019 relative à la lutte contre la fraude portant atteinte aux intérêts financiers de l’Union européenne au moyen du droit pénal, démontrant la volonté croissante de réprimer les infractions aux biens et plus précisément les fraudes portant atteinte aux intérêts de l’Etat et de l’Union européenne.
COMMET UN ABUS DE FAIBLESSE LE PSYCHIATRE QUI CONDUIT SA PATIENTE A AVOIR DES RELATIONS SEXUELLES ALORS QU’ELLE SOUFFRAIT DE TROUBLES PSYCHIQUES ENTRAINANT UNE GRANDE APPETENCE SEXUELLE DONT IL AVAIT CONSCIENCE Cour de cassation, Chambre criminelle, 19 février 2014, 12-87.558 Définition de l’abus de faiblesse Selon l’article 223-15-2 du Code pénal, l’abus de faiblesse est défini comme :  « l’abus frauduleux de l’état d’ignorance ou de la situation de faiblesse soit d’un mineur, soit d’une personne dont la particulière vulnérabilité, due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse, est apparente ou connue de son auteur, soit d’une personne en état de sujétion psychologique ou physique résultant de l’exercice de pressions graves ou réitérées ou de techniques propres à altérer son jugement, pour conduire ce mineur ou cette personne à un acte ou à une abstention qui lui sont gravement préjudiciables ». L’auteur de l’infraction doit avoir abusé de l’état de vulnérabilité de la victime, tout en ayant connaissance de cet état. Contrairement à l’abus de confiance, il ne s’agit pas pour l’auteur d’abuser de la confiance qu’il a acquis auprès des victimes. Doivent être réunis les conditions suivantes : -un état d’ignorance ou une situation de faiblesse du fait de la minorité ou de la particulière vulnérabilité de la victime, -cet état d’ignorance ou cette situation de faiblesse est apparent ou connu de l’auteur, -l’abus de faiblesse doit avoir eu pour objectif un acte ou une abstention de la part de la victime, -L’abus de faiblesse doit avoir porté gravement préjudice à la victime. Exemples d’actes d’abus de faiblesse Une aide-ménagère ayant profité de la faiblesse de la personne âgée pour qui elle travaillait afin de lui soutirer la somme totale de 164.000 euros a été condamnée par le Tribunal correctionnel de LIMOGES (https://france3-regions.francetvinfo.fr/nouvelle-aquitaine/haute-vienne/limoges/video-temoignage-elle-est-escroquee-de-toutes-ses-economies-par-l-aide-menagere-a-son-service-pendant-17-ans-2691774.html). Un père de famille, son fils et un troisième membre de la famille ont été condamnés par le Tribunal correctionnel des SABLES D’OLONNE à des peines allant d’un an à trois ans d’emprisonnement ferme aménageable pour avoir abusé de la faiblesse d’une personne âgée. Ils l’avaient démarché dans le cadre de leur activité professionnelle de travaux et lui avaient signer des chèques à leur profit, y compris alors que ce dernier se trouvait à l’hôpital (https://actu.fr/pays-de-la-loire/les-sables-d-olonne_85194/abus-de-faiblesse-en-vendee-une-famille-allait-jusqua-faire-signer-des-cheques-en-blanc-a-un-vieil-homme-a-lhopital_59661882.html). Un gourou a été condamné par la Cour d’assises de GIRONDE à la peine de 18 ans de réclusion criminelle pour des faits de viols et d’abus de faiblesse dans le cadre de la secte qu’il avait mis en place et l’endoctrinement de jeunes femmes dont sa fille (https://www.leparisien.fr/gironde-33/claude-alonso-alias-le-gourou-zeus-condamne-a-18-ans-de-prison-pour-viols-et-abus-de-faiblesse-23-09-2022-5J6EAOGWRFHOBHAXMUWT2CT2EA.php). En pratique : cas d’un psychiatre avec une patiente atteinte de troubles bipolaires dans l’affaire citée Le 19 février 2014, la Cour de cassation a validé la décision de la Cour d’appel ayant condamné un psychiatre. En l’espèce, la victime avait été diagnostiquée bipolaire de type 1 dans les années 2000 et avait un comportement instable selon ses proches. Entre juillet et octobre 2005, période de prévention, elle était hospitalisée à trois reprises sous contrainte, et transférée dans le service du condamné. Son état de faiblesse était déduit de son état psychique particulièrement instable ainsi décrit. Il a été jugé que le condamné avait connaissance de cet état de faiblesse pour plusieurs raisons : -il avait accès à son dossier médical, -elle était hospitalisée sous contrainte à trois reprises en deux mois et demi, -il bénéficiait d’une certaine expérience professionnelle, -il avait bénéficié d’une formation en psychiatrie. Par ailleurs, l’état de la victime était parfaitement connu, compte tenu de son diagnostic ancien. Or, il avait donc connaissance du fait que dans le cadre de cette maladie, le patient a des phases dites « maniaques » au cours desquelles il vit une grande exaltation et a notamment une grande appétence sexuelle. La victime avait développé des sentiments amoureux à l’égard du condamné, qui auraient dû entrainer de la part de ce dernier une prudence et une distanciation professionnelle. A la place, il alimentait ces sentiments par des cadeaux, des discussions personnelles afin de faire croire à une complicité, des invitations et des propositions de logement dans le cabinet médical, et par le fait de donner son numéro de téléphone et le n° de sa chambre d’hôtel. En outre, le condamné avait fait faire à la victime deux tests HIV en dehors des périodes d’hospitalisation ayant entrainés une confusion et une soumission affective de la victime. Il bénéficiait dès lors de relations sexuelles avec sa patiente. Selon les juges, l’état de faiblesse de la victime était caractérisé, mais plus encore connu du condamné qui en a abusé afin d’obtenir des relations sexuelles, nuisant à l’intégrité du malade et violant les règles de déontologies. Il était ainsi condamné à une peine d’un an d’emprisonnement avec sursis et une interdiction d’exercer son activité de psychiatrie durant un an. Les juges ajoutaient que l’abus de faiblesse pouvait être constitué d’un acte matériel ou juridique.
ACCIDENT DE LA CIRCULATION : CADRE JURIDIQUE, EXPERTISE MEDICALE, PLAINTE ET INDEMNISATION   I. Cadre juridique Les accidents de la circulation et leurs conséquences ne sont pas soumis aux règles de droit commun de la responsabilité civile mais à un régime spécifique issu de la loi dite Badinter du 5 juillet 1985. Il convient de préciser les conditions d’application de cette loi : –un véhicule terrestre à moteur : les remorques et semi-remorques sont également visées, sont toutefois exclus les moyens de transport sans moteur et les moyens de transport se déplaçant sur des rails, –ce véhicule doit être impliqué : autrement dit, sans ce véhicule, l’accident ne se serait pas produit, –une victime : l’article 2 de la loi prévoit que les victimes peuvent également être conducteurs, –un accident : tout choc, collision, incendie, etc, provoqué par un véhicule à moteur en circulation entre dans le champ d’application de cette loi. Cet accident ne doit pas être volontaire (Cass civ, 2ème civ, 12 décembre 2002, n°00-17.433). Le véhicule impliqué peut avoir été en contact direct avec la victime, dès lors la question de son implication ne pose pas de difficulté. Cependant, cette implication doit être prouvée en cas d’absence de contact, le véhicule doit avoir jouer un rôle dans l’accident : « Mais attendu qu’ayant retenu par des constatations souveraines qu’il était établi que M. W… avait perdu le contrôle de sa motocyclette au moment où il se rabattait sur sa voie de circulation et que c’est la présence du tracteur qui, alors qu’il était en action de fauchage, circulait à allure très réduite et empiétait sur la voie de circulation, l’avait contraint à cette manoeuvre de dépassement, la cour d’appel a exactement décidé que ce tracteur était impliqué dans l’accident » (Cass civ, 2è civ, 18 avril 2019, n°18-14.948). Enfin, il convient de noter que le véhicule, même sans conducteur, peut être impliqué dans un accident s’il a joué un rôle dans sa réalisation : « En statuant ainsi, alors qu’elle avait relevé que le scooter de M. [K] avait achevé sa course contre le véhicule de M. [R] et qu’il résultait de ses constatations que les collisions successives étaient intervenues dans un même laps de temps et dans un enchaînement continu, de sorte qu’elles constituaient un accident complexe, dans lequel ce véhicule était impliqué, la cour d’appel a violé le texte susvisé » concernant un conducteur éjecté de son scooter, le véhicule ayant poursuivi sa trajectoire (Cass civ, 2ème civ, 15 décembre 2022, n°21-11.423). II. Organismes compétents pour indemniser Les compagnies d’assurance du véhicule impliqué sont les acteurs principaux de l’indemnisation des accidents de la circulation. Dans le cas où le véhicule impliqué n’est pas assuré, c’est le Fonds de Garantie des Assurances Obligatoires de dommages (FGAO) qui sera compétent. Ce Fonds est également compétent si le responsable de l’accident est inconnu ou insolvable. III. Dépôt de plainte et déclaration de sinistre Il convient, si cela est possible, après un accident de la circulation de récupérer les informations nécessaires à une prise en charge (plaque d’immatriculation, identité du conducteur, coordonnées, assurance etc). La victime devra déclarer le sinistre à sa compagnie d’assurance afin de déclencher le processus de prise en charge. Par ailleurs, la victime peut déposer plainte contre le responsable, ou s’il est inconnu contre X. Cela pourra déclencher une enquête afin de déterminer les circonstances exactes de l’accident, voire déclencher un procès pénal. L’intérêt de cette plainte pourra être discuté avec un avocat. IV. Expertise médicale L’expertise médicale a pour objectif d’identifier tous les dommages subis par la victime de l’accident, de les classer selon les postes de préjudices prédéfinis et de les quantifier. Cette expertise servira de fondement de la demande d’indemnisation. L’expertise peut être amiable, c’est-à-dire que l’assureur du véhicule responsable prendra contact avec la victime afin de la mettre en place. Elle peut également être judiciaire, la victime demandera alors au juge civil ou pénal une expertise aux fins de déterminer ses préjudices (par le biais d’un référé expertise auprès du tribunal judiciaire ou de conclusions aux fins d’expertise devant le juge pénal). Il convient pour la victime de conserver tous les documents liés à l’accident et à ses conséquences notamment médicales (certificats médicaux ou d’hospitalisation, arrêts de travail, ordonnances, radiographies etc). La victime peut se faire assister lors de cette expertise par un avocat et un médecin conseil de victimes. Il est recommandé de se faire assister, car l’expert est désigné et payé par l’assurance du véhicule impliqué. IMPORTANT : Le médecin conseil a pour rôle de veiller à ce que tous les dommages de la victime aient été pris en compte par l’expert, et à défendre ses intérêts. La victime est libre de choisir son médecin conseil. Ce médecin assiste pleinement la victime par une préparation des documents et de la victime en vue de l’expertise, puis d’une assistance lors de l’expertise (il est garant du respect du contradictoire, peut aider la victime à s’exprimer et veille à ce qu’il n’y ait pas d’oubli). Ce médecin sera particulièrement utile lorsque les connaissances médicales nécessaires à l’expertise sont très avancées. Le rôle de l’avocat sera également de préparer la victime et son dossier, notamment lorsqu’un médecin conseil ne pourra pas être mandaté. Il rassure la victime par sa présence lors de cette expertise. La présence de la victime à cette expertise est obligatoire et tous les dommages devront être évoqués (physiques, psychologiques, conséquences sur le travail, sur la vie quotidienne, suivi médical etc). Un rapport d’expertise sera par la suite envoyé à la victime ou à son avocat, permettant le chiffrage de son préjudice. V. Chiffrage du préjudice Le chiffrage est une étape complexe réalisée à l’aide de la Nomenclature Dintilhac, un barème de référence dans l’indemnisation des victimes pour chaque poste de préjudice. Ce chiffrage doit être réalisé par un avocat spécialisé dans le préjudice corporel, car la matière est technique. Il devra prendre en compte deux périodes de temps : la période avant consolidation et la période à partir de la consolidation. La consolidation est généralement définie comme le moment où les lésions se sont fixées et ont pris un caractère permanent tel qu’un traitement n’est plus nécessaire si ce n’est pour éviter une aggravation, et qu’il devient possible d’apprécier l’existence éventuelle d’une atteinte permanente à l’intégrité physique et psychique. Les postes de préjudices indemnisés sont les suivants : Préjudices patrimoniaux temporaires –Dépenses de santé actuelles : tous les frais de santé engagés ayant un lien de causalité avec l’accident devront être intégralement indemnisés (sur présentation de justificatifs), –Frais divers : tous les frais qui ne seront pas pris en charge par les organismes sociaux mais ayant un lien de causalité avec l’accident devront également être indemnisés sur présentation de justificatifs (par exemple frais de transport pour se rendre à l’hôpital ou voir un médecin, aide par une tierce personne etc), –Perte de gains professionnels actuels : toute perte de rémunération liée à l’accident devra être indemnisée sur présentation d’arrêts de travail. Le médecin prescrivant ces arrêts devra établir un lien entre l’arrêt et l’accident. Préjudices patrimoniaux permanents (après consolidation) –Dépenses de santé futures : il s’agit d’indemniser les frais de santé qui seront occasionnés par l’état de la victime une fois la consolidation établie, afin d’éviter une aggravation de son état. Ces frais doivent avoir un lien de causalité avec l’accident et peuvent être permanents ou occasionnels. Les soins permanents feront l’objet d’une indemnisation par voie de rente viagère, –Frais de logement et de véhicule adapté : la victime peut devoir réaliser des aménagements de son logement en adéquation avec son handicap issu de l’accident (installation de barres de soutien, installation d’une douche à la place d’une baignoire, changement de lit etc). Elle peut également devoir changer de véhicule (passage d’un véhicule à boite manuelle à un véhicule à boite automatique), –Aide par une tierce personne : la nécessité d’une assistance par une tierce personne à vie ne peut être laissée à la charge de la victime et devra être indemnisée. L’expert évaluera le nombre d’heures nécessaires (par jour, semaine ou mois) qui établira, avec le cout horaire, l’indemnisation, –Perte de gains professionnels futurs et incidence professionnelle : il conviendra d’indemniser la victime en cas d’obligation de changer de travail, de reclassement professionnel, de débuter une nouvelle formation, en cas de dévalorisation sur le marché ou d’incidence sur la retraire en raison de l’accident. Sans cet accident, la victime aurait pu obtenir tel travail, elle aurait pu garder son travail, elle aurait conservé sa rémunération antérieure etc. La perte de chance pour une personne sans profession au moment de l’accident sera également indemnisée, –Préjudice scolaire, universitaire, de formation : toute perte d’année de formation ou toute  réorientation fera l’objet d’une indemnisation s’il existe un lien avec l’accident. Préjudices extrapatrimoniaux temporaires –Déficit fonctionnel temporaire : les périodes de troubles et de gêne dans la vie courante seront indemnisées. L’expert attribuera des périodes, puis la moitié du smic sera attribué par jour contenu dans ces périodes, en fonction du % de déficit (par exemple, un déficit à 25% pendant 10 jours en 2023 : 10 x (25% de 31 euros) = 77,5 euros), –Souffrances endurées : l’expert évalue les souffrances physiques et morales sur une échelle à 7 degrés, puis un barème donne une fourchette correspondant à chaque palier de cette échelle : –Préjudice esthétique temporaire : l’état physique est altéré par l’accident et la victime souffre de l’image qu’elle renvoie. La nature des séquelles, leur localisation, leur étendue et la durée des doléances permettra l’évaluation de cette souffrance sur une échelle à 7 degrés également, Préjudices extrapatrimoniaux permanents (après consolidation) –Déficit fonctionnel permanent : la gêne et les troubles sont définitifs et engendrent une perte de potentiel physique, une perte d’autonomie, des douleurs et des répercussions psychologiques liées. L’indemnisation dépendra d’une valeur à point fixée par l’expert. Le montant de l’indemnisation augmente avec la valeur et le jeune âge de la victime, –Préjudice d’agrément : la victime ne peut plus pratiquer d’activités sportives ou profiter de ses loisirs antérieurs à l’accident, que ce soit pour des raisons physiques ou morales, –Préjudice esthétique permanent : la victime souffre de l’image qu’elle renvoie aux autres du fait de l’accident de manière définitive (par exemple : cicatrice sur une partie visible du corps, perte d’un membre, utilisation permanente de cannes etc), la souffrance est évaluée sur l’échelle à 7 degrés, –Préjudice sexuel : l’acte sexuel est totalement ou partiellement impossible du fait de l’accident, en raison d’une atteinte morphologique, d’une impossibilité ou difficulté à procréer, ou d’une perte de plaisir lié à l’acte sexuel, –Préjudice d’établissement : la perte d’espoir d’avoir une famille ou une vie « normale » sera également indemnisée en fonction de l’âge et des montants habituellement retenus par la jurisprudence, –Préjudices permanents exceptionnels : ce préjudice sera lié à une particulière gravité de l’accident (en cas d’attentat). VI. Indemnisation par voie amiable Une fois les préjudices chiffrés, la victime et la compagnie d’assurance peuvent s’entendre par voie amiable sur le montant de l’indemnisation, afin d’éviter la voie judiciaire. L’article 12 de la loi Badinter prévoit que l’assurance du véhicule impliqué doit faire une proposition d’indemnisation dans les huit mois suivants l’accident, et dans les cinq mois suivants la date de consolidation de l’état de la victime. Il convient de noter que ce délai s’impose à l’assureur, qui sera soumis à une pénalité s’il ne le respecte pas conformément à l’article 16 de la même loi : « le montant de l’indemnité offerte par l’assureur ou allouée par le juge à la victime produit intérêt de plein droit au double du taux de l’intérêt légal à compter de l’expiration du délai et jusqu’au jour de l’offre ou du jugement devenu définitif ». La victime aura la possibilité d’accepter ou de refuser l’offre d’indemnisation, mais elle pourra aussi faire une contre-proposition. Ces étapes peuvent nécessiter l’assistance d’un avocat, car les compagnies d’assurance auront tendance à diminuer l’indemnisation au maximum. L’acceptation de l’offre de la compagnie d’assurance met fin à toute procédure. En cas d’échec de la négociation, l’affaire pourra être portée devant la juridiction. VII. Indemnisation par voie judiciaire Deux voies sont ouvertes à la victime d’un accident de la circulation afin d’obtenir l’indemnisation de son préjudice. La voie civile : la victime pourra saisir le tribunal judiciaire aux fins d’obtenir une expertise si cela n’a pas été prévu par l’assureur, demander le versement de provisions, puis demander la liquidation définitive des préjudices dès lors que la victime sera consolidée. Il convient de préciser que devant le juge civil, la procédure est écrite, de sorte que tout ce que la victime n’aura pas écrit ne pourra pas être demandé. L’assistance d’un avocat est obligatoire. La voie pénale : la victime peut se constituer partie civile et demander des dommages et intérêts à l’occasion du procès pénal. VIII. Délais de recours La loi Badinter et l’article 2270-1 du Code civil prévoient que la victime dispose d’un délai de 10 ans pour agir aux fins de réparation du préjudice corporel devant le Tribunal judiciaire. Le point de départ de ce délai est la consolidation de l’état de la victime directe, pour cette dernière comme pour les victimes indirectes (article 2226-1 du Code civil ; Cass civ, 2è civ, 3 novembre 2011, n°10-16.036). IX. Les proches de la victime peuvent-ils être indemnisées ? Les proches de la victime blessée ou décédée peuvent en effet demander réparation pour leur préjudice moral (ou préjudice d’affection) et économique (perte de revenus, frais d’hospitalisation, d’obsèques, de déplacement et d’hébergement pour visiter la victime blessée etc). Un préjudice de deuil pathologique peut également être indemnisé dans le cas où la souffrance issue de la perte d’un être cher est si importante qu’elle nécessite une indemnisation indépendante. Ce préjudice peut se cumuler avec le préjudice d’affection (Cass crim, 2 avril 2019, n°18-81.917). Il appartiendra à la victime indirecte de prouver son lien particulier avec la victime (famille ou amis, voisins, parents éloignés …). Ces preuves pouvant être diverses (photos, événements, emails, messages, réseaux sociaux …).
L’assistance d’un témoin par un avocat lors d’une audition en enquête préliminaire n’est pas possible, à moins que soit reconnue au témoin la qualité de victime   Cass., crim., 23 mai 2024, n°23-85.888   L’impossibilité pour un témoin d’être assisté par un avocat Aux termes de l’article 62 du code de procédure pénale, « Les personnes à l’encontre desquelles il n’existe aucune raison plausible de soupçonner qu’elles ont commis ou tenté de commettre une infraction sont entendues par les enquêteurs sans faire l’objet d’une mesure de contrainte ». Elles peuvent être retenues sous contrainte le temps nécessaire à leur audition, mais cela ne doit pas excéder quatre heures. De plus, et selon l’article 78 du code de procédure pénale, les personnes convoquées par un officier de police judiciaire pour les nécessités de l’enquête doivent comparaître.   Dès lors, il convient de déduire de ces dispositions que lors d’une enquête préliminaire, le témoin ne peut être assisté par un avocat lors de son audition.   L’assistance possible d’une victime par un avocat Dans le cas de l’audition d’un témoin, les dispositions sont différentes. En effet, l’article 10-4 du code de procédure pénale dispose qu’ « à tous les stades de l’enquête, la victime peut, à sa demande, être accompagnée par son représentant légal et par la personne majeure de son choix, y compris par un avocat, sauf décision contraire motivée prise par l’autorité judiciaire compétente. »   L’assistance possible d’une personne mise en examen par un avocat Dans le cadre d’une instruction, l’article 82-1 du code de procédure pénale prévoit que les parties peuvent demander à « ce qu’il soit procédé à leur audition ou à leur interrogatoire, à l’audition d’un témoin, à une confrontation ou à un transport sur les lieux, à ce qu’il soit ordonné la production par l’une d’entre elles d’une pièce utile à l’information, ou à ce qu’il soit procédé à tous autres actes qui leur paraissent nécessaires à la manifestation de la vérité. » Cette demande, adressée au juge d’instruction pour saisine, doit être formulée par écrit et doit être motivée. Lorsque la personne mise en examen saisit le juge d’instruction, d’une demande tendant à ce que ce magistrat procède à un transport sur les lieux, à l’audition d’un témoin, d’une partie civile ou d’une autre personne mise en examen, elle peut demander que cet acte soit effectué en présence de son avocat.   L’arrêt du 23 mai 2024   En l’espèce, une société a porté plainte contre plusieurs sociétés pour des faits de contrefaçon. Au cours de l’enquête préliminaire, les enquêteurs ont procédé à l’audition du conseil en propriété industrielle et du dirigeant de la société en qualité de témoin. Le dirigeant de la société était accompagné d’un avocat. Les juges ont ainsi rappelé que les témoins ne peuvent être assistés d’un avocat. Néanmoins, ils ont estimé en l’espèce que le dirigeant de la société est assimilé à une victime en raison de son statut, ce qui lui donne droit à l’assistance d’un avocat.   Cette décision assouplit en conséquence les conditions de réception d’une exception de nullité. En assimilant un témoin à une victime en raison de son statut de dirigeant de la société ayant porté plainte, le régime d’assistance de la personne entendue est différent, ouvrant droit à l’assistance « par la personne majeure de son choix, y compris par un avocat ».
L’état de sidération est désormais reconnu comme un élément de la surprise constituant l’agression sexuelle Cass.crim., 11 septembre 2024, n°23-86.657   Rappels sur l’infraction d’agression sexuelle L’infraction d’agression sexuelle est prévue par l’article 222-22 du Code pénal comme : « Constitue une agression sexuelle toute atteinte sexuelle commise avec violence, contrainte, menace ou surprise ou, dans les cas prévus par la loi, commise sur un mineur par un majeur ». Sont considérés comme des agressions sexuelles des attouchements, des caresses, des baisers non consentis etc…. Cette infraction impose la preuve de l’absence de consentement par l’un des moyens utilisés par l’agresseur suivant : la violence, la contrainte (morale ou physique), la menace ou la surprise. Par ailleurs, il s’agit d’une infraction intentionnelle, c’est-à-dire que l’auteur doit avoir eu conscience de l’absence de consentement de la victime. Ces dernières années, plusieurs victimes d’agression sexuelle ont soutenu s’être trouvées dans un état de sidération, un état dans lequel elles étaient incapables de manifester leur opposition aux faits, ou de seulement bouger. Or, l’état de sidération n’étant pas prévu par la loi, il n’était jamais accepté comme preuve de l’absence de consentement, jusqu’au 11 septembre 2024.   L’état de sidération comme élément de la surprise La Cour de cassation a eu l’occasion de définir l’état de sidération comme un élément de la surprise, obstacle au consentement de la victime. En l’espèce, le condamné était l’oncle de la victime, et commettait des attouchements sur des zones intimes, alors que cette dernière dormait. Elle était réveillée par les faits et ne se manifestait pas. L’affaire était renvoyée devant le Tribunal correctionnel pour des faits d’agression sexuelle, pour lesquels le Tribunal prononçait une relaxe. Le Ministère public interjetait appel et la Cour d’appel réformait la décision. Selon elle, la victime était dans un état de sidération que le condamné avait constaté, de sorte qu’il avait nécessairement conscience qu’elle n’était pas consentante. Notamment : -la victime dormait lorsque les faits débutaient et le condamné ne contestait pas le fait que la victime n’avait pas réagi, qu’elle ne l’avait pas touché et ne l’avait pas embrassé, -le prévenu reconnaissait être à l’initiative des faits, -la victime était constante dans ses déclarations, décrivant son état de prostration. Elle ne pouvait plus bouger ni crier, comme si son corps ne lui appartenait plus, -le condamné avait déclaré à un tiers qu’elle était restée comme une « poupée de chiffon », -dans un courrier postérieur qu’il adressait à la victime, il disait être honteux, qu’elle n’avait rien à se reprocher et qu’il était seul responsable, -dans ce courrier, il ne précisait aucunement que la victime ait été active dans les faits. Compte tenu de ces éléments, la Cour d’appel considérait que la victime était dans un état de sidération et que le condamné était coupable pour avoir agi par surprise, ayant constaté l’état dans lequel se trouvait la victime et ne pouvant ignorer son absence de consentement. La Cour de cassation, saisie par le condamné, rejetait son pourvoi, reprenant les motifs de la Cour d’appel et intégrant ainsi l’état de sidération dans l’élément de surprise de l’agression sexuelle. La Cour d’appel a ainsi créé un précédent important, rendant désormais difficile la défense des prévenus selon laquelle la victime était nécessairement consentante puisqu’elle ne disait pas non.   Un contexte particulier : les liens familiaux et la différence d’âge Il convient cependant de souligner que la Cour d’appel, soutenue par la Cour de cassation, semble avoir ajouté une condition à la reconnaissance de l’état de sidération comme élément matériel de l’agression sexuelle. En effet, la Cour retenait que les parties avait un lien familial (oncle et nièce) et une différence d’âge (le condamné avait 20 ans de plus que la victime). Dans ces conditions : « il est étonnant que M. (D) ne se soit pas assuré du consentement de sa nièce, surtout constatant qu’elle ne prononçait pas un mot ». Par cette précision, la Cour semble induire que le consentement devrait particulièrement être recherché dans le cadre de relations hors cadre classique. Dès lors, si les faits avaient eu lieu entre deux jeunes personnes du même âge, s’étant rencontrées lors d’un événement, et n’ayant aucun lien de famille, l’état de sidération serait-il également reconnu comme élément de la surprise ? Seule la jurisprudence à venir déterminera si l’état de sidération sera reconnu de façon générale ou s’il sera limitativement reconnu dans le cadre de relations ayant des éléments de contexte particuliers.   Exemples d’état de sidération invoqué avant cette jurisprudence L’état de sidération n’est pas inconnu des juges, qui en entendent souvent les éléments constitutifs dans le cadre d’affaires. Par exemple, le 16 avril 2024, un individu a été condamné par le Tribunal correctionnel de NANTES pour avoir sexuellement agressée sa meilleure amie. Cette dernière expliquait lors de ses déclarations « J’étais incapable de bouger, c’est comme si j’étais hors de mon corps ». Le prévenu ne contestait pas les faits, bien qu’il n’en ait plus de souvenirs en raison de l’alcool. Il était condamné à la peine de trois ans d’emprisonnement assortie d’un sursis probatoire (https://www.ouest-france.fr/societe/justice/agression-sexuelle-apres-une-nuit-divresse-a-nantes-le-meilleur-ami-condamne-a-du-sursis-9384656c-fc97-11ee-ace2-9fae4b2f67b4). Également, un ancien adjoint aux finances d’une commune a été mis en examen pour des faits de viol commis sur une ancienne élue, faits commis en 2014. Elle déclare avoir été dans un état de sidération. Les faits n’ont pas encore été jugés (https://www.ouest-france.fr/pays-de-la-loire/saint-nazaire-44600/lancien-adjoint-aux-finances-a-la-ville-de-saint-nazaire-mis-en-examen-pour-viol-41414878-bc56-11ee-8a7d-fa3ec2db0626). Plus récemment, un ambulancier était condamné pour agression sexuelle sur une patiente de 68 ans qu’il prenait en charge pour la première fois. La victime déclarait à l’audience qu’elle n’avait rien dit de spécial lorsque la question du consentement était posée, et son avocate a plaidé son état de sidération. Le prévenu a été condamné à la peine d’un an d’emprisonnement assortie de sursis (https://actu.fr/pays-de-la-loire/guerande_44069/loire-atlantique-un-ambulancier-condamne-pour-une-agression-sexuelle-sur-une-patiente-de-68-ans_60369021.html).   L’exemple du droit suisse : la loi du 13 juin 2023 Tandis que la jurisprudence française commence tout juste à reconnaitre l’état de sidération dans le cadre de l’agression sexuelle, le droit suisse a prévu cet état dans son Code pénal par une loi du 13 juin 2023 entrée en vigueur le 1er juillet 2024, en ce qui concerne l’infraction de viol. En effet, l’article 190 du Code pénal suisse prévoit que : « 1 Quiconque, contre la volonté d’une personne, commet sur elle ou lui fait commettre l’acte sexuel ou un acte analogue qui implique une pénétration du corps ou profite à cette fin d’un état de sidération d’une personne, est puni d’une peine privative de liberté de cinq ans au plus ». Si l’état de sidération n’y est pas défini, le Procureur général suppléant de Neuchâtel explique que c’est le travail d’audition des forces de l’ordre qui permettra de déduire l’état de sidération de la victime qui dépose plainte, qui est « un état vague » (https://www.watson.ch/fr/suisse/viol/824379477-loi-sur-le-viol-2024-un-procureur-nous-explique-ce-qui-change).   Nous ne pouvons qu’espérer que cela ne sera pas matière à erreur judiciaire.
LA COUR DE CASSATION RAPPELLE LA NECESSITE DE CONSTITUER LES ELEMENTS D’UNE INFRACTION : L’ELEMENT LEGAL, L’ELEMENT MATERIEL, ET L’ELEMENT MORAL   Cour de cassation, Chambre criminelle, 25 janvier 2023, pourvoi n°22-83.344   Une infraction est constituée de plusieurs éléments à savoir : -l’élément légal : l’infraction doit avoir été prévue par la loi, -l’élément matériel : le juge doit constater la réalité des faits qui peuvent être prouvés, -l’élément moral ou intentionnel : il est demandé aux juges de constater la volonté d’accomplir un acte en vue d’un résultat.   La Cour de cassation a rappelé le 25 janvier 2023 l’importance pour les juges de constater chacun de ces éléments, car l’absence de l’un d’eux fait obstacle à la déclaration de culpabilité. En l’espèce, un professeur de collège était poursuivi pour agression sexuelle sur deux élèves mineures de moins de 15 ans. Le prévenu qui avait été condamné formait un pourvoi en cassation, soulevant que : -le juge ne constatait pas son intention de commettre les faits reprochés considérant les déclarations de l’une des mineures (l’une d’elle avait expliqué aux gendarmes qu’elle n’était pas sûre, qu’il « n’avait pas vraiment fait exprès »), -le juge l’avait déclaré coupable en se bornant à constater l’âge des mineures, sans expliquer en quoi les faits avaient été commis avec violence, contrainte, menace ou surprise, comme l’exige l’article 222-22 du Code pénal. La Cour de cassation cassait l’arrêt de la Cour d’appel au motif que le juge n’avait effectivement pas caractérisé l’élément intentionnel et qu’il n’avait pas expliqué en quoi les faits avaient été commis avec violence, contrainte, menace ou surprise. Elle expliquait que le constat de déclarations concordantes entre les mineures, de leur état psychologique et d’un contexte plus général de comportement déplacé reproché au prévenu ne suffit pas à caractériser l’infraction d’agression sexuelle. Les Juges ne peuvent ainsi se contenter de quelques éléments et de leur intime conviction, ils doivent caractériser chaque élément constitutif de l’infraction tel que prévu par la loi.
LES PERSONNES AYANT AIDE UN ETRANGER EN SITUATION IRREGULIERE A ENTRER SUR LE TERRITOIRE NE BENEFICIENT PAS D’IMMUNITE, SELON UN ARRET DE JANVIER 2023   Cour de cassation, Chambre criminelle, 25 janvier 2023, n°21-86.839 L’immunité de poursuite accordée aux personnes souhaitant aider un étranger en situation irrégulière sur le territoire n’est pas illimitée comme cela a été rappelé par la Cour de cassation le 25 janvier 2023. En effet, l’article L.622-1 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA) prévoyait les infractions : -d’aide à l’entrée irrégulière sur le territoire, -d’aide au séjour irrégulier sur le territoire, -d’aide à la circulation irrégulière sur le territoire. L’article L.622-1 du CESEDA avait quant à lui prévu une immunité de poursuite en cas d’aide au séjour et à la circulation irréguliers sur le territoire français. Cette immunité était subordonnée au motif humanitaire motivant l’aide apportée à un étranger se trouvant en situation irrégulière. Il ressort de ces articles que l’aide à l’entrée irrégulière sur le territoire n’entre pas dans le champ de cette immunité. Cette exclusion se comprend en ce que l’entrée irrégulière sur le territoire français est une infraction pénale qui peut être reprochée à un étranger, de sorte qu’il serait inopportun de poursuivre l’étranger entré irrégulièrement et pas la personne l’ayant aidé à commettre cette infraction, peu importe les motivations de cette dernière. En ce sens, la Cour de cassation a rappelé le 25 janvier 2023 que l’article 1er de la Directive européenne 2002/90/CE permet de réprimer cette aide à l’entrée irrégulière sans imposer d’immunité humanitaire. La Cour rappelait également que la personne aidant un étranger en situation irrégulière à commettre une infraction ne peut bénéficier de cette immunité humanitaire. Il convient ainsi de bien définir l’aide apportée à un étranger se trouvant en situation irrégulière pour définir si l’immunité est applicable.  
La chambre criminelle est tout à fait claire à ce propos (Cass. Crim. 27 octobre 1993, n°93.81-570) : la prise de sang ne s’impose que s’il peut être démontré une impossibilité physiologique de souffler. Si le prévenu n’est pas en mesure d’apporter la preuve de ladite impossibilité il tombera alors sous le coup de la loi et du délit de refus de se soumettre aux épreuves de vérification. Ceci a été rappelé il y a peu par la Cour d’appel de Chambéry (Cour d’appel de Chambéry, 30 juin 2022, n°22/365), à une conductrice qui espérait imposer une prise de sang aux forces de l’ordre.
L’ANONYMAT EST LIBREMENT ADMIS LORSQUE LES DECLARATIONS SONT RECUEILLIES DANS LE CADRE D’UN SIMPLE PROCES-VERBAL DE RENSEIGNEMENT Cour de Cassation, chambre criminelle, 28 mai 2014, n°13-83.197 L’anonymat des témoins dans la procédure pénale L’anonymat des témoins est prévu par l’article 706-57 du Code de procédure pénale comme suit : « Les personnes à l’encontre desquelles il n’existe aucune raison plausible de soupçonner qu’elles ont commis ou tenté de commettre une infraction et qui sont susceptibles d’apporter des éléments de preuve intéressant la procédure peuvent, sur autorisation du procureur de la République ou du juge d’instruction, déclarer comme domicile l’adresse du commissariat ou de la brigade de gendarmerie. Si la personne a été convoquée en raison de sa profession, l’adresse déclarée peut être son adresse professionnelle. L’autorisation du procureur de la République n’est pas nécessaire lorsque le témoignage est apporté par une personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public pour des faits qu’elle a connu en raison de ses fonctions ou de sa mission et que l’adresse déclarée est son adresse professionnelle ». Lorsque le témoin craint pour sa vie, l’article 706-58 du Code de procédure pénale prévoit quant à lui que : « En cas de procédure portant sur un crime ou sur un délit puni d’au moins trois ans d’emprisonnement, lorsque l’audition d’une personne visée à l’article 706-57 est susceptible de mettre gravement en danger la vie ou l’intégrité physique de cette personne, des membres de sa famille ou de ses proches, le juge des libertés et de la détention, saisi par requête motivée du procureur de la République ou du juge d’instruction, peut, par décision motivée, autoriser que les déclarations de cette personne soient recueillies sans que son identité apparaisse dans le dossier de la procédure. Cette décision n’est pas susceptible de recours, sous réserve des dispositions du deuxième alinéa de l’article 706-60. Le juge des libertés et de la détention peut décider de procéder lui-même à l’audition du témoin. La décision du juge des libertés et de la détention, qui ne fait pas apparaître l’identité de la personne, est jointe au procès-verbal d’audition du témoin, sur lequel ne figure pas la signature de l’intéressé. L’identité et l’adresse de la personne sont inscrites dans un autre procès-verbal signé par l’intéressé, qui est versé dans un dossier distinct du dossier de la procédure, dans lequel figure également la requête prévue à l’alinéa précédent. L’identité et l’adresse de la personne sont inscrites sur un registre coté et paraphé, qui est ouvert à cet effet au tribunal judiciaire ». Il ressort ainsi de l’association de ces articles qu’un témoin peut être entendu de manière anonyme si : -il n’a aucun lien avec l’infraction commise, -il est susceptible d’apporter des éléments intéressants l’enquête, -il risque des représailles. Il convient de noter que l’anonymat nécessite des autorisations du Procureur de la République ou du Juge d’instruction dans le cas où seule l’adresse est camouflée, et l’autorisation du Juge des libertés et de la détention en cas d’anonymat total. La question posée à la Cour de cassation était de connaitre la nature des déclarations du témoin : De simples renseignements constituent-ils une audition et nécessitent-ils donc de respecter la procédure d’autorisation ?   Arrêt du 28 mai 2014 : confirmation d’une jurisprudence de 2003 En l’espèce, un fonctionnaire de police a dressé un procès-verbal de déclarations d’une personne souhaitant rester anonyme, faisant état d’un possible trafic de stupéfiants. Une enquête préliminaire était diligentée, puis une information judiciaire ouverte et des suspects étaient mis en examen. L’un des mis en examen a déposé une requête en annulation portant notamment sur ce procès-verbal n’ayant fait l’objet d’aucune autorisation. La Chambre de l’instruction a rejeté cette demande, au motif que le procès-verbal ne constituait pas une audition de témoin mais un simple recueil de renseignements destinés à guider d’éventuelles poursuites, n’ayant à ce titre aucune valeur probante. La Cour de cassation a validé cette motivation, ajoutant que ce procès-verbal avait été dressé avant tout acte d’enquête. De plus, le fonctionnaire n’avait pas interrogé le témoin mais avait seulement recueilli ses déclarations spontanées. Dès lors, ce procès-verbal ne pouvait s’analyser en une audition de témoin, et ne nécessitait donc pas de respecter la procédure prévue par les articles précédemment cités. Il convient de préciser que cette solution avait déjà été rendue par la Cour de cassation dans le cadre d’un arrêt du 9 juillet 2003, selon lequel le procès-verbal établi par un fonctionnaire de police faisant état des déclarations d’un témoin souhaitant rester anonyme constituait un simple recueil de renseignements destiné à guider d’éventuelles investigations, et n’ayant pas de valeur probante. Les dispositions de l’article 706-57 du Code de procédure pénale n’étaient dès lors pas applicable (Cass.crim., 9 juillet 2003, n°03-82.119).
Qu’est ce que l’Activité Partielle de Longue Durée ? Quel est le cadre législatif ? Loi n° 2020-734 du 17 juin 2020 relative à diverses dispositions liées à la crise sanitaire L’article 53 de cette loi a institué le dispositif spécifique de l’activité partielle. Ainsi, aux termes du I de cet article : « Il est institué un dispositif spécifique d’activité partielle dénommé « activité réduite pour le maintien en emploi » destiné à assurer le maintien dans l’emploi dans les entreprises confrontées à une réduction d’activité durable qui n’est pas de nature à compromettre leur pérennité. L’employeur peut bénéficier de ce dispositif sous réserve de la conclusion d’un accord collectif d’établissement, d’entreprise ou de groupe ou de la conclusion d’un accord collectif de branche étendu, définissant la durée d’application de l’accord, les activités et les salariés concernés par l’activité partielle spécifique, les réductions de l’horaire de travail pouvant donner lieu à indemnisation à ce titre et les engagements spécifiquement souscrits en contrepartie, notamment pour le maintien de l’emploi. » Ordonnance du 24 juin 2020 relative à l’adaptation du taux horaire de l’allocation d’activité partielle Cette ordonnance a été prise en application de la loi du 17 juin 2020 relative à diverses dispositions liées à la crise sanitaire et vient préciser que jusque fin septembre 2020, plusieurs secteurs (dont celui de la restauration) qui ont subi une très forte baisse d’activité, continuent de bénéficier d’une prise en charge à 100% de l’indemnité de chômage partiel versée aux salariés. Décret n° 2020-926 du 28 juillet 2020 relatif au dispositif spécifique d’activité partielle en cas de réduction d’activité durable Ce décret est venu mettre en place le dispositif d’Activité Partielle de Longue Durée qui a vocation à prendre le relais sur le dispositif de chômage partiel qui avait été mis en place en urgence et qui, au plus fort de la crise, a protégé plus de 9 millions de salariés. C’est un dispositif permettant à une entreprise confrontée à une réduction durable de son activité de diminuer l’horaire de travail de ses salariés, en contrepartie d’engagements en matière de maintien dans l’emploi et de formation. Ce décret précise les conditions de recours au dispositif spécifique d’activité partielle prévu jusqu’au 30 juin 2022 pour les employeurs faisant face à une réduction d’activité durable, ses modalités de mise en œuvre ainsi que les règles d’indemnisation applicables aux salariés et aux employeurs concernés. Quelles sont les problématiques liées au dispositif de l’Activité Partielle de Longue Durée ? Les entreprises auxquelles s’adresse ce dispositif L’activité partielle de longue durée est mobilisable par toutes les entreprises implantées sur le territoire national, sans critère de taille ou de secteur d’activité. Tout salarié possédant un contrat de travail de droit français est susceptible de bénéficier de l’activité partielle. Toutefois, conformément aux alinéas 1° et 2° de l’article R.5122-8 du Code du travail : « Ne peuvent bénéficier de l’allocation et de l’indemnité d’activité partielle : 1° les employeurs et leurs salariés quand la réduction ou la suspension de l’activité est provoquée par un différend collectif de travail intéressant l’établissement dans lequel ces salariés sont employés. 2° En cas de réduction de l’horaire de travail habituellement pratiqué dans l’établissement, Les salariés dont la durée du travail est fixée par forfait en heures ou en jours sur l’année. » La durée du dispositif Conformément à l’article 3 du décret du 28 juillet 2020 : « Le bénéfice de l’Activité Partielle de Longue Durée est accordé par période de 6 mois, dans la limite de 24 mois, consécutifs ou non, sur une période de référence de 3 années consécutives. » La procédure Conformément à l’article 53 de la loi du 17 juin 2020 :« L’activité partielle de longue durée nécessite un accord collectif, signé au sein de l’établissement, de l’entreprise, du groupe, ou de la branche. Dans ce dernier cas, l’employeur élabore un document conforme aux stipulations de l’accord de branche.Les Direccte (autorité administrative) disposent de 15 jours pour valider un accord et de 21 jours pour homologuer un document élaboré en application d’un accord de branche. Son silence vaut validation et homologation. » Le niveau de prise en charge Le salarié placé en activité partielle spécifique reçoit une indemnité horaire, versée par son employeur, correspondant à 70 % de sa rémunération brute servant d’assiette de l’indemnité de congés payés dans la limite de 4.5 SMIC. Le contrat de travail, comme en activité partielle classique, est suspendu sur les heures au cours desquelles le salarié n’est pas à la disposition de son employeur. L’employeur reçoit :– 60% de la rémunération horaire brute limitée à 4,5 fois le taux horaire SMIC pour les accords transmis à l’autorité administrative avant le 1er octobre 2020 ;– 56% de cette rémunération pour les accords transmis à l’autorité administrative à compter du 1er octobre 2020. Les engagements à la charge de l’employeur Conformément à l’article 1er I du décret du 28 juillet 2020, l’accord et le document de l’employeur doivent obligatoirement mentionner :« 1° La date de début et la durée d’application du dispositif spécifique d’activité partielle ;2° Les activités et salariés auxquels s’applique le dispositif ;3° La réduction maximale de l’horaire de travail en deçà de la durée légale ; Les engagements en matière d’emploi et de formation professionnelle ;5° Les modalités d’information des organisations syndicales de salariés signataires et des institutions représentatives du personnel sur la mise en œuvre de l’accord. Cette information a lieu au moins tous les trois mois. » Conformément au II du décret, l’accord peut également prévoir, sans que cette liste soit limitative :« 1° Les conditions dans lesquelles les dirigeants salariés exerçant dans le périmètre de l’accord, les mandataires sociaux et les actionnaires, dans le respect des compétences des organes d’administration et de surveillance, fournissent des efforts proportionnés à ceux demandés aux salariés pendant la durée de recours au dispositif ;2° Les conditions dans lesquelles les salariés prennent leurs congés payés et utilisent leur compte personnel de formation, avant ou pendant la mise en œuvre du dispositif ;Les moyens de suivi de l’accord par les organisations syndicales. » Le périmètre de l’engagement de métier de l’emploi Les engagements en matière de maintien de l’emploi portent sur l’intégralité des emplois de l’établissement ou de l’entreprise, sauf si l’accord d’activité partielle spécifique prévoit un périmètre d’engagements sur l’emploi plus restreint. Le dispositif de l’Activité d’activité Partielle de Longue Durée et l’Activité Partielle de « droit commun » L’Activité Partielle de Longue Durée ne peut être cumulée, sur une même période et pour un même salarié, avec le dispositif d’activité partielle de droit commun prévu à l’article L. 5122-1 du Code du travail. Toutefois, un employeur bénéficiant du dispositif d’activité partielle longue durée pour une partie de ses salariés peut concomitamment bénéficier pour d’autres salariés du dispositif d’activité partielle de droit commun prévu à l’article L. 5122-1 du Code du travail, pour l’un des motifs suivants : « Difficultés d’approvisionnement en matières premières ou énergieSinistre ou intempéries de caractère exceptionnel.La transformation, restructuration ou modernisation de l’entreprise.Toute autre circonstance de caractère exceptionnel. » Il n’est cependant pas possible de recourir concomitamment au dispositif d’activité partielle de longue durée et à l’activité partielle de droit commun pour un motif de conjoncture économique.
LA MANIFESTATION PAR ECRIT DE FAIRE APPEL AVANT L’EXPIRATION DU DELAI VAUT APPEL SOUS RESERVE DE REGULARISATION Arrêt de la Chambre Criminelle de la Cour de Cassation en date du 18 Décembre 2013, n°12-87.281 Le juge d’application des peines a, par ordonnance, accordé partiellement une réduction supplémentaire de peine. Le jour même de la notification de l’ordonnance, le prévenu a adressé un courrier au greffe de l’établissement pénitentiaire pour faire connaitre son souhait d’interjeter Appel. L’appel ne sera enregistré que six jours plus tard mais dès lors que la date de l’écrit n’a pas été contesté lorsqu’il a été établi, et que l’appel est régularisé par la suite, celui-ci est recevable.
Les juridictions de l’application des peines ne peuvent aggraver le sort de l’appelant lorsqu’elle est saisie sur son seul appel Cass.crim., 12 février 2014, n°13-81.683 Définition de la réduction de peine Les réductions de peine sont accordées par le Juge de l’application des peines à une personne condamnée à exécuter une peine d’emprisonnement. Ces réductions sont accordées selon deux critères, selon l’article 721 du Code de procédure pénale : -la bonne conduite du condamné (absence d’incidents, respect du règlement intérieur, respect des instructions de service, implication dans la vie quotidienne, respect du personnel pénitentiaire etc…), -les efforts sérieux de réinsertion (suivi d’une formation, acquisition d’une compétence, travail, indemnisation de la victime, suivi de soins etc…). Les ordonnances du Juge de l’application des peines portant réduction de peine peuvent faire l’objet d’un appel du condamné ou du Parquet. Selon l’article D.49-39 du Code de procédure pénale, l’appel doit être interjeté auprès du Greffe de l’établissement pénitentiaire dans les 24 heures suivant notification de l’ordonnance. La Cour de cassation a eu à s’interroger sur la possible aggravation de la situation du condamné en cas d’appel. Arrêt du 12 février 2014 : l’impact du seul appel du condamné En l’espèce, un condamné avait sollicité une réduction de peine supplémentaire selon les dispositions législatives en 2012. Le Juge de l’application des peines lui avait accordé cette réduction supplémentaire de deux mois. Le condamné interjetait appel. La chambre de l’application des peines de la Cour d’appel avait infirmé cette décision sur le fondement de la situation personnelle du condamné : rien de ne justifiait selon elle cette réduction supplémentaire. La Cour de cassation cassait cette décision au motif que la décision aggravait la situation du condamné. Or, étant le seul à avoir interjeté appel, la décision ne pouvait lui être défavorable. En d’autres termes, la chambre de l’application des peines n’avait que deux solutions : accorder une meilleure réduction de peine ou confirmer la décision du juge de l’application des peines. Il s’agit d’un revirement de jurisprudence, car le principe précédemment appliqué était la possibilité d’aggraver la situation du condamné sur son seul appel (Cass.crim., 7 mars 2007, n°06-83.981). Quid en cas d’appel du Parquet ? Il ressort de cette jurisprudence qu’en cas d’appel du seul condamné, la décision ne peut aggraver sa situation. Par conséquent, il en ressort que si le Parquet avait lui aussi interjeté appel de cette ordonnance, la chambre de l’application des peines aurait eu plus de marge de manœuvre, et aurait pu aggraver sa situation. Cette solution se rapproche de la solution retenue pour les ordonnances de retrait de crédits de peine prévues par l’article D.49-41-2 du Code de procédure pénale : en cas d’appel incident du parquet, la chambre peut rendre une décision aggravant la situation du condamné.
LE PRESIDENT DE LA CHAMBRE DE L’APPLICATION DES PEINES NE PEUT, SAUF URGENCE CONSTATEE, STATUER SUR L’APPEL INTERJETE AVANT L’EXPIRATION DU DELAI DE 1 MOIS LAISSE AU CONDAMNE POUR ADRESSER DES OBSERVATIONS ECRITES Cass.crim., 9 avril 2014, n°13-85.617 La question posée à la Cour de cassation dans cet arrêt était de savoir dans quelles conditions le Président de la chambre de l’application des peines pouvait statuer sur l’appel du condamné avant l’expiration du délai d’un mois accordé pour adresser des observations écrites. Principe applicable Le Code de procédure pénale prévoit qu’un condamné peut interjeter appel d’une ordonnance du Juge de l’application des peines devant le Président de la chambre de l’application des peines, dans le cadre des réductions de peine, des autorisations et des permissions de sortir. Le Président doit alors attendre l’expiration du délai d’un mois, accordé au condamné pour fournir des observations écrites, avant de rendre sa décision, sauf urgence. En ce sens, l’article 712-5 du Code de procédure pénale prévoit que : « Sauf en cas d’urgence, les ordonnances concernant les réductions de peine, les autorisations de sorties sous escortes et les permissions de sortir sont prises après avis de la commission de l’application des peines ». L’article 712-12 du Code de procédure pénale prévoit quant à lui que : « L’appel des ordonnances mentionnées aux articles 712-5 et 712-8 est porté devant le président de la chambre de l’application des peines de la cour d’appel, qui statue par ordonnance motivée au vu des observations écrites du ministère public et de celles du condamné ou de son avocat ». Enfin, l’article D49-41 du Code de procédure pénale prévoit que : « (…) A l’appui de son appel, le condamné ou son avocat peut adresser des observations écrites au président ou à la chambre. Hors le cas de l’urgence, ces observations doivent être adressées un mois au plus tard après la date de l’appel, sauf dérogation accordée par le président de la juridiction (…) ». Il en ressort ainsi la nécessité pour le Président de la chambre de l’application des peines d’attendre l’expiration de ce délai d’un mois pour rendre sa décision, ce qui est confirmé par la jurisprudence.     Arrêt du 9 avril 2014 : confirmation d’une jurisprudence ancienne En l’espèce, par ordonnance du 2 juillet 2013, un condamné s’est vu octroyer une réduction de peine complémentaire. Il a interjeté appel de cette ordonnance le 4 juillet 2013, et disposait donc d’un mois à compter de cette date pour fournir des observations écrites, soit jusqu’au 4 aout 2013. Il a fourni des observations écrites en date du 19 juillet 2013. Or, dès le 15 juillet 2013, le Président de la chambre de l’application des peines a rendu une ordonnance de confirmation. Il n’avait donc pu prendre connaissance de ces observations avant de rendre sa décision. La Cour de cassation a cassé cette ordonnance et a jugé que le Président de la chambre de l’application des peines ne dispose que de deux possibilités : -constater une urgence et rendre son ordonnance avant l’expiration du délai d’un mois, -ou attendre l’expiration du délai d’un mois octroyé au condamné pour adresser ses observations avant de rendre son ordonnance. Le non-respect de ces règles entraine la cassation de l’ordonnance rendue par le Président de la chambre de l’application des peines. Cette solution n’est pourtant pas nouvelle, car la Cour de cassation avait rendu la même décision en date du 6 septembre 2006 (Cass.crim., 6 septembre 2006, n°06-82.297) et en date du 28 avril 2011 (Cass.crim., 28 avril 2011, n°10-88.055). Exemple d’une urgence à statuer hors délai d’un mois Comme évoqué, le Président de la chambre de l’application des peines peut constater une urgence et rendre sa décision avant l’expiration du délai d’un mois. La Cour de cassation a eu l’occasion de démontrer en quoi peut consister cette urgence, dans le cadre d’un arrêt du 15 mai 2013 (Cass.crim., 15 mai 2013, n°12-85.586). En l’espèce, un condamné avait demandé une permission de sortir pour le 20 juillet 2012, ce qui était refusé par ordonnance du 5 juillet 2012. Il a interjeté appel de cette décision le 12 juillet 2012, ce qui aurait dû déclencher le délai d’un mois afin de présenter ses observations écrites, soit jusqu’au 12 aout 2012. Or, le Président de la chambre de l’application des peines a confirmé cette décision par ordonnance du 18 juillet 2012. La Cour de cassation a validé cette décision, en ce qu’une urgence était constatée. En effet, le Président de la chambre de l’application des peines devait rendre sa décision avant la date de la permission de sortir sollicitée, soit avant le 20 juillet 2012. Ainsi, dans le cadre des permissions de sortir, une urgence pourrait être facilement constatée par le Président de la chambre de l’application des peines, faisant obstacle au respect du délai d’un mois.
CLASSIFICATION ET REGLEMENTATION DES DIFFERENTES ARMES DE PROTECTION   Lorsque l’on se sent en danger,  parce que l’on est menacé ou parce que l’on a récemment été victime d’une agression, il est légitime de se demander si l’on peut porter une arme afin de se protéger : une arme que l’on utiliserait bien évidemment uniquement en cas de légitime défense. Mais peut-on porter une arme pour se protéger ? Quel type d’armes peut-on porter ? Quelle est la règlementation ? En France, les armes sont classées par catégorie allant de A (la plus dangereuse) à D (la moins dangereuse). Il va de soi que plus l’arme est dangereuse, plus la réglementation est stricte. A l’inverse, plus l’arme est inoffensive, plus la règlementation est souple. Toutefois, il est important de préciser que, de manière générale, le droit français est très rigoureux en matière de port d’armes. Le développement ci-dessous précisera les conditions d’acquisition et de détention des armes, de la moins dangereuse (catégorie D) à la plus dangereuse (catégorie A). I. Les armes de catégorie D : Acquisition et détention libre A. Quelles sont les armes de catégorie D? Les armes de catégorie D sont définies comme « tous objets susceptibles de constituer une arme dangereuse pour la sécurité publique ».   Les armes de catégorie D les plus courantes sont : Les armes non à feu camouflées (cane, parapluie, épée) ; Les armes blanches (poignards, couteaux-poignards, matraques) ; Les armes de projection de moins de 100 ml (bombe aérosol, lacrymogène, poivre) ; Les armes à impulsion électrique de contact (matraque électrique, poing électrique, shaker électrique) Attention, le taser est une arme de catégorie B. Pour plus de précisions, voici un tableau explicatif des armes de catégorie D :                      TYPES D’ARMES                                                         CARACTERISTIQUES Objet pouvant constituer une arme dangereuse pour la sécurité publique Exemples :   –          Arme non à feu camouflée, –          Poignard, couteau-poignard, –          matraque, –          Projecteur hypodermique. Certaines bombes aérosols incapacitantes ou lacrymogènes Capacité de 100 ml maximum. Certaines armes à impulsion électrique de contact Exemples :   –          Matraque électrique –          Poing électrique –          Shaker électrique (mais pas un pistolet Taser) Arme et lanceur dont le projectile est propulsé de manière non pyrotechnique Énergie à la bouche comprise entre 2 et 20 joules (et les munitions de ces armes).   Exemples : –          Lanceur de paint-ball, –          Carabine à air comprimé. Arme conçue pour le tir de munitions à blanc, à gaz ou de signalisation Non convertible pour d’autres projectiles (et les munitions de ces armes). Reproduction d’arme Modèle d’avant 1900.   Tire uniquement des munitions sans étui métallique. La fabrication ne doit pas améliorer sa précision et sa durabilité. Matériel de guerre neutralisé (rendu inapte au tir) – modèles d’avant 1946 sauf les armes à feu des catégories A, B ou C neutralisées   – modèles d’après 1946 figurant sur une liste du ministère de la défense Arme historique et de collection   Reproduction d’arme d’avant 1900 Arme neutralisée (rendue inapte au tir)  B. Peut-on acheter une arme de catégorie D?   Oui, il est possible d’acheter une arme de catégorie D à condition d’être majeur. Par conséquent, les armes de catégorie D peuvent être détenues librement. C. Peut-on porter une arme de catégorie D en dehors de son domicile? En principe, le port d’armes de catégorie D, en dehors de son domicile, est interdit sans motif légitime. Les juges tiennent compte du lieu, des circonstances et du contexte pour déterminer s’il existe un motif légitime. L’examen du motif légitime se fait au cas par cas. Prétendre que l’arme servirait à mieux affronter une altercation ou un danger ne constitue pas un motif légitime en soi. D. Quelles sont les sanctions? En cas de port sans motif légitime d’une arme de catégorie D, la sanction est la suivante : Commise par une personne seule: 15 000€ d’amende et 1 an d’emprisonnement Commise par 2 personnes ou plus: 30 000€ d’amende et 2 ans d’emprisonnement   La sanction est allégée en cas d’arme ou lanceur dont le projectile est propulsé de manière non pyrotechnique (lanceur de paintball, carabine à air comprimé) : 750€ d’amende seulement. E. Peut-on utiliser une arme de catégorie D en cas de légitime défense? La légitime défense consiste à se protéger en cas d’agression, en commettant un acte répréhensible ou interdit par la loi. De ce fait, la légitime défense permet l’utilisation d’une arme de défense, c’est-à-dire l’un des équipements appartenant à la catégorie D. Néanmoins, pour qu’un acte de légitime défense soit reconnu comme tel, plusieurs conditions strictes et précises doivent être réunies : L’acte de légitime défense doit avoir eu lieu à la suite d’une agression injustifiée à son encontre, ou d’une attaque à l’encontre d’un membre de sa famille ou d’un proche. L’utilisation d’une arme de défense ne peut avoir lieu que lorsque l’agression représente une menace « réelle et immédiate ». L’utilisation d’une arme de défense est autorisée, que lorsque la violence constituait le seul moyen de se protéger d’une attaque. Les moyens de défense mis en place devaient être proportionnés. L’acte de légitime défense a été réalisé au moment de l’attaque. Exemples de légitime défense : Le fait de repousser une personne introduite par effraction, de nuit, de son domicile est considéré comme de la légitime défense. Le fait d’utiliser une arme de défense de catégorie D, dans le cadre d’une agression à la suite d’un vol avec violence, est considéré comme de la légitime défense. Finalement, l’emploi d’une arme de catégorie D en cas d’attaque doit toujours être justifié et proportionnel à la dangerosité du cas de figure. En tout état de cause, seule la justice est en mesure de considérer si la légitime défense est caractérisé ou non.   En pratique, très peu de poursuites sont initiées par le procureur de la République lorsque des femmes sont contrôlées en possession d’arme de type shaker électrique. L’avantage en termes de protection que donne ce type d’arme et le faible risque de poursuites en font un moyen de défense efficace au quotidien. Attention les utilisations abusives sont par contre sévèrement sanctionnées.  II. Les armes de catégorie C : soumises à déclaration A. Quelles sont les armes de catégorie C? Les principales armes de catégorie C sont les armes à feu d’épaule à répétition semi-automatique et les armes à feu fabriquées pour tirer une balle ou des projectiles non métalliques. Pour plus de précisions, voici un tableau explicatif des armes de catégorie C :                   TYPE D’ARME                                                  CARACTERISTIQUES     Arme à feu d’épaule à répétition semi-automatique -Projectile de diamètre inférieur à 20 mm   -Tir de 3 munitions au plus sans réapprovisionnement     Arme à feu d’épaule à répétition manuelle -Projectile de diamètre inférieur à 20 mm.   -Tir de 11 munitions au plus sans réapprovisionnement. Arme à feu d’épaule à un coup par canon           Arme à feu d’épaule à répétition manuelle -Canon rayé muni d’un dispositif de rechargement à pompe chambré pour les calibres 8, 10, 12, 14, 16, 20, 24, 28, 32, 36 et 410.   -Capacité de 5 coups maximum. -Longueur totale supérieure à 80 cm. -Longueur du canon supérieure à 60 cm. -Crosse fixe. Arme à feu fabriquée pour tirer une balle ou plusieurs projectiles non métalliques. Classée dans cette catégorie par décision ministérielle. Arme à feu et lanceur dont le projectile est propulsé de manière non pyrotechnique. Energie à la bouche de 20 joules ou plus. Arme à feu de catégorie A, B ou C neutralisée (rendue inapte au tir).   Munitions et éléments de munitions Arme de catégorie C ou classé dans cette catégorie par décision ministérielle. B. Peut-on acheter une arme de catégorie C? Pour acheter une arme de catégorie C, il faut remplir plusieurs conditions : Ne pas être inscrit au FNIADA (fichier national des interdits d’acquisition et de détention d’armes) Ne pas avoir sur votre bulletin n°2 du casier judiciaire de condamnations pour certaines infractions (meurtre, assassinat, violence volontaire, viol, agression sexuelle, trafic de stupéfiant). Avoir un des titres suivants : Permis de chasser ; Licence d’une fédération sportive ayant reçu une délégation ministérielle pour la pratique du tir, du ball-trap ou du biathlon. S’agissant des armes à feu fabriquée pour tirer une balle ou des projectiles non métalliques, il n’est pas nécessaire de détenir un titre. C. Comment déclarer une arme de catégorie C? En 2022, un nouveau système d’information sur les armes, s’est ouvert aux détenteurs d’armes particuliers. Il s’agit du système français d’information sur les armes (SIA). Il est ouvert  à l’ensemble des détenteurs particuliers (licenciés de la fédération française de ball-trap, de ski et de tir sportif et collectionneurs) ainsi qu’aux détenteurs d’armes non licenciés (anciens licenciés des fédérations de tir sportif, de ball-trap et de ski ainsi que les détenteurs ayant trouvé ou hérité d’armes). La création du nouveau système d’information sur les armes entraîne la suppression de tous les documents papiers qui étaient échangés jusqu’ici entre les armuriers, les préfectures et les détenteurs. Dorénavant, toutes les procédures seront informatisées et automatisées. La création d’un compte personnel avant le 1er juillet 2023 est obligatoire pour conserver son droit à détenir ses armes au-delà de cette date. D. Comment conserver une arme de catégorie C à domicile? Une arme de catégorie C doit être conservée d’une des manières suivantes : Dans un coffre-fort ou une armoire forte adaptée; Par démontage d’un élément d’arme la rendant immédiatement inutilisable, lequel est conservé à part Par tout autre dispositif empêchant l’enlèvement de l’arme (par exemple, enchaînement sur un râtelier, passage d’un câble dans le pontet) Les munitions doivent être conservées séparément et ne doivent pas être librement accessibles. E. Quelles sont les sanctions? Acheter, vendre ou détenir une ou plusieurs armes de catégorie C sans faire de déclaration est sanctionné par une peine de prison de 2 ans et une amende de 30 000 €. La peine de prison est de 7 ans et l’amende de 100 000 € en cas d’infraction commise en bande organisée. Les peines complémentaires suivantes peuvent s’y ajouter : Interdiction de détenir ou de porter, pendant 5 ans maximum, une arme soumise à autorisation ; Confiscation d’une ou plusieurs armes ; Retrait du permis de chasser avec interdiction de demander un nouveau permis pendant 5 ans maximum.   III. Les armes de catégorie B : soumises à autorisation A. Quelles sont les armes de catégorie B? Les armes de catégorie B sont  les armes à feu de poing (revolver, pistolet), les armes à feu d’épaule (fusil, carabine) et les taser. B. Peut-on acheter et détenir des armes de catégorie B? Certaines armes classées catégorie B peuvent être autorisées pour faire du tir sportif ou en cas de risque professionnel. C. A quelles conditions peut-on détenir une arme de catégorie B? Pour détenir une arme de catégorie B dédiée au tir sportif, il faut présenter une licence en cours de validité de la Fédération française de tir. Pour détenir une arme de catégorie B dédiée à l’activité professionnelle, il faut justifier du risque sérieux lié à l’activité professionnelle. En tout état de cause, il faut remplir les conditions suivantes pour porter une arme de catégorie B : Etre majeur Ne pas être inscrit au FNIADA Ne pas avoir sur votre bulletin n°2 du casier judiciaire de condamnations pour certaines infractions (meurtre, assassinat, tortures, actes de barbarie, violences volontaires, viol, agressions sexuelles, trafic de stupéfiant) Ne pas être soumis à une interdiction de détenir ou de porter une arme dans le cadre d’une ordonnance de protection de victimes de violences Ne pas avoir été ou être admis en soins psychiatriques sans consentement   II. Armes de catégorie A A. Quelles sont les armes de catégorie A ? Les armes de catégorie A sont certaines armes à feu et les matériels de guerre. B. Peut-on acheter et détenir des armes de catégorie B? Il est interdit d’acquérir ou de détenir une arme de catégorie A.
LE CLASSEMENT DES INTERETS LEGAUX EN CAS DE NON-FORMULATION D’UNE OFFRE D’INDEMNISATION PAR LA COMPAGNIE D’ASSURANCE DANS LE CADRE DE LA LOI BADINTER L’obligation de formulation d’une offre d’indemnisation par la compagnie d’assurance Pour comprendre le raisonnement ci-dessous, il convient de définir la notion de consolidation. La consolidation est le moment où les lésions se fixent et prennent un caractère permanent (par exemple, lorsqu’un traitement n’est plus nécessaire). Il est alors possible d’apprécier un certain degré d’incapacité permanente réalisant un préjudice définitif. La consolidation sert de point de départ aux délais légaux d’offre d’indemnité. Il convient de distinguer deux situations (article L. 211-9 du code des assurances) : L’assureur a connaissance de la consolidation dans les trois mois de l’accident: Il est tenu de faire une offre définitive dans les huit mois de l’accident.   L’assureur a connaissance de la consolidation après ces trois mois: Il est tenu de faire une offre provisionnelle dans les huit mois de l’accident. Puis il est tenu de faire une offre définitive dans les cinq mois qui suivront la date à laquelle il a eu connaissance de la consolidation. /!\  En principe, le point de départ du délai de huit mois est fixé au jour de l’accident. Néanmoins, si c’est le FGAO qui est chargé de faire l’offre, ce point de départ est reporté « au jour où celui-ci a reçu les éléments justifiant son intervention » (article L. 211-22 du code des assurances). Suspension du délai : Le délai est suspendu lorsque l’assureur n’a pas été avisé de l’accident dans le mois qui suit, et jusqu’à réception de cet avis (art. R. 211-29 du code des assurances).   En cas d’absence ou d’insuffisance de réponse de la victime aux demandes de renseignements nécessaires à l’assureur pour présenter son offre, le délai est suspendu jusqu’à réception de la lettre appropriée (art. R. 211-31 à R. 211-33 du code des assurances).       Prorogation du délai : Lorsque la victime décède plus d’un mois après le jour de l’accident, le délai de l’offre aux ayants droit est prorogé du temps écoulé entre la date de l’accident et le jour du décès, diminué d’un mois (art. R. 211-30 du code des assurances).   Exemple : Si l’accident a eu lieu le 30 mars et que la victime est décédée le 12 août, la prorogation du délai est égale au temps écoulé entre le 30 mars et le 12 août, soit quatre mois et douze jours, puis on diminue ce délai d’un mois. Le délai est donc prorogé de trois mois et douze jours, soit jusqu’au 12 juillet.   Si la victime refuse de se soumettre à un examen médical ou n’accepte pas le médecin choisi par l’assureur, la désignation d’un médecin par le juge des référés proroge d’un mois le délai initial de formulation de l’offre (art. R. 211-34 du code des assurances). C’est le délai le plus favorable à la victime qui s’applique (article L. 211-9, alinéa 4 du code des assurances).   La sanction en cas de non formulation d’une offre par la compagnie d’assurance Des pénalités sont encourues par les assureurs en cas d’offre tardive. Lorsque l’offre n’a pas été faite dans les délais mentionnés ci-dessus « le montant de l’indemnité offerte par l’assureur ou allouée par le juge à la victime produit un intérêt de plein droit au double du taux de l’intérêt légal à compter de l’expiration du délai et jusqu’au jour de l’offre ou du jugement devenu définitif » (art. L. 211-13 du code des assurances). La sanction pour offre tardive s’applique aussi bien à l’absence d’offre provisionnelle (Crim., 24 janvier 1996, n° 94-85.550) qu’à l’absence d’offre définitive (Crim., 5 février 1997, n° 93-82.930 et n° 96-81.770). Le point de départ des intérêts majorés court à compter de la date à laquelle l’assureur aurait dû faire une offre provisionnelle ou définitive et non à compter de la demande en justice (Crim., 16 mai 2006, n° 05-85.667). Lorsqu’un nouvel expert ayant mission de fixer la date de consolidation a été commis après le dépôt du rapport de l’expert sollicité par l’assureur, cette date ne peut pas être connue avant le dépôt du second rapport, de sorte que l’assureur ne doit les intérêts au double du taux légal qu’à compter de cinq mois après avoir eu connaissance du dernier rapport (Civ. 2e, 5 juin 2008).  
L’AUTOBLANCHIMENT DE SON INFRACTION EST POSSIBLE Cass.crim., 14 juin 2017, n°16-84.921   Définition et cadre légal du blanchiment Le blanchiment est défini par le dictionnaire Larousse comme le fait de faire subir à des fonds une série d’opérations à la suite desquelles leur origine frauduleuse, illégale, peut être dissimulée. Cette définition est précisée par le Code pénal. La définition légale issue de l’article 324-1 du Code pénal prévoit en effet deux comportements : « Le blanchiment est le fait de faciliter, par tout moyen, la justification mensongère de l’origine des biens ou des revenus de l’auteur d’un crime ou d’un délit ayant procuré à celui-ci un profit direct ou indirect. Constitue également un blanchiment le fait d’apporter un concours à une opération de placement, de dissimulation ou de conversion du produit direct ou indirect d’un crime ou d’un délit ». L’infraction de blanchiment nécessite ainsi :   Une infraction, à savoir un crime ou un délit, Un produit issu directement ou indirectement de cette infraction, Un comportement de blanchiment : faciliter la justification mensongère de l’origine de ce produit OU apporter son concours à une opération de placement, de dissimulation ou de conversion du produit   Il convient de préciser que si le blanchiment porte généralement sur l’argent, des biens peuvent également faire l’objet d’un blanchiment. La jurisprudence a pu connaitre de cas de blanchiment de biens volés (Cass.crim., 26 janvier 2011, n°10-84.081 : le prévenu était condamné pour blanchiment, en l’espèce pour avoir servi d’intermédiaire dans la revente d’engins de travaux publics volés). Cependant, jusqu’au 14 juin 2017, le blanchiment ne pouvait porter que sur le produit de l’infraction commis par une autre personne.   Autoblanchiment : une innovation jurisprudentielle La Cour de cassation a précisé, par un arrêt du 14 juin 2017, que l’auteur de blanchiment peut avoir blanchi le produit de sa propre infraction. En l’espèce, le condamné avait commis des actes d’abus de confiance à l’encontre d’une personne âgée, veuve et souffrant de déficience mentale. Or, afin de dissimuler les abus de confiance, le condamné avait multiplié la création de comptes bancaires au nom de la victime et à son propre nom. En outre, il avait consenti des prêts à des amis avec l’argent issu des actes d’abus de confiance, et avait acquis des biens immobiliers dont il remboursait les emprunts avec cet argent. Toutes ces opérations avaient pour but de dissimuler l’origine frauduleuse de l’argent acquis à l’aide des actes d’abus de confiance sur personne vulnérable. Le condamné, dans ses moyens, expliquait que l’alinéa 2 de l’article 324-1 du Code pénal prévoyait un « concours au placement du produit d’une infraction principale » : il considérait en effet que cet article exigeait une infraction principale commise par des comparses et l’infraction distincte de blanchiment commise par un tiers. La Cour de cassation a jugé que l’infraction de blanchiment était générale et autonome, de sorte qu’elle pouvait être commise par n’importe qui, y compris l’auteur de l’infraction initiale. En effet, selon elle, l’article 324-1 du Code pénal, en son alinéa 2, ne prévoit pas de distinction entre les auteurs. Dès lors, l’auteur de l’infraction initiale peut également être condamné pour le blanchiment du produit issu de cette première infraction. Cette autonomie suppose donc deux conséquences : -l’absence de poursuite de l’infraction initiale n’a pas de conséquence sur la poursuite de l’auteur du blanchiment, -l’auteur de l’infraction initiale peut également être condamné au blanchiment de son propre butin, sans que le principe non bis in idem ne s’applique (interdiction de condamner deux fois pour les mêmes faits).   En pratique : cas d’autoblanchiment reconnus A notamment été reconnu l’autoblanchiment d’un professionnel vendeur de véhicules d’occasion. Il vendait en effet des véhicules d’occasion sur un autre site que son site principal, sans avoir déclaré cette activité à l’URSSAF. Il avait également à ce titre embauché un employé sans l’avoir déclaré. Il était dès lors condamné pour exécution d’un travail dissimulé et pour non déclaration auprès de l’URSSAF de son établissement secondaire. Plus encore, il était condamné pour le blanchiment des fonds issus de ces ventes. Il avait en effet versé ces fonds sur ses comptes ou ceux de sa femme, puis les réinjectait dans le circuit financier légal en achetant des véhicules d’occasion ou en réglant des dépenses de famille (Cass.crim., 27 mars 2018, n°16-87.585).   De la même manière, le maire de la commune de LEVALLOIS PERRET, condamné pour fraude fiscale et prise illégale d’intérêts, a été condamné pour le blanchiment de ses infractions, pour avoir notamment acquis à l’aide des fonds illégaux des biens immobiliers (Affaire BALKANY : https://www.francetvinfo.fr/politique/affaire/affaire-balkany/blanchiment-de-fraude-fiscale-patrick-et-isabelle-balkany-condamnes-en-appel-a-quatre-ans-et-demi-et-trois-ans-et-demi-de-prison_5592030.html)
Autour des problèmes liés aux compagnies aériennes, le droit européen et international encadre la question des retards et annulation. Les deux principaux textes sur la question sont le Règlement européen  (CE) n°261/2004 établissant des règles communes en matière d’indemnisation et d’assistance des passagers en cas de refus d’embarquement et d’annulation ou de retard important d’un vol  (EC261), et la Convention pour l’unification de certaines règles relatives au transport aérien international (convention de Montréal) datant de 1999. Leur champ d’application reste assez restreint, car le Règlement EC261 s’applique uniquement aux vols au départ d’un territoire européen, ou atterrissant dans un tel espace. La Convention de Montréal de 1999, quant à elle, s’applique aux Etats l’ayant ratifié, c’est-à-dire 139 pays, dont les Etats-Unis, le Canada, le Japon, et tous les Etats de l’Union Européenne, mis à part la Pologne. La liste complète peut être retrouvée ici : CONVENTION POUR L=UNIFICATION DE CERTAINES RÈGLES (icao.int).   A quoi ai-je droit si mon avion est retardé ?   Selon le Règlement EC261 : L’article 6 de ce Règlement prévoit que : « 1. Lorsqu’un transporteur aérien effectif prévoit raisonnablement qu’un vol sera retardé par rapport à l’heure de départ prévue: a) de deux heures ou plus pour tous les vols de 1500 kilomètres ou moins, ou b) de trois heures ou plus pour tous les vols intracommunautaires de plus de 1500 km et pour tous les autres vols de 1500 à 3500 km, ou c) de quatre heures ou plus pour tous les vols qui ne relèvent pas des points a) ou b), les passagers se voient proposer par le transporteur aérien effectif: i) l’assistance prévue à l’article 9, paragraphe 1, point a), et paragraphe 2, et ii) lorsque l’heure de départ raisonnablement attendue est au moins le jour suivant l’heure de départ initialement annoncée, l’assistance prévue à l’article 9, paragraphe 1, points b) et c), et iii) lorsque le retard est d’au moins cinq heures, l’assistance prévue à l’article 8, paragraphe 1, point a). En tout état de cause, cette assistance est proposée dans les limites fixées ci-dessus compte tenu de la distance du vol»   L’article 9 cité ici détaille ce dont les passagers dont l’avion a été retardé pourraient bénéficier : Dans tous les cas cités : « 1. Lorsqu’il est fait référence au présent article, les passagers se voient offrir gratuitement: des rafraîchissements et des possibilités de se restaurer en suffisance compte tenu du délai d’attente»   Additionnellement, l’article 9 prévoit pour tous les passagers : « 2. En outre, le passager se voit proposer la possibilité d’effectuer gratuitement deux appels téléphoniques ou d’envoyer gratuitement deux télex, deux télécopies ou deux messages électroniques ».   Spécifiquement dans le cas d’un vol retardé au jour suivant : b) un hébergement à l’hôtel aux cas où: – un séjour d’attente d’une ou plusieurs nuits est nécessaire, ou – lorsqu’un séjour s’ajoutant à celui prévu par le passager est nécessaire; c) le transport depuis l’aéroport jusqu’au lieu d’hébergement (hôtel ou autre) »   Si le retard est d’au moins cinq heures : L’article 8, paragraphe 1, prévoit : « a) – le remboursement du billet, dans un délai de sept jours, selon les modalités visées à l’article 7, paragraphe 3, au prix auquel il a été acheté, pour la ou les parties du voyage non effectuées et pour la ou les parties du voyage déjà effectuées et devenues inutiles par rapport à leur plan de voyage initial, ainsi que, le cas échéant, – un vol retour vers leur point de départ initial dans les meilleurs délais »   Pour récapituler : un retard de vol ouvre droit à des rafraîchissements, et la possibilité d’effectuer deux appels téléphoniques. Si le vol est retardé au jour suivant, le Règlement EC261 prévoit un hébergement, avec le transport jusqu’à celui-ci. Si le vol a un retard d’au moins cinq heures, le passager a un droit au remboursement ou au réacheminement.   De plus, ce règlement ne limite pas le droit du passager à demander une indemnité complémentaire à la compagnie aérienne, selon l’article 12, s’il s’estime victime d’un préjudice distinct. Cependant, « l’indemnisation accordée en vertu du présent règlement peut être déduite d’une telle indemnisation ».   -Selon la Convention de Montréal : La Convention de Montréal 1999 confère aussi des droits aux passagers. Dans son article 19, la Convention spécifie que « Le transporteur est responsable du dommage résultant d’un retard dans le transport aérien de passagers, de bagages ou de marchandises. Cependant, le transporteur n’est pas responsable du dommage causé par un retard s’il prouve que lui, ses préposés et mandataires ont pris toutes les mesures qui pouvaient raisonnablement s’imposer pour éviter le dommage, ou qu’il leur était impossible de les prendre ». L’article 20, à la suite, détaille les cas d’exonération de responsabilité du transporteur : « Dans le cas où il fait la preuve que la négligence ou un autre acte ou omission préjudiciable de la personne qui demande réparation ou de la personne dont elle tient ses droits a causé le dommage ou y a contribué, le transporteur est exonéré en tout ou en partie de sa responsabilité à l’égard de cette personne, dans la mesure où cette négligence ou cet autre acte ou omission préjudiciable a causé le dommage ou y a contribué. Lorsqu’une demande en réparation est introduite par une personne autre que le passager, en raison de la mort ou d’une lésion subie par ce dernier, le transporteur est également exonéré en tout ou en partie de sa responsabilité dans la mesure où il prouve que la négligence ou un autre acte ou omission préjudiciable de ce passager a causé le dommage ou y a contribué. Le présent article s’applique à toutes les dispositions de la convention en matière de responsabilité, y compris le paragraphe 1 de l’article 21 ». Cependant, c’est l’article 22 qui se révèle être le plus intéressant en termes de retard : « 1. En cas de dommage subi par des passagers résultant d’un retard, aux termes de l’article 19, la responsabilité du transporteur est limitée à la somme de 4150 droits de tirage spéciaux par passager. Dans le transport de bagages, la responsabilité du transporteur en cas de destruction, perte, avarie ou retard est limitée à la somme de 1000 droits de tirage spéciaux par passager, sauf déclaration spéciale d’intérêt à la livraison faite par le passager au moment de la remise des bagages enregistrés au transporteur et moyennant le paiement éventuel d’une somme supplémentaire. Dans ce cas, le transporteur sera tenu de payer jusqu’à concurrence de la somme déclarée, à moins qu’il prouve qu’elle est supérieure à l’intérêt réel du passager à la livraison». Cet article rappelle les cas d’exonération de responsabilité de la compagnie aérienne : « 5. Les dispositions des paragraphes 1 et 2 du présent article ne s’appliquent pas s’il est prouvé que le dommage résulte d’un acte ou d’une omission du transporteur, de ses préposés ou de ses mandataires, fait soit avec l’intention de provoquer un dommage, soit témérairement et avec conscience qu’un dommage en résultera probablement, pour autant que, dans le cas d’un acte ou d’une omission de préposés ou de mandataires, la preuve soit également apportée que ceux-ci ont agi dans l’exercice de leurs fonctions ». Enfin, cet article détaille les indemnités qu’il est possible de demander : « 6. Les limites fixées par l’article 21 et par le présent article n’ont pas pour effet d’enlever au tribunal la faculté d’allouer en outre, conformément à sa loi, une somme correspondant à tout ou partie des dépens et autres frais de procès exposés par le demandeur, intérêts compris. La disposition précédente ne s’applique pas lorsque le montant de l’indemnité allouée, non compris les dépens et autres frais de procès, ne dépasse pas la somme que le transporteur a offerte par écrit au demandeur dans un délai de six mois à dater du fait qui a causé le dommage ou avant l’introduction de l’instance si celle-ci est postérieure à ce délai ». Il convient de préciser que les sommes indiquées en « tirages spéciaux » indiqués dans la Convention « sont considérées comme se rapportant au droit de tirage spécial tel que défini par le Fonds monétaire international », selon l’article 23. Pour les Etats qui ne sont pas membres du FMI, ils « peuvent, au moment de la ratification ou de l’adhésion, ou à tout moment par la suite, déclarer que la limite de responsabilité du transporteur prescrite à l’article 21 est fixée, dans les procédures judiciaires sur leur territoire, à la somme de 1500000 unités monétaires par passager; 62500 unités monétaires par passager pour ce qui concerne le paragraphe 1 de l’article 22; 15000 unités monétaires par passager pour ce qui concerne le paragraphe 2 de l’article 22; et 250 unités monétaires par kilogramme pour ce qui concerne le paragraphe 3 de l’article 22. Cette unité monétaire correspond à soixante-cinq milligrammes et demi d’or au titre de neuf cents millièmes de fin. Les sommes peuvent être converties dans la monnaie nationale concernée en chiffres ronds. La conversion de ces sommes en monnaie nationale s’effectuera conformément à la législation de l’État en cause ». Enfin, l’article 36, traitant des cas de transporteurs successifs, stipule que « au cas d’un tel transport, le passager ou ses ayants droit ne pourront recourir que contre le transporteur ayant effectué le transport au cours duquel l’accident ou le retard s’est produit, sauf dans le cas où, par stipulation expresse, le premier transporteur aura assuré la responsabilité pour tout le voyage ».     En conclusion, peu importe que ce soit le Règlement EC261 ou la Convention de Montréal qui est utilisée comme fondement légal, il incombe à la compagnie aérienne de prendre en charge les besoins du passager, causés par le retard.   A quoi ai-je droit si mon avion est annulé ? L’article 5 du Règlement EC261 dispose des cas d’annulation de vol : « 1. En cas d’annulation d’un vol, les passagers concernés: a) se voient offrir par le transporteur aérien effectif une assistance conformément à l’article 8; b) se voient offrir par le transporteur aérien effectif une assistance conformément à l’article 9, paragraphe 1, point a), et paragraphe 2, de même que, dans le cas d’un réacheminement lorsque l’heure de départ raisonnablement attendue du nouveau vol est au moins le jour suivant le départ planifié pour le vol annulé, l’assistance prévue à l’article 9, paragraphe 1, points b) et c), et   c) ont droit à une indemnisation du transporteur aérien effectif conformément là l’article 7, à moins qu’ils soient informés de l’annulation du vol : i) au moins deux semaines avant l’heure de départ prévue, ou ii) de deux semaines à sept jours avant l’heure de départ prévue si on leur offre un réacheminement leur permettant de partir au plus tôt deux heures avant l’heure de départ prévue et d’atteindre leur destination finale moins de quatre heures après l’heure d’arrivée prévue, ou iii) moins de sept jours avant l’heure de départ prévue si on leur offre un réacheminement leur permettant de partir au plus tôt une heure avant l’heure de départ prévue et d’atteindre leur destination finale moins de deux heures après l’heure prévue d’arrivée.   Lorsque les passagers sont informés de l’annulation d’un vol, des renseignements leur sont fournis concernant d’autres transports possibles. Un transporteur aérien effectif n’est pas tenu de verser l’indemnisation prévue à l’article 7 s’il est en mesure de prouver que l’annulation est due à des circonstances extraordinaires qui n’auraient pas pu être évitées même si toutes les mesures raisonnables avaient été prises. Il incombe au transporteur aérien effectif de prouver qu’il a informé les passagers de l’annulation d’un vol ainsi que le délai dans lequel il l’a fait». En cas d’annulation, les passagers ont droit aux mêmes aides que pour les retards, notamment l’assistance et les aides au transport. Une annulation ouvre aussi droit à une indemnisation, qui dépendra du fait que les passagers en ont été informés.
EN CAS DE DESIGNATION SUCCESSIVE D’AVOCATS, SEUL L’AVOCAT REGULIEREMENT DESIGNE DOIT ETRE CONVOQUE AUX AUDITIONS ET INTERROGATOIRES LORS DE L’INSTRUCTION Cass.crim., 20 aout 2014, n°14-83.699   La procédure de désignation d’un avocat Le Code de procédure pénale prévoit un formalisme précis pour désigner un avocat dans le cadre de l’instruction, et des débats contradictoires devant le Juge des libertés et de la détention. En ce sens, l’article 115 du Code de procédure pénale prévoit que le mis en examen doit informer le juge d’instruction du nom de l’avocat désigné par déclaration au greffe, ou lettre recommandée avec accusé de réception. Si le mis en examen est détenu, cette déclaration est réalisée auprès du chef de l’établissement pénitentiaire. Cette désignation est d’importance, car à moins d’y renoncer expressément le mis en examen doit être assisté de son avocat dans le cadre des auditions et interrogatoires lors de l’instruction, l’article 114 du Code de procédure pénale. Par extension, le mis en examen doit être assisté de son conseil lors des débats contradictoires, intervenant en cours d’instruction, en vue de sa libération ou de son maintien en détention. Son conseil doit être convoqué au débat contradictoire (article 145-2 du Code de procédure pénale).   La difficulté survient si le mis en examen désigne plusieurs avocats. L’article 115 du Code de procédure pénale prévoit un formalisme : le mis en examen qui désigne plusieurs avocats doit faire connaitre au Juge d’instruction l’avocat qui recevra les convocations. A défaut de faire ce choix, le premier avocat désigné sera le destinataire des convocations. Il appartient donc au mis en examen d’être diligent dans la désignation des avocats et dans le choix du conseil qui recevra les convocations. Ce choix est d’autant plus important que l’absence d’assistance à l’audience peut entrainer de lourdes conséquences.   L’arrêt du 20 aout 2014 En l’espèce, un individu était mis en examen du chef de meurtre. Il avait désigné un premier avocat, qu’il remplaçait en cours de procédure par un nouvel avocat. Le mis en examen n’avait pas explicitement fait connaitre son choix quant au conseil devant recevoir les convocations. Il précisait uniquement qu’il s’agissait d’un remplacement. Or, un débat contradictoire était organisé afin de débattre de sa remise en liberté ou de la prolongation de la détention provisoire. Le premier avocat désigné, et qui avait été remplacé, était régulièrement convoqué. L’avocat remplaçant n’était donc pas en conséquence convoqué. Or, l’avocat convoqué ne s’étant pas présenté au débat, le mis en examen n’était pas assisté et a vu sa détention provisoire prolongée. Il saisissait la chambre de l’instruction en annulation de la décision, sur le fondement de cette irrégularité. La Chambre de l’instruction rejetait sa requête, au motif que le premier avocat n’avait pas été régulièrement remplacé selon les formes de l’article 115 du Code de procédure pénale, de sorte qu’il était valable qu’il soit convoqué au débat contradictoire. La Cour de cassation cassait cette décision. En effet, elle jugeait que le second avocat avait valablement été désigné comme avocat remplaçant, de sorte qu’il aurait dû être convoqué au débat contradictoire et assister le mis en examen. La Cour ordonnait la remise en liberté du mis en examen.   On en comprend qu’en désignant un nouvel avocat en « remplacement », le requérant avant implicitement fait le choix que ce dernier soit convoqué aux audiences.
Préjudice des victimes directes : l’incidence professionnelle   CE, 27 mai 2021, n°431557 L’Office National d’Indemnisation des Accidents Médicaux (ONIAM) est un établissement public chargé d’organiser l’indemnisation des victimes d’accidents médicaux, sans passer par une procédure en justice. Dans l’arrêt du Conseil d’Etat du 27 mai 2021, le Conseil d’Etat a rappelé que la victime d’un accident médical doit être indemnisé des pertes de revenus actuelles et futures liées à son activité. Mais il ajoute aussi que l’incidence professionnelle doit prendre en compte dans le calcul de l’indemnisation le manque de bénéfices relationnels et sociaux. Il était question ici d’un plombier ne pouvant plus exercer son activité suite à une vaccination lui ayant causé une incapacité de travail, ce qui lui donnait droit à indemnisation.
Décision en matière de dommage corporel : lien de causalité entre un préjudice moral d’un enfant conçu après les faits et le décès d’un proche   Cass, civ.2, 11 mars 2021, n°19-17.384 Dans un arrêt du 11 mars 2021, la Cour de cassation rappelle l’importance de caractériser un lien de causalité entre le préjudice moral invoqué par une victime conçue après les faits et le décès d’un proche. En l’espèce, la victime est née trois ans après le décès de sa sœur, qu’elle n’a donc jamais connue. Cette dernière demande l’indemnisation d’un préjudice d’affection lié à la disparition de sa sœur dont le traumatisme est entretenu dans la famille. Les juges ont ainsi eu l’occasion de préciser que l’indemnisation du préjudice moral d’une victime n’est possible qu’à condition que celle-ci soit conçue au moment des faits. Il n’y a donc pas de lien de causalité entre le préjudice moral d’une victime conçue plusieurs années après les faits et le décès d’un proche. Au regard des circonstances, la victime n’a donc pu obtenir d’indemnisation.
« Le secret médical ne peut constituer un obstacle légitime à la présence de l’avocat »   CA Grenoble, 30 janvier 2024, n°23/01786   Le secret médical protège les informations médicales d’une personne. Les professionnels de santé ont donc l’obligation de ne pas divulguer les informations médicales d’un patient. Le patient n’est cependant pas soumis à ce secret médical. Seul le patient peut donc librement disposer de son droit au secret médical, en choisissant les personnes pouvant avoir accès à ses informations médicales.   En l’espèce, une expertise médicale devait avoir lieu à la suite d’un accident au cours duquel une femme avait été percutée à l’épaule par un parasol ayant été projeté par le vent, alors qu’elle se trouvait au bord de la piscine d’un centre de vacances. Pour évaluer le préjudice indemnisable de la victime, une expertise médicale a été organisée. L’ordonnance du juge des référés prévoyait que l’examen clinique de la victime ne devrait se dérouler qu’en présence du médecin expert désigné.   Aucune disposition légale n’interdit la présence de médecins-conseils et d’un avocat aux côtés de la victime. Dès lors, il est possible que ces derniers assistent à l’expertise médicale à condition que la victime demande expressément leur présence, et que cela ne trouble pas le bon déroulement de l’examen.   La cour d’appel de Grenoble a infirmé l’ordonnance du juge des référés en précisant que la victime peut solliciter la présence de son avocat lors d’une expertise médico-légale.
Est considéré comme un préjudice corporel le préjudice dont une victime d’agression sexuelle se prévaut. Dès lors, le délai de prescription court à compter de la date de consolidation de l’état de la victime, et non à partir de la date des faits.   Cass., civ. 2, 7 juillet 2022, 20-19.147   La Cour de cassation a eu l’occasion d’apporter des précisions concernant le délai de prescription applicable en matière de préjudice corporel causé par des faits de violence ou d’agression sexuelle sur un mineur. Il s’agissait ici d’un individu ayant principalement assigné un membre de la direction d’un établissement d’enseignement scolaire lui ayant fait subir des viols et agressions sexuelles lorsqu’il était collégien de 1972 à 1975, alors qu’il était collégien, et donc mineur. La victime a débuté en octobre 1989 une psychothérapie, justifiant la conscience de la gravité des dommages subis et la nécessité d’y remédier. La Cour de cassation, dans sa décision, a jugé que la date de consolidation du dommage devait être vérifiée pour que le délai de prescription commence à courir. En l’espèce, les juges ont considéré que le délai de prescription commençait à courir en octobre 1989, date de la psychothérapie consolidant le dommage, et ce pour vingt ans. La cour d’appel avait estimé que le délai de prescription ne courait que pour dix ans. Pour rappel, lorsque le dommage est causé par des violences ou des agressions sexuelles commises à l’encontre d’un mineur, le délai de prescription est porté à vingt ans au lieu de dix ans, et ce à compter de la majorité de la victime.  
La nomenclature Dintilhac   La nomenclature Dintilhac est une liste de préjudices patrimoniaux et extrapatrimoniaux indemnisables. Elle permet d’évaluer la réparation d’une infraction ayant causé des dommages corporels à une victime. Elle est organisée par postes de préjudices, pour lesquels la jurisprudence est abondante. Elle a été établie par un groupe de travail créé spécialement à cette fin, et présentée au garde des Sceaux le 28 octobre 2005. Cette nomenclature permet de clarifier les règles relatives aux indemnités versées aux victimes directes ou indirectes, et prévient les indemnisations de plusieurs faits appartenant au même poste de préjudices. L’objectif est d’être le plus juste possible en matière d’indemnisation. Cette nomenclature n’a pas de valeur légale, ni de force obligatoire et n’est pas exhaustive, mais est désormais reconnue en pratique, que ce soit par les juges que par les fonds d’indemnisation ou de garantie notamment.   Le 23 mars 2022, la Cour de cassation a modifié la nomenclature Dintilhac en reconnaissant l’autonomie du préjudice d’angoisse de mort imminente ainsi qu’en insérant à la liste des préjudices indemnisables le préjudice d’attente et d’inquiétude. (Cass., ch. Mixte, 23 mars 2022, n°20-17.072 et n°20-15.624)
La victime en état végétatif chronique, à la suite d’un manque de surveillance de la part de l’anesthésiste, a droit à la réparation intégrale de son préjudice.   Cass., crim., 15 janvier 2019, n°17-86.461   Dans un arrêt du 15 janvier 2019, la Cour de cassation a rappelé l’importance de réparer intégralement le préjudice subi par une victime en état végétatif chronique. En l’espèce, une femme a été hospitalisée en clinique pour deux opérations courantes. Alors qu’elle était sous anesthésie générale, l’anesthésiste s’était absentée, et la sonde endotrachéale s’était déconnectée. La patiente s’est donc retrouvée en anoxie cérébrale prolongée, ce qui a eu pour conséquence un état végétatif chronique. L’incapacité permanente partielle a été évaluée par l’expertise médicale à 99%. La victime demandait une indemnisation de 50 000 euros au titre des souffrances endurées. L’anesthésiste contestait ce poste d’indemnisation au motif que la victime était placée sous anesthésie générale puis sous coma artificiel, ce qui impliquait l’absence de douleurs physiques.   La Cour de cassation a retenu la responsabilité de l’anesthésiste pour faute grave car ladite anesthésiste a exposé la victime à « un risque d’une particulière gravité, inhérent à toute anesthésie générale, que tout médecin anesthésiste ne peut ignorer de par sa formation ». Elle a donc contribué à créer la situation ayant permis la réalisation du dommage. Quant à l’indemnisation du préjudice, la Cour de cassation a appliqué la jurisprudence constante en la matière, rendue aussi bien par le Conseil d’Etat que la Cour de cassation, en rappelant que l’état végétatif chronique de la victime d’un accident n’exclut aucun chef d’indemnisation ; son préjudice doit donc être réparé intégralement.   Cet arrêt démontre l’importance de la prise en compte la responsabilité des médecins dans les accidents médicaux. La victime subit la faute du médecin ainsi que l’état végétatif dans lequel elle se trouve, et doit pouvoir être indemnisée de l’intégralité de son préjudice, peu important que la victime soit consciente de son état ou non. La Cour de cassation rappelle donc ici une jurisprudence qui, bien que constante, ne cesse d’être remise en cause.
Le préjudice d’agrément   Le préjudice d’agrément peut être défini comme le préjudice subi par une victime d’un dommage corporel en raison de la perte partielle ou totale de sa capacité à pratiquer des activités de la vie courante (sport, loisirs, …).   La Cour de cassation a eu l’occasion de différencier le préjudice d’agrément et le préjudice de déficit fonctionnel temporaire. Pour caractériser le préjudice d’agrément, il est nécessaire de justifier d’une « impossibilité pour la victime de pratiquer régulièrement une activité spécifique sportive ou de loisirs », et ce de manière permanente. La perte d’une qualité de vie et des joies usuelles de la vie courante relève du poste de préjudice nommé déficit fonctionnel temporaire. (Cass., civ. 2e, 28 mai 2009, n°08-16.829)   Par exemple, est indemnisable sous le poste de préjudice d’agrément le fait pour une victime d’un accident de moto de ne plus pratiquer ce loisir, non pas en raison d’une impossibilité fonctionnelle, mais suite à un impact psychologique l’en empêchant. (Cour de cassation, civile, Chambre civile 2, 5 juillet 2018, 16-21.776)   La nomenclature Dintilhac n’envisage que le préjudice d’agrément permanent. Selon la jurisprudence, le préjudice d’agrément temporaire est inclus dans le déficit fonctionnel temporaire. (Cass., civ 2e, 5 mars 2015, n°14-10.758)    
Cass., civ 2e, 16 septembre 2021, n°19-26.014 Dans un arrêt du 16 septembre 2021, la Cour de cassation a pu se prononcer sur l’importance du lien de causalité entre l’apparition de symptômes liés à un syndrome du défilé thoraco-cervico-brachial et un accident de la circulation, aux fins d’indemnisation du préjudice de la victime.   En l’espèce, une femme a été victime d’un accident de la circulation. A la suite de cet accident, la victime s’est vue diagnostiquer un syndrome thoraco-cervico-brachial nécessitant une intervention chirurgicale. Une expertise judiciaire avait écarté le lien de causalité entre l’accident et la décompensation du syndrome, mais n’expliquait pas les raisons de l’apparition du syndrome après l’accident.   La Cour de cassation a jugé que, lorsque les symptômes d’un syndrome thoraco-cervico-brachial, jusqu’alors asymptomatique, ou tout du moins non douloureux pendant trente-six ans, apparaissent plusieurs mois après un accident de la circulation, ledit syndrome ne peut être que la conséquence directe de l’accident puisque ces symptômes ont été révélés par le fait dommageable. Cela donne ainsi lieu à une réparation intégrale du préjudice subi par la victime.
Evaluation du préjudice économique d’un enfant résultant du décès d’un de ses parents Cass., civ. 2, 19 janvier 2023, n°21-12.264 Dans un arrêt du 19 janvier 2023, la Cour de cassation a eu l’occasion de préciser les modalités d’évaluation du préjudice subi par un enfant suite au décès d’un de ses parents. En effet, la Cour de cassation a appliqué le principe de réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime, et la nomenclature Dintilhac selon laquelle, en cas de décès de la victime directe, le préjudice économique est évalué en fonction des revenus annuels des parents avant le décès, en tenant compte de l’autoconsommation de chacun et des charges fixes de leurs foyers respectifs, et de la part des revenus du parent survivant pouvant être consacrée à l’enfant. Il était question ici d’une mère de famille, divorcée du père de ses enfants, ayant été victime d’un assassinat. Un de ses enfants a saisi une commission d’indemnisation des victimes d’infractions pour obtenir indemnisation de son préjudice économique lié à la perte du revenu que lui procurait sa mère. Or, le fonds saisi contestait l’évaluation du préjudice économique de l’enfant ayant été indemnisé. En effet, la CIVI du tribunal de grande instance de Grasse avait alloué à l’enfant la somme de 21.083,46 euros en réparation du préjudice économique lié au décès de sa mère. Or, les revenus perçus par l’enfant provenaient de l’obligation alimentaire du père en vertu de l’obligation d’entretien et d’éducation.
Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur le casier judiciaire sans oser le demander Le casier judiciaire va bien au delà de la réponse à la question « Avez-vous un casier ? » Plusieurs réponses sont en effet possibles à cette question pourtant simple. En bref Tout d’abord, il est important de préciser qu’il  existe non pas un, mais trois bulletins composant le casier judiciaire. Chacun comporte des mentions qui lui sont propres. Le bulletin n°1 est le plus complet, son accès est donc limité aux autorités judiciaires. Le bulletin n°2 comporte la majorité des mentions qui concerne le justiciable, ainsi la majorité des établissements publics y ont accès. Le bulletin n°3 ne concerne que les condamnations les plus graves, il comporte, normalement, très peu de mentions. C’est pour cela que le bulletin n°3 est le seul qui puisse être demandé lors d’un entretien d’embauche par exemple. Pour aller plus loin Toute la complexité du casier judiciaire réside dans sa division en trois bulletins : les mentions, les conditions d’accès, les délais et les méthodes d’effacement ne sont pas toujours les mêmes.   LE BULLETIN N°1 DU CASIER JUDICIAIRE   Quelles en sont les mentions ? D’après l’article 769 du Code de procédure pénale, le bulletin n°1 du casier judiciaire est, celui des trois, le plus complet. Il contient toutes les condamnations prononcées par la justice pénale notamment : Les condamnations prononcées par le Tribunal de police Les condamnations assorties du bénéfice du sursis, avec ou sans mise à l’épreuve Certaines décisions administratives et disciplinaires qui engendrent des incapacités Les décisions qui entraînent une déchéance de l’autorité parentale Les arrêtés d’expulsions (pour les étrangers) Les compositions pénales Les peines ou dispenses de peines prononcées après ajournement du prononcé de la peine Les grâces, réductions de peine Les décisions de libération conditionnelle et de révocation La suspension de peine La dispense de peine Les décisions qui ordonnent ou suspendent l’exécution d’une première condamnation Les peines prononcées à l’étranger La surveillance judiciaire et de réincarcération La surveillance de sûreté, rétention de sûreté La réhabilitation   Comment les mentions s’effacent-elles ? Les condamnations bénéficiant de l’amnistie ou d’une réhabilitation judiciaire avec retrait du casier judiciaire s’effacent immédiatement. D’après l’article 769 du Code de procédure pénale, lorsqu’il n’y pas eu de nouvelles condamnations, il faut 3 ans pour l’effacement des mentions suivantes : Les condamnations prononcées par le Tribunal de police Les dispenses de peine Les sanctions ou mesures éducatives prononcées contre les mineurs Les compositions pénales   Après 5 ans, les mentions effacées sont : Les décisions relatives à une liquidation judiciaire ou à une faillite personnelle Les condamnations à une interdiction de gérer de moins de 5 ans Les interdictions de gérer de plus de 5 ans s’effacent après la fin de la peine d’interdiction. À savoir : les acquittements et les relaxes ne figurent pas dans le casier judiciaire. Qui a accès au bulletin n°1 ? Puisque le bulletin n°1 est le plus complet, l’article 774 du Code de procédure pénaleprévoit qu’il ne peut être délivré qu’aux autorités judiciaires. Exceptionnellement, il peut être adressé aux établissements pénitentiaires afin de compléter le dossier de la personne incarcérée pour une meilleure prise en charge.   LE BULLETIN N°2 DU CASIER JUDICIAIRE   Quelles en sont les mentions ? L’article 775 du Code de procédure pénale prévoit que le bulletin n°2 mentionne la plupart des condamnations sauf : Les décisions prononcées lors de la minorité Les condamnations expressément exclue du bulletin n°2 Les condamnations prononcées par le Tribunal de police Les condamnations assorties du bénéfice de sursis, avec ou sans mise à l’épreuve lorsqu’elles sont considérées comme non avenues Le suivi socio-judiciaire ou la peine d’interdiction d’exercer une activité professionnelle ou bénévole impliquant un contact habituel avec des mineurs y figure pendant la durée de la mesure Les condamnations ayant fait l’objet d’une réhabilitation de plein droit ou judiciaire La déchéance d’autorité parentale Les arrêtés d’expulsion abrogés ou rapportés Les condamnations prononcées sans sursis pendant la durée de la mesure Les déclarations de culpabilité assorties d’une dispense de peine ou d’un ajournement du prononcé de celle ci Les condamnations d’un mineur prononcées par des autorités étrangères Les compositions pénales   Comment les effacer? Toujours d’après l’article 775 du Code de procédure pénale, certaines condamnations comportent un délai d’effacement. Les condamnations à une peine de jours-amende s’effacent après un délai de 3 ans. Il faut 5 ans pour l’effacement des mentions suivantes: Les décisions de liquidation judiciaire ou de faillite personnelle Les condamnations à une interdiction de gérer Les condamnations à un stage de citoyenneté Les condamnations à des travaux d’intérêts généraux Les condamnations à une confiscation du véhicules ou d’armes Les condamnations de moins de 5 ans à une suspension ou une interdiction de permis Les condamnations de moins de 5 ans à une interdiction de gérer une entreprise ou de payer par chèque Le suivi socio-judiciaire Les condamnations prononcées sans sursis   Certaines condamnations de plus de 5 ans s’effacent après la fin de la mesure : Les suspensions ou une interdictions de permis Les interdictions de gérer une entreprise ou de payer par chèques   Cependant, les condamnations prononcées par une juridiction étrangère à l’encontre d’un ressortissant français s’efface après : 3 ans pour les sanctions financières 10 ans pour les condamnations à une peine d’emprisonnement d’une durée supérieur d’un an 40 ans pour les condamnations à une peine d’emprisonnement d’une durée supérieure à 10 ans 5 ans pour tout autre type de peine   Lors du prononcé d’une condamnation, le tribunal peut exclure sa mention dans le bulletin n°2 ou une requête ultérieure peut être formée pour l’exclure. Depuis la loi dite Perben II du 9 mars 2004, les condamnations pour des infractions sexuelles ou violentes ne peuvent pas être effacé du bulletin à l’exception de l’exhibition sexuelle. Selon l’article 775-1 du Code de procédure pénale, les mentions qui ne peuvent pas faire l’objet d’un effacement sont les condamnations de : Meurtre ou assassinat sur un mineur ou commis en état de récidive Crimes de tortures ou d’actes de barbarie Crimes de violences sur un mineur de quinze ans ayant entraîné une mutilation ou une infirmité permanente Crimes de viol Délits d’agressions sexuelles Délits et crimes de traite des êtres humains à l’égard d’un mineur Délit et crime de proxénétisme à l’égard d’un mineur Délit de corruption de mineur Délit de proposition sexuelle faite par un majeur à un mineur de quinze ans ou à une personne se présentant comme telle en utilisant un moyen de communication électronique Délits relatifs à des images pédopornographiques Délits de fabrication, de transport, de diffusion ou de commerce de message violent ou pornographique susceptible d’être vu par un mineur Délit d’incitation d’un mineur à se soumettre à une mutilation sexuelle ou à commettre cette mutilation Délits d’atteintes sexuelles   Pour les crimes et délits précités, la mention est effacée au bout de vingt ans après une libération définitive ou conditionnelle s’il n’y a pas eu d’autres condamnations depuis cette libération. Qui y a accès ? D’après l’article 776 du Code de procédure pénale, les autorités qui y ont accès sont les suivants : Les préfets et les administrations publiques de l’Etat Les autorités militaires Les administrations et personnes morales dont la liste est déterminée par le décret en Conseil d’Etat Aux présidents des tribunaux de commerce pour être joint aux procédures de faillite et de règlement judiciaire Aux présidents de conseils départementaux saisis d’une demande d’agrément en vue d’adoption Aux autorités compétentes désignées par arrêté du ministre de la justice Aux autorités compétentes pour recevoir les déclarations de candidatures à une élection   Aux fins d’aider aux recrutements, le bulletin n°2 peut être transmis (s’il est vierge) : Aux établissements qui exercent une activité avec des mineurs Aux établissement ou services mettant en œuvre certaines mesures éducatives ordonnées par l’autorité judiciaire Certains lieux de vie et d’accueil concernant des mineurs Aux établissements ou services d’enseignement et d’éducation spéciale qui assurent une éducation adaptée aux mineurs ou jeunes adultes handicapés Aux centres d’action médico-sociale précoce   Comment demander le bulletin n°1 et n°2 ? La demande du bulletin n°1 et n°2 doit être faite au service du casier judiciaire national automatisé par lettre, télétransmission ou support magnétique avec l’identité de la personne concernée par le bulletin. Il faut préciser la qualité de l’autorité requérante ainsi que le motif de la demande. Quelles sont les conséquences d’avoir des mentions inscrites sur le bulletin n°2 ? La présence de mentions sur le bulletin n°2 peut avoir de lourdes conséquences sur l’employabilité du justiciable. Pour un certain nombre d’organisme, il ne doit pas y avoir de mentions sur ce bulletin. Par exemple, afin d’exercer les métiers nécessitant un agrément préfectoral, le bulletin n°2 doit obligatoirement être vierge. C’est le cas notamment des activités d’aide à la personne, des agents de sécurité ou des chauffeurs de taxi.   LE BULLETIN N°3 DU CASIER JUDICIAIRE   Quelles en sont les mentions ? Selon l’article 777 du Code de procédure pénale, le bulletin n°3 contient le relevé des condamnations suivantes prononcées par une juridiction nationale pour crime ou délit : Condamnations à des peines privatives de liberté d’une durée supérieure à 2 ans qui ne sont assorties d’aucun sursis ou qui doivent être exécutées en totalité par l’effet de révocation du sursis Condamnations à des peines privatives de liberté d’une durée inférieure ou égale à 2 ans si la juridiction a ordonné la mention au bulletin n°3. Condamnations à des interdictions, déchéances ou incapacités prononcées par une juridiction nationale sans sursis pendant la durée de celles ci Décisions d’un suivi socio-judiciaire ou d’interdiction d’exercer une activité professionnelle ou bénévole impliquant un contact habituant avec des mineurs pendant la durée de la mesure   Comment les supprimer? L’article 775-1 du Code de procédure pénaleprévoit que la condamnation peut préciser l’absence de mention dans le casier judiciaire. Autrement, une requête ultérieure pourra être déposée afin de supprimer la mention préjudiciable. Par ailleurs, les mentions qui s’effacent du casier judiciaire sont : Les condamnations bénéficiant de l’amnistie Les condamnations bénéficiant d’une réhabilitation judiciaire avec retrait du casier judiciaire   Qui y a accès? La personne concernée peut le demander. L’autorité centrale d’un Etat membre de l’Union européenne saisie par la personne concernée peut également y avoir accès. Comment demander le bulletin n°3 ? La demande doit être faite par la personne concernée ou son représentant légal s’il s’agit d’un mineur ou d’un majeur sous tutelle. Qu’en est-il des condamnations prononcées lors de la minorité ? L’article 770 du Code de procédure pénaleprévoit qu’une personne condamnée lors de sa minorité peut faire l’objet d’un effacement de son casier judiciaire, soit d’office, soit sur requête du parquet ou de l’intéressé selon les formes prévues à l’article 778 du Code de procédure pénale. Ainsi, 3 ans après la décision définitive ou sur requête de l’intéressé, le tribunal pour enfants peut procéder à la suppression du casier judiciaire. Quand est ce que le casier judiciaire est-il mis à jour ? Par qui ? C’est le service du Casier Judiciaire national (CJN) qui est chargé de la gestion des casiers judiciaires en France. En effet, localisé au 107 rue du Landreau, 44317 Nantes Cedex 3, il est lié à la Direction des affaires criminelles et des grâces. Ainsi, le délai d’envoi d’une condamnation au service du le casier judiciaire est, en moyenne, de quinze jours à compter de la notification de la décision. Le casier judiciaire est mis à jour tous les ans.   Pour récapituler La présence de mentions sur les bulletins du casier judiciaire peut porter préjudice à la personne concernée. En effet, beaucoup d’individus possèdent des mentions sur leur casier pour des condamnations qui ont eu lieu lorsqu’ils étaient à peine sortis de la majorité. Ces mentions peuvent handicaper la personne concernée afin de rentrer dans la vie active. Dans ce cas, il est conseillé de former une requête pour faire effacer  les mentions qui y figurent.  
LES DIFFERENTES CATEGORIES DE REHABILITATION ET LEURS CONSEQUENCES SUR LE CASIER JUDICIAIRE   Le casier judiciaire est un fichier automatisé tenu sous l’autorité du ministre de la justice qui contient l’ensemble des condamnations d’un individu ainsi que certaines décisions judiciaires et administratives le concernant. Les dispositions relatives au casier judiciaire sont prévues aux articles 768 à 781 du Code de procédure pénale. Le casier judiciaire comporte 3 bulletins. Aux termes de l’article 774 du Code de procédure pénale, le bulletin n°1 est relatif au relevé intégral des fiches du casier judiciaire. Celui-ci ne peut être délivré qu’aux autorités judiciaires. Le bulletin n°2 est plus restreint. L’article 775 du Code de procédure pénale prévoit que sont notamment exclues de ce bulletin les condamnations dont la mention au bulletin n° 2 a été expressément exclue, les condamnations avec sursis considérées comme non avenue ou encore les condamnations ayant fait l’objet d’une réhabilitation de plein droit ou judiciaire. Ce bulletin peut être délivré uniquement aux personnes physiques ou morales limitativement énumérées à l’article 776 du Code de procédure pénale. On peut notamment citer les administrations publiques de l’Etat, certaines autorités ainsi que certains employeurs. Enfin, en ce qui concerne le bulletin n°3, l’article 777 du Code de procédure pénale dispose qu’il recense uniquement les crimes et les délits les plus graves : Les condamnations à des peines privatives de liberté d’une durée supérieure à deux ans qui ne sont assorties d’aucun sursis ou qui doivent être exécutées en totalité par l’effet de révocation du sursis Les condamnations à des peines privatives de liberté de la nature de celles visées ci-dessus et d’une durée inférieure ou égale à deux ans, si la juridiction en a ordonné la mention au bulletin n° 3 Les condamnations à des interdictions, déchéances ou incapacités prononcées par une juridiction nationale sans sursis, en application des articles 131-6 à 131-11 du code pénal, pendant la durée des interdictions, déchéances ou incapacités Les décisions prononçant le suivi socio-judiciaire prévu par l’article 131-36-1du code pénal ou la peine d’interdiction d’exercer une activité professionnelle ou bénévole impliquant un contact habituel avec des mineurs, pendant la durée de la mesure Les condamnations prononcées par les juridictions étrangères à des peines privatives de liberté d’une durée supérieure à deux ans qui ne sont assorties d’aucun sursis   Ce bulletin ne peut être délivré qu’à la personne qui le concerne et ne doit en aucun cas être divulgué à des tiers sauf s’il s’agit de l’autorité centrale d’un Etat membre de l’Union européenne, saisie par la personne concernée.   Qu’est-ce qu’une condamnation non avenue ? Une condamnation est considérée comme « non avenue » lorsque celle-ci ne peut plus être exécutée. Elle concerne les condamnations avec sursis et les peines prescrites. La condamnation avec sursis : Aux termes de l’article 132-29 du Code pénal, la juridiction qui prononce une peine peut ordonner qu’il sera sursis à son exécution. Ainsi, en cas de crime ou de délit, le condamné devra exécuter sa peine uniquement s’il est condamné à un crime ou un délit de droit commun dans un délai de 5 ans à compter de la première condamnation. En ce qui concerne les contraventions, le condamné sera dans l’obligation d’exécuter sa peine uniquement s’il a commis, dans un délai de 2 ans, un crime ou un délit de droit commun ou une contravention de la 5ème classe. La condamnation est réputée non avenue si le condamné n’a commis aucune infraction pendant ce délai. Sur le casier judiciaire, il sera inscrit la mention « condamnation réputée non avenue » sur le bulletin n°1. En revanche, aucune inscription ne figurera dès lors sur le bulletin n°2.   La prescription de la peine En principe, selon les articles 133-2 et suivants du Code pénal, les peines prononcées pour un crime se prescrivent par 20 années révolues à compter de la date à laquelle la décision de condamnation est devenue définitive. Elles se prescrivent par 6 ans en matière de délit et par 3 ans en matière de contravention. Une fois ce délai écoulé, si la peine n’a pas été exécutée, elle ne pourra plus être exécutée. En revanche, étant donné que la prescription n’efface pas la peine, celle-ci sera toujours inscrite dans le casier judiciaire de l’individu.   Comment réhabiliter une condamnation ? Avant toute chose, il convient de préciser que selon l’article 133-12 du Code pénal « Toute personne frappée d’une peine criminelle, correctionnelle ou contraventionnelle peut bénéficier, soit d’une réhabilitation de plein droit dans les conditions prévues à la présente section, soit d’une réhabilitation judiciaire accordée dans les conditions prévues par le code de procédure pénale ».   La réhabilitation de plein droit En ce qui concerne la réhabilitation de plein droit, celle-ci entraîne l’effacement de la condamnation sur le casier judiciaire de l’individu si celui-ci n’a été condamné à aucune peine criminelle ou correctionnelle dans les délais prévus par le législateur :   Pour la condamnation à l’amende ou à la peine de jours-amende : 3 ans à compter du jour du paiement de l’amende ou du montant global des jours-amende, de l’expiration de la contrainte judiciaire ou du délai de l’incarcération prévue par l’article 131-25ou de la prescription accomplie Pour la condamnation unique soit à un emprisonnement n’excédant pas 1 an, soit à une peine autre que la réclusion criminelle, la détention criminelle, l’emprisonnement, l’amende ou le jour-amende : 5 ans à compter soit de l’exécution de la peine, soit de la prescription accomplie Pour la condamnation unique à un emprisonnement n’excédant pas 10 ans ou pour les condamnations multiples à l’emprisonnement dont l’ensemble ne dépasse pas 5 ans : 10 ans à compter soit de l’expiration de la peine subie, soit de la prescription accomplie   Les délais prévus au présent article sont doublés lorsque la personne a été condamnée pour des faits commis en état de récidive légale. Le législateur a également prévu que pour les condamnations assorties d’un sursis (simple, probatoire ou avec l’obligation d’accomplir un travail d’intérêt général), les délais courent à compter de la date à laquelle la condamnation est devenu non avenue.   La réhabilitation judiciaire   Quelles sont les conditions pour obtenir une réhabilitation judiciaire ? La réhabilitation judiciaire peut être accordée par la chambre de l’instruction si les conditions légales sont réunies. En principe, cette demande ne peut être formée qu’après l’expiration d’un délai qui varie en fonction de l’infraction en cause : 5 ans pour crimes 3 ans pour les délits 1 an pour les contraventions Ces délais commencent à courir au jour où la condamnation est devenue irrévocable s’il s’agit d’une amende, au jour de la libération définitive s’il s’agit d’une peine privative de liberté ou au jour de leur libération conditionnelle conformément à l’article 733 du Code de procédure pénale lorsqu’elle celle-ci n’a pas été suivie de révocation. En revanche, le législateur a prévu des délais dérogatoires dans certaines situations. La demande doit être formée après l’expiration d’un délai de 10 ans à compter de leur libération ou depuis la prescription : Pour les condamnés en état de récidive légale Pour ceux qui ont encouru une nouvelle condamnation après avoir obtenu la réhabilitation Pour ceux qui, condamnés contradictoirement ou par contumace à une peine criminelle, ont prescrit contre l’exécution de la peine   La demande doit être formée après l’expiration d’un délai de 6 ans depuis leur libération : Pour les récidivistes qui n’ont subi aucune peine criminelle Pour les réhabilités qui n’ont encouru qu’une condamnation à une peine correctionnelle   La demande doit être formée après l’expiration d’un délai de 6 années depuis la prescription : Pour les condamnés contradictoirement ou par défaut à une peine correctionnelle qui ont prescrit contre l’exécution de la peine   En plus de respecter les délais légaux, l’article 788 du Code de procédure pénale précise que le condamné doit, sauf le cas de prescription, justifier du paiement de l’amende et des dommages-intérêts ou de la remise qui lui en est faite. A défaut de cette justification, il doit établir qu’il a subi le temps de contrainte judiciaire déterminé par la loi ou que le Trésor a renoncé à ce moyen d’exécution.   Quelle est la procédure pour obtenir une réhabilitation de sa condamnation ? Le condamné doit adresser lui-même ou par le biais de son avocat la demande de réhabilitation au procureur de la République de sa résidence actuelle ou, s’il demeure à l’étranger, au procureur de la République de sa dernière résidence en France ou, à défaut, à celui du lieu de condamnation. Cette demande doit comporter les mentions suivantes : La date de la condamnation Les lieux où le condamné a résidé depuis sa libération Ensuite, le procureur de la République se fait délivrer différentes pièces notamment le bulletin n°1 du condamné et il transmet l’ensemble de ces pièces au procureur général. Ce dernier saisit la cour qui statut dans un délai de 2 mois sur les conclusions du procureur général.   Qu’elles sont les conséquences d’une réhabilitation sur le casier judiciaire ? L’article 798 du Code de procédure pénale précise qu’en cas de réhabilitation « les bulletins n° 2 et n° 3 du casier judiciaire ne doivent pas mentionner la condamnation. L’arrêt qui prononce la réhabilitation peut toutefois ordonner que la condamnation soit retirée du casier judiciaire et ne soit pas non plus mentionnée au bulletin n° 1. ». En revanche, l’article 133-16 in fine du Code pénal précise que la réhabilitation n’interdit pas la prise en compte de la condamnation, par les seules autorités judiciaires, en cas de nouvelles poursuites, pour l’application des règles sur la récidive légale.   En cas de rejet de la demande de réhabilitation, l’article 797 dispose que « une nouvelle demande ne peut être formée avant l’expiration d’un délai de deux années, à moins que le rejet de la première ait été motivé par l’insuffisance des délais d’épreuve. En ce cas, la demande peut être renouvelée dès l’expiration de ces délais ».
Un résumé des évolutions de la jurisprudence en matière de droit pénal de la circulation routière La conduite du véhicule La conduite malgré une suspension administrative : La personne conduisant après une suspension administrative commet un délit (article L.224-16 du Code de la route), mais les éléments matériel et intentionnel de ce délit sont réunis uniquement lorsqu’elle a reçu la notification de la suspension de son permis (Cass. Crim. 21 novembre 2001, n°01-80.410).La lettre de notification, qui doit être envoyée en recommandée avec accusé de réception, doit seulement arriver au domicile de la personne concernée pour que la notification soit valable, sans qu’il soit nécessaire que la personne concernée la retire(Cass. Crim. 4 juin 2013, n°12-86.877). Cette disposition a notamment permis qu’un conducteur de poids lourds conduisant malgré une suspension administrative de son permis puisse être relaxé, car l’absence de notification prévaut (CA Angers 29 septembre 2020, n°19/00180). En l’espèce, le prévenu a reconnu l’infraction devant la police mais l’a nié en première instance et en appel. Il a été relaxé malgré sa possession de deux exemplaires de permis falsifiés.   Le régime de la flagrance Dans un arrêt de 2021, la cour d’appel de Chambéry précise le contexte de la flagrance appliquée aux infractions au Code de la route (CA Chambéry 24 février 2021, n°19/00692). En l’espèce, un conducteur n’ayant pas mis son clignotant a été contrôlé, et est poursuivi par la suite pour récidive de conduite après usage de stupéfiants, et pour défaut de clignotant. Les policiers vérifient le fichier national des permis de conduire deux fois : une première fois, il est fait établi que son permis est « état de demande », et une deuxième fois après avoir testé positivement le conducteur au cannabis, cette deuxième recherche révélant que le conducteur avait bien un permis B. Le conducteur affirme que si les policiers avaient mieux effectué leur recherche, ils auraient trouvé qu’il possédait bien un permis, et qu’il n’y avait en conséquence aucune infraction, annulant donc le contexte de la flagrance. Cependant, la Cour de Chambéry considère qu’étant donné que le prévenu conduisait sans mettre son clignotant, qu’il n’a pas pu montrer son permis aux policiers, et que la première recherche faisait apparaître la mention « état de demande » sur son dossier, la flagrance était justifiée. Le prévenu aurait donc essayé de faire annuler les actes réalisés en enquête de flagrance en arguant que l’infraction n’existait pas, alors que les enquêteurs en flagrance se fondent sur la plausibilité du crime ou délit, et non pas sur l’existence de l’infraction (Cass. Crim. 3 septembre 2002, n°01-86.950).   La vitesse du véhicule Un conducteur est tenu responsable de toute infraction commise dans son véhicule, à part s’il prouve ne pas être l’auteur de l’infraction (articles L.121-1 et L.121-3 Code de la route). La jurisprudence antérieure à 2020 nous donne des exemples de cas d’exonération : un passeport prouvant un séjour à l’étranger (CA Douai, 10 octobre 2002, n°02.01424), une différence de genre entre le prévenu et le conducteur (Cass. Crim. 1er avril 2008, n°07-86.275 ; CA Toulouse 7 avril 2003, n°02/011022 ; Cass. Crim. 6 mai 2014, n°13-83.588). Cependant, la cour d’appel d’Angers a pu considérer que le conducteur d’un véhicule qui est utilisé par plusieurs personnes peut être exonéré de sa responsabilité d’une infraction si l’auteur des faits n’est pas retrouvé (CA Angers, 6 octobre 2020, n°19/00748). En l’espèce, un conducteur utilisait un véhicule que son employeur louait auprès d’une société qui en était propriétaire. Il n’était donc pas le seul usager, et comme l’auteur des faits est resté inconnu, le prévenu n’a pas été tenu de payer les amendes. Sa responsabilité pénale a été écartée, et l’obligation pécuniaire ne pouvait être retenue.     La lucidité du conducteur L’état d’imprégnation alcoolique Un contrôle d’alcoolémie se fait par le biais d’un dépistage positif, ou du refus de s’y soumettre, avant de procéder aux opérations de vérification (CA Rennes, 2 juin 2020, n°19/02407). Ce dépistage préalable n’importe pas dans le procès-verbal, qui va se concentrer sur l’éthylomètre et la prise de sang (Cass. Crim. 28 janvier 2014, n°13-81.330).En l’espèce, le prévenu était poursuivi pour blessures involontaires aggravées par l’état alcoolique, exposition d’autrui à un risque et circulation éloignée du bord droit de la chaussée, ayant percuté deux véhicules après s’être déporté sur la gauche de la chaussée. Il n’y a pas eu de dépistage préalable, mais les juges estiment que les opérations de vérification du taux d’alcoolémie après les faits, effectuées grâce à un éthylomètre, sont conformes. La preuve de l’alcoolémie ne peut pas être fondée que sur les opérations de vérification (CA Chambéry, 27 janvier 2021, n°10/00511). L’absence de mentions relatives à l’éthylotest ne saurait faire grief au prévenu, tant que l’éthylomètre, avec ses références et sa marque, est bien mentionné.   Usage de produits stupéfiants Lorsque la vérification de prise de stupéfiants est faite par prise de sang, il faut qu’il y ait deux tubes d’analyse, dont un tube de contrôle (CA Angers, 2 juin 2020, n°18/00390). Il existe un délai de 5 jours pour que le prévenu demande l’analyse de contrôle (selon un décret du 24 aout 2016), à peine de ne plus pouvoir contester la régularité des opérations de contrôle (Cass. Crim. 19 décembre 1991, n°88-85.149). En l’espèce, le prévenu a été contrôlé positif au cannabis par prise de sang. Le tribunal correctionnel d’Angers ordonne l’expertise de contrôle, mais l’analyse de contrôle, concluant à la même positivité, n’est pas transmise à temps. La cour d’appel a ordonné l’examen de contrôle également, désignant toujours le même expert (le fait que le deuxième expert dans une analyse appartienne au même laboratoire que le premier ne fait pas forcément douter de sa neutralité, selon un arrêt Cass. Crim. 20 mars 2018, n°17-81.238), mais le flacon de contrôle avait été détruit. L’expert produit le rapport quand même, et la Cour d’appel relaxe le prévenu, car la situation pouvait créer un doute quand à l’infraction, et car l’absence de notification dans le délai n’importe pas si la cour a ordonné le second examen.   La sécurité du véhicule et des personnes Angles morts Le décret D. n°2020-1396, 17 novembre 2020, décret d’application des dispositions crées par la loi du 24 décembre 2019 sur les mobilités, créé l’article L.313-1 Code de la route sur les véhicules à équiper de signalisation sur leurs angles morts, complété par l’article R.313-32-1 du Code de la route, prévoyant quels véhicules sont concernés par la sanction pécuniaire applicable : tous les véhicules de plus de 3,5 tonnes sont concernés, sauf les véhicules agricoles et forestiers, les engins de service hivernal ou les véhicules d’intervention des services gestionnaires des autoroutes. Des autocollants de différentes couleurs selon la visibilité de la zone par le conducteur ont été créés par un arrêté du 5 janvier 2021. Une amende maximum de 750 euros est prévue en sanction de toute contravention.   La circulation et le stationnement du véhicule Usage des routes et autoroutes L’article L.412-1 du Code de la route prévoit que faire obstacle à la circulation est sanctionné de 2 ans d’emprisonnement et 4 500 euros d’amende, ainsi que d’une suspension de permis pendant trois ans maximum, et la réduction du nombre de points sur le permis de moins que la moitié du nombre maximal. Cet article s’applique surtout, en pratique, aux manifestations sur la voie publique, avec de nombreux exemples jurisprudentiels : des manifestants avertis que leur manifestation avait un caractère illicite et ayant continué commettent un délit (Cass. Crim. 8 mars 2005, n°04-83.979). Une obstruction complète d’une gare de péage va au-delà d’une simple gêne causée par une manifestation (Crim. 15 juin 2010, n°09-87.191). De plus, le délit prévu par cet article est conforme à l’article 11 CEDH, car il vise à la protection de l’ordre et des droits d’autrui (CEDH 5 mars 2009, n°31684/05 Barraco c/ France). Une obstruction de la voie publique en mettant des poubelles au milieu de la route constitue une infraction de ce type (CA Aix-en-Provence, 6 juillet 2020, n°20/0251). En l’espèce, des policiers appelés pour constater une infraction se voient bloquer le passage par un homme qui bouge des poubelles et des conteneurs de poubelles en pleine rue. Interpellé, il explique qu’il réagit à la grève des éboueurs. Il est condamné en première instance, reconnaît l’entrave en appel mais continue de nier qu’elle constituait une infraction, alors que des vidéos de surveillance le montrent en train de bouger les poubelles de manière délibérée.   Caractérisation des infractions et application des sanctions Preuve et constatation des infractions Selon l’article 537 CPP, la nullité d’un procès-verbal est établie seulement par preuve contraire. La jurisprudence a estimé qu’un PV non signé par l’intéressé n’encourt pas une nullité automatique (Crim. 9 février 2000, n°99-80.371), même dans le cas où un agent intercepteur avait dressé un PV après un excès de vitesse mais l’agent en poste fixe n’avait pas signé (Crim. 8 juin 2006, n°06-81.293). La Cour de cassation rappelle que l’absence de signature n’invalide pas forcément le PV (Cass. Crim. 2 septembre 2020, n°19-84.665). En l’espèce, un conducteur en état alcoolique a encouru 350 euros d’amende et 1 mois de suspension de son permis. Le tribunal de police l’a relaxé en raison de l’absence de signature de sa part sur le PV, et cela remettrait en cause sa déclaration du fait qu’il n’avait pas consommé d’alcool ou de stupéfiants dans les 30 minutes avant le contrôle. Pourtant, la Cour de cassation censure cette décision, estimant qu’il aurait choisi de ne pas signer le PV.   Sanctions L’article L.121-6 du Code de la route, créé par la loi du 18 novembre 2016, dispose que pour les infractions prévues à l’article L.130-9 du même Code, le représentant légal de la personne morale qui possède le certificat d’immatriculation du véhicule a un délai de 45 jours (à compter de l’envoi ou de la remise de la contravention) pour indiquer qui conduisait le véhicule lors de la contravention. Sinon, il encoure une amende de 750 euros. La contravention poursuivie n’est pas conditionnée à la validité de la procédure antérieure (Crim. 24 mars 2020, n°19-86.463 : la contravention d’origine est distincte de la contravention de l’article L.121-6 du Code de la route), le juge n’ayant donc pas besoin de se pencher sur la validité de la première procédure, car de plus, si l’avis de contravention initiale n’est pas dans le dossier, le juge peut demander un supplément d’information (Cass. Crim. 17 novembre 2020, n°20-81.244). Une personne morale est toujours tenue de son obligation de connaître l’identité du conducteur, même si cela est impossible car il y a deux personnes à bord : dans l’exemple d’une société d’ambulances, la présence d’une feuille de route sans indications précisées sur l’identité du conducteur n’exonère pas la personne morale de la responsabilité, car un recensement du conducteur est possible (Cass. Crim. 2 mars 2021, n°20-85.359 ; Cass. Crim. 26 janvier 2021 (deux arrêts), n°29-83.913 et n°20-83.917 ; Cass. Crim. 2 janvier 2021, n°20-83.918 ; Crim. 17 novembre 2020, n°20-81.249). L’article L.121-6 du Code de la Route, qui prévoit une obligation de désignation par la personne morale titulaire du certificat d’immatriculation du conducteur du véhicule lors de l’infraction commise, est jugé conforme à l’article 6 de la CEDH, car proportionné. Les éléments considérés sont l’amélioration de la sécurité routière, le fait que le représentant de la personne morale est obligé de transmettre l’identité du conducteur, mais l’identité elle-même n’est pas incriminante, et le représentant de la personne morale peut être exonéré de la responsabilité (Cass. Crim 15 décembre 2020, n°20-82.503). Le représentant de la personne morale mise en cause n’est pas exonéré si le conducteur n’est pas un préposé de la personne morale (Cass. Crim. 16 mars 2021, n°20-83.911 ; Crim. 17 novembre 2020, n°20-81.241). Si une personne morale en possession du certificat d’immatriculation ou titulaire d’un véhicule l’a loué à une autre personne morale, qui l’a loué au conducteur, la deuxième peut être légalement obligée de donner l’identité du conducteur, au même titre que la première personne morale (Cass. Crim. 1er septembre 2020, n°19-85.466). Une personne morale ayant reçu les avis de contravention et de non-désignation du conducteur peut être relaxée. En l’espèce, un avis de contravention, et un avis de non-désignation du conducteur ont été adressé à une personne morale, alors même qu’elle n’était pas la destinataire et que la conductrice avait déjà payé (Cass. Crim. 4 mai 2021, n°20-83.566). Un prévenu, pour être relaxé de sa responsabilité tenant à l’infraction de l’article L.121-6 commise, doit avoir contesté les mentions contenues dans l’avis de contravention reçu, si celles-ci sont incorrectes (Cass. Crim. 13 avril 2021, n°20-85.796). En l’espèce, la personne morale concernée a reçu un avis de contravention mentionnant seulement la date d’édition, et non pas la date d’envoi. La Cour de cassation a estimé qu’étant donné que le prévenu n’avait pas contesté les mentions contenues dans cet avis, il ne pouvait pas être relaxé de sa responsabilité. De plus, la cour d’appel aurait dû demander un supplément d’information.   Incidence des sanctions L’article L.212-9 du Code du sport interdit l’exercice des fonctions d’éducateur sportif quand la personne concernée a été condamné pour une infraction par le passé (même pour une infraction prévue à l’article L.235-1 et L.235-3 du Code de la route). Une QPC a été transmise au Conseil constitutionnel sur cette question, car cela créé une obligation d’honorabilité, et une incapacité professionnelle définitive (Cons. Const. 7 mai 2021, n°2021-904). Le Conseil a jugé cette disposition conforme à la Constitution, car elle vise à préserver l’éthique du sport. De plus, il n’y a pas d’atteinte à la liberté d’entreprendre car le condamné peut demander la non-inscription de la condamnation.
  LA COUR DE CASSATION A PU JUGER, EN JANVIER 2023, QUE LE PREVENU DOIT EXPRESSEMENT DONNER SON ACCORD AUX POURSUITES OU A LA REQUALIFICATION DE L’INFRACTION BASEES SUR DES FAITS ABSENTS DE LA CITATION DIRECTE Cour de cassation, chambre criminelle, 10 janvier 2023, n°20-85.968   En cas d’absence de poursuite de faits de nature pénale par le Ministère public, la victime a la possibilité de faire citer une personne devant le Tribunal correctionnel par la voie de la citation directe. Cette procédure répond à des conditions de forme, et doit notamment mentionner les faits poursuivis et les textes légaux les réprimant (Article 551 du Code de procédure pénale). Le juge est dès lors tenu par les faits reprochés et peut leur redonner leur qualification exacte. La question s’est posée de savoir si le juge peut opérer cette requalification au regard de faits non compris dans les poursuites. La Cour de cassation a jugé que : « s’il appartient aux juges répressifs de restituer aux faits dont ils sont saisis leur véritable qualification, c’est à la condition de n’y rien ajouter ou de ne pas substituer des faits distincts à ceux de la prévention, sauf acceptation expresse par le prévenu d’être jugé sur des faits et circonstances non compris dans la poursuite ». En l’espèce, le prévenu était cité pour des faits de menaces de mort réitérées en récidive, ces faits étant punis de 3 ans d’emprisonnement et 45.000 euros d’amende (Article 222-17 du Code pénal). Les juges de première instance et de la Cour d’appel prenaient en compte des faits non poursuivis dans la citation, à savoir : « la nature des violences préconisées dans les propos que le prévenu reconnaît avoir tenus, par le nombre et la qualité des personnes visées, les faits énumérés dans la prévention constituent une incitation directe à commettre des actes causant un grave trouble à l’ordre public, par l’intimidation ou la terreur, pour faire taire des personnes avec lesquelles il y a désaccord, précisant que seule importe la volonté d’atteindre le maximum de personnes par le biais des réseaux sociaux et de provoquer des réactions des internautes (…) la demande expresse faite en public, par M. [B], de filmer les actes de violence ainsi préconisés, et de les diffuser sur internet, participe directement à l’objectif d’intimidation et de terreur au sein du public ». Sur le fondement de ces nouveaux faits, ils décidaient de requalifier les faits de menaces de mort réitérées en provocations directes à des actes de terrorisme, aggravées par l’utilisation de communication au public en ligne, punies d’une peine de 7 ans d’emprisonnement et 100.000 euros d’amende (article 421-2-5 du Code pénal). La Cour de cassation jugeait que les faits ainsi listés ne faisaient pas partie de la citation et n’étaient dès lors pas poursuivis. Plus encore, elle déclarait que le prévenu avait accepté la requalification des faits de menace en délit de provocation à commettre un crime ou un délit, mais il n’avait pas accepté la requalification des faits en provocation directe à des actes de terrorisme, aggravées par l’utilisation de communication au public en ligne. Dès lors, les juges ne pouvaient le déclarer coupable pour provocation directe à des actes de terrorisme. L’obligation d’obtenir l’acceptation du prévenu se comprend notamment au regard des peines encourues, doublées dans le cas d’espèce, mais également par la nature de la qualification qui sera inscrite dans le casier judiciaire. La Cour de cassation a dès lors cassé l’arrêt de la Cour d’appel et renvoyait l’affaire pour être de nouveau jugée.  
L’ARTICLE 60 DU CODE DES DOUANES, « PIERRE ANGULAIRE DE L’ACTION DES AGENTS DES DOUANES », A ETE ABROGE PAR LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL LE 22 SEPTEMBRE 2022 (DECISION N°2022-1010 QPC DU 22 SEPTEMBRE 2022) L’article 60 du Code des douanes, promulgué par un décret du gouvernement Queuille I, règlementait les fouilles des véhicules et des personnes. Ce texte prévoyait que : « Pour l’application des dispositions du présent code et en vue de la recherche de la fraude, les agents des douanes peuvent procéder à la visite des marchandises et des moyens de transport et à celle des personnes ».   Cet article avait une importance particulière et permettait aux agents des douanes de procéder à la fouille tant des personnes que des véhicules. Il était considéré comme « la pierre angulaire de l’action des agents des douanes » pour reprendre les termes du journaliste Thomas Saintourens. De même Manuela Dona, secrétaire générale de la CGT-Douanes, a affirmé « l’article 60, c’est la base de notre travail, nous l’utilisation tous les jours ».   Dans une affaire mettant en cause un individu arrêté par les agents des douanes avec 47 000 euros en liquide dissimulés dans son véhicule, la conformité de cette disposition à la Constitution a été remise en cause. En effet, l’avocat du mis en cause, Maître Bangoura a estimé que « ce texte particulièrement lapidaire est attentatoire aux libertés individuelles et totalement détaché des garanties légales de droit commun régissant les contrôles de police ou de gendarmerie ».    Une QPC a été transmise au Conseil constitutionnel. Ce dernier s’est prononcé le 22 septembre 2022. L’article 60 a été déclaré inconstitutionnel entraînant ainsi son abrogation : « en ne précisant pas suffisamment le cadre applicable à la conduite de ces opérations (…) le législateur n’a pas assuré une conciliation équilibrée entre d’une part, la recherche des auteurs d’infraction et, d’autre part, la liberté d’aller et venir et le droit au respect de la vie privée ».    Dans l’objectif de préserver la sécurité juridique, le Conseil constitutionnel a décidé de ne pas abroger immédiatement le texte mais de reporter cette abrogation au 1er septembre 2023. Or, de nombreuses fouilles et saisies dans des affaires en cours, notamment de trafics de stupéfiants, ont été réalisées sur ce fondement. L’inconstitutionnalité de cette disposition a pu être invoquée entraînant ainsi des relaxes mais également des saisies frappées de nullité. A titre d’exemple, un individu ayant dissimulé 53 kilos de cannabis dans son camion a été relaxé. De même, une saisie de 2,3 kilos de cocaïne a été déclarée nulle.   Depuis la décision du Conseil constitutionnel, l’administration des douanes s’est réunie à plusieurs reprises pour accélérer la réécriture de cet article. Cette nouvelle rédaction devra être conforme à la Constitution en assurant un juste équilibre entre d’une part, les droits et libertés que la Constitution garantie et d’autre part la protection de l’ordre public. Le nouvel article devra poser des limites en précisant les circonstances dans lesquelles un tel contrôle peut intervenir, la durée de cette intervention ou encore les lieux où un tel contrôle peut avoir lieu sous peine d’être censuré une nouvelle fois par le Conseil.   Cette décision fragilise toutes les saisies douanières depuis le 22 septembre 2022…   Sur ce sujet, voir l’excellent article de Thomas Saintourens paru dans Le Monde.
LORSQUE LA CHAMBRE DE L’INSTRUCTION ORDONNE LA COMPARUTION PERSONNELLE DES PARTIES, CELLES-CI DOIVENT ETRE ENTENDUES Cass.crim., 29 janvier 2014, n°13-82.785 La chambre de l’instruction, située auprès de la Cour d’appel, est la juridiction d’instruction du second degré. Elle a notamment pour rôle de connaitre des appels formulés dans le cadre de l’instruction judiciaire, ou des questions liées à la détention provisoire. Lors des audiences prévues pour traiter ces questions, les parties peuvent comparaitre elles-mêmes, ou être représentées par leur avocat. La chambre de l’instruction peut également ordonner la comparution personnelle des parties, selon l’alinéa 4 de l’article 199 du Code de procédure pénale. La Cour de cassation est venue préciser ce qu’implique pour la Chambre de l’instruction d’ordonner cette comparution. En effet, selon l’arrêt du 29 janvier 2014, une ordonnance de non-lieu avait été rendue dans le cadre d’une instruction judiciaire pour des faits de violences par personnes dépositaires de l’autorité publique. Un appel avait été interjeté et dans le cadre de l’audience à venir, la chambre de l’instruction avait ordonné la comparution personnelle de la partie civile. Cette dernière comparaissait donc à l’audience. Or, il ressort de l’arrêt de la chambre de l’instruction que la partie civile n’avait pas été entendue. La Cour de cassation a jugé que lorsque la chambre de l’instruction ordonne la comparution personnelle d’une partie, il lui appartient d’entendre cette partie. Constatant que la partie civile n’avait pas été entendue, la Cour de cassation a annulé l’arrêt de la chambre de l’instruction, et renvoyé l’affaire pour être de nouveau tranchée. Cette décision répond à la question de l’intérêt d’obliger une partie à comparaitre à l’audience si elle n’aura jamais l’occasion d’être entendue et de s’expliquer lors de cette audience, et alors qu’elle aurait pu être représentée par son avocat.   Cette solution a été précisée encore par un arrêt du 18 avril 2023 (Cass.crim., 18 avril 2023, n°23-80.661) : La Cour de cassation exige que la comparution personnelle du mis en examen placé en détention provisoire ait lieu en présentiel si celui-ci refuse la visioconférence, y compris lorsque cette comparution personnelle a été ordonnée par la chambre de l’instruction. Le seul obstacle à cette comparution personnelle en présentiel devra être constitué de risques graves de trouble à l’ordre public ou d’évasion. Ainsi, si la chambre de l’instruction ordonne la comparution personnelle du mis en examen mais que celui-ci refuse la visioconférence, la chambre de l’instruction doit l’entendre en présentiel.   Il convient de noter que l’irrégularité de la procédure devant la chambre de l’instruction a pour conséquence l’annulation de l’arrêt litigieux et la mise en place d’une nouvelle audience, mais n’aura pas pour conséquence d’annuler tout ou partie de la procédure d’enquête ou d’instruction.
La loi du 8 avril 2021 permet aux détenus de former un recours en cas de conditions indignes de détention  La loi n° 2021-403 du 8 avril 2021 tendant à garantir le droit au respect de la dignité en détention a créé le nouvel article 803-8 du Code de procédure pénale permettant aux détenus de former un recours en cas de conditions indignes de détention. Ainsi, selon cet article, si un individu détenu dans un établissement pénitentiaire considère que ces conditions de détention sont contraires à la dignité de la personne humaine, il peut former un recours afin qu’il soit mis fin à ces conditions de détention indignes.   Devant quelle autorité le recours doit-il être exercé ? Devant le juge des libertés et de la détention : si la personne détenue est en détention provisoire   Devant le juge de l’application des peines : si la personne est condamnée et incarcérée en exécution d’une peine privative de liberté   Quelle est la procédure ? La personne détenue doit formuler une requête contenant des allégations circonstanciées, personnelles et actuelles de sorte à constituer un commencement de preuve que les conditions de détention ne respectent pas la dignité de la personne. Si la requête remplie ces conditions, le juge déclare la requête recevable. Le cas échéant, il informe par tout moyen le magistrat saisi du dossier de la procédure du dépôt de la requête. Cette décision doit intervenir dans un délai de 10 jours à compter de sa réception. S’il estime la requête recevable, le juge procède ou fait procéder aux vérifications nécessaires et recueille les observations de l’administration pénitentiaire dans un délai compris entre 3 jours ouvrables et 7 jours à compter de la décision. Si le juge estime la requête fondée, il fait connaître à l’administration pénitentiaire, dans un délai de 10 jours à compter de la décision prévue au même deuxième alinéa, les conditions de détention qu’il estime contraires à la dignité de la personne humaine et il fixe un délai compris entre 10 jours et 1 mois pour permettre de mettre fin, par tout moyen, à ces conditions de détention.    Quelle décision le juge peut prendre s’il n’est pas mis fin aux conditions indignes de détention ? A la fin de ce délai, si le juge estime qu’il n’a pas été mis fin aux conditions indignes de détention, il rend, dans un délai de 10 jours, l’une des décisions suivantes : Le transfert de la personne détenue dans un autre établissement pénitentiaire Si la personne est en détention provisoire : il ordonne sa mise en liberté immédiate, le cas échéant sous contrôle judiciaire ou sous assignation à résidence avec surveillance électronique Si la personne est définitivement condamnée : il ordonne la mise en place d’une mesure de semi-liberté, de placement à l’extérieur, de détention à domicile sous surveillance électronique, de libération conditionnelle ou d’une libération sous contrainte, si elle est éligible à une telle mesure
CONSEIL EN CAS D’AUDITIONS OU D’INTERROGATOIRE, PLACEMENT EN GARDE A VUE, AUDITION LIBRE, INTERROGATOIRE DE PREMIERE COMPARUTION OU INTERROGATOIRE AU FOND   Ce petit mémo est l’occasion d’évoquer la mémoire d’un très grand Avocat malheureusement décédé. Il y a peu, Daniel Soulez Larivière nous a quitté le 22 septembre 2022 dernier. Au-delà de l’immense talent qui le caractérisait, il a plus encore été en effet l’un des avocats qui a le plus, et le mieux écrit sur la profession.    Tous les avocats pénalistes ont évidemment la volonté d’essayer de rassurer leurs clients lorsqu’ils sont convoqués dans le cadre d’une garde à vue ou directement devant un juge. Il s’agit en premier lieu de rendre la chose intelligible et moins mystérieuse pour éviter l’angoisse que constitue pour la plupart des citoyens, l’idée d’être confrontés aux forces de police et ce à tort ou à raison.   Lorsque j’ai réfléchi à l’idée de la rédaction d’un mémo, j’en ai été vite découragé en tombant sur ce qui avait déjà été fait et très bien fait.   En effet, il y a déjà fort longtemps notre confrère Daniel Soulez Larivière écrivait (en 2017) ce livre passionnant « Face au juge, ce que tous les honnêtes gens doivent savoir », édition Albin Michel.   Voilà les conseils qu’il édictait déjà :   « En cas de garde à vue, utiliser toutes les possibilités que la loi présente.   Visite médicale, bien sûr ;   Avocats, évidemment ;   Décision de ne rien dire, avant que l’avocat ne soit là ;   Utilisation de la demi-heure réglementaire prévue par la loi avec l’avocat ;   Présence de l’avocat pendant toute la durée des interrogatoires ;   Pas de rendez-vous prit à l’issue de la période de 24 heures, ou même celle de 48 heures en cas de renouvellement de la garde à vue, pour ne pas être dérangé dans son esprit par une possibilité de prolongation de garde à vue ;   Réponse à chaque question. Mais uniquement à la question ;   Pas de relance inutile ;   Déclaration, uniquement centrée sur ce qu’il sait par lui-même et non pas ce qu’il a appris, ce qu’il suppose ou imagine ;   Il ne rapporte aucun ouï-dire, mais se contente de parler de ce qu’il sait ;   Quand il n’est pas sûr de lui, il ne se souvient pas ;   Il ne ment pas. Il ne se sent pas obligé de répondre et n’hésite pas à s’en abstenir ;   Il ne fait pas l’expert. Ce qui est particulièrement difficile pour un ingénieur, par exemple, qui passe sa vie à se voir poser des problèmes et payer pour les résoudre. Mais non, il n’est pas là pour résoudre les problèmes de l’officier de police judiciaire ou du juge d’instruction ;   Il répond aux questions à la manière d’un joueur de tennis en fond de cours qui renvoie toutes les balles lorsqu’elles sont rattrapables mais fait des amortis et ne cherche pas à marquer des points ;   Il relit soigneusement ses déclarations, et n’hésite pas à les faire corriger ».   Tout est dit en ces quelques phrases.   Peut-être pourrait-on ajouter qu’il est également important de ne pas chercher l’assentiment ni de provoquer l’agacement de celui qui pose les questions. On ne doit pas en chercher l’affection, mais on ne le voit pas non plus prendre plaisir à s’en faire un ennemi.   Les forces de l’ordre, comme les magistrats sont évidemment là, pour faire leur travail, bien nécessaire, et tenter de faire la vérité sur le dossier qui leur est confié. Aussi est-il important, comme le souligne Daniel Soulez Larivière, de ne pas s’éloigner du cœur du sujet, et de préférer rester laconique plutôt que de s’étendre en des explications alambiquées et hors sujet.   Pour conclure il faut également toujours se souvenir que si une question est posée plusieurs fois il convient que la réponse soit toujours la même. Cette trivialité pour conclusion est pourtant le piège dans lequel il est le plus difficile de ne pas tomber !
Le seuil du non consentement fixé à 15 ans 15 ans est donc le seuil en dessous duquel une relation sexuelle avec un adulte sera qualifiée de viol selon le code pénal. Ce sujet est compris dans le projet de loi contre les violences sexistes et sexuelles du gouvernement. Si le débat a été aussi passionné que sensible c’est à cause de l’affaire dite de Pontoise dans laquelle le parquet n’avait pas retenu le viol mais qualifié d’atteinte sexuelle la relation sexuelle entre un homme de 28 ans et une fillette de 11 ans. Que dit la loi aujourd’hui ? Aujourd’hui une relation sexuelle non consentie si elle est qualifiée de viol est passible de 20 ans de prisions. Jusqu’ici l’unique seuil fans la loi était l’interdiction pour un majeur d’avoir une relation sexuelle avec un mineur de moins de 15 ans. Il risquait alors une peine de 5 ans de prison. 13,14 ou 15 ans ont été proposés mais c’est le seuil de 15 ans, la tranche la plus haute, qui a été retenu. Comment le seuil de consentement a été fixé Après les consultations citoyennes dans le cadre du Tour de France de l’Egalité et les conclusions du rapport d’experts remis à Matignon, le gouvernement a décidé de retenir l’âge de 15 ans. Les 7 experts qui avaient été mandatés en février par le gouvernement ont également préconisé d’introduire dans la loi deux nouvelles infractions de viol et d’agression sexuelle sur mineur de moins de 15 ans. Les 2 autres volets du projet de loi Les deux autres volets du projet de loi annoncé par le gouvernement comprendront un allongement du délai de prescription des crimes sexuels sur les mineurs. Les victimes pourraient alors déposer plainte jusqu’à 30 ans après leur majorité. Aujourd’hui le droit des victimes s’arrête à 20 ans. Enfin le projet de loi prévoit la verbalisation du harcèlement de rue. Une concertation a été lancée auprès des acteurs du secteur (policiers, magistrats…) et des citoyens.
LES CAISSES DE SECURITE SOCIALE NE PEUVENT SE CONSTITUER PARTIE CIVILE EN L’ABSENCE D’UN DOMMAGE SUBI PERSONNELLEMENT   Cour de cassation, Chambre criminelle, 31 janvier 2023, n°22-82.917   Selon les articles 2 et 418 du Code de procédure pénale : « L’action civile en réparation du dommage causé par un crime, un délit ou une contravention appartient à tous ceux qui ont personnellement souffert du dommage directement causé par l’infraction » (Art. 2) « Toute personne qui, conformément à l’article 2, prétend avoir été lésée par un délit, peut, si elle ne l’a déjà fait, se constituer partie civile à l’audience même. (…) La partie civile peut, à l’appui de sa constitution, demander des dommages-intérêts correspondant au préjudice qui lui a été causé » (Art. 418). La partie civile est donc la personne qui s’estime lésée par une infraction, a souffert d’un dommage et en demande réparation.   La question s’est posée de savoir si les caisses de sécurité sociale pouvaient se constituer partie civile dans le cas où elles n’interviennent qu’en demande de remboursement de prestations versées à la victime directe. Au visa de ces articles et de l’article L.376-1 du Code de la sécurité sociale, la Cour de cassation a répondu à cette question par la négative. Elle rappelle en effet en premier lieu que les caisses de sécurité sociale ont pour objet de verser des prestations aux victimes d’infractions, et qu’elles disposent uniquement d’une action subrogatoire contre les auteurs de l’infraction afin d’obtenir le remboursement de ces prestations. En second lieu, la Cour de cassation rappelle que seule la victime directe des faits peut se constituer partie civile, et que les caisses de sécurité sociale ne peuvent intervenir dans la procédure qu’à l’issue de cette constitution de partie civile et sur le fondement de l’action de la victime. Enfin, la Cour rappelle que les caisses de sécurité sociale ne formulent pas des demandes indemnitaires, en réparation d’un dommage, en ce qu’elles n’ont pas souffert personnellement d’un dommage causé directement par une infraction. Il en ressort ainsi que les caisses de sécurité sociale ne peuvent se constituer partie civile et obtenir de dommages et intérêts si elles n’ont pas personnellement subi le dommage, mais demandent le remboursement de prestations versées à la victime directe.
La clause pénale sanctionne l’inexécution d’une obligation contractuelle.   Définition de la clause pénale Le contrat est un acte juridique par lequel des personnes s’engagent sur des obligations, comme le définit l’article 1101 du Code civil : « Le contrat est un accord de volontés entre deux ou plusieurs personnes destiné à créer, modifier, transmettre ou éteindre des obligations ». Parce que ces personnes ont donné leur accord à cet engagement, elles sont tenues de le respecter (article 1103 du Code civil) : « les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits ». La problématique intervient lorsqu’une partie n’exécute pas sa part du contrat. Comment sanctionner sa défaillance ? La clause pénale a pour objectif de sanctionner cette défaillance, sans nécessité de passer par la voie judiciaire (article 1231-5 du Code civil) : « Lorsque le contrat stipule que celui qui manquera de l’exécuter paiera une certaine somme à titre de dommages et intérêts, il ne peut être alloué à l’autre partie une somme plus forte ni moindre ». La clause pénale est donc une clause du contrat, prévue par les parties, et prévoyant une somme forfaitaire connue des parties au contrat, qui devra être versée en cas d’inexécution de ses obligations par l’une d’elles.   A qui s’applique-t-elle ? L’article 1199, alinéa 1, du Code civil prévoit que le contrat « ne crée d’obligations qu’entre les parties ». C’est l’effet relatif du contrat : seules les personnes ayant donné leur consentement au contrat y sont assujetties. Cela se comprend en effet car il ne pourrait être sollicité d’un tiers n’ayant pas accepté que des obligations pèsent sur lui de respecter ce contrat. Cela signifie donc que les tiers au contrat ne sont pas tenus à son exécution, et ne sont donc pas responsables en cas d’inexécution. La clause pénale n’est donc applicable qu’aux parties au contrat, débitrices d’obligations. La jurisprudence a en effet jugé en ce sens (Cass.civ., 3ème civ., 20 février 1996, n°94-14.776) : « Attendu qu’ayant, abstraction faite d’un motif surabondant et sans modifier l’objet du litige, retenu, à bon droit, que l’inexécution de l’obligation sanctionnée par une clause pénale doit être imputable au débiteur ». Par exemple, dans le cadre d’une vente d’un bien immobilier pour lequel un notaire interviendrait, ainsi qu’un agent immobilier rédacteur de l’acte de vente, seuls les vendeur et acquéreur s’obligent dans le cadre du contrat : -le vendeur s’oblige à remettre le bien, -l’acquéreur s’oblige à verser le montant de ce bien. L’agent immobilier rédacteur de l’acte de vente et le notaire ne sont pas parties au contrat, n’ayant pas donné leur consentement à cette vente. En cas d’inexécution, ils ne seraient donc pas assujettis à une clause pénale.   Conditions d’application Tout d’abord, la clause pénale ne se déduit pas, elle doit être prévue au contrat pour être applicable. De plus, cette clause ne nécessite pas l’intervention d’un juge. Sa seule présence au contrat et son acceptation par les parties justifie que son application puisse être sollicitée en cas d’inexécution. En outre, la clause pénale ne peut être appliquée qu’en cas d’inexécution fautive de l’une des parties (Cass.com., 22 mars 2011, n°09-16.660) : « Vu l’article 1226 du code civil ; Attendu que la caducité d’un acte n’affecte pas la clause pénale qui y est stipulée et qui doit précisément produire effet en cas de défaillance fautive de l’une des parties ». Cela ne signifie pas que l’une des parties doit avoir commis une faute, car la clause pénale s’applique par le simple constat d’une inexécution de ses obligations. Cela ne signifie donc pas non plus qu’un préjudice doit être prouvé. En revanche, cela signifie que la défaillance doit être attribuable au débiteur de l’obligation et non à une cause de force majeure (article 1231-1 du Code civil) : « Le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, s’il ne justifie pas que l’exécution a été empêchée par la force majeure ». Ainsi, si l’inexécution est due à un cas de force majeure (une circonstance exceptionnelle échappant au contrôle du débiteur), la clause pénale ne sera pas applicable. Enfin, l’article 1231-5 du Code civil exige que le débiteur défaillant soit mis en demeure d’exécuter son obligation avant l’application de la clause pénale, sauf en cas d’inexécution définitive. Cette mise en demeure doit permettre au débiteur défaillant de rattraper son erreur et d’exécuter son obligation.
UN AGENT DE POLICE JUDICIAIRE NE PEUT PROCEDER ARBITRAIREMENT A UN CONTROLE D’IDENTITE   Les contrôles d’identité sont prévus aux articles 78-1 et suivant du Code de procédure pénale. L’article 78-1 pose une obligation qui s’impose à tous : « Toute personne se trouvant sur le territoire national doit accepter de se prêter à un contrôle d’identité ». Cependant, les contrôles d’identité ne peuvent pas être réalisés par les autorités de police dès qu’ils le souhaitent. Il convient donc de savoir les conditions qui doivent être respectées pour procéder à ce contrôle.   I) Le contrôle doit être effectué par un agent habilité Dans un premier temps, il faut s’assurer que l’agent qui a procédé à ce contrôle était habilité à le faire. En effet, seuls les officiers de police judiciaire et, sur l’ordre et sous la responsabilité de ceux-ci, les agents de police judiciaire et agents de police judiciaire adjoints peuvent réaliser un tel contrôle. Les articles 20 et 20-1 du Code de procédure pénale nous dressent une liste limitative des agents de police judiciaire.   II) Le contrôle doit s’inscrire dans l’une des situations prévues par le législateur Dans un second temps, il faut vérifier que cet agent était dans l’une des situations prévues par le législateur pour justifier le contrôle d’identité. Il faut distinguer entre les contrôles à finalité judiciaire et les contrôles à finalité administrative.   A) Les contrôles de police judiciaire Les contrôles réactifs Ils interviennent lorsqu’un trouble à l’ordre public a été constaté, donc en réaction à la commission ou à la préparation d’une infraction. 5 cas sont prévus par la loi : – l’individu a commis ou tenté de commettre une infraction – il se prépare à commettre un crime ou un délit – il est susceptible de fournir des renseignements utiles à l’enquête en cas de crime ou de délit –  il a violé les obligations ou interdictions auxquelles il est soumis dans le cadre d’un contrôle judiciaire, d’une mesure d’assignation à résidence avec surveillance électronique, d’une peine ou d’une mesure suivie par le juge de l’application des peines – il fait l’objet de recherches ordonnées par une autorité judiciaire   Les contrôles proactifs Ils interviennent pour révéler un trouble à l’ordre public, pour rechercher l’existence d’une infraction. Il existe 2 cas prévus par la loi : Sur réquisitions écrites du procureur de la République aux fins de recherche et de poursuite d’infractions qu’il précise Sur réquisitions du procureur de la République aux fins de recherche et de poursuite du travail clandestin    B) Les contrôles de police administrative Ces contrôles sont au nombre de 2 : L’identité de toute personne, quel que soit son comportement, peut être contrôlée pour prévenir une atteinte à l’ordre public notamment à la sécurité des personnes ou des biens Il convient toutefois de préciser que ce contrôle ne peut pas permettre aux officiers de policier judiciaire de contrôler arbitrairement l’identité d’un individu. Les agents doivent démontrer qu’il existe un risque sérieux et actuel d’atteinte à l’ordre public. Vérifier le respect des obligations de détention, de port et de présentation des titres et documents prévus par la loi dans l’espace Schengen   Le non-respect de ces conditions constitue un vice de procédure permettant ainsi de demander la nullité de la mesure. C’est ainsi que la Cour de cassation a considéré que doit être annulé un contrôle d’identité qui faisait présumer que celui-ci avait été motivé en raison de l’appartenance ethnique de l’individu. La seule référence à l’aspect « nord-africain » de la personne contrôlée ne constitue pas un motif licite de contrôle (Cass.crim., 3 nov. 2016, n° 15-85.548).  
Être juré d’assise : quel vécu ?   Le jury d’assise, inspiré du modèle anglais, est instauré à la révolution française. Il représente alors l’immiscion du peuple dans la justice, traditionnellement secrète et inquisitoire. Mais dès ses débuts, il pose beaucoup de questions quant à son efficacité : les jurés ne comprennent pas toujours bien la procédure de la Cour d’assise. Ainsi, les débuts du jury d’assise sont marqués de nombreux acquittements « scandaleux ». En effet, les jurés de l’époque n’ont pas de pouvoirs sur les peines. Ils ne jugent que les faits, et la culpabilité. Les peines sont prévues par le Code pénal de 1791. Dès lors, lorsque la peine parait disproportionnée, les jurés sont enclins à déclarer l’accusé innocent, même lorsque sa culpabilité est prouvée, en opposition à la peine jugée sévère. Dans d’autres cas, les jurés étaient perdus dans le système de vote par balles blanches ou noires. Et puisqu’il suffisait de trois balles blanches pour déclarer l’innocence, celle-ci était rapidement acquise. L’étude des verdicts rendus dans 16 départements entre 1792 et 1811 par Robert Allen montre un taux d’acquittement de 45%. Aujourd’hui, les critères permettant de faire partie des listes sont définis par les articles 254 et suivant du Code de procédure pénale : la nationalité française, 23 ans, et l’inscription aux listes électoral. N’importe qui peut donc être désigné juré. La faiblesse des critères contraste avec la complexité de la tâche. Être juré marque. Il y a un avant et un après : c’est une expérience qui ne peut pas laisser indifférent.   1 : La procédure de sélection des jurés D’après les inscrits sur listes électoral, le maire effectue un tirage au sort et élimine ceux de moins de 23 ans.  « Le maire, en vue de dresser la liste préparatoire de la liste annuelle, tire au sort publiquement à partir de la liste électorale un nombre de noms triple de celui fixé par l’arrêté préfectoral » Art 261 Code de procédure pénal. Il informe par lettre les tirés au sort, qui peuvent alors transmettre une demande de dispense pour motifs graves s’il y a lieu. La lise formée est transmise à une commission spéciale qui examine les demandes de dispense et effectue un nouveau tirage au sort sur les noms restants. Une liste de 35 jurés et 10 suppléants est ainsi formée. Ils sont convoqués 15 jours avant l’audience. A l’ouverture de chaque procès, un tirage au sort est effectué pour désigner 6 jurés. Le ministère public et l’accusé peuvent chacun récuser les jurés tirés. Les 6 premiers jurés non récusés forment le jury. La phase de récusation peut être surprenante ou mal vécue par les jurés. Ces récusations se fondent souvent sur le genre, le métier, l’âge ou la présentation physique du juré.   2 : Le déroulé du procès Quand le jury est formé, le procès commence. La position du juré est difficile. Il peut s’identifier à l’une ou l’autre des parties, qui peuvent éventuellement porter les traits d’une histoire commune. Son devoir est d’être juste et impartial. Les jurés disposent d’un accompagnement avant le procès, par le biais d’une réunion, et pendant, en la figure du président. Mais ils restent souvent dépourvus face aux responsabilités qui leur incombe. Ils ne connaissent pas les usages de la Cour, les peines généralement données pour telle ou telle infraction, ou encore les moyens de défense souvent utilisés. Beaucoup des jurés ne s’attende pas à la complexité des affaires, et le flou qui y règne. Ils sont tiraillés entre « l’intime conviction » et « le doute profite à l’accusé ». Les jurés de disposent pas du dossier. Tout est présenté à l’oral. Ils ont simplement un cahier pour prendre des notes. Catherine Papadacci (ça m’intéresse, Témoignage : j’ai été juré aux assises) témoigne « En tout, j’ai noirci 33 pages – et j’écris petit ! ». Les notes prennent beaucoup d’importance, comme seul support pour les jurés qui ne veulent rien oublier. Beaucoup de jurés témoigne d’anxiété présente pendant la durée des procès, et de difficultés à dormir. Certains gèrent cette angoisse en parlant à leur famille ou leurs proches, parfois en quantité excessive. Ils ressassent les affaires encore et encore, tous les soirs en rentrant chez eux. D’autres s’enferment dans un mutisme, laissant leurs proches dans l’incompréhension. Dans les 2 cas, un fossé se creuse entre juré et non-juré.   3 : Le jugement Lorsque les débats son finis, le jury se retire et délibère, avec le Président de la Cour et les assesseurs. Ils ne sortent pas tant qu’ils n’ont pas jugé. La responsabilité est lourde, il faut se prononcer non seulement sur la culpabilité, mais aussi sur la peine, s’il y en a lieu. Le président guide la réflexion mais n’essaye pas d’influencer les jurés. Une majorité de 6 est nécessaire pour condamner. Les voix des jurés comptent autant que celles des magistrats. Ancien juré dans une affaire de viol, François-Xavier Gillibert (Envoyé spécial) raconte la sortie de la salle des délibérés. Il était assis en face de la victime, impuissant face à un verdict qui n’avait pas obtenu suffisamment de voix pour condamner, obligé d’assumer la responsabilité d’une décision à laquelle il n’adhérait pas.  « Elle m’a regardé, je l’ai regardé. Le verdict n’avait pas encore été annoncé. Elle avait compris. » L’annonce du verdict sonne la fin du procès. Tous ses acteurs, accusé, victime, jurés, quittent le Tribunal par la même porte. Il se retrouvent tous sur le parvis, à égal. La distance présente dans la salle est effacée. Les jurés sont mis directement face à leur décision commune, même lorsque celle-ci ne satisfaisait pas leur conviction individuelle.   4 : L’après Malgré la fin des procès, la souffrance psychique des jurés n’est pas finie. Certains suivent attentivement les résultats des procès, les dates de sorties, l’aménagement des peines, le sort des condamnés, ou des relaxés. Ils gardent les journaux traitant des affaires, les carnets de prise de note du procès, ou encore leur convocation. Souvent des liens de soutien se tissent entre co-jurés. Ceux-ci échangent leurs contacts, et restent en relation. Ils trouvent entre eux les seules personnes capable de comprendre leur détresse. Certains encore « prolongent » leur immersion dans le milieu judiciaire en effectuant du bénévolat dans les prisons, ou en témoignant dans des associations d’anciens jurés. Globalement, l’exercice de la fonction de juré améliore tout de même l’image et l’opinion de la justice. La confrontation avec le crime permet de repenser le but de la justice. « Si elle doit punir, elle a surtout vocation à sauver » dit Catherine Papadacci.   En conclusion, le jury d’assise, élément fondamental de la démocratie, peut créer de profondes souffrances dans l’esprit du juré. Un accompagnement post-procès, tel que des réunions avec les magistrats pour discuter du verdict, seraient un point de départ à la prise en compte des personnes et de l’impact de ce devoir.     Source « La souffrance psychique des jures de cour d’assises et les modalités de sontraitement » de Jean-Pierre DURIF-VAREMBONT  
La déclaration d’intention, un moyen pour les parties de faire connaître leurs observations ou demandes au juge d’instruction L’article 175 III° du Code de procédure pénale, dans sa version entrée en vigueur en 2019, prévoit que : « III.-Dans un délai de quinze jours à compter soit de chaque interrogatoire ou audition réalisé au cours de l’information, soit de l’envoi de l’avis prévu au I du présent article, les parties peuvent faire connaître au juge d’instruction, selon les modalités prévues à l’avant-dernier alinéa de l’article 81, qu’elles souhaitent exercer l’un ou plusieurs des droits prévus aux IV et VI du présent article ».   La question qui se pose est celle de savoir en quoi consiste cette procédure dite de déclaration d’intention prévue par cet article ?   Dans le cadre d’une information judiciaire, les parties disposent de plusieurs droits de la défense leur permettant d’intervenir dans cette information.   Ceux-ci sont prévus dans l’article 175 du Code de procédure pénale, en ses alinéas IV° et VI° : -Faire des observations au Juge d’instruction, dont une copie sera adressée au Procureur de la République ; -Formuler des demandes ou des requêtes : des demandes d’audition, de confrontation, de transport sur les lieux, de faire produire d’une pièce utile à l’information, demande de tout autre acte utile, des demandes aux fins de faire constater la prescription de l’action publique, une demande d’expertise, une requête en nullité. -Formuler des observations complémentaires après communication des réquisitions du Procureur de la République.   Selon l’article 175, les parties devront ainsi réaliser une déclaration d’intention de faire usage de ces droits de la défense dans le cadre de l’information. Il s’agit donc de prévenir le Juge d’instruction qu’on a potentiellement l’intention de faire usage de ces droits. Par ailleurs, cet article impose de faire cette déclaration dans un délai limité de 15 jours à compter : -de toute audition, -de tout interrogatoire, -de l’envoi de l’avis de fin d’information. L’article 175 du Code n’impose pas de répéter cette déclaration, dès lors, une unique déclaration vaut pour toute l’information judiciaire.   Dans la mesure où il n’est pas possible de connaitre à l’avance les droits qu’il sera nécessaire de faire appliquer (il est difficile de savoir dès le début de l’information si une confrontation sera réalisée, ou si des nullités pourront être soulevées), il convient de faire une déclaration la plus large possible, afin de ne pas oublier l’un des droits précités. Cela vaut également après l’avis de fin d’information, dans la mesure où le Procureur de la République dispose d’un délai au minimum d’un mois pour rendre son réquisitoire définitif, et qu’il est impossible de prédire ce qu’il contiendra, cette déclaration devra donc être réalisée dans les délais et devra être large. Il est possible en effet de déclarer son intention d’exercer « les droits prévus par l’article 175 IV° et VI° du Code de procédure pénale » sans plus de précision, pour être le plus complet possible.   Enfin, cette déclaration doit répondre aux exigences de forme de l’article 81 du Code de procédure pénale, c’est-à-dire qu’elle doit être réalisée par déclaration au greffe du Juge d’instruction saisi du dossier, ou par voie de lettre recommandée avec avis de réception. Si la partie est détenue, elle doit faire cette déclaration auprès du chef de l’établissement pénitentiaire.
LES FAITS DENONCES EN EXECUTION D’UNE OBLIGATION REGLEMENTAIRE NE PEUVENT ETRE CONSIDERES COMME SPONTANES Cass.crim., 14 janvier 2014, n°12-86.781 Définition de l’infraction de dénonciation calomnieuse L’infraction de dénonciation calomnieuse vise à sanctionner le fait de porter à la connaissance d’une autorité des faits que l’on sait faux, ce qui pourra gravement nuire à la personne visée par ces propos qui en subira de lourdes conséquences. Par cette fausse dénonciation, l’auteur porte atteinte à l’honneur de la victime. En ce sens, l’article 226-10 du Code pénal prévoit que : « La dénonciation, effectuée par tout moyen et dirigée contre une personne déterminée, d’un fait qui est de nature à entraîner des sanctions judiciaires, administratives ou disciplinaires et que l’on sait totalement ou partiellement inexact, lorsqu’elle est adressée soit à un officier de justice ou de police administrative ou judiciaire, soit à une autorité ayant le pouvoir d’y donner suite ou de saisir l’autorité compétente, soit aux supérieurs hiérarchiques ou à l’employeur de la personne dénoncée est punie de cinq ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende. La fausseté du fait dénoncé résulte nécessairement de la décision, devenue définitive, d’acquittement, de relaxe ou de non-lieu, déclarant que le fait n’a pas été commis ou que celui-ci n’est pas imputable à la personne dénoncée. En tout autre cas, le tribunal saisi des poursuites contre le dénonciateur apprécie la pertinence des accusations portées par celui-ci ».   Pour caractériser cette infraction, il convient de rassembler les éléments suivants : -Une fausse révélation portant sur un fait, -La connaissance de la fausseté de cette information, -Des conséquences d’une gravité importante à prévoir par cette révélation (sanction judiciaire, administrative ou disciplinaire), -Avoir fait cette révélation à une autorité pouvant appliquer des sanctions ou saisir l’autorité compétente.   A la différence de la diffamation, qui exige une révélation fausse ou vraie faite à toute personne, la dénonciation calomnieuse exige une révélation fausse à une autorité pouvant appliquer des sanctions.   Il convient enfin de préciser que la fausseté du fait dénoncé peut être démontrée de deux manières : -par une décision devenue définitive de l’autorité saisie selon laquelle le fait n’a pas été commis ou n’est pas imputable à son auteur (article 226-11 du Code pénal), -en l’absence d’une telle décision, les magistrats saisis devront apprécier les éléments fournis démontrant cette fausseté.   L’arrêt du 14 janvier 2014 : l’exigence de la spontanéité des révélations Dans cet arrêt, une société a fait l’objet d’une procédure de redressement judiciaire et à l’occasion de cette procédure, un administrateur et un représentant des créanciers avaient été désignés. Ces derniers ont rendu un rapport au juge-commissaire et au Procureur de la République, conformément à l’article 29 du décret 85-1388 du 27 décembre 1985 relatif au redressement et la liquidation judicaires des entreprises. Selon cet article, « Dans le délai de deux mois après le jugement d’ouverture, l’administrateur et le représentant des créanciers font rapport au juge-commissaire et au procureur de la République sur le déroulement de la procédure et la situation de l’entreprise ». Ainsi, sur le fondement de ce rapport, le Procureur de la République avait déclenché une procédure d’enquête, révélant de fortes présomptions d’infractions de banqueroute par détournements d’actifs et d’abus de biens sociaux à l’encontre des dirigeants de la société. Une information judiciaire avait alors été ouverte, puis une décision de non-lieu avait été rendue. Les dirigeants déposaient dès lors plainte pour dénonciation calomnieuse puis se constituaient partie civile, déclenchant en conséquence une information judiciaire. Une ordonnance de non-lieu était également rendue, contre laquelle les parties civiles interjetaient appel. La Cour d’appel confirmait l’ordonnance, soutenue par la Cour de cassation. En effet, selon cette dernière, la dénonciation calomnieuse exige que la révélation d’un fait que l’on sait faux soit spontanée. Cela signifie, que l’auteur de la révélation n’avait aucune obligation de faire cette révélation mais l’a décidé de lui-même. En l’espèce, l’élément de spontanéité faisait défaut en raison de l’obligation légale portant sur les administrateurs et représentants des créanciers de rédiger un rapport sur la situation de l’entreprise en redressement judiciaire et de le remettre au Procureur de la République (article 29 du décret n°85-1388). Ils n’ont pas choisi de révéler des faits mais ont simplement respecté une obligation légale.   Exemples de jurisprudences sur l’élément de spontanéité Constituent des révélations spontanées : -le fait pour deux avocats d’écrire de leur propre chef une lettre au président de la chambre d’accusation afin de l’informer que seul le magistrat instructeur a pu avoir révélé des informations secrètes aux journalistes (Cass.crim., 30 mai 2000, n°99-84.470), -le fait de déposer plainte auprès des autorités, la Cour de cassation n’a en effet pas accueilli l’argument selon lequel la plaignante avait été contrainte de révéler les faits d’agressions sexuelles (Cass.crim., 12 janvier 2016, n°14-86.710).   Au contraire, ne constituent pas des révélations spontanées : -le fait pour un mineur de révéler des faits sous la pression des questions de ses parents puis en réponse aux questions des enquêteurs et du magistrat instructeur (Cass.crim., 7 janvier 2020, n°19-82.608), -le fait pour un policier de rédiger un rapport concernant un incident qu’il avait le devoir de porter à la connaissance de son supérieure hiérarchique (Cass.crim., 3 mai 2000, n°99-85.107), -le fait pour des témoins de répondre aux questions des gendarmes (Cass.crim., 16 juin 1988, n°87-85.432).
Traitements inhumains et dégradants infligés à un détenu : violation de la Convention européenne des droits de l’Homme et des libertés fondamentales et consécration nationale par le Conseil constitutionnel CEDH 421 (2019) CEDH, 30 janvier 2020, J.M.B. et autres c. France, n°9671/15 et 31 autres Décision du Conseil Constitutionnel du 2 octobre 2020, n°2020-858/859 QPC   Les conditions de détention, maintes fois dénoncées, ont fait l’objet de plusieurs décisions importantes entre l’année 2019 et l’année 2020. L’arrêt de la Cour européenne des droits de l’Homme du 5 décembre 2019 Pour la première fois, la Cour européenne des droits de l’Homme a rendu une décision particulièrement importante à l’égard de la France. Dans un arrêt rendu le 5 décembre 2019, la Cour européenne a condamné la France pour « traitements inhumains et dégradants » infligés à une personne détenue, en violation de l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’Homme et des libertés fondamentales. Cet article prévoit en effet : « nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ». En l’espèce, le plaignant s’était scarifié l’avant-bras, souhaitant être transféré vers un établissement pénitentiaire plus proche de sa famille. Le médecin a refusé de le faire hospitaliser, puis il a été placé en quartier d’isolement en raison de son refus de regagner sa cellule et le temps de son transfert vers un autre établissement. Le plaignant a mis le feu à du papier dans sa cellule, provoquant l’intervention des surveillants pénitentiaires à l’aide d’une lance à incendie, visant notamment le plaignant. Le lendemain, lors de son transfert, le plaignant était quasiment nu, habillé d’un simple t-shirt, et avait été attaché par les pieds. Il a déposé plainte pour traitements inhumains en raison du traitement décrit et de coups qu’il aurait reçu de la part de surveillants, étant porteur de contusions. La Cour européenne a jugé que le plaignant avait subi des violences psychologiques en raison de la souffrance et de l’anxiété causées par le comportement du personnel pénitencier (son état psychique et la privation de liberté le plaçant en situation de vulnérabilité), outre des violences physiques attestées par des certificats médicaux, les surveillants ayant usé de la force cotre lui. Le plaignant avait ainsi, selon la Cour, subi des traitements inhumains et dégradants.   L’arrêt de la Cour européenne des droits de l’Homme du 30 janvier 2020 La Cour européenne a rendu une autre décision sur les conditions indignes en détention de manière générale, en date du 30 janvier 2020. En l’espèce, la Cour européenne a été saisie par 32 requêtes, dénonçant des conditions de détention indignes (matelas au sol, population oisive, offre d’enseignement limitée, espace de vie réduit, cellule partagée par plusieurs détenus, manque d’intimité, présence de nuisibles et insectes, draps sales, mauvais accès aux soins etc). Elle reconnait ainsi, par cet arrêt, les conditions indignes de détention dans les prisons françaises. Par ailleurs la Cour européenne reproche également à la France l’absence de recours effectif contre ces conditions. En effet, le recours administratif prévu par les articles L.521-2 et suivants du Code de justice administrative ne permettent pas au juge d’agir sur le fond du problème, à savoir la surpopulation carcérale, mais uniquement de manière provisoire.   La décision QPC du Conseil constitutionnel du 2 octobre 2020 En suite de cet arrêt de la Cour européenne, le Conseil constitutionnel s’est saisi de la problématique et a rendu une décision le 2 octobre 2020. Par cette décision, le Conseil constitutionnel consacre l’interdiction de soumettre les personnes détenues à des conditions d’incarcération contraires à la dignité humaine et a souligné l’attention que les juges du fond doivent apporter aux allégations de ces personnes quant à leurs conditions de détention. Le Conseil rappelle également l’importance de mettre en place un recours efficace permettant aux personnes détenues de dénoncer ces conditions de détention.   La loi du 8 avril 2021 tendant à garantir le droit au respect de la dignité en détention (n°2021-403) Cette loi est intervenue en réponse à ces différentes décisions, afin prévoir un recours pour les personnes détenues vivant leur incarcération dans des conditions indignes. Elle modifie les articles 144-1 (détention provisoire) et 707 (principes entourant l’exécution de la peine) du Code de procédure pénale afin d’y intégrer le principe du respect de la dignité dans le cadre de l’incarcération. Par ailleurs, un nouvel article 803-8 du Code de procédure pénale a été créé.   Selon cet article, la personne détenue dont les conditions de détention seraient indignes dispose de deux recours, un référé liberté devant le juge administratif (mesure provisoire) et une saisine du Juge des libertés et de la détention (détention provisoire) ou du Juge de l’application des peines (condamné). Cette dernière saisine permettra au Juge de proposer des solutions afin de mettre fin aux conditions de détention indignes, qui devront être mises en place par l’administration pénitentiaire. En cas d’impossibilité de les mettre en place, le juge pourra décider du transfert du détenu, ou d’un aménagement de peine, afin de mettre fin aux conditions de détention indignes dénoncées.
Quid des placements de retraite lors de la liquidation du régime matrimonial ? Le divorce fait naître de nombreuses questions liées à la liquidation du régime matrimonial.   Les biens qui ne font pas l’objet d’un partage lors de la liquidation du régime matrimonial sont les biens propres.   En vertu de l’article 1405 du Code civil: « restent propres les biens dont les époux avaient la propriété ou la possession au jour de la célébration du mariage, ou qu’il acquièrent, pendant le mariage, par succession, donation ou legs« .   Autrement dit, sans contrat de mariage avec stipulations contraires, les sommes perçues avant le mariage, les sommes issues d’un héritage ou les placements à l’aide de cet héritage sont propres à l’époux concerné, ces sommes ne font pas l’objet d’un partage.   Concernant les placements de retraite, ils existent plusieurs critères pour que les biens restent propres.   Tout d’abord, il faut déterminer si les placements de retraite ont été alimentés par des biens propres ou avant le mariage.   Puis, il convient de savoir si l’option a été levée avant ou après le divorce.   En effet, s’agissant des stocks-options, la jurisprudence a estimé que les actions acquises par l’exercice de ces droits entrent dans la communauté lorsque l’option est levée pendant le mariage (Cass.civ., 1ère civ., 9 juillet 2014, n°13-15.948).   Autrement dit, concernant les stocks-options, si l’option n’est pas levée avant le divorce, les sommes inhérentes restent propres à l’époux bénéficiaire et échappe au partage.   Par ailleurs, concernant le plan d’épargne pour la retraite collectif (PERCO), un tel placement reste propre à l’époux dans deux cas: -PERC O alimenté par des biens propres, -PERCO alimenté avant le mariage.   Toutefois, la jurisprudence a estimé que « Ayant relevé que le contrat, au titre duquel les sommes étaient réclamées, ouvrait droit à une retraire complémentaire de cadre dont le bénéficiaire ne pourrait prétendre qu’à la cessation de son activité professionnelle, la cour d’appel, qui a ainsi caractérisé un propre par nature, a rejeté, à bon droit, la demande tendant à inclure dans l’actif de la communauté le montant des sommes litigieuses » (Cass.civ., 1ère civ., 30 avril 2014, n°12-21.484).   De la même manière, il a été jugé que « les différents versements attachés à la pension viennent grossir la communauté, le droit à la pension reste personnel à l’époux bénéficiaire qui peut ainsi conserver pour lui l’intégralité des versements effectués après la dissolution du mariage » (Cour d’appel de LIMOGES, 22 février 2016, n°14/01490).   Autrement dit, étant donné que les placements de retraite n’offriront qu’à la cessation d’activité, si le divorce intervient avant une telle situation, les sommes n’ont pas à faire l’objet d’un partage.
Demande d’indemnisation à la CIVI Demande adressée au juge délégué aux victimes Demande de copie d’une décision de justice pénale Référentiel d’indemnisation par l’ONIAM Demande d’aide juridictionnelle Attestation de témoin Formulaire SARVI
Le droit de la défense : la nécessité d’avertir le prévenu de son droit à l’assistance d’un avocat dans le cadre de son jugement correctionnel avant le jugement. Cass., crim., 24 novembre 2010, n°10-80.551   Le principe fondamental de droit à la défense Le droit de la défense est un principe universel reconnu en France et à l’échelle internationale, à la fois dans le code de procédure pénale, au sein de la Convention européenne des droits de l’Homme, de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen, et dans des conventions internationales telles que le pacte international relatif aux droits civils et politiques. Selon ce principe, toute personne accusée d’une infraction pénale a droit de se défendre et d’être défendue. La méconnaissance de ce principe porte atteinte aux droits de la défense, comme le rappelle régulièrement la jurisprudence. (Cass., crim., 22 septembre 1999, bull. crim. n°196)   Cela reste toutefois une possibilité, accordant ainsi la liberté au prévenu de se défendre seul dans le cadre d’une audience correctionnelle le concernant. L’article 417 du code de procédure pénale dispose en ce sens que « Le prévenu qui comparaît a la faculté de se faire assister par un défenseur ». De plus, le législateur français précise dans ce même article que lorsque le prévenu n’a pas bénéficié de cette information avant l’audience, il peut en faire la demande auprès du président du tribunal qui, après l’avoir informé de son droit, commettra un avocat commis d’office pour le défendre.   La jurisprudence a tendance à rappeler que lorsque le prévenu renonce à se faire assister par un avocat commis d’office dans le cadre de sa défense, cela doit impérativement être constaté dans le jugement. (Cass., crim. 12 janv. 2011, no 10-82.617)   L’assistance obligatoire du prévenu par un avocat en cas d’infirmité Selon les termes de l’article 417 alinéa 4 du code de procédure pénale, « L’assistance d’un défenseur est obligatoire quand le prévenu est atteint d’une infirmité de nature à compromettre sa défense ».   Cela sécurise le droit à la défense du prévenu n’ayant pas pleine capacité à comprendre le déroulement des débats le concernant.   L’arrêt du 24 novembre 2010 Selon la Cour de cassation, l’exercice de la faculté reconnue au prévenu qui comparaît devant la juridiction correctionnelle de se faire assister d’un avocat implique que le président l’ait préalablement informé de cette possibilité, s’il n’a pas reçu cette information avant l’audience.   L’assistance d’un défenseur est obligatoire lorsque le prévenu est atteint d’une infirmité de nature à compromettre sa défense. La personne qui comparaît lors d’une audience correctionnelle a la faculté de se faire assister par un défenseur. S’il se présente seul à l’audience, le tribunal ou la cour doit rappeler ce droit au prévenu et s’assurer de ce qu’il n’entend pas être assisté d’un défenseur.   Il était question en l’espèce d’un individu ayant été condamné à neuf ans d’emprisonnement pour atteinte sexuelle et tentative d’atteinte sexuelle, ainsi qu’une peine complémentaire de dix années de suivi socio-judiciaire. Ce dernier n’avait pas été informé de son droit d’être assisté d’un avocat commis d’office au titre de l’aide juridictionnelle. Une expertise psychiatrique avait été effectuée, relevant le niveau intellectuel faible du prévenu, pouvant l’empêcher de comprendre le déroulement des débats. Au regard des dispositions législatives relatives au droit à la défense ainsi qu’à la situation psychiatrique de l’individu, celui-ci aurait dû être assisté d’un avocat dans le cadre de sa défense devant la juridiction correctionnelle.   Cette obligation d’assistance est applicable aux majeurs protégés, placés sous tutelle ou curatelle, conformément à l’article 706-112 du code de procédure pénale. En effet, les capacités psychiatriques des majeurs protégés, placés sous tutelle ou curatelle sont considérées comme ne permettant pas de comprendre totalement le déroulement des débats lors de l’audience les concernant. Le tuteur doit dans ces cas-là être informé des poursuites et des décisions de condamnation dont cette personne fait l’objet, ainsi qu’être avisé de la date d’audience. (Cass., crim., 14 avril 2010, n°09-83.503)
Important, un nouvel arrêt vient consacrer l’idée que la transmission par l’officier du ministère public de Rennes au Tribunal territorialement compétent entraîne une interruption de la prescription : « Pour constater l’extinction de l’action publique par la prescription, le jugement retient qu’aucun acte d’instruction ou de poursuite n’a été accompli entre l’avis de contravention du 22 février 2020 et l’acte d’enquête de l’officier du ministère public près le tribunal de police de Beauvais en date du 11 mai 2021. En prononçant ainsi, alors que constituait un acte de poursuite la transmission de la procédure, le 6 juin 2020, à l’officier du ministère public territorialement compétent en raison du domicile du contrevenant, le tribunal de police a méconnu le sens et la portée des textes susvisés et du principe ci-dessus rappelé» (Cass. Crim., 10 janvier 2023, n°22-84.007). Il ne faudra donc pas se réjouir trop vite passer le délai d’un an et la consécration devant le Tribunal.
La saisine du juge des Affaires Familiales doit être préférée à la non-représentation d’un enfant en cas d’exposition à des violences ou autre fait infractionnel d’un enfant par l’un de ses parents   Cass. crim., 4 avr.2024, n°23-84-683   Le délit de non-représentation de l’enfant En cas de séparation des parents, l’attribution et les modalités de garde des enfants doivent être prévus. Pour cela, les parents peuvent se mettre d’accord, auquel cas la séparation sera à l’amiable et les modalités de séparation seront convenues entre les parties. Autrement, à défaut d’accord entre les parents, ou si aucune décision relative à la garde n’est prévue, le Juge aux Affaires Familiales (JAF) devra être saisi. Le JAF a pour mission d’attribuer la garde de l’enfant, de fixer sa résidence habituelle et les modalités de visite et d’hébergement de chaque parent / titulaire de l’autorité parentale. La décision rendue par le JAF devra alors être respectée par les parties concernées, c’est-à-dire les parents. Le non-respect de cette décision est sanctionnable. Notamment, le fait de ne pas représenter l’enfant dans le cadre du droit de visite et d’hébergement constitue un délit puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende. Celui-ci est défini par l’article 227-5 du Code pénal comme le fait de ne pas représenter un enfant mineur à la personne qui a le droit de le réclamer. Il est important de préciser que ni l’état de nécessité ni la résistance de l’enfant ne peuvent justifier un tel comportement si l’intention délictuelle est établie.   L’arrêt du 4 avril 2024 : la présentation d’une question prioritaire de constitutionnalité relative au délit de non-représentation d’un enfant exposé à un risque de violences à son encontre Une question prioritaire de constitutionnalité contestant l’article 227-5 du Code pénal a été formulée. La non-représentation d’enfant, lorsqu’elle est effectuée dans le but de protéger les intérêts de l’enfant et l’équilibre familial d’un possible danger, est justifiée par le principe de nécessité des peines ainsi que les droits de l’enfant et à la protection de la famille garantis par les articles 7 et 8 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, ainsi que par les alinéas 10 et 11 du préambule de la Constitution de 1946, et ne devrait pas, en principe, être condamnable. La Cour de Cassation rappelle ainsi que si un enfant est exposé à un risque de violences ou de toute autre infraction à son encontre par un titulaire de l’autorité parentale, la modification des décisions du Juge des Affaires Familiales peut être demandée, à tout moment, par l’un des parents. Dès lors, la non-représentation d’un enfant ne peut être justifiée par l’exposition à un risque de violences ou toute autre infraction commise par l’un des parents, à l’encontre de l’enfant. Par ailleurs, lorsque le refus de représentation repose sur des violences dont serait victime l’enfant, le procureur de la République doit procéder à des vérifications permettant d’apprécier la réalité des violences avant de déclencher l’action publique, comme l’indique le Code de procédure pénale à l’article D.46-11-3.   En conséquence, en cas de faits de violence ou de toute infraction commise sur l’enfant par l’un des parents, il faut saisir le JAF et le procureur de la République afin que soit démontrée la réalité des faits allégués, et que l’enfant soit protégé, les intérêts de l’enfant devant être préservés. La Cour estime ainsi qu’il n’y a pas lieu de renvoyer cette question prioritaire de constitutionnalité au Conseil constitutionnel. Quand bien même il semble que la justice avance plus lentement que les événements et les risques encourus par les enfants et les familles, l’actualité nous montre que la ténacité des parents et des avocats qui portent leurs dossiers n’est pas vaine.   L’Affaire Sophie ABIDA, l’histoire d’une mère incriminée pour non-représentation d’enfants afin de les protéger de leur père Alors que Sophie Abida et son mari sont séparés depuis 2021 en raison de violences physiques commises sur leurs enfants, ces derniers révèlent, en janvier 2022, avoir subi des violences physiques et sexuelles au domicile de leur père. L’aîné, en septembre et en novembre 2022, décrit des « faits de viols commis par son père de manière récurrente ». La mère de ces derniers, Sophie Abida, souhaitant protéger ses enfants, refuse de les représenter au père, qui porte plainte. Face au juge des enfants d’Orléans, l’enfant réitère ses propos. Pourtant, Sophie Abida a été condamnée par le tribunal de Chartres à dix mois d’emprisonnement avec sursis pour non-représentation d’enfants, la juridiction estimant que l’état de nécessité ne pouvait être caractérisé dans une telle situation. Par la suite, une décision du JAF attribue la garde des enfants au père. Cette affaire réitère le principe selon lequel le JAF doit être saisi en cas de non-respect de la décision du JAF relative à l’exercice du droit de garde des enfants, ou bien si les intérêts de l’enfant sont mis en jeu. Concernant les faits de violence, ceux-ci ont été démontrés. En mai 2024, le père de famille a été condamné à trois mois de prison avec sursis pour des violences sur deux de ses quatre enfants.
LA CONSTATATION DE NOUVEAUX DELITS FLAGRANTS OU DE LA REITERATION DE L’INFRACTION NE PEUVENT PAR ELLES-MEME PERMETTRE LA PROLONGATION DE L’ENQUETE DE FLAGRANCE Cass.crim., 18 décembre 2013, n°13-85.375   Définition de l’enquête de flagrance   L’enquête de flagrance est définie par l’article 53 du Code de procédure pénale comme :   « Est qualifié crime ou délit flagrant le crime ou le délit qui se commet actuellement, ou qui vient de se commettre. Il y a aussi crime ou délit flagrant lorsque, dans un temps très voisin de l’action, la personne soupçonnée est poursuivie par la clameur publique, ou est trouvée en possession d’objets, ou présente des traces ou indices, laissant penser qu’elle a participé au crime ou au délit ».   Autrement dit, l’enquête de flagrance porte sur des infractions qui viennent d’être commises ou ont été commises dans un espace de temps très voisin de la découverte des faits.   En outre, l’enquête de flagrance porte sur des crimes ou des délits, donc nécessairement des infractions pénales faisant encourir une peine d’emprisonnement.   Début et fin de l’enquête de flagrance   Comme évoqué, l’enquête de flagrance est conditionnée au temps de commission ou de découverte de l’infraction.   Elle début donc lorsque :   -l’infraction « se commet actuellement » : c’est le cas lorsqu’un membre des forces de l’ordre constate l’infraction. A titre d’exemple, il constate qu’un individu brise la vitre d’une habitation pour y pénétrer ;   -l’infraction « vient de se commettre » : l’infraction a déjà été commise, mais est immédiatement rapportée aux forces de l’ordre.  Par exemple, un passant se rend dans un commissariat ou une gendarmerie afin d’informer avoir vu quelques minutes auparavant un individu briser la vitre d’une habitation et y entrer ;   -il y a aussi flagrant délit lorsque « dans un temps très voisin de l’action, la personne soupçonnée est poursuivie par la clameur publique » : l’infraction vient d’avoir lieu, et les forces de l’ordre sont averties par les témoins. Par exemple, un individu porteur d’une cagoule brise une vitre, entre dans une habitation, en ressort avec un sac rempli et fuit, les passants hurlent alors qu’il y a eu un vol et les forces de l’ordre en sont averties de la sorte. C’est la formule « au voleur ! » ;   -enfin, « la personne soupçonnée (…) est trouvée en possession d’objets, ou présente des traces ou indices, laissant penser qu’elle a participé au crime ou au délit » : c’est par exemple le cas de l’individu trouvé par les membres des forces de l’ordre porteur d’une cagoule, des gants dans les poches et un sac à la main rempli de bijoux.   La jurisprudence exige également que les membres des forces de l’ordre relèvent des indices apparents d’un comportement délictueux révélant l’existence d’une infraction (Cass.crim., 4 janvier 1982, n°80-95.198, Cass.crim., 2 février 1988, n°87-81.147).   Une enquête de flagrance ne pourra donc pas débuter sur un renseignement anonyme, même si l’infraction vient d’être réalisée, car les membres des forces de l’ordre ne peuvent constater d’indices apparents de la commission de cette infraction. Et ce également si la personne dénoncée par renseignement anonyme est connue des forces de l’ordre (Cass.crim., 11 juillet 2007, n°07-83.427).   L’enquête de flagrance dure, selon l’article 53 du Code de procédure pénale, pendant 8 jours.   Au-delà, une prolongation peut être ordonnée par le Procureur de la République, dans certaines conditions (crime ou délit puni d’une peine d’emprisonnement supérieure ou égale à 5 ans, investigations qui ne peuvent être différées).   A défaut de prolongation, l’enquête de flagrance prend fin au terme de huit jours et l’enquête préliminaire débute.   Différences de pouvoirs entre l’enquête de flagrance et l’enquête préliminaire   Ces deux cadres d’enquête diffèrent dans les pouvoirs octroyés aux forces de l’ordre.   Si les actes d’enquête sont les mêmes, l’urgence de l’enquête de flagrance autorise en effet les OPJ à réaliser des actes sans obtenir certaines autorisations.   A titre d’exemple, les perquisitions de domicile peuvent être réalisées sans l’autorisation de l’occupant dans le cadre d’une enquête de flagrance, cette autorisation étant nécessaire dans le cadre d’une enquête préliminaire (article 57 du Code de procédure pénale).   De la même manière, un OPJ peut, de sa propre initiative, procéder à des réquisitions dans le cadre de l’enquête de flagrance, tandis qu’une autorisation du Parquet est obligatoire dans le cadre de l’enquête préliminaire (article 60 et suivants du Code de procédure pénale).   Le cadre d’enquête a donc un enjeu en termes d’étendue des pouvoirs des OPJ.   Arrêt du 18 décembre 2013 : pas de prolongation de l’enquête de flagrance par la découverte de nouveaux faits   En l’espèce, des policiers en patrouille de sécurité, passant au niveau d’un parking extérieur, non clos, d’une résidence privée, ont constaté la présence d’un véhicule dépourvu de certificat d’assurance, muni de double plaque d’immatriculation.   Leurs vérifications ont permis d’établir que le véhicule était volé et que les plaques étaient fausses.   Une enquête de flagrance était ouverte et un dispositif de surveillance du véhicule était mis en place.   Les investigations se poursuivaient dans le cadre d’une enquête préliminaire, au cours de laquelle les policiers découvraient d’autres véhicules volés, d’autres fausses plaques et un trafic de stupéfiants.   Ils délivraient dès lors, sans autorisation préalable du magistrat du Parquet, des réquisitions relatives à la vidéosurveillance et aux transactions bancaires liées, pouvoirs accordés dans l’unique cadre de l’enquête de flagrance.   La Cour de cassation rappelle que la découverte de nouveaux délits flagrants ne peut proroger le délai de 8 jours accordé à l’enquête de flagrance, car seule l’autorisation du Parquet ou l’ouverture d’une procédure de flagrance incidente aurait permis aux services de police de continuer à agir dans le cadre de la flagrance.
UNE ESCROQUERIE (CREATION D’UNE FAUSSE IDENTITE) PEUT ETRE JUSTIFIEE PAR LA LIBERTE D’EXPRESSION DES JOURNALISTES Arrêt de la Chambre Criminelle de la Cour de Cassation en date du 26 Octobre 2016, n°15-83.774 Un journaliste avait usé d’un faux nom et d’une fausse qualité pour créer de faux profils sur un réseau social et un site pour adhérer au Front National. Cela lui avait permis d’obtenir des documents qu’il avait utilisés dans un livre pour raconter son expérience. Par un arrêt du 26 octobre 2016, les juges ont confirmé l’ordonnance de non-lieu aux motifs que le journaliste n’avait pas l’intention de nuire au parti politique et avait pour seul objectif d’informer et d’avertir les lecteurs dans le cadre d’un débat d’intérêt général.
Dans quelles conditions un étranger s’étant opposé à une mesure d’éloignement du territoire français peut-il être condamné ? Les étrangers ne détenant pas un titre de séjour valide ou représentant une menace pour l’ordre public peuvent se voir appliquer différentes mesures d’éloignement. Parmi ces mesures se trouvent : –l’Obligation de quitter le territoire français : il s’agit d’une mesure administrative prise par le Préfet, obligeant un étranger en situation irrégulière à quitter le territoire par ces propres moyens dans un délai de 30 jours (ou sans délai), –l’Expulsion : il s’agit d’une mesure administrative prise par le Préfet ou le Ministre de l’Intérieur, visant à obliger un étranger, représentant une menace pour l’ordre public ou en cas d’urgence, à quitter le territoire, par la force si nécessaire, –l’Interdiction du territoire français : il s’agit d’une peine pénale appliquée à titre principale ou complémentaire, prise contre un étranger ayant commis un crime ou un délit, -la Remise à la frontière : cette mesure administrative est une reconduite à la frontière et oblige l’étranger à se rendre dans un autre Etat européen, l’étranger étant remis directement aux autorités étrangères.   L’étranger faisant l’objet de l’une de ces mesures a l’obligation de les respecter et a l’interdiction d’y faire obstacle d’une quelconque manière à son éloignement. En cas de refus ou d’obstacle de l’étranger à son éloignement, celui-ci peut être condamné sur le plan pénal.   La question qui se pose est celle de savoir dans quelles conditions cette condamnation peut avoir lieu.   De quelle peine s’agit-il ? En premier lieu, l’article L.824-1 du CESEDA (Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile) prévoit que : « Est puni de trois d’emprisonnement le fait, pour un étranger, de ne pas présenter à l’autorité administrative compétente les documents de voyage permettant l’exécution d’une interdiction administrative du territoire, d’une décision d’expulsion, d’une mesure de reconduite à la frontière ou d’une obligation de quitter le territoire français ou, à défaut de ceux-ci, de ne pas communiquer les renseignements permettant cette exécution ou de communiquer des renseignements inexacts sur son identité.L’étranger condamné en application du présent article encourt la peine complémentaire de dix ans d’interdiction du territoire français ».   L’article L.824-9 du CESEDA prévoit quant à lui : « Est puni de trois ans d’emprisonnement le fait, pour un étranger, de se soustraire ou de tenter de se soustraire à l’exécution d’une interdiction administrative du territoire français, d’une obligation de quitter le territoire français ou d’une décision d’expulsion. Cette peine est également applicable en cas de refus, par un étranger, de se soumettre aux modalités de transport qui lui sont désignées pour l’exécution d’office de la mesure dont il fait l’objet. Cette peine est également applicable en cas de refus, par un étranger, de se soumettre aux obligations sanitaires nécessaires à l’exécution d’office de la mesure dont il fait l’objet. L’étranger condamné en application du présent article encourt la peine complémentaire de dix ans d’interdiction du territoire français ».   Quelles sont les différentes étapes de la procédure d’éloignement à respecter avant une condamnation pénale ? La Cour de Justice de l’Union européenne a rappelé le 28 avril 2011 (arrêt EL DRIDI, affaire C-61/11) que toutes les mesures de nature administrative doivent être mises en œuvre avant toute condamnation pénale, en vertu de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008. Cette directive organise en effet les étapes successives à respecter, par degré de coercition croissant : -article 6 : étape initiale, les autorités peuvent prendre une mesure d’éloignement mais elles doivent privilégier son exécution volontaire, -article 7 : dans des conditions particulières telles qu’un risque de fuite, un délai pour exécuter peut être imposer, voire une exécution sans délai, -article 8 : en cas d’absence d’exécution, toutes les mesures nécessaires, y compris coercitives, peuvent être mises en œuvre, -article 15 : la rétention de l’étranger en vue de l’exécution peut être mise en œuvre. Les mesures les plus coercitives sont donc l’assignation à résidence et la rétention administrative (l’enfermement). Une fois ces différentes étapes réalisées de manière infructueuse, des sanctions pénales peuvent être prononcées. L’objectif de cette directive est donc de contraindre les Etats à réaliser toutes les démarches en vue de l’éloignement, et de condamner sur le plan pénal en cas d’échec de la procédure d’éloignement. Il ne s’agit ainsi pas de deux procédures appliquées parallèlement.   Que signifie l’application de sanctions pénales en cas d’échec de ces étapes ? Par trois arrêts du 13 avril 2023, la Cour de cassation est venue apporter des précisions sur cette condamnation pénale (pourvois n°22-81.676, n°22-85.816, n°22-84.426). La Cour de cassation a jugé que la sanction pénale ne peut avoir lieu avant que toutes les étapes de la procédure d’éloignement n’aient été réalisées. Elle précise que cela signifie : -la durée maximale d’une mesure de rétention a été atteinte, ou -il a été mis fin à cette mesure en raison du constat qu’il n’existe plus de perspectives d’éloignement.   Ainsi, la Cour de cassation a jugé qu’une sanction pénale sur le fondement des articles L.824-1 et L.824-9 du CESEDA ne peut être prononcée qu’en ultime recours, une fois tous les efforts en vue de l’éloignement mis en œuvre, et une fois les délais maximums de rétention atteints.   Pour conclure, il convient dès lors de vérifier que toutes les étapes ci-dessus rappelées ont été respectées, et que la rétention administrative avait atteint son délai maximum, faute de quoi une requête en nullité pourra être réalisée.
La Cour de cassation vient apporter son secours aux médecins pratiquant l’euthanasie Par un arrêt de la chambre criminelle de la Cour de cassation en date du 5 mars 2019, cette dernière a considéré que : « les faits, tel que dénoncés par les parties civiles, auraient été commis dans le cadre de la procédure collégiale même si ce protocole a été réalisé de manière imparfaite ce qui exclut toute intention de porter atteinte à la personne du patient et dès lors ne sont pas susceptibles de recevoir une qualification pénale» (Cass. Crim., 5 mars 2019, n°18-80.712). Il s’agissait de la très médiatique affaire Vincent Lambert. Les médecins ayant pratiqué l’euthanasie sur ce dernier avait utilisé la procédure prévue par la loi dite « Léonetti» dans sa version en vigueur à la date des faits (LOI n° 2005-370 du 22 avril 2005 relative aux droits des malades et à la fin de vie). Pour autant, dans le cadre de cette procédure collégiale, les médecins en question avaient commis un certain nombre d’erreurs dans le respect du protocole. Il s’agissait alors de savoir s’ils pouvaient être, en raison de ces erreurs, poursuivis pour tentative d’assassinat et violences sur personne vulnérable, non-assistance à personne en péril, délaissement d’une personne hors d’état de se protéger. Une plainte avec constitution de partie civile avait été déposée, la chambre de l’instruction n’avait pas prononcé un non-lieu mais plus radicalement encore l’irrecevabilité de la constitution de partie civile et un refus d’informer. Si on comprend bien, en opportunité, la décision de la Cour  est plus discutable sur le terrain du strict droit pénal car une telle exception n’avait évidement pas été prévue par la loi. La Cour a donc voulu protéger les médecins qui se risquent sur le terrain difficile de l’euthanasie en leur « permettant» quelques erreurs éventuelles dans la mise en place de la procédure prévue par la loi de 2005, sans qu’ils puissent néanmoins être poursuivi en raison de ses erreurs. La portée de cet arrêt est très importante car elle pourrait bénéficier à tous les auteurs de procédure irrégulière d’arrêt de soins.
Est complice d’exercice illégal de la médecine le médecin qui vend du matériel à la gérante d’un salon d’esthétique, non titulaire d’un doctorat en médecine, pour exercer des cryolipolyse et micro-needling Cass.crim., 31 janvier 2023, pourvoi n°22-83.399 En droit français, pour caractériser l’exercice illégal de la médecine, il est nécessaire d’être en présence d’un acte médical. L’arrêté du 6 janvier 1962 fixe la liste des actes médicaux pouvant être pratiqués que par des médecins ou pouvant être pratiqués également par des auxiliaires médicaux ou par des directeurs de laboratoires d’analyses médicales non médecins. Ensuite, le législateur a dressé une liste de comportements constitutifs d’exercice illégal de la médecine à l’article L. 4161-1 du Code de la santé publique :   Toute personne qui prend part habituellement ou par direction suivie, même en présence d’un médecin, à l’établissement d’un diagnostic ou au traitement de maladies, congénitales ou acquises, réelles ou supposées, par actes personnels, consultations verbales ou écrites ou par tous autres procédés quels qu’ils soient, ou pratique l’un des actes professionnels prévus dans une nomenclature fixée par arrêté du ministre chargé de la santé sans être titulaire d’un diplôme, certificat ou autre titre mentionné à l’article L. 4131-1 et exigé pour l’exercice de la profession de médecin, ou sans être bénéficiaire des dispositions spéciales mentionnées aux articles L. 4111-2 et suivants du Code de la santé publique. Toute personne qui se livre aux activités définies ci-dessus sans être de nationalité française, de citoyenneté andorrane ou ressortissant d’un Etat membre de l’Union européenne ou partie à l’accord sur l’Espace économique européen, du Maroc ou de la Tunisie, compte tenu, le cas échéant, des exceptions apportées par le Code de la santé publique. Toute personne qui, munie d’un titre régulier, sort des attributions que la loi lui confère, notamment en prêtant son concours aux personnes mentionnées aux 1° et 2°, à l’effet de les soustraire aux prescriptions du présent titre. Toute personne titulaire d’un diplôme, certificat ou tout autre titre de médecin qui exerce la médecine sans être inscrite à un tableau de l’ordre des médecins ou pendant la durée de la peine d’interdiction temporaire à l’exception des personnes mentionnées aux articles  4112-6 et L. 4112-7. Le médecin, le praticien de l’art dentaire ou la sage-femme qui exécute des actes professionnels sans remplir les conditions ou satisfaire aux obligations prévues audit article. Dans l’arrêt rendu par la chambre criminelle le 31 janvier 2023, un médecin a vendu à la gérante d’un salon d’esthétique, non-titulaire d’un titre lui permettant d’exercer des actes de médecine, des appareils réservés aux médecins afin qu’elle puisse pratiquer des actes de cryolipolyse et de micro-needling. De plus, le médecin avait dispensé des formations relatives à ces actes. Après avoir recouru à des actes de cryolipolyse et de micro-needling dans ce salon d’esthétique, des lésions sont apparues sur le corps de 4 clientes (tâches rougeâtres, gonflements, cloques, brûlures…). Une enquête a été ouverte et le médecin a été poursuivi du chef de complicité de l’exercice illégal de la médecine. La Cour d’appel confirmée par la Cour de cassation a considéré que tant la cryolipolyse (même à visée esthétique) que le micro-needling (bien que non expressément visée par le texte) constituent des actes médicaux entrant dans les prévisions de l’arrêté du 6 janvier 1962 et ainsi, en réserve la pratique aux médecins. Par conséquent, en vendant du matériel et en dispensant des formations à des individus non-titulaires du titre leur permettant d’exercer des actes médicaux, le médecin s’est porté complice par aide ou assistance, conformément à l’article 121-7 du Code pénal, à l’exercice illégal de la médecine.
Un policier peut-il fouiller mon véhicule lors d’un contrôle de police ? En droit français, la fouille des véhicules est strictement encadrée par le législateur. Celle-ci ne peut s’effectuer que dans des situations limitativement prévues par la loi.   1.Les situations permettant une fouille de véhicule En cas de flagrant délit   Le législateur a prévu à l’article 78-2-3 du Code de procédure pénale que « Les officiers de police judiciaire, assistés, le cas échéant, des agents de police judiciaire et des agents de police judiciaire adjoints mentionnés aux 1°, 1° bis et 1° ter de l’article 21, peuvent procéder à la visite des véhicules circulant ou arrêtés sur la voie publique ou dans des lieux accessibles au public lorsqu’il existe à l’égard du conducteur ou d’un passager une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu’il a commis, comme auteur ou comme complice, un crime ou un délit flagrant ; ces dispositions s’appliquent également à la tentative ». Ainsi, suite à un contrôle de police, si les agents habilités par le législateur soupçonnent le conducteur ou le passager d’avoir commis ou tenté de commettre une infraction flagrante, ils peuvent procéder à une fouille de véhicule. Ex : une odeur de produits stupéfiants dans la voiture, des bruits suspects entendus dans le coffre…   Sur réquisitions du procureur de la république   Sur réquisition du procureur de la République, sur un lieu et une période de temps qu’il détermine (elle ne peut excéder 24h), les officiers de police judiciaires assistés, le cas échéant, des agents de police judiciaire et des agents de police judiciaire adjoints, peuvent procéder à la visite des véhicules circulant, arrêtés ou stationnant sur la voie publique en vue de rechercher et de poursuivre certaines infractions. Ces infractions sont listées à l’article,78-2-2 du Code de procédure pénale et on retrouve notamment les actes de terrorisme (421-1 à 421-6 du Code pénal), les infractions en matière d’armes (222-54 du Code pénal et L317-8 du Code de la sécurité intérieure) mais également les faits de trafic de stupéfiants (222-34 et suivants du Code pénal).   Pour prévenir une atteinte grave à la sécurité et des biens   Pour prévenir une atteinte grave à la sécurité des personnes et des biens, les officiers de police judiciaire et, sur l’ordre et sous la responsabilité de ceux-ci, les agents de police judiciaire et les agents de police judiciaire adjoints peuvent procéder avec l’accord du conducteur ou, à défaut, sur instructions du procureur de la République communiquées par tous moyens, à la visite des véhicules circulant, arrêtés ou stationnant sur la voie publique ou dans des lieux accessibles au public (article 78-2-4 du Code de procédure pénale). Néanmoins, le véhicule ne peut être immobilisé plus de 30 minutes.   Aux fins de recherche et de poursuite de l’infraction prévue à l’article 431-10 du Code pénal L’article 431-10 du Code pénal réprime le fait de participer à une manifestation ou à une réunion publique en étant porteur d’une arme. Ainsi, pour rechercher et poursuivre cette infraction, les officiers de police judiciaire et sous la responsabilité de ceux-ci, les agents de police judiciaire peuvent, sur réquisitions écrites du procureur de la République, procéder sur les lieux d’une manifestation sur la voie publique et à ses abords immédiats à la visite des véhicules circulant, arrêtés ou stationnant sur la voie publique ou dans les lieux accessibles au public.   2.Les règles communes aux fouilles de véhicules Les règles applicables à la fouille des véhicules sont prévues à l’article 78-2-2 du Code de procédure pénale. La durée du contrôle Les véhicules en circulation ne peuvent être immobilisés que le temps strictement nécessaire au déroulement de la visite. La présence du conducteur ou du propriétaire du véhicule. Lorsque la fouille porte sur un véhicule à l’arrêt ou en stationnement, elle doit se dérouler en présence du conducteur ou du propriétaire du véhicule. A défaut, une personne requise à cet effet par l’officier ou l’agent de police judiciaire et qui ne relève pas de son autorité administrative doit être présente. Or, si la visite comporte des risques graves pour la sécurité des personnes ou des biens, la présence d’une personne extérieure n’est pas requise. Le cas particulier des véhicules à usage d’habitation Si le véhicule est spécialement aménagé à usage d’habitation (ex : un camping-car), ce sont les règles de la perquisition qui s’appliquent (cf : voir l’article « en enquête préliminaire, les agents de police judiciaire peuvent procéder à une perquisition dès lors qu’ils agissent sous le contrôle de l’officier de police judiciaire » pour les conditions légales de la perquisition).  
L’avis à famille relatif au placement en garde à vue doit être réalisé dès la demande du gardé à vue, mais peut aussi être reporté par le Procureur de la République, à condition que le motif légal de ce report figure en procédure Qu’est ce que l’avis à famille ? Selon l’article 63-1 du Code de procédure pénale, lorsqu’une personne est placée en garde à vue, l’officier de police judiciaire (ou un agent de police judiciaire sous son contrôle) doit lui notifier qu’elle a notamment le droit de « faire prévenir un proche et son employeur ou toute autre personne qu’elle désigne ainsi que, si elle est de nationalité étrangère, les autorités consulaires de l’Etat dont elle est ressortissante, et, le cas échéant, de communiquer avec ces personnes ». L’avis à famille a pour objectif de laisser l’opportunité à la personne placée en garde à vue de prévenir un proche, qui pourra lui venir en aide (désigner un avocat, prendre en charge les enfants, prévenir de l’absence à un rendez-vous etc). Qui est concerné par cet avis ? L’article 63-2 du Code de procédure pénale prévoit que les personnes pouvant être avisées sont : -la personne avec qui le gardé à vue habite habituellement, -ses parents en ligne directe, -ses frères ou sœurs, -toute autre personne qu’il désigne. Il convient de préciser que la personne gardée à vue peut notamment faire prévenir son tuteur ou son curateur dans le cadre de cet avis, sur le fondement de l’article 63-2 du Code de procédure pénale, s’il fait l’objet d’une protection judiciaire. En effet, au stade de la garde à vue, aucune disposition n’impose aux enquêteurs de le prévenir (Cass.crim., 11 décembre 2018, n°18-80.872). Comment est réalisé cet avis ? La personne gardée à vue doit fournir aux enquêteurs les coordonnées de la personne qu’elle souhaite faire prévenir, ou un moyen de la trouver. Si la personne placée en garde à vue est dans l’incapacité de fournir son numéro de téléphone, ne peut donner l’adresse de la personne à aviser, ne peut conduire les enquêteurs à son domicile, et que cette personne n’a pu être trouvée sur les pages blanches de l’annuaire, il ne pourra être reproché aux enquêteurs un avis à famille infructueux (Cour d’appel de RENNES, 13 aout 2016, n°16/00294). De plus, l’article 63-2 du Code de procédure pénale prévoit que cet avis est réalisé « par téléphone ». Selon la jurisprudence, cet avis par téléphone signifie seulement que les enquêteurs doivent prévenir la personne désignée à l’aide d’un téléphone, sans préciser s’il peut ou doit s’agir d’un appel ou d’un message. Il ne peut leur être reproché de ne pas avoir laissé un message à la personne désignée, dès lors que les enquêteurs l’ont appelé et que cette personne n’a pas répondu (Cour d’appel de PARIS, 18 mai 2022, n°22/01430). Dans le cas contraire, l’avis réalisé par simple message SMS, sans avoir appelé la personne désignée, suffit à respecter les dispositions législatives à savoir un avis par téléphone (Cour d’appel de RENNES, 14 juin 2017, n°17/00268). Un message vocal suffit également à considérer l’avis à famille réalisé (Cour d’appel de VERSAILLES, 17 février 2009, n°09/01252). Plus encore, il ne peut être reproché aux enquêteurs de ne pas avoir tenté d’appeler plusieurs fois la personne désignée (Cour d’appel de PARIS, 22 septembre 2007, n°07/02657). En effet, l’obligation de prévenir la famille en cas de demande de la personne placée en garde à vue est seulement une obligation de moyen, signifiant qu’il suffit aux enquêteurs de démontrer qu’ils ont réalisé l’avis, sans avoir à démontrer que la personne a effectivement répondu à l’information. Quel délai pour réaliser cet avis ? L’article 63-2 du Code de procédure pénale prévoit que cet avis à famille doit être réalisé dans un délai de 3 heures : « Sauf en cas de circonstance insurmontable, qui doit être mentionnée au procès-verbal, les diligences incombant aux enquêteurs ou, sous leur contrôle, aux assistants d’enquête en application du premier alinéa doivent intervenir au plus tard dans un délai de trois heures à compter du moment où la personne a formulé la demande ». N’est pas considérée comme une circonstance insurmontable faisait obstacle à ce délai l’intervention d’un interprète si l’avis à famille pouvait être fait dans les 3 heures. En l’espèce, l’enquêteur, qui avait eu des difficultés à trouver un interprète pour réaliser l’avis à famille, avait procédé à l’audition de la personne placée en garde à vue avant l’avis à famille. Or, si l’avis à famille, qui est prioritaire sur l’audition, avait été réalisée avant celle-ci, le délai de 3 heures aurait été respecté. Rien ne justifiait donc ce retard (Cour d’appel de PARIS, 19 septembre 2007, n°07/02617). En revanche, constitue une circonstance insurmontable le fait pour les enquêteurs d’avoir été mis en échec dans la prise de contact avec la personne désignée, du fait de la personne placée en garde à vue. En l’espèce, cette dernière avait fourni une adresse erronée aux enquêteurs, qui n’ont pu contacter la personne désignée dans les délais (Cass.crim., 7 juin 2011, n°10-85.565). En cas de présence d’un interprète, il convient aux enquêteurs de prouver que d’autres actes étaient prioritaires ou plus urgents que l’avis à famille pour justifier un retard dans sa réalisation (Cour d’appel de PARIS, 18 septembre 2007, n°07/02607). Enfin, constitue une circonstance insurmontable le fait pour la personne gardée à vue d’être dans l’impossibilité de fournir les coordonnées de la personne désignée, et l’absence de cette personne sur les pages blanches de l’annuaire (Cour d’appel de RENNES, 13 aout 2016, n°16/00294). Comment faire lorsque la personne avisée ne parle pas français ? Si la personne désignée ne parle pas français, le Code de procédure pénale ne prévoit pas d’obligation de faire appel à un interprète (Cour d’appel de VERSAILLES, 1er février 2010, n°10/00724). En revanche, rien n’empêche les enquêteurs de faire appel aux services d’un interprète (Cour d’appel de PARIS, 18 septembre 2007, n°07/02607 ; Cour d’appel de PARIS, 19 juillet 2007, n°07/01921). L’avis peut-il faire l’objet d’un report ? L’article 63-2 du Code de procédure pénale prévoit également que cet avis peut être différé ou ne pas être réalisé s’il existe un risque : « Le procureur de la République peut, à la demande de l’officier de police judiciaire, décider que l’avis prévu au premier alinéa du présent I sera différé ou ne sera pas délivré si cette décision est, au regard des circonstances, indispensable afin de permettre le recueil ou la conservation des preuves ou de prévenir une atteinte grave à la vie, à la liberté ou à l’intégrité physique d’une personne ». Il peut s’agir par exemple de la demande d’aviser un membre de sa famille du placement en garde à vue, alors que ce membre pourrait avoir un lien avec l’affaire. Cependant, il ne suffit pas au Procureur de la République de décider de ce report, il faut encore qu’il indique dans la procédure le motif de ce report, parmi ceux limitativement énumérés par cet article (Cass.crim., 7 février 2024, n°22-87.426). Conséquences du non-respect des dispositions Selon le Code de procédure pénale et la jurisprudence, il existe trois moyens de nullités de l’avis à famille pouvant entrainer la nullité de la mesure de garde à vue : -Absence d’avis à famille malgré demande de la personne placée en garde à vue, -Avis à famille tardif non justifié par des circonstances insurmontables, -Absence de motif justifiant le report de l’avis à famille. La jurisprudence a en effet rappelé que le droit à prévenir un membre de sa famille de la mesure de garde à vue est un « droit essentiel » (Cour d’appel de PARIS, 11 juin 2008, n°08/02079). Le non-respect de ce droit peut entraîner la remise en liberté de l’individu placé en rétention administrative, sur saisine du Juge des libertés et de la détention (Cour d’appel de PARIS, 11 juin 2008, n°08/02079). Le non-respect de ce droit peut également faire l’objet d’un moyen de nullité. Il convient cependant de noter que la Cour de cassation sollicite la démonstration d’un grief tiré du non-respect de ce droit (Cass.crim., 7 juin 2011, n° 10-85.565 ; Cass.crim., 7 février 2024, n°22-87.426).  
La garde à vue doit rester l’exception, si une simple audition libre peut suffire pour entendre le prévenu et s’il existe des garanties suffisantes de sa présentation devant le procureur de la République.   Cour de cassation, Chambre criminelle, 7 juin 2017, 16-87.588   La Chambre criminelle de la Cour de cassation, dans un arrêt en date du 7 juin 2017, a rappelé que la liberté est le principe et la contrainte est l’exception, dans le cadre de la garde à vue. En effet, selon l’article 62-2 du Code de procédure pénale, la garde à vue est une mesure de contrainte, et doit être l’unique moyen de parvenir à l’un des objectifs suivants : « 1° Permettre l’exécution des investigations impliquant la présence ou la participation de la personne ; 2° Garantir la présentation de la personne devant le procureur de la République afin que ce magistrat puisse apprécier la suite à donner à l’enquête ; 3° Empêcher que la personne ne modifie les preuves ou indices matériels ; 4° Empêcher que la personne ne fasse pression sur les témoins ou les victimes ainsi que sur leur famille ou leurs proches ; 5° Empêcher que la personne ne se concerte avec d’autres personnes susceptibles d’être ses coauteurs ou complices ; 6° Garantir la mise en œuvre des mesures destinées à faire cesser le crime ou le délit. »   Cela signifie donc que la mesure de garde à vue ne peut être appliquée de manière automatique et doit restée l’exception, justifiée par une nécessité précise. En l’espèce, le prévenu était notaire et était suspecté d’avoir commis des faits de faux en écriture publique aggravé, de faux et usage, et d’escroquerie. La procédure démontrait qu’il avait coopéré avec les gendarmes, en l’espèce : -en ayant déféré aux réquisitions aux fins de remise de pièces, -en ayant remis une seconde fois des pièces utiles à l’enquête de sa propre initiative, -en s’étant présenté à la gendarmerie pour être entendu. A l’occasion de cette audition, il était toutefois placé en garde à vue au seul motif que cette mesure constituait l’unique moyen de garantir sa présentation devant le procureur de la République. Le prévenu déposait une requête en nullité de la mesure de garde à vue et des actes subséquents. La Chambre de l’instruction décidait que la mesure de garde à vue ne constituait pas l’unique moyen de garantir sa présentation, considérant qu’il avait coopéré avec les forces de l’ordre et qu’il disposait d’une famille et d’une situation connue. Elle considérait dès lors qu’une simple audition libre aurait suffi et que la mesure de garde à vue était irrégulière car non justifiée. Cette décision a été confirmée par la Cour de cassation, rappelant ainsi que la mesure de garde à vue doit être appliquée de manière exceptionnelle.
Ne peuvent être retranscrites dans les PV les propos d’une personne placée en garde à vue précédant la notification de son droit au silence.   Cass.crim., 22 novembre 2023, n° 23-80-575   Rappel des faits Le 5 octobre 2021 Monsieur K et Monsieur O, respectivement chauffeur et client, se sont fait interpellés par des fonctionnaires de police.  Cependant, ces individus n’ont dans l’instant pas cru qu’il s’agissait de représentants de l’autorité mais au contraire de passants mal intentionnés tentant de s’en prendre à eux. Le client demande donc au chauffeur d’accélérer, pour fuir. Dans leur fuite ils écrasent un fonctionnaire de police ayant tentés de les interpeller avant d’être intercepté.   Placés en garde à vue notamment pour ce motif : tentative de meurtre sur personne dépositaire de l’autorité publique, Monsieur O s’étonne et fait part aux agents lui notifiant ces droits de la crainte d’une agression par des individus malintentionnés au moment des faits et non des forces de polices. L’enquêteur retranscrit ces propos dans un procès-verbal de renseignement. Or, à ce moment-là Monsieur O n’avait pas encore été informé de son droit de garder le silence : s’agit-il donc d’une violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l’homme, préliminaire et 63-1 du code de procédure pénale ?   Rappel de la procédure en la matière : l’article 803-6 du code de procédure pénale Principes L’article 803 du code de procédure pénal rappelle que toute personne suspectée ou poursuivie soumise à une mesure privative de liberté – une garde à vue – a le droit  » lors des auditions ou interrogatoires, de faire des déclarations, de répondre aux questions qui lui sont posées ou de se taire ». Le gardé à vue doit être informé de ces droits dès le début de la garde. En effet, la notification constitue la première étape du déroulement de la garde à vue.   1.2 Nuances L’article 6 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme prévoit que tout accusé a le droit d’être informé dans les plus court délais de ses droits, d’une manière détaillée de la nature de l’accusation portée contre lui ainsi que de la cause de cette accusation. L’article 63-1 prévaut par ailleurs que l’omission, lors de la notification du gardé à vue, d’une partie des faits qu’il est soupçonné d’avoir commis ou tenté de commettre ne peut entraîner une nullité que si les propos prononcés portent atteinte à ses intérêts. C’est en se basant sur le caractère incriminant des propos que la Cour de Cassation est en mesure de s’assurer que les réponses aux questions des enquêteurs ne portaient pas atteintes aux intérêts du prévenu.   Une réponse favorable de la Cour de Cassation La réclamation de l’annulation du procès-verbal par un prévenu avant toute défense de fond, faute d’avoir été notifié de son droit de se taire n’entraîne pas une modification de la situation juridique du prévenu. Cependant, la Cour répond que tant qu’une raison impérieuse tenant aux circonstances n’a pas été prononcée, avérée, décrétée, le recueil des déclarations spontanés de Monsieur O n’avait pas lieu d’être. L’enquêteur ne pouvait donc retranscrire les propos dans le procès-verbal de renseignement ou dans aucun autre procès-verbal.   L’impact de l’arrêt du 5 janvier 2023 L’arrêt de la cour d’appel de Nancy n’a pas été cassé par la Cour de Cassation car la culpabilité des prévenus n’était ni uniquement ni majoritairement fondée sur les propos du prévenu avant la complète notification de ces droits, notamment celui de se taire. En outre, les propos tenus par le prévenu n’étant pas de nature à l’incriminer ni à permettre la recherche d’une personne en péril, la Cour a décidé de soutenir la décision de la juridiction souveraine de Nancy. En effet, les charges retenues contre les prévenus étaient d’une autre nature que celles dont ils demandaient l’annulation (trafic de stupéfiants).   La difficile consécration du principe de la nullité relative de certains actes de la procédure pénale L’arrêt du 23 avril 1991 de la Cour de Cassation expose d’autres éléments qui réaffirment la difficulté de l’aboutissement du principe de la nullité de la procédure suite à l’absence de notification des droits ou à une notification partielle. En effet, la cour d’appel, après avoir fait droit à la demande d’annulation du gardé à vue, peut énoncer que la convocation par OPJ – officier de police judiciaire – devant le tribunal correctionnel constitue un acte différent de la garde à vue qui ne saurait être atteint des irrégularités réalisées lors de la mesure coercitive. La cour a donc une autre pièce sur laquelle fonder sa décision, l’absence de la notification des droits lors de la garde à vue ne saurait entraîner la nullité de l’intégralité de la procédure.   POUR ALLER PLUS LOIN Vis-à-vis de la réponse de la Cour de Cassation Il est nécessaire de garder à l’esprit que tant que la Cour de Cassation est en mesure d’assurer que la cour d’appel s’est appuyée sur d’autres éléments que le seul procès -verbal faisant état des propos tenus avant la notification complète des droits lors de l’audience en garde à vue pour condamner le prévenu. En outre, la chambre d’instruction n’est pas dans l’obligation d’annuler une garde à vue lorsque le prévenu ne s’est pas vu notifier son droit de garder le silence ou de se faire assister d’un avocat au début de la restriction de liberté, si la non notification de ce droit a été sans incidence sur la spontanéité des propos de l’intéressé tant qu’ils avaient une finalité de rechercher une personne en péril. Par ailleurs il est important de rappeler que certaines circonstances sont insurmontables et ne peuvent donc pas faire l’objet du principe de nullité pour non notification des droits, notification tardive ou notification partielle. L’une de ces circonstances est la circonstance insurmontable d’ébriété sur laquelle jurisprudence a eu l’occasion de statuer: “Aucune nullité ne saurait résulter  de la notification tardive des droits du gardé à vue, la cour d’appel ayant caractérisé la circonstance insurmontable puisque l’alcoolémie diminuant de 0,10 à 0,15 grammes par litre de sang par heure écoulée, le délai de plus de quatorze heures respecté par les enquêteurs étaient nécessaires pour que la personne concernée soit en mesure de comprendre ses droits” (Crim. 6 déc. 2016 n°15-86. 619). Pour approfondir le principe de nullité nous vous recommandé notre article Nullité/ La nullité en matière pénale.
Quels sont les nouveaux droits en garde à vue en 2024 ?   La garde à vue est une mesure de contrainte d’une personne à l’encontre de laquelle il existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu’elle a commis ou tenté de commettre un crime ou un délit puni d’une peine d’emprisonnement afin qu’elle soit maintenue à la disposition des enquêteurs (Article 62-2 du Code de procédure pénale)   Le 28 septembre 2023, la France a fait l’objet d’un avis de la part de la Commission européenne concernant la conformité de la procédure pénale française avec la Directive européenne du 22 octobre 2013 relative au droit d’accès à un avocat pour les procédures pénales et procédures de mandat d’arrêt européen, au droit d’informer un tiers dès la privation de liberté et au droit des personnes privées de liberté de communiquer avec des tiers et avec les autorités consulaires. Pour remédier à cela, la loi n°2024-364 du 22 avril 2024 modifie le Code de procédure pénale en matière de garde à vue.   Tout d’abord, l’article 63-2 du Code de procédure pénale a été modifié pour se conformer aux exigences de la Commission européenne. Désormais, la personne gardée à vue peut prévenir la personne qu’elle souhaite, et non plus seulement une personne avec laquelle elle vit habituellement, un parent ou un frère et sœur. L’objectif est de laisser au gardé à vue le choix de la personne qu’elle souhaite prévenir de cette mesure et avec qui elle voudrait communiquer.   « Toute personne placée en garde à vue peut, à sa demande, faire prévenir, par téléphone, une personne avec laquelle elle vit habituellement ou l’un de ses parents en ligne directe ou l’un de ses frères et sœurs ou toute autre personne qu’elle désigne de la mesure dont elle est l’objet ». (Article 63-2 du Code de procédure pénale)   Ensuite, la demande d’assistance d’un avocat par le gardé à vue a été modifiée, de sorte que ce dernier peut désormais le demander « à tout moment » au cours de la garde à vue.   « Dès le début de la garde à vue et à tout moment au cours de celle-ci, la personne peut demander à être assistée par un avocat désigné par elle ou commis d’office » (Article 63-3-1 du Code de procédure pénale)   De plus, selon la Commission Européenne, l’Union Européenne impose aux Etats membres un droit pour tout suspect ou toute personne poursuivie à ce qu’un avocat soit physiquement présent lors de son audition. Pour s’y conformer, la loi du 22 avril 2024 a supprimé le délai dit « de carence » selon lequel la personne gardée à vue ne peut être entendue sans la présence de son avocat pendant un délai de deux heures à compter de l’avis de saisine de l’avocat. Cependant, ce principe connait des exceptions puisqu’il est possible d’auditionner le gardé à vue sans la présence de son avocat s’il renonce à son droit d’assistance, ou bien si le Procureur de la République justifie la nécessité de procéder immédiatement à l’audition de la personne gardée à vue sans attendre l’arrivée de l’avocat. « Si l’avocat désigné dans les conditions prévues aux deux premiers alinéas du présent article ne peut être contacté ou déclare ne pas pouvoir se présenter dans un délai de deux heures à compter de l’avis qui lui a été adressé ou si la personne gardée à vue a demandé à être assistée par un avocat commis d’office, l’officier de police judiciaire ou, sous son contrôle, l’agent de police judiciaire ou l’assistant d’enquête saisit sans délai et par tous moyens le bâtonnier aux fins de désignation d’un avocat commis d’office. Il en informe la personne gardée à vue. » (Article 63-3-1 du Code de procédure pénale)   Enfin, l’avocat a désormais le droit de consulter les procès-verbaux d’audition, ainsi que les procès-verbaux de confrontation des parties. Auparavant, seuls les procès-verbaux d’audition pouvaient être consultés par l’avocat.   « Si des auditions et confrontations ont été décidées en application du deuxième alinéa de l’article 63-4-2 ou de l’article 63-4-2-1, l’avocat peut également consulter les procès-verbaux de ces auditions et confrontations » (Article 63-4-1 du Code de procédure pénale)
Sous conditions, la prise d’empreintes peut être contrainte, depuis une loi du 24 janvier 2022 Conseil Constitutionnel – Décision n° 2022-1034 QPC   Alors que l’article 55-1 du Code de procédure pénale prévoyait qu’en cas de refus de se soumettre aux opérations de prélèvement d’empreintes, seule une infraction pouvait être retenue contre le suspect, la loi du 24 janvier 2022 n°2022-52 relative à la responsabilité pénale et à la sécurité intérieure prévoit désormais en complément la possibilité de contraindre le suspect à s’y soumettre. En effet, l’article 55-1 du Code comprend désormais un alinéa 5 : « Sans préjudice de l’application de l’avant-dernier alinéa, lorsque la prise d’empreintes digitales ou palmaires ou d’une photographie constitue l’unique moyen d’identifier une personne qui est entendue en application des articles 61-1 ou 62-2 pour un crime ou un délit puni d’au moins trois ans d’emprisonnement et qui refuse de justifier de son identité ou qui fournit des éléments d’identité manifestement inexacts, cette opération peut être effectuée sans le consentement de cette personne, sur autorisation écrite du procureur de la République saisi d’une demande motivée par l’officier de police judiciaire. L’officier de police judiciaire ou, sous son contrôle, un agent de police judiciaire recourt à la contrainte dans la mesure strictement nécessaire et de manière proportionnée. Il tient compte, s’il y a lieu, de la vulnérabilité de la personne. Cette opération fait l’objet d’un procès-verbal, qui mentionne les raisons pour lesquelles elle constitue l’unique moyen d’identifier la personne ainsi que le jour et l’heure auxquels il y est procédé. Le procès-verbal est transmis au procureur de la République, copie en ayant été remise à l’intéressé ». Cette disposition a été validée par le Conseil constitutionnel par une décision du 10 février 2023, au motif qu’elle a pour objectif de faciliter l’identification des mis en cause au cours d’une enquête pénale. Le Conseil constitutionnel a cependant rappelé les différentes conditions qui devront être respectées afin que cette contrainte soit valable : L’Officier de Police judiciaire doit en faire la demande motivée, Le Procureur de la République doit donner une autorisation écrite de contraindre à la prise d’empreintes, Cette contrainte doit être l’unique moyen d’identifier une personne qui refuse de justifier de son identité ou fournit des éléments manifestement inexacts, Il doit exister des raisons plausibles de soupçonner qu’elle ait commis ou tenté de commettre un crime ou un délit puni d’au moins trois ans d’emprisonnement, La contrainte doit être strictement limitée au nécessaire et proportionnée, et prendre en compte la personne et notamment sa vulnérabilité, Un avocat doit être présent.   Ces conditions sont cumulables. L’infraction de refus, par une personne à l’encontre de laquelle il existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu’elle a commis ou tenté de commettre une infraction, de se soumettre aux opérations de prélèvement, est également cumulable avec ces nouvelles dispositions. Bien que la jurisprudence en matière de nullité ne se soit pas encore prononcée sur ces dispositions, il convient dès lors de vérifier l’existence de chacune de ces conditions afin de demander la nullité d’une prise d’empreintes contrainte en violation de l’article 55-1 alinéa 5 du Code de procédure pénale.
Les déclarations spontanées d’un gardé à vue transféré au commissariat ne peuvent être intégrées dans la procédure   Cass.crim., 25 avril 2017, n°16-87.518   Le Code de procédure pénale a prévu un cadre dans lequel la personne placée en garde à vue peut être entendue et ses déclarations peuvent être retranscrites. En ce sens, les articles 63-1 et 63-3-1 du Code de procédure pénale prévoient la possibilité pour la personne placée en garde à vue d’être assistée par un avocat et le droit de se taire. L’article 63-4-2 du Code de procédure pénale prévoit quant à lui que dans le cas où la personne placée en garde à vue a choisi d’être assistée d’un avocat, celui-ci doit être présent dans le cadre des auditions, hormis les cas où il aurait du retard. La jurisprudence a précisé que les déclarations spontanées de la personne placée en garde à vue ne pouvaient être recueillies par les enquêteurs lorsqu’elles sont recueillies en dehors de ces cadres légaux. C’est notamment la solution de la Cour de cassation du 25 avril 2017. Arrêt du 25 avril 2017 En l’espèce, la personne gardée à vue avait été déplacée par les enquêteurs en vue d’une perquisition, dans le cadre d’une procédure pour tentative de meurtre, violences aggravées et infraction à la législation sur les armes. Alors qu’il se trouvait dans un véhicule avec des enquêteurs, en chemin pour rentrer au Commissariat, l’individu expliquait spontanément aux enquêteurs les circonstances dans lesquelles il était entré en possession de l’arme utilisée, et qu’il n’avait pas eu l’intention de tirer et de viser la victime. Les enquêteurs retranscrivaient ces déclarations dans un procès-verbal. L’individu était mis en examen des chefs susvisés. Il déposait une requête en nullité de ce procès-verbal et la Cour d’appel faisait droit à sa requête. La Cour d’appel jugeait que l’individu avait sollicité l’assistance d’un avocat et n’y avait pas renoncé de manière équivoque. Il ne pouvait dès lors être entendu que dans le cadre d’une audition, en présence de son avocat. Par ailleurs, aucune circonstance exceptionnelle ne justifiait que les déclarations ne soient pas recueillies une fois dans le Commissariat, dans le cadre d’une audition. La Cour de cassation a validé cette argumentation, et rappelait l’importance pour les enquêteurs de respecter le cadre légal prévu, à savoir une audition au cours de laquelle l’individu peut être assisté d’un avocat et faire usage de son droit au silence. Dans ces conditions, ce procès-verbal pouvait être annulé. Cette décision était d’autant plus importante que l’individu avait fait des déclarations auto incriminantes dans ce véhicule. La jurisprudence a eu l’occasion à plusieurs reprises de rappeler ce cadre légal et l’interdiction de recueillir des déclarations spontanées en dehors de toute audition ou interrogatoire. D’autres exemples de déclarations spontanées entrainant la nullité des actes A titre d’exemple, la Cour de cassation a pu casser l’arrêt d’une Cour d’appel qui avait validé le procès-verbal d’enquêteurs ayant recueillis des déclarations spontanées après un interrogatoire de première comparution. L’individu avait fait usage de son droit au silence lors de cet interrogatoire, puis se livrait aux enquêteurs dans le cadre de son transfert en maison d’arrêt. Selon la Cour de cassation, les enquêteurs ne pouvaient retranscrire ses déclarations dans un procès-verbal, mais pouvaient uniquement informer le Juge d’instruction de la volonté du mis en examen de s’exprimer (Cass.crim., 5 mars 213, n°12-87.087).   De la même manière, il est acquis par la jurisprudence que la retranscription de déclarations recueillies dans le cadre de la sonorisation des cellules de garde à vue est interdite. Ainsi, il n’est pas possible pour les enquêteurs d’enregistrer les déclarations spontanées de personnes placées en garde à vue, réalisées en dehors de tout cadre légal, de toute audition, et sans la présence d’un avocat, et de les retranscrire dans un procès-verbal (Cass. AP., 6 mars 2015, n°14-84.339).   Enfin, la retranscription de déclarations spontanées réalisées avant la notification des droits à la personne placée en garde à vue est également interdite et peut faire l’objet d’une annulation. En l’espèce, au passage d’un enquêteur, un individu lui demandait les motifs de son placement en garde à vue, puis reconnaissait avoir commis les faits reprochés. L’enquêteur retranscrivait sur procès-verbal la teneur des propos tenus. Compte tenu de son état alcoolisé, la notification des droits n’avait pas encore eu lieu. La Cour de cassation cassait l’arrêt de la Cour d’appel, au motif que les déclarations spontanées réalisées avant toute notification des droits au silence et d’être assisté d’un avocat ne pouvaient être retranscrites (Cass.crim., 5 juin 2019, n°18-83.590).   Dans le cas où des déclarations spontanées seraient réalisées hors présence de l’avocat et en dehors du cadre de l’audition, il conviendrait de solliciter la nullité du procès-verbal retranscrivant ces déclarations.
Une personne placée en garde à vue doit être informée qu’un tiers a désigné un avocat pour l’assister Cass.crim., 4 octobre 2016, n°16-81.778   1. Le droit à être assisté d’un avocat La présence de l’avocat au stade de la garde à vue est un droit reconnu par le Code de procédure pénale, dont l’article 63-3-1, en son premier alinéa, prévoit que : « Dès le début de la garde à vue, la personne peut demander à être assistée par un avocat ». Ce droit d’être assisté d’un avocat doit être notifié à la personne immédiatement après son placement en garde à vue, par l’officier de police judiciaire (article 63-1 du Code de procédure pénale) : « La personne placée en garde à vue est immédiatement informée par un officier de police judiciaire ou, sous le contrôle de celui-ci, par un agent de police judiciaire, dans une langue qu’elle comprend, le cas échéant au moyen du formulaire prévu au treizième alinéa : (…) 3° Du fait qu’elle bénéficie : (…) –du droit d’être assistée par un avocat, conformément aux articles 63-3-1 à 63-4-3 ». Le non-respect de la notification du droit d’être assisté d’un avocat, et le non-respect de la demande d’être assisté par un avocat sont sanctionnés par la nullité de la mesure de garde à vue (cass.crim., 24 juin 2009, n°08-87.241, cass.crim., 2 décembre 2015, n°13-83.787, cass.crim., 5 novembre 2013, n°13-82.682, cass.crim., 28 juin 2015, n°04-50.050). Il convient de rappeler que si la personne ne sollicite pas dès le début de sa garde à vue l’assistance d’un avocat, elle peut le faire à tout moment (cass.crim., 5 novembre 2013, n°13-82.682). 2. Les modes de désignation d’un avocat L’article 63-3-1 du Code de procédure pénale prévoit plusieurs modes de désignation d’un avocat, laissé au libre choix de la personne placée en garde à vue : -la désignation d’un avocat choisi par le gardé à vue, -la désignation d’un avocat commis d’office par le bâtonnier, -la désignation d’un avocat choisi par un tiers. Dans le cas où la personne a choisi un avocat et le désigne pour l’assister, les officiers de police judiciaire doivent prendre contact avec cet avocat dans les meilleurs délais. S’ils n’arrivent pas à le joindre, ils doivent en informer la personne placée en garde à vue, qui pourra choisir la désignation d’un avocat commis d’office. Enfin, la personne gardée à vue peut faire prévenir un membre de sa famille (parents en ligne directe, frères, sœurs) ou la personne avec laquelle elle vit habituellement de son placement en garde à vue (article 63-2 du Code de procédure pénale). Les personnes susceptibles d’être prévenues de la mesure de garde à vue sont limitativement énumérées. Ce tiers est dès lors en droit de saisir un avocat qui assistera la personne gardée à vue. Cet avocat pourra l’assister si cette désignation est confirmée par la personne prévenue (article 63-3-1 du Code de procédure pénale). L’article 63-3-1 du Code de procédure pénale autorise les seules personnes prévues par l’article 63-2 du même Code à désigner un avocat. Plus précisément, seule la personne nommément citée par la personne placée en garde à vue et prévenue de la mesure pourra désigner un avocat (Cass.crim. 13 novembre 2018, n°18-82.108). Il en ressort qu’à titre d’exemple, si la personne gardée à vue a choisi de faire prévenir sa mère, son père ne pourra désigner un avocat (Cass.crim., 19 octobre 2021, n°21-81.569). Il ressort de cette jurisprudence que l’audition réalisée sans la présence d’un avocat, alors qu’un avocat avait été désigné par un tiers autre que la personne prévenue, ne pourra faire l’objet d’une annulation pour vice de procédure. Si l’avocat est choisi par un tiers, l’officier de police judiciaire doit en informer la personne placée en garde à vue, comme l’a rappelé la Cour de cassation le 4 octobre 2016. 3. L’arrêt du 4 octobre 2016 : l’obligation d’informer le gardé à vue en cas de désignation par un tiers En l’espèce, un individu était placé en garde à vue pour des faits de viol, et sa mère était informée de la mise en place de la mesure par l’officier de police judiciaire. Le gardé à vue avait refusé l’assistance d’un avocat lors de la notification de ses droits. Sa mère avait de son côté contacté un avocat qui, à son tour, avait contacté le commissariat pour se faire connaitre. L’officier de police judiciaire lui a répondu que le gardé à vue refusait d’être assisté d’un avocat, de sorte que l’accès à son client lui a été refusé, et n’a pas prévenu le gardé à vue qu’un avocat avait été saisi par sa mère. Le gardé à vue a de nouveau refusé l’assistance d’un avocat lors de la prolongation de la mesure et a fait des déclarations l’incriminant. L’individu déposait une requête en nullité de la mesure de garde à vue, au motif qu’il n’avait pas été informé de la saisine d’un avocat par sa mère. La Cour d’appel avait rejeté sa requête, au motif qu’il avait refusé d’être assisté, et qu’il ne démontrait pas que sa mère avait confirmé à l’officier de police la désignation de l’avocat. La Cour de cassation a cassé cet arrêt de la Cour d’appel, jugeant qu’il importe peu que le gardé à vue ait refusé d’être assisté d’un avocat. L’officier de police doit toujours l’informer qu’un avocat a été désigné par un tiers, afin qu’il puisse dire s’il accepte ou non d’être assisté par cet avocat.
Le non-respect des prescriptions médicales entraîne la nullité de la garde à vue   Cass.crim., 14 mars 2017, n°16-84.352   L’article 63-3 du Code de procédure pénale : droit à être examiné par un médecin L’article 63-3 du Code de procédure pénale prévoit le droit pour toute personne placée en garde à vue d’être examinée par un médecin : « Toute personne placée en garde à vue peut, à sa demande, être examinée par un médecin désigné par le procureur de la République ou l’officier de police judiciaire. En cas de prolongation, elle peut demander à être examinée une seconde fois. (…) Le médecin examine sans délai la personne gardée à vue. Le certificat médical par lequel il doit notamment se prononcer sur l’aptitude au maintien en garde à vue est versé au dossier ».   Non-respect des prescriptions du médecin : nullité de la garde à vue La Cour de cassation a eu l’occasion de rappeler l’obligation pour les enquêteurs de respecter les prescriptions du médecin, par un arrêt du 14 mars 2017. En l’espèce, la personne placée en garde à vue avait fait un malaise lors d’une perquisition et avait été conduite à l’hôpital, mais n’avait pas été admise. Un médecin l’examinait plusieurs heures plus tard, et déclarait son état compatible avec la mesure de garde à vue, sous réserve d’être transportée à l’hôpital deux fois par jour, à 8H puis à 20H. Ce certificat était émis à 3H26. Les enquêteurs réalisaient une nouvelle perquisition à 7H30, faisant obstacle au respect de cette prescription. Lors de cette nouvelle perquisition, la personne placée en garde à vue faisait un malaise et était de nouveau conduite à l’hôpital. Le Juge d’instruction mettait fin à la garde à vue.   La nullité de la garde à vue était sollicitée par le requérant, mais la chambre de l’instruction rejetait sa demande. Elle soulevait en effet plusieurs éléments : -les enquêteurs n’auraient pas eu connaissance du certificat médical et n’avaient donc aucune volonté de porter atteinte à l’intégrité du requérant, -il convenait de s’attacher, non pas à la prescription médicale de manière stricte, mais à son esprit, à savoir que le requérant devait voir un médecin deux fois par jour, le matin et le soir. De cette manière, elle expliquait que le médecin n’avait pas pour objectif d’imposer un planning strict mais de faire respecter cette obligation de voir un médecin deux fois par jour, -en débutant la perquisition d’un simple bureau à 7H30, les enquêteurs avaient anticipé le fait qu’ils pourraient respecter l’esprit de cette prescription tel que décrit, ce qu’ils avaient fait en le présentant à l’hôpital à 10H35.   La Cour de cassation cassait cette argumentation, et s’attachait à la prescription médicale stricte. En effet, selon elle, le médecin avait jugé l’état du requérant compatible avec la garde à vue sous réserve d’être conduite à l’hôpital à 8H et à 20H. Dès lors, les enquêteurs auraient dû présenter le requérant à l’hôpital à 8H et ne pouvaient débuter la perquisition à 7H30. La Cour de cassation ajoutait que les enquêteurs avaient certes présenté le requérant à l’Hôpital à 10H35, mais que cela avait été fait sur demande des pompiers intervenus en raison du second malaise subi.   Dès lors, la Cour de cassation impose la nullité de la garde à vue en cas de non-respect des prescriptions médicales.   Non-respect des prescriptions du médecin : un précédant en 2009 Il ressort de la jurisprudence que dès 2009, la Cour de cassation concluait à la nullité d’une garde à vue pour non-respect des prescriptions du médecin, et ce peu importe que le requérant ait subi un grief particulier (Cass.crim., 27 octobre 2009, n°09-82.505).   En l’espèce, le requérant était placé en garde à vue et était examiné par un médecin qui concluait à 21H50 à l’incompatibilité de son état de santé avec cette mesure. A 2H25, un autre médecin rendait un certificat de compatibilité de l’état de santé avec la mesure de garde à vue. La chambre de l’instruction rejetait la demande de nullité de la garde à vue, aux motifs que : -l’avocat du requérant n’avait formulé aucune observation suite au premier certificat, -le requérant ne s’était pas plaint de son état de santé devant les enquêteurs ou devant le juge d’instruction, -son audition intervenue entre l’établissement des deux certificats contradictoires ne portait pas sur le fond de l’affaire et ne pouvait donc lui faire grief. La chambre de l’instruction concluait ainsi à l’absence d’atteinte portée aux intérêts du requérant.   La Cour de cassation jugeait au contraire que la simple poursuite de la garde à vue malgré la constatation d’une incompatibilité entre la mesure et l’état de santé portait nécessairement atteinte aux intérêts du requérant.   Dès lors, le seul irrespect des prescriptions médicales suffit à caractériser un grief, justifiant l’annulation de la mesure de garde à vue.
LE NON-RESPECT DES PRESCRIPTIONS MEDICALES ENTRAINE LA NULLITE DE LA GARDE A VUE Arrêt de la Chambre Criminelle de la Cour de Cassation en date du 14 Mars 2017, n°16-84.352 Un certificat médical indiquait que le gardé à vue devait être amené 2 fois par jour à l’hôpital, à 8h et à 20h. Malgré cela, les policiers avaient commencé une perquisition à 7h30 et à 10h30 le suspect avait été pris d’un malaise. Les policiers se justifiaient en arguant qu’ils n’avaient jamais eu connaissance de ce certificat en raison d’un problème de transmission. Peu importe. Les juges ont tout de même annulé la mesure de garde à vue.
DIFFERER LA NOTIFICATION DE SES DROITS AU GARDE A VUE EST POSSIBLE, SEULEMENT S’IL EST DEMONTRE QU’IL N’ETAIT PAS EN MESURE DE COMPRENDRE SES DROITS   Cadre de la notification des droits Parce que la garde à vue est privative de liberté, peut durer jusque 48 heures, et engendre des conséquences importantes sur la vie privée et sur l’issue de la procédure pénale, la personne placée en garde à vue dispose de droits. Ces droits sont énumérés par l’article 63-1 du Code de procédure pénale : -faire prévenir un proche ou son employeur, -être examiné par un médecin, -être assisté d’un avocat, -être assisté d’un interprète, -faire des déclarations, répondre aux questions ou se taire dans le cadre des auditions, -consulter une partie de la procédure et faire des observations en cas de prolongation de la mesure (notification de placement en garde à vue, examen médical, auditions). Ces droits doivent être notifiés par l’Officier de police judiciaire, immédiatement après le placement en garde à vue. La jurisprudence a jugé qu’une notification 15 minutes après le placement en garde à vue n’était pas tardive (Cass.crim., 27 juin 2000, n°00-80.411), tout comme la notification des droits survenue plus tard, en raison de l’impossibilité de la réaliser sur la voie publique (Cass.crim., 23 mars 1999, n°98-86.263). Plus encore, la jurisprudence admet une notification différée de plusieurs heures, dans les cas où le gardé à vue ne serait pas en mesure de comprendre ses droits.   La possibilité de différer la notification des droits de manière exceptionnelle : le gardé à vue n’est pas en mesure de comprendre ses droits Dans le cas où le gardé à vue serait en état d’ébriété, et serait donc dans l’impossibilité de comprendre ses droits, la notification ne peut avoir lieu. Il s’agit d’une circonstance insurmontable à la notification des droits, au sens de la jurisprudence (Cass.crim., 3 avril 1995, n°94-81.792). Il existe deux manières de vérifier la capacité à comprendre ses droits : -le test d’alcoolémie, -les vérifications des enquêteurs. En effet, même en présence d’une quantité d’alcool dans le sang, la capacité de compréhension des droits varie d’une personne à l’autre. Le dégrisement complet n’est pas nécessaire. Dès lors, les enquêteurs peuvent se contenter de vérifier si la personne placée en garde à vue est manifestement en capacité de répondre aux interpellations, dit se sentir en état de répondre aux questions et signe les procès-verbaux (Cass.crim., 10 mai 2000, n°00-80.865). Cette solution a été réitérée par la Cour de cassation dans un arrêt du 21 juin 2017 (n°16-84.599). En l’espèce, un individu était placé en garde à vue avec un taux d’alcool de 0,75mg/litre d’air expiré à 22H15. La notification des droits était différée. A 3H50, son taux était de 0,22mg/litre d’air expiré. Ses droits lui étaient notifiés à 5H, à son dégrisement total. La procédure était annulée, car rien ne permettait de démontrer qu’il n’était pas en mesure de comprendre ses droits à 3H50, alors que son taux était de 0,22mg/litre d’air expiré. La Cour attend donc des enquêteurs de vérifier par d’autres moyens si le gardé à vue peut comprendre ses droits et s’il n’est pas inutile de différer plus encore cette notification. Dans un arrêt du même jour, la Cour de cassation jugeait les vérifications des enquêteurs suffisantes (Cass.crim., 21 juin 2017, n°16-84.158). En l’espèce, un individu était placé en garde à vue à 22H22 et son taux d’alcool était de 0,73 mg/litre d’air expiré. Ses droits lui étaient notifiés à 2H45. La Cour d’appel rejetait la demande de nullité aux motifs que le PV mentionnait que l’enquêteur avait constaté que l’individu était en capacité de comprendre ses droits : « de visu et par un questionnement simple qu’il paraît avoir retrouvé sa lucidité et peut se voir notifier la mesure le concernant ». Par ailleurs, une période de 4h s’étant écoulée, le dégrisement pouvait être considéré comme suffisant. La Cour de cassation validait cette décision et exigeait par son arrêt que les enquêteurs fassent des vérifications supplémentaires, et les mentionnent dans un PV, afin de ne pas différer encore sans raison la notification des droits. En cas de placement en garde à vue, il conviendra donc de vérifier si la notification des droits a été réalisée immédiatement, et dans la négative, si le taux d’alcool rendait la compréhension des droits impossible. Si la notification est tardive et que rien ne permet de démontrer que les droits ne pouvaient être compris, il convient de solliciter la nullité de la garde à vue.
LE TRAJET NECESSAIRE POUR SE RENDRE AU COMMISSARIAT CONSTITUE UNE CIRCONSTANCE INSURMONTABLE JUSTIFIANT LE RETARD DE LA NOTIFICATION DES DROITS Arrêt de la Chambre Criminelle de la Cour de Cassation en date du 6 janvier 2015, n°13-87.652 Les fonctionnaires de police ont procédé à l’interpellation d’un automobiliste dont la conduite apparaissait anormale. Constatant qu’il présentait des signes d’ivresse manifeste, ils l’ont soumis à un dépistage par éthylotest, qui s’est révélé positif. Placé en garde à vue l’automobiliste a refusé de se soumettre à la prise de sang et à l’éthylomètre puis devant le Tribunal Correctionnel, il a été déclaré coupable. Souhaitant faire annuler sa garde à vue, il soutient que la notification de ses droits a eu lieu à l’arrivée au commissariat et non lors de son interpellation. Or les juges précisent qu’un délai de trente cinq minutes était le délai nécessaire permettant à la patrouille de se rendre au commissariat.
Dans quels cas les enquêteurs peuvent géolocaliser un bien appartenant au suspect? La géolocalisation est un acte d’investigation permettant aux enquêteurs de rechercher des preuves utiles à la manifestation de la vérité. Son régime est prévu aux articles 230-32 et suivants du Code de procédure pénale. La géolocalisation permet de déterminer en temps réel la position d’une personne à partir d’un moyen technique notamment par l’apposition sur un véhicule, une valise ou un objet quelconque d’une balise GPS. La géolocalisation peut également s’effectuer grâce à la localisation d’un téléphone portable.   La géolocalisation est-elle possible pour toutes les enquêtes quel que soit l’infraction en cause ?   Les enquêteurs peuvent recourir à la géolocalisation uniquement dans le cadre d’une procédure d’enquête ou d’instruction relatives aux infractions suivantes :   Procédure d’enquête ou d’instruction portant sur un crime ou sur un délit puni d’au moins trois ans d’emprisonnement : trafic de stupéfiants, associations de malfaiteurs, délits contre les personnes, trafic d’être humain… Procédure d’enquête ou d’instruction de recherche des causes de la mort ou de la disparition prévue aux articles 74,74-1 et 80-4  Procédure de recherche d’une personne en fuite prévue à l’article 74-2   Quelle est la durée d’une géolocalisation ? Elle est autorisée par le procureur de la République pour une durée de 8 jours. Cependant, s’il s’agit d’une enquête pour rechercher les causes de la mort ou de la disparition, d’une procédure de recherche d’une personne en fuite ou d’une enquête relevant de la criminalité organisée, la géolocalisation est autorisée pour une durée de 15 jours.   A l’issue de ces délais, c’est le juge des libertés et de la détention qui l’autorise pour une durée de 1 mois renouvelable.   Lorsque l’instruction porte sur la recherche des causes de la mort ou de la disparition d’une personne, le juge d’instruction autorise la mesure pour une durée de 4 mois renouvelable.   La durée totale de cette mesure ne peut excéder 1 an ou 2 ans s’il s’agit d’une enquête ou d’une instruction relevant de la criminalité organisée.   Seul le suspect peut faire l’objet d’une géolocalisation ? La loi n’impose pas que seul le suspect puisse faire l’objet d’une géolocalisation. Une personne qui n’est pas visée par la procédure peut faire l’objet d’une telle mesure dès lors que cette opération est exigée par les nécessités de l’enquête.   La géolocalisation peut-elle s’effectuer sur un bien n’appartenant pas au suspect ?   Il est tout à fait possible de géolocaliser un bien n’appartenant pas au suspect. C’est notamment l’hypothèse où le bien a été frauduleusement obtenu par le suspect ou encore, lorsque le suspect use habituellement du bien en cause.   Le suspect est-il en droit de contester la régularité d’une géolocalisation effectuée sur un bien frauduleusement obtenu ?   La Cour de cassation a eu l’occasion de préciser à propos d’un véhicule volé et faussement immatriculé que si la procédure est irrégulière et qu’en principe les preuves ne peuvent être transcrites dans un procès-verbal puis versé au dossier du suspect, les preuves pourront toutefois être admises. En effet, le suspect est irrecevable à contester la régularité de la géolocalisation sur le bien sur lequel il ne peut se prévaloir d’aucun droit (Cass. crim 7 juin 2016 n°15-87.755). Si le bien n’a pas été obtenu frauduleusement (ex : usage habituel du véhicule d’un proche), le suspect se réserve le droit de contester la régularité de la procédure (Cass. crim 9 mai 2018 n°17-86.558).  
Pour qu’un prévenu soit condamnable, la Cour doit trouver que le prévenu a « appelé » à la haine Cass. Crim., 4 juin 2019, n°18-82742 Le prévenu avait déclaré lors d’une émission télé : « 91% d’enfants musulmans dans une classe pose un « problème » évident parce que cela dépasse les seuils de tolérance ». La Cour de cassation, saisit des faits, déclare : « Les propos poursuivis, portant sur une question d’intérêt public relative à l’immigration, n’ont pas dépassé les limites admissibles à la liberté d’expression ; même si leur formulation a pu légitimement choqué, ils ne contiennent néanmoins pas d’appel ou d’exhortation, même sous une forme implicite, à la discrimination, à la haine ou à la violence ». On peut ici mesurer une inflexion de la jurisprudence de la haute juridiction qui en 2012 considérait qu’il suffisait que « l’auteur visait à susciter un sentiment d’hostilité ou de rejet envers un groupe de personnes clairement identifié à raison de ses origines, de sa race ou de sa religion » pour être condamné. (Cass. Crim., 14 février 2012, n°11-81954 ) Manifestement, la Cour considère qu’il faut aujourd’hui « appeler » et non plus seulement « viser à » pour être condamnable.  
La loi n° 2022-299 du 2 mars 2022 visant à combattre le harcèlement scolaire a créé un nouveau délit dans le Code pénal   L’article L. 111-6 du Code de l’éducation a ainsi été modifié dans l’objectif de mettre en lumière l’esprit de la loi « Aucun élève ou étudiant ne doit subir de faits de harcèlement résultant de propos ou comportements, commis au sein de l’établissement d’enseignement ou en marge de la vie scolaire ou universitaire et ayant pour objet ou pour effet de porter atteinte à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de dégrader ses conditions d’apprentissage. Ces faits peuvent être constitutifs du délit de harcèlement scolaire prévu à l’article 222-33-2-3 du code pénal ».    Les éléments constitutifs de l’infraction : Aux termes du nouvel article 222-33-2-3 du Code pénal, le harcèlement scolaire se caractérise par des propos ou comportements répétés commis à l’encontre d’un élève par toute personne étudiant ou exerçant une activité professionnelle au sein du même établissement d’enseignement, ayant pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de vie se traduisant par une altération de sa santé physique ou mentale.   La qualification de harcèlement scolaire pourra également être retenue si les faits se poursuivent alors que l’auteur ou la victime n’étudie plus ou n’exerce plus au sein de l’établissement.   Les peines applicables : Le harcèlement scolaire est puni de 3 ans d’emprisonnement et de 45 000 € d’amende : Lorsqu’il a causé une incapacité totale de travail inférieure ou égale à 8 jours ou n’a entraîné aucune incapacité de travail   Les peines sont portées à 5 ans d’emprisonnement et à 75 000 € d’amende : Lorsque les faits ont causé une incapacité totale de travail supérieure à 8 jours   Les peines sont portées à 10 ans d’emprisonnement et à 150 000 € d’amende : Lorsque la victime s’est suicidée ou a tenté de se suicider
De nouvelles dispositions sont entrées en vigueur permettant de préserver les intérêts d’une victime d’homicide conjugal, ainsi que leur intégrité patrimoniale.   Une nouvelle loi du 31 mai 2024 a été publiée au Journal Officiel le 1er juin 2024. Celle-ci vise à assurer une justice patrimoniale au sein de la famille, et tend notamment à « préserver les intérêts des ex conjoints et des héritiers, en cas de divorce, de dissolution du PACS ou d’homicide conjugal ». Parmi les dispositions de cette loi, l’une prévoit la déchéance des avantages patrimoniaux lorsque l’un des époux a été condamné, comme auteur ou complice, à une peine criminelle ou correctionnelle pour avoir volontairement donné ou tenté de donner la mort à un conjoint, ou pour avoir volontairement commis des violences ayant entraîné la mort du conjoint sans intention de la donner. La déchéance des droits doit être prononcée par le tribunal judiciaire saisi sur requête des héritiers ou du procureur de la République.   Il est à noter que les dispositions de la loi du 31 mai 2024 s’appliquent aux conventions matrimoniales conclues avant son entrée en vigueur. Toutes les conventions matrimoniales sont donc concernées par ce changement.   Cette loi constitue une avancée considérable dans la prise en compte des violences conjugales et homicides conjugaux. Cela vient achever le processus de protection des victimes de violences conjugales ou d’homicide conjugal. C’est un sujet très médiatisé et juridicisé ; cela s’explique par la libération de la parole des victimes ces dernières années.
  Les accidents de la circulation sont soumis au régime de la loi Badinter du 5 juillet 1985, qui a pour objectif de faciliter l’indemnisation des victimes dès lors qu’un véhicule terrestre à moteur est impliqué dans un accident de la circulation.   Notion d’accident de la circulation   Un véhicule terrestre à moteur Avant toute chose, l’accident de la circulation implique l’intervention d’un véhicule terrestre à moteur. La loi ne donne aucune définition du véhicule terrestre à moteur. La doctrine l’a donc défini comme « un engin circulant sur le sol, muni d’une force motrice et pouvant transporter des choses ou des personnes ». Ainsi, une voiture, un scooter, une motocyclette ou encore un tracteur sont considérés comme des véhicules terrestres à moteur dès lors qu’ils sont utilisés pour transporter des choses ou des personnes.   Un accident de la circulation Il n’existe aucune définition légale de l’accident de la circulation. Néanmoins, un accident est nécessairement un évènement fortuit ou aléatoire. Un accident volontaire ne peut pas entrer dans le champ d’application de cette loi (2e civ., 12 déc. 2002, n°00-17.433). Ensuite, la notion de circulation n’englobe pas seulement les accidents survenant lorsque le véhicule utilise sa fonction de déplacement. Sont aussi concernés les véhicules à l’arrêt, en stationnement ou abandonnés sur la voie publique ou dans un lieu privé. Il faut tout de même préciser qu’un véhicule à l’arrêt, mais utilisé dans sa fonction d’outil est exclu du champ d’application de cette loi (ex : moissonneuse batteuse, benne basculante d’un camion à l’arrêt…).   Une implication du véhicule dans l’accident La jurisprudence considère qu’un véhicule est impliqué dans un accident de la circulation lorsqu’il est intervenu d’une manière ou d’une autre dans cet accident. C’est ainsi que la Cour de cassation a jugé dans une décision du 15 décembre 2022 (2Civ, 15 déc. 2022, n° 21-11.423) que les collisions successives qui sont intervenues dans un même laps de temps et dans un enchaînement continu constituent un accident complexe. Elle a également rappelé que dans un accident complexe, la victime est en droit de demander l’indemnisation de son préjudice à l’assureur de l’un quelconque des véhicules impliqués, même si elle n’a pas été en contact avec celui-ci.   Cas particulier : le droit d’indemnisation lorsque le véhicule n’est pas à l’origine de l’accident Pour pouvoir être indemnisé, il n’est pas nécessaire que le véhicule ait joué un rôle dans la réalisation du dommage, ni qu’il soit à l’origine de l’accident. C’est la raison pour laquelle est utilisé le terme « d’implication » au détriment de « causalité ». De même, le comportement et la position normale du véhicule n’excluent pas l’engagement de la responsabilité du conducteur ou du propriétaire, même lorsque le véhicule est à l’arrêt ou stationné. C’est ainsi que la Cour de cassation a jugé le 15 décembre 2022 que la victime d’un accident peut demander réparation de son préjudice au propriétaire d’un véhicule stationné n’ayant pas causé de dommage à la victime, ni causé cet accident (2e civ., 15 déc. 2022, n°21-11.423).   Un dommage Il est nécessaire de démontrer l’existence d’un dommage. Le dommage corporel est l’atteinte portée à l’intégrité physique d’une personne pouvant aller des blessures graves ou légères, à la mort. Ce dommage doit avoir un lien de causalité certain avec cet accident.   L’obligation pour l’assureur de présenter une offre d’indemnité Après un accident de la circulation, les articles 12 à 27 de la loi Badinter imposent à l’assureur qui garantit la responsabilité civile du fait d’un véhicule terrestre à moteur de présenter une offre d’indemnité à la victime. Ces articles ont été codifiés aux articles L 211-9 et suivants et R 211-29 et suivants du Code des assurances. Une offre d’indemnité doit être présentée à la victime qui a subi une atteinte à sa personne dans un délai maximum de 8 mois à compter de l’accident de la circulation. En revanche, si la responsabilité n’est pas contestée et le dommage a été entièrement quantifié (ex : suite à une expertise médicale), l’assureur doit présenter à la victime une offre d’indemnité dans un délai de 3 mois à compter de la demande d’indemnisation qui lui est présentée. La victime aura le choix entre accepter cette offre, la refuser ou faire une contre-proposition. De nombreuses victimes sont tentées de faire aveuglement confiance à leur assurance en acceptant, parfois même rapidement cette offre d’indemnité. Or, bien souvent, celle-ci n’est pas représentative de la réalité du préjudice subi par la victime. En effet, les dommages corporels sont minimisés, tous les préjudices subis par la victime ne sont pas pris en compte afin de réduire le montant de l’indemnité. Pour cette raison, il est toujours préférable de recourir à l’assistance d’un avocat spécialisé en dommage corporel pour obtenir une indemnisation qui corresponde à la réalité du préjudice subi.   L’importance de recourir à l’assistance d’un avocat L’avocat spécialisé en dommage corporel expliquera en détail à la victime la procédure d’indemnisation et l’assistera tout au long de cette procédure que celle-ci soit amiable (procédure engagée par l’assurance) ou judiciaire.   Constituer le dossier médical de la victime L’avocat aidera la victime à constituer le dossier médical le plus complet possible afin de lui permettre d’optimiser au maximum son indemnisation. Ce dossier médical, qui sera notamment transmis à l’expert permettra de prouver les circonstances dans lesquelles le dommage s’est produit ainsi que les conséquences de celui-ci sans l’imputer à un état antérieur. Ce dossier peut notamment comporter les pièces justificatives suivantes : Certificat médical Compte rendu d’hospitalisation Les radiographies et scanners Correspondances entre médecins Procès-verbaux Photographies des blessures Arrêt de travail Activité sportive ou de loisirs réalisés antérieurement à la survenance du dommage Le questionnaire corporel pro-victimes Si besoin, l’avocat se rapprochera de différents organismes afin d’obtenir tous les documents utiles à ce dossier médical.   Le choix du médecin-conseil L’avocat aidera la victime dans le choix de son médecin-conseil. Ce dernier joue également un rôle essentiel dans ce processus d’indemnisation car il assiste et défend les intérêts de la victime tout au long de la procédure et notamment lors de l’expertise médicale amiable ou judiciaire. Lors de cette expertise, il prendra soin de vérifier que l’ensemble des préjudices subis par la victime soient pris en compte.   La réalisation d’une expertise Si la victime entame une procédure d’indemnisation par la voie judiciaire, l’avocat pourra demander que soit réalisée une expertise par le biais d’un référé expertise devant le tribunal judiciaire ou de conclusions aux fins d’expertise devant le juge pénal. Cette étape est cruciale dans l’évaluation du préjudice car l’expert va identifier tous les dommages et déterminer si les préjudices sont en lien avec le dommage. L’expert a l’obligation de répondre aux questions de la mission (articles 238 du Code de procédure civile et 161 du Code de procédure pénale). Ainsi, le rôle de l’avocat est d’une grande importance puisqu’il sera chargé d’exposer de façon précise les questions qu’il souhaite poser à l’expert. En outre, l’avocat a pour rôle de contrôler l’indépendance des médecins-experts au cours de l’expertise et sollicitera le versement de provisions. Cette expertise servira ensuite de fondement de la demande d’indemnisation. L’avocat négociera chaque poste de préjudice et sera ensuite chargé de les évaluer.   L’évaluation des préjudices Le dommage fait naître des préjudices patrimoniaux et/ou extrapatrimoniaux. Les préjudices patrimoniaux représentent la perte subie ou le gain manqué. Les préjudices extrapatrimoniaux englobent les atteintes portées à un intérêt qui n’est pas pécunier, donc à un intérêt moral. Ces différents postes de préjudices ont été regroupés au sein de la nomenclature Dintilhac. Cette liste, non exhaustive, n’a aucune valeur normative mais est cependant utilisée par les tribunaux ainsi que par les experts. Cette nomenclature effectue une distinction entre les préjudices temporaires (avant consolidation) et permanents (après consolidation) :   Les préjudices patrimoniaux temporaires (avant consolidation)   Dépenses de santé : il s’agit des frais hospitaliers, médicaux, paramédicaux et pharmaceutiques et assimilés qui ont été à la charge de la victime avant la consolidation.   Pertes de gains professionnels : il s’agit des répercussions du dommage sur la sphère professionnelle de la victime jusqu’à sa consolidation.   Assistance temporaire par tierce personne: ce poste comprend les dépenses qui visent à indemniser le coût pour la victime de la présence nécessaire d’une tierce personne pour l’assister de manière quotidienne du jour de l’accident jusqu’à la consolidation. Il est important de préciser que l’assistance bénévole, même d’un membre de la famille, n’exclut pas l’indemnisation de ce préjudice. C’est ce qu’a affirmé la Cour de cassation dans un arrêt du 22 mai 2019 (Civ 1ère, 22 mai 2019, n°18-14.063). De plus, les juges de la Haute Cour ont pris le soin de rappeler que ce poste de préjudice englobe l’assistance dans les actes de la vie quotidienne mais également l’assistance dans la sphère professionnelle. Pour connaître le montant de l’indemnisation, l’expert évaluera le nombre d’heures nécessaires (par jour, semaine ou mois) qui établira, avec le coût horaire, l’indemnisation.   Frais divers : ce poste vise à indemniser les frais susceptibles d’être exposés par la victime avant la date de consolidation (ex : honoraires des médecins, frais de transports…).   Les préjudices patrimoniaux permanents (après consolidation)   Dépenses de santé : ce poste comprend les frais hospitaliers, médicaux, paramédicaux, pharmaceutiques et assimilés, même occasionnels, postérieurs à la consolidation de la victime.   Frais de logement adapté : il s’agit des frais qui sont à la charge de la victime pour adapter son logement à son handicap ou des frais liés à l’acquisition d’un logement mieux adapté après la consolidation.   Frais de véhicule adapté : ce poste de préjudice vise à indemniser les dépenses nécessaires pour procéder à l’adaptation d’un véhicule aux besoins de la victime atteinte d’un handicap permanent.   Assistance permanente par tierce personne : elle concerne les dépenses qui visent à indemniser, le coût pour la victime de la présence nécessaire d’une tierce personne pour l’assister de manière quotidienne après la consolidation.   Perte de gains professionnels : elle vise à indemniser la victime de la perte ou de la diminution de ses revenus consécutive à l’incapacité permanente, partielle ou totale, à laquelle elle est désormais confrontée dans la sphère professionnelle (ex : perte de l’emploi, emploi exercé à temps partiel…). Par un arrêt rendu le 24 juillet 2019 (n°4086624), le Conseil d’Etat a considéré que la victime qui se trouve privée de toute possibilité d’exercer un jour une activité professionnelle en raison d’un accident corporel survenu dans son jeune âge, peut obtenir une indemnisation au titre de la perte de gain professionnel. La seule circonstance qu’il soit impossible de déterminer le parcours professionnel qu’elle aurait suivi ne fait pas obstacle à ce que soit réparé le préjudice qui doit être regardé comme présentant un caractère certain résultant de la perte des revenus qu’une activité professionnelle lui aurait procuré et de la pension de retraite consécutive.   Préjudice scolaire, universitaire ou de formation : ce poste a pour objet de réparer la perte d’année(s) d’études scolaires, universitaires, de formation ou autre consécutive à la survenance du dommage (ex : retard dans l’apprentissage, modification d’orientation…).   Préjudice extrapatrimoniaux temporaires (avant consolidation)   Déficit fonctionnel temporaire : il a pour objet d’indemniser l’incapacité totale ou partielle subie par la victime dans sa sphère personnelle du jour de l’accident jusqu’à la consolidation (ex : périodes d’hospitalisation, perte de la qualité de vie et des joies usuelles de la vie courante…). L’expert attribuera des périodes, puis la moitié du smic sera attribué par jour contenu dans ces périodes, en fonction du % de déficit (par exemple, un déficit à 25% pendant 10 jours en 2023 : 10 x (25% de 31 euros) = 77,5 euros).   Souffrances endurées temporaires : ce poste comprend l’indemnisation de toutes les souffrances physiques et psychiques, ainsi que des troubles associés, que doit endurer la victime du jour de l’accident jusqu’à celui de la consolidation. Il est important de préciser que l’état d’inconscience de la victime n’est pas de nature à réduire ou à exclure le préjudice résultant des souffrances endurées (Cass. crim, 25 juin 2019, n°18-82.655). L’expert évalue les souffrances endurées sur une échelle à 7 degrés (1 correspondant à « très léger » et 7 à « exceptionnel »). Ensuite, pour connaître le montant de l’indemnisation, un barème donne une fourchette correspondant à chaque degré de cette échelle.   Préjudice esthétique temporaire : il vise à indemniser les conséquences de l’altération de l’apparence physique temporaire de la victime. Pour évaluer le montant de ce préjudice, l’expert établira le degré de ce préjudice en référence à un barème de la même manière que pour les souffrances endurées.   Préjudice extrapatrimoniaux permanents (après consolidation)   Déficit fonctionnel permanent : ce préjudice est relatif à l’atteinte portée aux fonctions physiologiques de la victime (telle que la réduction du potentiel physique, psychosensorielle ou intellectuelle), qui demeure même après la consolidation. Pour ce poste de préjudice, l’indemnisation sera calculée en tenant compte du degré de ce préjudice évalué par l’expert et de l’âge de la victime.   Souffrances endurées permanentes : ce poste de préjudice a pour objet l’indemnisation des souffrances physiques et psychiques, ressenties par la victime de façon permanente après la consolidation.   Préjudice d’agrément : il vise à réparer la perte de la qualité de vie et les troubles dans les conditions d’existence que la victime rencontre au quotidien après la consolidation ainsi que la gêne ou l’impossibilité pour la victime de pratiquer régulièrement une activité sportive ou de loisirs. Par un arrêt du 29 mars 2018, la Cour de cassation a considéré que pour invoquer le préjudice d’agrément, la limitation de l’activité sportive ou de loisirs peut suffire (2 civ, 29 mars 2018, n° 17-14.499). Le préjudice d’agrément est selon l’association d’aide aux victimes en France estimé entre 1 000 à 5 000 euros pour une personne pratiquant du sport régulièrement. (Cf Association Aide indemnisation victimes de France – préjudice d’agrément). En outre, la Cour d’appel de Reims a considéré que le préjudice d’agrément doit être évalué à 20 000 euros pour un individu ne pouvant plus pratiquer des activités de jardinage, de cueillettes et de sorties dominicales comme auparavant (CA Reims, 8 octobre 2008, n’07/01036).   Préjudice esthétique permanent : ce poste de préjudice vise à indemniser les conséquences permanentes de l’altération de l’apparence physique de la victime. Ce poste de préjudice englobe les conséquences dommageables de l’apparence physique, notamment des hématomes, cicatrices, des troubles de la voix ou de l’élocution mais également des anomalies dans la démarche.   Préjudice sexuel : il vise à réparer les préjudices touchant à la sphère sexuelle qui inclut le préjudice morphologique (atteinte aux organes sexuels primaires et secondaires), le préjudice lié à l’acte sexuel lui-même qui repose sur la perte du plaisir et le préjudice lié à une impossibilité ou une difficulté à procréer. La Cour de cassation a considéré que « le préjudice sexuel, qui comprend tous les préjudices touchant à la sphère sexuelle, peut être éprouvé par ricochet par le conjoint de la victime directe qui, à la suite du fait dommageable, subit elle-même un tel préjudice » (1 Civ, 30 juin 2021, n°19-22.787). Le préjudice sexuel subit pour une personne avec des difficultés à accomplir l’acte sexuel et une moindre fréquence des rapports sexuels est estimé par L’Association d’aide aux victimes en France entre 3 000 et 4 000 euros. ((Cf Association Aide indemnisation victimes de France – préjudice sexuel).   Préjudice d’établissement : ce poste de préjudice cherche à indemniser la perte d’espoir, de chance ou de toute possibilité de réaliser un projet de vie familiale en raison de la gravité du handicap permanent, dont reste atteinte la victime après sa consolidation. La Cour de cassation a précisé qu’en cas de séparation ou de dissolution d’une précédente union, la victime peut invoquer le préjudice d’établissement même si elle a déjà pu, par le passé, réaliser un projet familial (Civ 2e, 4 juillet 2019, n°18-19.592). En revanche, en l’absence de séparation ou de dissolution d’une précédente union, la Cour de cassation refuse d’indemniser la victime sur le fondement du préjudice d’établissement. Ce préjudice sera évalué en tenant compte de l’âge de la victime.   Préjudices permanents exceptionnels : ce poste a pour objet d’indemniser, à titre exceptionnel, tel ou tel préjudice extrapatrimonial permanent, particulier et non indemnisable au titre d’un autre poste (ex : impossibilité physique d’accomplir des gestes strictement liés à sa culture). Les victimes par ricochet peuvent également obtenir une indemnisation de leurs préjudices. Les préjudices qu’ils peuvent invoquer sont notamment les frais d’obsèques, les pertes de revenus, le préjudice d’accompagnement, le préjudice d’affection ou encore les frais divers. Pour se prévaloir de la qualité de victimes par ricochet, il n’est pas nécessaire de démontrer l’existence d’un lien juridique avec la victime directe. Il est néanmoins nécessaire de démontrer que les victimes par ricochet ont un lien proche avec la victime directe et souffrent personnellement du dommage (ex : blessures, mort…) de la victime directe.   Le cas particulier des victimes conductrices d’un véhicule La loi Badinter de 1985 a créé un régime de réparation inégalitaire en fonction de la qualité de la victime. En effet, si la victime conductrice d’un véhicule a commis une faute, cette dernière pourra lui être opposée et entraîné de graves conséquences sur son droit à être indemnisé.   Les victimes non conductrices d’un véhicule Les victimes non conductrices d’un véhicule sont considérées comme des victimes privilégiées. En effet, la loi a posé un principe : « les victimes, hormis les conducteurs de véhicules terrestres à moteur, sont indemnisées des dommages résultant des atteintes à leur personne qu’elles ont subis, sans que puisse leur être opposée leur propre faute ». Les piétons, cyclistes ou encore les passagers d’un véhicule sont concernés. Néanmoins, il existe 2 exceptions. La faute de la victime peut lui être opposée dès lors qu’elle a commis une faute inexcusable qui a été la cause exclusive de l’accident ou lorsqu’elle a volontairement recherché le dommage qu’elle a subi. La Cour de cassation admet strictement l’existence de ces hypothèses et visent notamment les situations où la victime a tenté de se suicider. Il convient tout de même de préciser que dans 2 hypothèses, la faute de la victime ne peut jamais lui être opposée même si celle-ci a volontairement recherché le dommage qu’elle a subi : – lorsque la victime est âgée de 16 ans ou de plus de 70 ans –  lorsque la victime est titulaire, au moment de l’accident, d’un titre lui reconnaissant un taux d’incapacité permanente ou d’invalidité au moins égal à 80 p. 100   Les victimes conductrices d’un véhicule Lorsque la victime est conductrice d’un véhicule, sa faute peut lui être opposée et réduire voire exclure son indemnisation. En cas d’accident, il est donc nécessaire de rechercher si la victime était conductrice ou non d’un véhicule au sens de la loi Badinter. A titre d’exemple, la Cour de cassation a récemment considéré qu’un fauteuil roulant électrique n’est pas un véhicule terrestre à moteur (2Civ, 6 mai 2021, n°20-14.551).   Le délai de prescription La loi Badinter et l’article 2226 du Code civil prévoient que le délai de prescription est de 10 ans à compter de la consolidation du dommage. Ce délai de prescription a été confirmée par la Cour de cassation notamment dans un arrêt du 3 novembre 2011 (2Civ 3 nov. 2011, n°10-16.036). Ainsi, la victime dispose d’un délai de 10 ans à compter de la consolidation de son dommage pour demander réparation de son dommage corporel résultant d’un accident de la route.  
Les trois circonstances pouvant réduire une indemnisation En matière de responsabilité civile, pour obtenir réparation suite à un dommage corporel, il est nécessaire de démontrer l’existence d’une faute de l’agent et d’un lien de causalité entre la faute et le dommage. Néanmoins, l’agent peut s’exonérer de sa responsabilité en invoquant la force majeure, le fait d’un tiers ou la faute de la victime.   La force majeure La force majeure peut être définie comme la survenance d’un évènement échappant à tout contrôle, qui ne pouvait être prévu et dont on ne peut faire face. Pour être considéré comme une force majeure, l’évènement doit remplir certaines caractéristiques :   Irrésistible : l’agent ne pouvait y faire face au moment de la réalisation du dommage Imprévisible : l’évènement ne pouvait pas être prévu au moment de la réalisation du dommage Extérieur : l’évènement doit être extérieure à l’agent   La force majeure entraîne une exonération totale de l’agent. Ainsi, la victime ne pourra obtenir aucune indemnisation de son préjudice. En revanche, en matière d’accident de la circulation, la force majeure ne peut être invoquée (article 2 de la loi du 5 juillet 1985).   Le fait d’un tiers Le fait d’un tiers, s’il présente les caractères de la force majeure, entraîne une exonération totale de la responsabilité de l’agent. En revanche, si le fait de ce tiers ne présente pas les caractères de la force majeure, l’agent demeure responsable. En outre, si les conditions permettant d’engager la responsabilité du tiers sont réunies, ils pourront être tenu in solidum à l’égard de la victime. En outre, le fait d’un tiers ne peut être invoqué en matière d’accident de la circulation (article 2 de la loi du 5 juillet 1985).   La faute de la victime Si la victime a commis une faute au moment de la réalisation du dommage et qu’elle présente les caractères de la force majeure, l’agent sera totalement exonéré de sa responsabilité. En revanche, si elle ne présente pas les caractères de la force majeure, l’indemnisation de la victime pourra être réduite. En revanche, en matière d’accident de la circulation, la victime non conductrice d’un véhicule ne peut pas, en principe, se voir opposer sa faute (cf : voir article « dans quelles circonstances mon indemnisation peut être réduite après un accident de la circulation ? »).
  Qu’est-ce que le JIVAT et quelles sont ses compétences ?   La loi du 23 mars 2019 a permis de centraliser la réparation des victimes d’attentats terroristes, en séparant la procédure de leur indemnisation de la procédure applicable aux autres victimes, par le biais de la création du JIVAT.   Cadre légal Créé par la loi du 23 mars 2019, le JIVAT est compétent en matière de dommages résultant d’un préjudice corporel des victimes d’attentats terroristes. Le Tribunal judiciaire de Paris bénéficie d’une compétence exclusive sur les litiges liés à l’indemnisation de telles victimes. C’est dans le rapport annexé à cette loi de 2019 que l’on trouve les spécificités relatives à ce nouveau juge. Cependant, cela reste une disposition récente, qui n’est pas encore pleinement développée (on ne retrouve pas encore le JIVAT dans le Code de l’organisation judiciaire). L’article 2.3 de ce rapport, intitulé « Accompagner les victimes » évoque la nécessité d’améliorer, entres autres, « la qualité des prises en charge par le renforcement des effectifs et le développement des compétences spécialisées pour les victimes particulièrement vulnérables comme les victimes mineures ou les plus gravement traumatisées ». L’article 3.3, « Améliorer encore l’efficacité de la justice antiterroriste » créé, dans ce but, un parquet national antiterroriste : « Il apparaît particulièrement nécessaire de procéder à une spécialisation du ministère public en matière de lutte contre le terrorisme. Plusieurs facteurs conduisent, de fait, à inscrire dans la présente loi les dispositions relatives à la création d’un parquet national antiterroriste (PNAT)». La loi du 23 mars 2019 donne donc une importance particulière à l’efficacité de la lutte contre le terrorisme. C’est donc de manière analogue qu’une procédure spéciale a également été créée pour les victimes. L’article 3.4 du rapport annexé, intitulé « Simplifier et améliorer le parcours procédural des victimes d’actes de terrorisme » est celui qui créé le JIVAT, dans le but de réparer les dommages causés aux victimes : « Prenant appui sur les travaux de la mission confiée par la garde des sceaux à Chantal Bussière, il est proposé de simplifier ce parcours, d’accélérer leur indemnisation tout en favorisant leur égalité de traitement.Dans cette perspective, il est tout d’abord donné compétence exclusive au tribunal de grande instance de Paris pour connaître l’ensemble des litiges liés à la reconnaissance de leur droit à indemnisation, à l’organisation d’une expertise judiciaire et à la réparation des préjudices des victimes de terrorisme, au fond comme en référé, selon les règles applicables à la procédure civile, ce qui permettra d’éviter que le traitement de ce contentieux particulièrement technique retarde le déroulement de l’information judiciaire et la tenue du procès. Cette compétence exclusive a pour corollaire l’incompétence des juridictions pénales pour connaître de l’action civile en réparation du dommage causé par une infraction constituant un acte de terrorisme. Les victimes d’un acte de terrorisme conserveront en revanche la possibilité de se constituer partie civile devant les juridictions pénales afin de mettre en mouvement ou de soutenir l’action publique et se voir reconnaître la qualité de victime. A cette fin, elles pourront notamment avoir accès au dossier de la procédure, formuler toute demande d’acte utile à la manifestation de la vérité.Dans la phase amiable, il est par ailleurs prévu de renforcer les garanties offertes aux victimes de terrorisme s’agissant du choix par le Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d’autres infractions (FGTI) du médecin procédant à l’examen médical de la victime et de conférer au FGTI des pouvoirs d’auditions et d’investigations en vue d’accélérer l’indemnisation des victimes de terrorisme ». Le JIVAT serait donc créé pour permettre aux victimes d’attentats terroristes de bénéficier d’une voie de recours leur étant spécifique.   En pratique : les litiges opposant les victimes au FGTI C’est le Fonds de Garantie des victimes des actes de Terrorisme et d’autres Infractions (FGTI) qui est tenu de proposer aux victimes d’attentats terroristes les indemnisations correspondantes aux préjudices subis. Selon le « Guide pour l’indemnisation des victimes d’actes de terrorisme », écrit par le FGTI, une fois que le Fonds a formulé une proposition d’indemnisation, la victime peut l’accepter ou la refuser. Si elle refuse, « le montant de l’indemnité est alors déterminé par le tribunal de grande instance, après saisine par la victime. C’est le tribunal de grande instance de Paris, où siège la juridiction de l’indemnisation des victimes d’actes de terrorisme (JIVAT) qui doit être saisi. Le Fonds de Garantie procède alors au règlement sur la base de la décision rendue ». Le JIVAT est essentiellement sollicité dans des litiges opposant une victime au FGTI, quand elle considère que l’indemnisation proposée par ce dernier n’est pas à la hauteur. Selon Monsieur Pierre Delmas-Goyon, le président du conseil d’administration du FGTI, « C’est un juge du recours et de la compensation. Selon la loi, le Jivat appréciera l’offre d’indemnisation faite par le FGTI, une fois la victime reconnue comme telle. La personne pourra contester le montant de l’offre devant le Jivat mais pas son principe. […] Il est difficilement concevable, dans le cadre d’un attentat de masse, qu’aucune victime ne soit indemnisée par le FGTI avant que le Jivat décide qui est victime et qui il convient donc d’indemniser. Ce dernier raisonnera au cas par cas. Ce n’est donc pas lui qui déterminera le périmètre des victimes » (dans le Rapport d’information n°278 (2018-2019), déposé au Sénat le 30 janvier 2019 par la commission des finances sur la prise en charge financière des victimes du terrorisme : https://www.senat.fr/rap/r18-278/r18-278_mono.html ). Il serait possible, après un premier recours au JIVAT, de faire appel de la décision de ce juge : dans un arrêt de la Cour d’appel de Paris, la famille d’une des victimes des attentats du Bataclan du 13 novembre 2015 a contesté le montant des indemnités proposées par le FGTI. Cet arrêt confirme que le JIVAT est compétent pour indemniser les victimes par ricochet d’attentats terroristes, et permet de démontrer ce que le JIVAT considère pour indemniser une victime. Dans cette affaire, la JIVAT a notamment dû se prononcer sur la somme tenant à l’action sur les souffrances endurées : « Pour allouer au titre des souffrances endurées par M. F N Q Y la somme de 100.000 €, la JIVAT a pris en compte les blessures dues aux quatre balles reçues par cette victime, les conditions de son évacuation, l’absence de traitement des lésions, le retentissement psychique des faits, la confrontation directe aux actions des terroristes, la mort de personnes autour de lui, le fait qu’il n’ait pas connu le sort des proches avec qui il se trouvait, l’impossibilité de s’enfuir, la détresse et l’angoisse dues à la conscience de sa mort inéluctable et des conséquences de celle ci pour ses proches » (Cour d’appel de Paris – Pôle 04 ch. 12, 21 avril 2022, n°21/00238). Le JIVAT permet donc aux victimes d’attentats terroristes de bénéficier d’une voie de recours, leur donnant la possibilité de contester le montant de l’indemnité allouée par le FGTI. Malgré le fait que ce juge ne statue pas sur le fond, se concentrant uniquement sur le montant des indemnités, il est possible qu’il ordonne des expertises médicales, entres autres, aux fins de déterminer le préjudice indemnisable. Il se penchera donc sur les circonstances spécifiques à l’affaire, et jugera au cas par cas.   Pour récapituler : Pour les victimes d’actes de terrorisme, ce qui change fondamentalement par l’apport de cette loi, c’est la compétence exclusive du Tribunal Judiciaire de Paris et non la CIVI lié au TJ de leur département.
  Qu’est-ce que la SARVI ? Créée par la loi n°2008-644 du 1er juillet 2008, la SARVI permet d’assurer l’indemnisation des victimes d’infractions après une décision du juge pénal : « Le juge pénal peut condamner l’auteur d’une infraction à payer à la victime des dommages-intérêts et une somme destinée à couvrir les frais engagés pour le procès. Lorsque la personne condamnée ne paie pas, la victime peut saisir le Service d’aide au recouvrement des victimes d’infraction (Sarvi) » (Aide aux victimes d’infraction pénale pour recouvrer les dommages et intérêts | Service-public.fr). La création de la SARVI répond au besoin d’encadrer l’indemnisation des victimes de « légers préjudices corporels ou certains dommages aux biens ».   Les victimes sont donc protégées, et peuvent saisir la SARVI si le condamné ne verse pas les indemnités, au lieu de forcer l’exécution de la décision de justice auprès de la personne condamnée, une situation qui peut s’avérer complexe (Livret-indemnisation-SARVI_AOUT2020_EP.pdf (fondsdegarantie.fr)).   Quel sera le montant de l’indemnisation allouée ? Il existe deux cas de figure à considérer dans le montant de l’indemnisation : Si la décision de justice a alloué à la victime une somme d’un montant inférieur ou égal à 1 000 euros: la victime sera payée intégralement. Si la décision de justice a alloué à la victime une somme d’un montant supérieur à 1 000 euros: la victime obtiendra en premier lieu 30% de la somme due (au minimum 1 000 euros, et au maximum 3 000 euros, d’après l’article L.422-7 du Code des assurances). La SARVI se chargera par la suite de rentrer en contact avec le condamné pour récupérer le reste des sommes mises à sa charge, et transmettra les sommes, qui peuvent être majorées d’une pénalité (article L.422-9 du Code des assurances) à la victime. Ces sommes seront transférées à la victime dans un délai de deux mois. Y-a-t-il un délai pour saisir la SARVI ? Il existe un délai de deux mois à respecter avant de saisir la SARVI, après que la décision ait été rendue définitive (une décision est définitive quand elle ne peut plus être contestée, que ce soit en interjetant appel, en formant opposition ou en formulant un pourvoi en cassation). La victime se doit aussi de respecter le délai maximal d’un an pour saisir la SARVI. Il faut donc saisir la SARVI au plus tôt deux mois après que la décision soit rendue définitive, et au plus tard un an après. Si la victime a déjà effectué une demande d’indemnisation à la CIVI (Commission d’indemnisation des victimes d’infractions), et que celle-ci l’a rejetée, il lui faudra attendre un an après la décision de rejet avant qu’elle puisse se diriger vers la SARVI. La procédure de saisine de la SARVI impose de fournir de nombreuses pièces, dont la liste peut être trouvée sur le site du Fonds de garantie : Livret-indemnisation-SARVI_AOUT2020_EP.pdf (fondsdegarantie.fr).   Cette procédure est intéressante et garantit aux victimes une indemnisation à hauteur de 3 000 euros, ce qui est une alternative intéressante lorsque la CIVI n’est pas compétente.
L’assistance bénévole n’exclut pas l’indemnisation de l’assistance par une tierce personne (1Civ, 22 mai 2019, n° 18-14.063) L’assistance par une tierce personne est un préjudice patrimonial destiné à indemniser la victime du coût de la présence nécessaire, de manière temporaire ou définitive, d’une tierce personne à ses côtés pour l’assister dans les actes de la vie quotidienne, préserver sa sécurité, contribuer à restaurer sa dignité et suppléer sa perte d’autonomie.   La question qui s’est posée était donc celle de savoir si la victime pouvait être indemnisée du chef de ce préjudice dans l’hypothèse où cette assistance a été effectuée de manière bénévole c’est-à-dire sans qu’aucune dépense n’ait été à la charge de la victime.   La Cour de cassation a répondu par l’affirmative dans un arrêt du 22 mai 2019. En l’espèce, après avoir reçu des soins orthodontiques, en 2007 et 2008, une femme exploitant un centre équestre a présenté différents troubles qui ont notamment entraîné une diminution de ses capacités professionnelles. Son mari lui a donc apporté une aide pour exploiter son centre équestre.   La Cour d’appel a refusé son droit d’être indemnisé sur le fondement de l’assistance par une tierce personne en considérant qu’elle n’a pas souffert personnellement d’une perte de revenus, que l’économie liée à l’assistance bénévole de son mari ne constitue pas un préjudice indemnisable.   La Cour de cassation quant à elle a cassé l’arrêt rendu par la Cour d’appel en considérant que sans l’aide apportée par son époux, soit elle aurait dû exposer des frais pour bénéficier d’une assistance, soit elle aurait subi une perte de gains professionnels.   Ainsi, même si vous avez bénéficié d’une aide de manière bénévole, notamment par un membre de votre famille, vous pourrez être indemnisé sur ce fondement.    Comment est évalué ce préjudice ? Selon le référentiel Mornet, la rémunération de la tierce personne est calculée sur la base du taux horaire moyen de 16 à 25 € selon divers critères : la gravité du dommage, la spécialisation de la tierce personne, le lieu du domicile de la victime… Le calcul de cette indemnisation s’effectuera en fonction du nombre d’heures d’assistance et du type d’aide nécessaire (ex : assistance permanente, simple surveillance…).
La CIVI peut indemniser les victimes d’infraction malgré une décision de relaxe ou d’acquittement, dans certaines conditions, et peut indemniser la victime si celle-ci n’a pas mis en cause la CPAM devant la juridiction pénale   Le principe d’autonomie de la CIVI La CIVI (Commission d’indemnisation des victimes d’infractions) a pour rôle de faciliter l’indemnisation des victimes d’infractions, et leur garantir une réparation intégrale de leur préjudice, y compris si l’auteur des faits est inconnu ou insolvable (article 706-3 et suivants du Code de procédure pénale). Or, le tribunal correctionnel jugeant de la culpabilité d’une personne peut également être saisi de la réparation du préjudice par la victime. La victime d’infraction dispose donc de deux moyens d’obtenir réparation. La question se pose donc de connaitre le niveau d’indépendance entre ces juridictions. La jurisprudence a tranché cette question : ces deux juridictions sont autonomes (Cass. civ., 2ème civ., 18 juin 1986, n°84-17.283 ; Cass.civ., 2ème civ., 1er juillet 1992, n°91-12.662). Se pose dès lors la question du degré d’indépendance de la CIVI : la CIVI peut-elle indemniser une victime si une relaxe a été prononcée ? Quand est-il si la victime n’a pas mis la CPAM dans la cause devant la juridiction pénale ? Quid de la relaxe ou de l’acquittement ? La jurisprudence accorde une grande autonomie à la CIVI, en lui autorisant l’indemnisation des victimes d’infraction, y compris dans les cas de relaxe ou d’acquittement, selon les raisons de cette relaxe. En effet, la CIVI dispose d’un pouvoir souverain de caractérisation des infractions reprochées (Cass.civ., 2ème civ., 25 mai 2022, n°20-18.569). Cela signifie donc que la CIVI peut identifier des éléments constitutifs d’une infraction, et reconnaitre l’existence d’une infraction pénale, alors même que celle-ci n’a pas encore été reconnue par la juridiction pénale (notamment en cas de classement sans suite : Cass.civ., 2ème civ., 1er juillet 1992, n°91-12.662). La CIVI peut également caractériser une infraction dans le cas où un acquittement a été prononcé, si les éléments caractérisant cette infraction sont réunis (Cass.civ., 2ème civ., 11 juillet 1988, n°87-15.061). C’est notamment le cas lorsque l’acquittement a été prononcé pour manque de preuve (Cass.civ., 2ème civ., 8 février 2018, n°17-12.516). En l’espèce, un individu avait été blessé par une arme à feu, à l’occasion d’une altercation. Le prévenu, accusé de tentative de meurtre, était acquitté. La CIVI rejetait la demande de provision, validée par la Cour d’appel, au motif que le droit à indemnisation du requérant se heurtait à une contestation sérieuse du fait de l’acquittement. La Cour de cassation cassait cette décision au motif que : -la blessure par arme à feu n’était pas contestée, -l’acquittement était motivé par l’insuffisance de preuve, -la matérialité des faits n’était pas remise en cause par ces éléments. La Cour de cassation en concluait qu’il appartenait à la CIVI et à la Cour d’appel de chercher les éléments matériels caractérisant l’infraction, et ce alors même qu’un acquittement avait été prononcé. Il convient d’en conclure qu’un acquittement ou une relaxe pour insuffisance de preuve ne remet pas en cause l’existence de l’infraction, de sorte que la CIVI peut être amenée à caractériser l’infraction et indemniser la victime. Il convient également d’en conclure qu’un acquittement au motif que l’infraction n’a pas eu lieu ne pourrait donner lieu à indemnisation.   Quid de l’indemnisation de la CIVI si la CPAM n’a pas été mise en cause devant la juridiction pénale ? En cas de préjudice corporel, la victime a l’obligation de mettre la CPAM dans la cause afin d’obtenir réparation de son préjudice (article L.376-1, alinéa 8, du Code de la sécurité sociale). Cette mise en cause doit être réalisée au moins 10 jours avant l’audience. En cas de comparution immédiate, le Ministère public se charge de cette mise en cause. La Cour d’appel a dû répondre à la question suivante : si la CPAM n’a pas été mise en cause dans le cadre de l’audience pénale, la CIVI peut-elle malgré cela indemniser la victime ? La Cour d’appel d’AIX EN PROVENCE a jugé que cette indemnisation pouvait en effet avoir lieu (CA d’AIX EN PROVENCE, 20 décembre 2013, n°12/03526). En l’espèce, un individu avait été condamné pour violences volontaires sur une femme, qui se constituait partie civile mais n’avait pas mis en cause la CPAM devant la juridiction pénale. La requérante saisissait la CIVI aux fins d’être indemnisée. La Cour d’appel rappelait la possibilité pour la CPAM de demander l’annulation du jugement pénal et que la CIVI pouvait indemniser la victime alors même qu’elle n’avait pas mis la CPAM dans la cause devant la juridiction pénale. Il convient d’en conclure que l’absence de mise en cause de la CPAM n’a pas d’impact sur l’indemnisation de la CIVI, mais aurait pour conséquence l’annulation du jugement pénal en ses dispositions civiles si cette annulation est sollicitée.   Quid du recours du Fonds de garantie aux fins de remboursement ? Enfin, il convient de rappeler que la FONDS DE GARANTIE DES VICTIMES D’INFRACTIONS a une action subrogatoire contre l’auteur de l‘infraction, aux fins de remboursement. Concrètement, une fois que la CIVI ordonne l’indemnisation de la victime, le FONDS DE GARANTIE peut indemniser cette dernière en lieu et place de l’auteur. Puis, le FONDS se retourne contre l’auteur de l’infraction afin d’être remboursé de la somme versée à la victime. En ce sens, la Cour de cassation a rappelé que cette action du FONDS DE GARANTIE n’existe que s’il peut justifier que les victimes auxquelles il a versé une indemnisation ont souffert d’un préjudice découlant de l’infraction (Cass.crim., 24 novembre 2004, n°04-80.226). Ainsi, le FONDS DE GARANTIE ne pourra demander à l’auteur des faits le remboursement des indemnités versées s’il ne peut pas prouver que les victimes en ayant bénéficié ont bien souffert d’un préjudice découlant directement de l’infraction qui lui est reprochée.
Dans quelles circonstances mon indemnisation peut être réduite après un accident de la circulation ?   La loi Badinter de 1985 à créé un régime de réparation inégalitaire en fonction de la qualité de la victime. En effet, la faute de la victime n’est pas appréciée de la même manière selon qu’elle soit conductrice ou non d’un véhicule terrestre à moteur (ci-après « véhicule »).   Les victimes non conductrices d’un véhicule   Les victimes non conductrices d’un véhicule sont considérées comme des victimes privilégiées. En effet, la loi a posé un principe : « les victimes, hormis les conducteurs de véhicules terrestres à moteur, sont indemnisées des dommages résultant des atteintes à leur personne qu’elles ont subis, sans que puisse leur être opposée leur propre faute ». Les piétons, cyclistes ou encore les passagers d’un véhicule sont concernés.   Néanmoins, il existe 2 exceptions. La faute de la victime peut lui être opposée :   Si elle a commis une faute inexcusable qui a été la cause exclusive de l’accident Lorsqu’elle a volontairement recherché le dommage qu’elle a subi   La Cour de cassation admet strictement l’existence de ces hypothèses et visent notamment les situations où la victime a tenté de se suicider.   Il convient tout de même de préciser que dans certains cas, la faute de la victime ne peut jamais lui être opposée même si celle-ci a volontairement recherché le dommage qu’elle a subi :   Lorsque la victime est âgée de moins de 16 ans ou de plus de 70 ans Lorsque, quel que soit son âge, la victime est titulaire, au moment de l’accident, d’un titre lui reconnaissant un taux d’incapacité permanente ou d’invalidité au moins égal à 80 p. 100.   Les victimes conductrices d’un véhicule Lorsque la victime est conductrice d’un véhicule, sa faute peut lui être opposée et ainsi réduire voire exclure son droit d’être indemnisé.
La nouvelle qualification de la trottinette électrique retenue par la Cour d’appel d’Aix-en-Provence le 23 novembre 2017 À la suite de l’utilisation de plus en plus fréquente des trottinettes électriques, des questions se sont rapidement posées sur le plan juridique. En effet, de nombreux accidents ont été causés impliquant ce nouvel outil de déplacement. La question s’est donc posée de savoir si les trottinettes électriques devaient être soumises au régime de la loi Badinter de 1985.  La loi Badinter de 1985 facilite l’indemnisation des victimes d’accidents de la circulation dès lors qu’un véhicule terrestre à moteur est impliqué. Cependant, cette loi a créé un régime de réparation inégalitaire en fonction de la qualité de la victime et plus précisément, si la victime était conductrice ou non d’un véhicule au moment de l’accident.  Par un arrêt du 23 novembre 2017 (n°2017/887), la cour d’appel d’Aix-en-Provence a considéré qu’une trottinette électrique est considérée comme un véhicule terrestre à moteur dès lors qu’elle dépasse 6km/h. Le décret du 23 octobre 2019 a également affirmé qu’une trottinette électrique dépassant 6km/h doit être considérée comme un véhicule.   Quelles sont les conséquences d’une telle qualification ?   Pour les victimes conductrices d’une trottinette électrique ne dépassant pas 6km/h  Les victimes conductrices d’une trottinette ne dépassant pas 6km/h sont considérées comme des victimes non conductrices d’un véhicule et donc, comme des victimes privilégiées. En effet, la loi a posé un principe en son article 3 : « les victimes, hormis les conducteurs de véhicules terrestres à moteur, sont indemnisées des dommages résultant des atteintes à leur personne qu’elles ont subis, sans que puisse leur être opposée leur propre faute ». Néanmoins, il existe 2 exceptions. La faute de la victime peut lui être opposée dès lors qu’elle a commis une faute inexcusable qui a été la cause exclusive de l’accident ou lorsqu’elle a volontairement recherché le dommage qu’elle a subi. La Cour de cassation admet strictement l’existence de ces hypothèses et visent notamment les situations où la victime a tenté de se suicider. Il convient tout de même de préciser que dans certains cas, la faute de la victime ne peut jamais lui être opposée même si celle-ci a volontairement recherché le dommage qu’elle a subi : Lorsque la victime est âgée de moins de 16 ans ou de plus de 70 ans Lorsque la victime est titulaire, au moment de l’accident, d’un titre lui reconnaissant un taux d’incapacité permanente ou d’invalidité au moins égal à 80 p. 100. Dans cette hypothèse, aucune condition d’âge n’est exigée.   Pour les victimes conduisant une trottinette électrique dépassant 6km/h Lorsque la victime est conductrice d’une trottinette électrique dépassant 6km/h, elle est considérée comme étant conductrice d’un véhicule au sens de la loi Badinter. Ainsi, sa faute peut lui être opposée et ainsi réduire voire exclure son droit d’être indemnisé.
Deux infractions similaires mais différentes dans leurs caractéristiques et sanctions L’injure et la diffamation publiques sont deux infractions de presse régies par les articles 29 et suivants de la loi du 29 juillet 1881 relative à la liberté de la presse. Lorsqu’elles ne sont pas publiques, elles relèvent des dispositions du Code pénal. Selon l’article 23 de la loi de 1881, sont considérés comme publics les discours, cris ou menaces proférés dans des lieux ou réunions publics, soit par des écrits, imprimés, dessins, gravures, peintures, emblèmes, images ou tout autre support de l’écrit, de la parole ou de l’image vendus ou distribués, mis en vente ou exposés dans des lieux ou réunions publics, soit par des placards ou des affiches exposés au regard du public, soit par tout moyen de communication au public par voie électronique. Il n’est pas toujours aisé de faire la distinction entre la diffamation et l’injure. Ainsi, il convient d’analyser quelles sont les différences entre ces deux infractions.   La diffamation   Définition de la diffamation   L’article 29 alinéa 1er de la loi de 1881 dispose que « Toute allégation ou imputation d’un fait qui porte atteinte à l’honneur ou à la considération de la personne ou du corps auquel le fait est imputé est une diffamation ». Pour être constitutive d’une diffamation, l’allégation ou l’imputation doit se présenter sous la forme d’une articulation précise de faits de nature à être sans difficulté, l’objet d’une preuve et d’un débat contradictoire. Autrement dit, une diffamation porte sur un fait qui peut être prouvé par l’auteur de l’allégation (Cass. crim, 3 déc. 1963 n°62-93.121 ; Cass. crim 14 février 2006 n°05-82.475 ; Cass. crim 16 mars 2004 n°03-82.828). Exemples de diffamation : « collaborateur » et « traître à la patrie » (Cass. crim 17 février 1949) ; « condamné de droit commun privé de ses droits civiques » (Cass. crim 18 janvier 1950) ; affirmer que l’auteur d’un viol, qui connaissait sa séropositivité « savait qu’il tuait » (TGI Paris 30 mai 1990) ; imputation à un journaliste d’avoir agi en porte-parole d’un ministre (Cass. ass. Plén, 25 février 2000 n°94-15.846).   Les sanctions de la diffamation   La diffamation publique   La diffamation publique commise envers les particuliers est punie d’une amende de 12 000 euros. En revanche, la diffamation est punie d’une amende de 45 000 euros : Lorsqu’elle est commise envers les cours, les tribunaux, les armées de terre, de mer ou de l’air et de l’espace, les corps constitués et les administrations publiques Lorsqu’elle est commise à raison de leurs fonctions ou de leur qualité, envers le Président de la République, un ou plusieurs membres du ministère, un ou plusieurs membres de l’une ou de l’autre Chambre, un fonctionnaire public, un dépositaire ou agent de l’autorité publique, un ministre de l’un des cultes salariés par l’Etat, un citoyen chargé d’un service ou d’un mandat public temporaire ou permanent, un juré ou un témoin, à raison de sa déposition. En outre, la diffamation est puni d’un an d’emprisonnement et/ou de 45 000 euros d’amende : Lorsqu’elle est commise envers une personne ou un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée Lorsqu’elle est commise envers une personne ou un groupe de personnes à raison de leur sexe, de leur orientation sexuelle ou identité de genre ou de leur handicap. La diffamation non publique La diffamation non publique est une contravention punie de l’amende prévue pour les contraventions de la 1re classe à savoir 38 euros (article R621-1 du Code pénal).   Les faits justificatifs Selon l’article 35 de la loi de 1881, la diffamation ne sera pas sanctionnée si l’auteur des propos apporte la preuve de la véracité des propos, sauf si l’allégation porte sur la vie privée de la victime. De même, si l’auteur des propos invoque l’exception de bonne foi, celui-ci pourra échapper à toute sanction sur le fondement de la diffamation.   Injure   Définition de l’injure Selon l’article 29 alinéa 2 de la loi de 1881, l’injure est « Toute expression outrageante, termes de mépris ou invective qui ne renferme l’imputation d’aucun fait ». Autrement dit, l’injure est une expression outrageante qui ne peut pas faire l’objet d’une preuve et d’un débat contradictoire. Exemple d’injures : « traître » (Cass. crim 6 mars 1974 n°73-91.937) ;  « couard, homme vil, dont la pensée roule au niveau du caniveau » (Cass. crim 26 février 1985) ; « menteuse, incapable, incompétente » (Cass. crim 27 novembre 1997 n°96-85.094)  ; qualifier des policiers « d’assassins » (Cass. ass. Plén, 25 juin 2010 n°08-86.891).   Les sanctions de l’injure   L’injure publique L’injure publique est punie d’une amende de 12 000 euros. En revanche, elle est punie d’un an d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende : Lorsqu’elle est commise envers une personne ou un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée. Lorsqu’elle est commise envers une personne ou un groupe de personnes à raison de leur sexe, de leur orientation sexuelle ou identité de genre ou de leur handicap. Lorsque les faits mentionnés aux 1 et 2 sont commis par une personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de ses fonctions ou de sa mission, les peines sont portées à trois ans d’emprisonnement et à 75 000 euros d’amende. L’injure non publique Tout comme la diffamation non publique, l’injure non publique est une contravention punie de l’amende prévue pour les contraventions de la 1re classe, donc 38 euros (article R621-2 du Code pénal).   Les faits justificatifs L’auteur de l’injure peut invoquer l’excuse de provocation pour s’exonérer de toute responsabilité pénale. En revanche, l’excuse de provocation ne peut être invoquée que lorsque l’injure vise un particulier. A la différence de la diffamation, la preuve des faits pouvant justifier la vérité des propos allégués n’est jamais autorisée (Cass. crim 12 juillet 1971 n° 70-90.146).   Quelle qualification retenir lorsque les propos relèvent à la fois de la diffamation et de l’injure ? La Cour de cassation a considéré que si les propos forment un tout indivisible, la qualification de diffamation doit être retenue (Cass. crim 3 mai 1956 ; Cass. crim 25 février 2014 n° 13-80.826), le délit d’injure étant absorbé par celui de diffamation (Cass. crim 23 juin 2009 n° 08-88.016). Si les propos sont divisibles, l’auteur des faits pourra être poursuivi à la fois sur le fondement de la diffamation que sur le fondement de l’injure.   Le délai de prescription   L’article 65 de la loi de 1881 a mis en place un délai de prescription extrêmement court. En effet, la diffamation et l’injure publique se prescrivent par 3 mois révolus à compter du jour où elles ont été commises, ou du jour du dernier acte d’instruction ou de poursuites. En revanche, lorsque la diffamation ou l’injure publiques sont discriminatoires (en raison de l’appartenance ou la non-appartenance à une ethnie, à une nation, en raison du sexe, de l’orientation sexuelle…) le délai de prescription est d’une année. En ce qui concerne la diffamation et l’injure non publiques, elles se prescrivent par une année révolue à compter du jour où l’infraction a été commise (article 9 du Code de procédure pénale).
L’instruction, ou information judiciaire, est une procédure tenue secrète pour son bon déroulement, selon l’article 11 du Code de procédure pénale. La question se pose de savoir si la partie civile est tenue au secret de l’instruction ?   1.Définition de l’instruction judiciaire L’instruction est une enquête menée par le Juge d’instruction, sur demande du Procureur de la République, afin de déterminer l’existence d’une infraction et ses auteurs, et d’établir la vérité. L’instruction est obligatoire en matière de crime, et est facultative en matière de délit. En effet, la gravité des crimes justifie qu’un juge soit spécialement saisi pour réaliser cette enquête. Une fois tous les actes d’instruction réalisés, le Juge d’instruction peut décider de la suite à donner à la procédure : il peut saisir la juridiction de jugement ou rendre une ordonnance de non-lieu, c’est-à-dire ordonner l’arrêt des poursuites. C’est dans ce cadre que le Code de procédure pénale a instauré le secret de l’instruction.   2.Définition du secret de l’instruction L’article 11 du Code de procédure pénale prévoit que : « Sauf dans le cas où la loi en dispose autrement et sans préjudice des droits de la défense, la procédure au cours de l’enquête et de l’instruction est secrète. Toute personne qui concourt à cette procédure est tenue au secret professionnel dans les conditions et sous les peines prévues à l’article 434-7-2 du code pénal ». Cet article prévoit donc que toute divulgation sur des éléments de l’instruction est prohibée.   Viole par exemple le secret de l’instruction : Le fait de divulguer des informations issues de l’instruction à des journalistes : En l’espèce, un officier de police judiciaire avait communiqué à des journalistes des informations connus seulement d’eux (Cass.crim., 24 mars 2020, n°19-80.909), Le fait de prévenir une partie de l’instruction de mesures mises en place à son encontre : En l’espèce, une avocate avait prévenu un ami de son client, soupçonné de trafic de stupéfiants, qu’il était sur écoute. Elle a été condamnée à la peine de 6 mois d’emprisonnement avec sursis et quatre mois d’interdiction d’exercer la profession d’avocat (https://www.leparisien.fr/paris-75/l-avocate-imprudente-a-ete-condamnee-13-12-2013-3403391.php), Le fait de divulguer au parent d’une partie de la procédure des informations issues de l’instruction : En l’espèce, un gendarme avait révélé à son médecin des éléments issues de l’information judiciaire, ce médecin étant la mère d’un mis en examen. Elle avait ainsi révélé à son fils ce qu’elle avait appris (Cass.crim., 10 décembre 2019, n°19-80.479).   La partie civile est-elle soumise au secret de l’instruction ? Avant 2021 La question se pose en ce que les actes d’instruction peuvent mettre en lumière des éléments, ou fournir des pièces utiles à la partie civile. Il arrive en effet régulièrement qu’une partie civile ait besoin de documents de nature pénale pour justifier par exemple de ses demandes d’indemnisation devant un juge civil. L’article 11 du Code de procédure pénale ne précisant pas les parties soumises au secret de l’instruction, la jurisprudence a éclairci cette question avant 2021. Cette dernière a considéré que la partie civile n’était pas soumise au secret de l’instruction (Cass.crim., 9 octobre 1978, n°76-92.075). Cette décision était confirmée par la deuxième chambre civile de la Cour de cassation (Cass.civ., 2ème civ., 21 janvier 1981, n°79-15.686). A l’occasion de cette dernière affaire, la Cour de cassation avait jugé que la partie civile pouvait utiliser des pièces de l’instruction au soutien de son affaire devant le Juge civil. Cette solution était encore confirmée par la chambre sociale de la Cour de cassation (Cass.soc., 6 juillet 1994, n°90-43.640), comme la chambre commerciale (Cass.com., 7 janvier 1976, n°72-14.029). Selon ces jurisprudences, la partie civile était libre de communiquer toute pièce de l’information judiciaire. Cependant, ces solutions sont anciennes et le Code de procédure pénale a été modifié dans le sens d’une restriction des droits de la partie civile.   3.Depuis 2021 : La partie civile peut-elle aujourd’hui produire des pièces pénales pour une instance civile ? La réponse est désormais négative. En effet, le Code de procédure pénale a subi en 2021 deux modifications majeures faisant obstacle à cette jurisprudence ancienne : -l’article 114 du Code prévoit que : « Seules les copies des rapports d’expertise peuvent être communiquées par les parties ou leurs avocats à des tiers pour les besoins de la défense », -l’article 114-1 du Code a été modifié : « Sous réserve des dispositions du sixième alinéa de l’article 114, le fait, pour une partie à qui une reproduction des pièces ou actes d’une procédure d’instruction a été remise en application de cet article, de la diffuser auprès d’un tiers est puni de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 € d’amende ». Ces articles prévoient dès lors que les parties civiles sont devenues de fait soumises au secret de l’instruction, pour ce qui concerne les pièces de la procédure. Elle reste cependant non soumise dans ses déclarations. Ainsi, une partie civile peut utiliser une expertise psychiatrique ou médicale réalisée dans le cadre de l’information judiciaire, aux fins de défense de ses intérêts dans une autre instance. Elle ne pourra cependant pas utiliser d’autres pièces de cette instruction.
Cass., crim, 23 mars 2004, n°03-87.854   Principe : l’impartialité   L’article 6§1 de la Convention européenne des Droits de l’Homme affirme le droit à un procès équitable, se manifestant notamment par le caractère indépendant et impartial du tribunal :   « Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle »   Cette disposition s’applique aux juridictions d’instruction et de jugement.   L’impartialité est appréciée subjectivement et objectivement, comme a pu le préciser la Cour Européenne des Droits de l’Homme (Hauschildt contre Danemark, 24 mai 1989, n° 10486/83) :   « L’impartialité doit s’apprécier selon une démarche subjective, essayant de déterminer la conviction personnelle de tel juge en telle occasion », et selon une démarche objective qui consiste à « se demander si indépendamment de la conduite personnelle du juge, certains faits vérifiables autorisent à suspecter l’impartialité de ce dernier ».   Il s’agit d’une règle obligatoire à laquelle les juges peuvent déroger sous aucun prétexte.   L’arrêt du 23 mars 2004   En l’espèce, l’impartialité d’un juge d’instruction chargé d’une procédure a été remise en cause au motif que son conjoint, avocat, représentait le commissaire au redressement judiciaire de la société mise en cause, dans une autre procédure.   La Cour de cassation a confirmé la décision de la cour d’appel de Grenoble, estimant que si la procédure distincte est clôturée à la date de l’ouverture de l’information objet du pourvoi, l’impartialité du juge dans l’affaire objet du pourvoi n’est pas affectée. Donc, l’impartialité d’un juge ne sera considérée comme éventuellement compromise lors de conflit d’intérêt dans des procédures ouvertes.   L’application du principe d’impartialité   La Cour de cassation a régulièrement l’occasion de confirmer sa position en matière d’impartialité. Dans un arrêt du 6 mars 2024, la chambre criminelle de la Cour de cassation a jugé qu’est impartial le président de la chambre correctionnelle de la cour d’appel ayant prononcé une condamnation, qui se trouve également être le juge de l’application des peines dans le même dossier.
La peine d’interdiction du territoire français et la requête en relèvement   L’interdiction du territoire français est une peine particulière dont peut se servir le juge pénal en cas de crime ou de délit. Elle peut être temporaire (10 ans au plus) ou définitive, une peine principale ou complémentaire, et concerne un étranger résidant en France. L’étranger subissant cette peine a donc l’obligation de quitter le territoire français le temps de l’exécution de la peine. Il peut cependant rédiger une requête en relèvement de l’interdiction du territoire français. Cette requête doit être rédigée auprès du Procureur de la République du Tribunal, ou auprès du Procureur général près la Cour d’appel, ayant condamné l’étranger.   Il doit remplir plusieurs conditions : L’étranger doit résider hors de France lorsqu’il rédige cette requête : L’article L.641-2 du CESEDA prévoit en effet que :   « Il ne peut être fait droit à une demande de relèvement d’une interdiction du territoire que si le ressortissant étranger réside hors de France. Cette condition ne s’applique pas :1° Pendant le temps où le ressortissant étranger subit en France une peine d’emprisonnement ferme ;2° Lorsque l’étranger fait l’objet d’une décision d’assignation à résidence prise en application des articles L. 731-3, L. 731-4 ou L. 731-5 ».   L’étranger ne peut rédiger cette requête avant un délai de 6 mois suivant la condamnation : L’article 702-1 du Code de procédure pénale prévoit en ce sens, en son alinéa 3 : « Sauf lorsqu’il s’agit d’une mesure résultant de plein droit d’une condamnation pénale, la demande ne peut être portée devant la juridiction compétente qu’à l’issue d’un délai de six mois après la décision initiale de condamnation. En cas de refus opposé à cette première demande, une autre demande ne peut être présentée que six mois après cette décision de refus. Il en est de même, éventuellement, des demandes ultérieures. En cas d’interdiction du territoire prononcée à titre de peine complémentaire à une peine d’emprisonnement, la première demande peut toutefois être portée devant la juridiction compétente avant l’expiration du délai de six mois en cas de remise en liberté. La demande doit être déposée au cours de l’exécution de la peine ».   Il doit pouvoir justifier des lieux où il a résidé depuis sa condamnation ou sa libération : L’article 703 du Code de procédure pénale prévoit que le demandeur :   « précise la date de la condamnation ainsi que les lieux où a résidé le requérant depuis sa condamnation ou sa libération ».   Il convient de préciser que des éléments de personnalité devront être rassemblés pour appuyer la requête (santé, famille, travail, formation, absence de nouveaux de nature pénale depuis la condamnation …).   En somme, il convient de réaliser une forme de CV du demandeur, qui pourra justifier de ses résidences et activités, et de sa nécessité de faire relever l’interdiction du territoire.
L’affaire CAHUZAC: un ancien ministre du Budget condamné à une peine de prison aménageable pour fraude fiscale et blanchiment d’argent   En Décembre 2012, Monsieur Jérôme CAHUZAC est accusé par le journal en ligne MEDIAPART d’avoir possédé des fonds non déclarés sur des comptes en SUISSE et à SINGAPOUR. Après avoir démenti avec force tant devant les médias que devant l’Assemblée Nationale, celui-ci finit par reconnaître les faits et démissionne de son poste de Ministre du Budget le 2 Avril 2013. Il sera logiquement mis en examen pour fraude fiscale et blanchiment d’argent de fraude fiscale. Le 8 Décembre 2016, il va être condamné en première instance à trois ans de prison ferme et à cinq ans d’inéligibilité. Cette condamnation lui interdisant de demander un aménagement de peine pour toute la durée de la peine, celui-ci devait inévitablement aller faire un tour par la case prison. C’est très certainement pour cette raison que Monsieur Jérôme CAHUZAC décida d’interjeter appel de la condamnation, ce qui en a suspendu l’exécution et lui a permis de rester libre jusqu’à ce jour. Devant la Cour d’Appel, le 20 Février 2018, l’avocat général Jean-Christophe MULLER, a requis la confirmation du jugement de première instance, par des mots durs, laissant penser que Monsieur Jérôme CAHUZAC devait être un exemple : « En définitive, vous serez une jurisprudence », ajouta-t-il. Lors de cette même audience, Maître DUPOND-MORETTI avait même accepté l’idée d’aggravation de la peine tout en exhortant la Cour de ne pas envoyer son client en prison : « Je ne demande pas la lune, je vous demande même d’aggraver la peine, mais je vous supplie de ne pas l’envoyer en prison. La sanction sociale répond déjà à la peine ». Le 15 Mai 2018, Monsieur Jérôme CAHUZAC a été condamné à quatre ans de prison dont deux avec sursis, 300 000 euros d’amende et cinq ans d’inéligibilité pour fraude fiscale et blanchiment de fraude fiscale. Cette décision semble, de prime abord plus sévère que la décision de première instance, mais en réalité, celle-ci devrait permettre à Monsieur Jérôme CAHUZAC d’éviter l’incarcération, l’une de ses plus grandes peurs comme il a pu le souligner lors du procès. Même si la Cour n’a pas prononcé d’aménagement de peine ab initio, avant la mise à exécution de la peine, il est désormais possible pour lui de saisir un Juge de l’application des peines dans le but d’en demander l’aménagement. En effet, dès lors que la peine d’emprisonnement ferme est inférieure à deux ans (ou un an en cas de récidive légale), et lorsque le condamné présente des garanties suffisantes en termes de réinsertion et de prévention de la récidive, le juge d’application des peines peut décider que la peine d’emprisonnement s’effectuera sous un régime différent, à savoir la semi-liberté, le placement sous surveillance électronique ou le placement à l’extérieure. Dans le cas de Monsieur Jérôme CAHUZAC, la finalité est d’obtenir le placement sous surveillance électronique. Cette décision semble allée à l’encontre de la politique que souhaitais mener le Président de la République, Emmanuel MACRON. En effet, ce dernier, lors de son discours sur la « refondation pénale » du 6 mars 2018, disait vouloir rompre avec l’hypocrisie collective menant à prononcer des peines pour les aménager par ailleurs. Dans cette décision, la Cour aggrave en appel le quantum de la peine pour mieux « faire passer », dans l’opinion public l’assouplissement qui va être accordé par la suite, et ne prend pas le risque de l’accorder elle-même.
Un juge d’instruction ne peut recommencer un interrogatoire en raison d’un défaut d’enregistrement sans empiéter sur les pouvoirs de la chambre de l’instruction (Cass. crim, 19 sept. 2017, n°17-81.016) En l’espèce, une information judiciaire a été ouverte à l’encontre d’un individu après la découverte de 900 pieds de cannabis. Le juge d’instruction a procédé à un interrogatoire de première comparution. Constatant que celui-ci n’avait pas été enregistré alors que des faits criminels avaient été notifiés, le magistrat instructeur a procédé à un nouvel interrogatoire de première comparution. Le mis en examen a donc formé une requête en annulation des actes de la procédure. En matière criminelle, en vertu de l’article 116-1 du Code de procédure pénale, il est obligatoire de procéder à un enregistrement audiovisuel des interrogatoires réalisés dans le cabinet du juge d’instruction, y compris l’interrogatoire de première comparution des personnes mis en examen. La Cour de cassation s’est prononcée à plusieurs reprises sur les conséquences du défaut d’un tel enregistrement. Tout d’abord, cette obligation destinée à préserver les droits du mis en examen en permettant notamment de vérifier ce qu’il aurait pu dire au cours de cet interrogatoire a une importance particulière. En effet, pour obtenir l’annulation d’un acte, le non-respect de la formalité légale ne suffit pas. Il est nécessaire de démontrer l’existence d’un grief causé à l’intéressé. Or, pour le non-respect de cet enregistrement audiovisuel, la Cour de cassation a précisé qu’il « porte nécessairement atteinte aux intérêts de la personne concernée ». Le mis en cause n’a donc pas besoin de démontrer l’existence d’un grief, celui-ci est présumé et ceux, même s’il a fait usage du droit de se taire (Cass. crim 3 mars 2010 n°09-87.924 ; 22 juin 2016 n° 15-87.752). Ensuite, dans le cadre d’une information judiciaire, seule la chambre de l’instruction est compétente pour recevoir et déclarer un acte nul. La question qui se posait était donc celle de savoir si le juge d’instruction pouvait réaliser un second interrogatoire de première comparution pour se conformer à cette obligation légale ou ce second enregistrement reviendrait à déclarer le premier acte nul sans aucune décision de la chambre de l’instruction ? La Cour de cassation s’est prononcée en considérant que « le juge d’instruction ne saurait, sans excès de pouvoir, recommencer un interrogatoire de première comparution qu’il estime entaché d’irrégularité ; qu’en procédant ainsi, il empiète sur les attributions de la chambre de l’instruction, seule compétente, pendant l’information judiciaire, pour en apprécier la régularité, sous le contrôle de la Cour de cassation ». Ainsi, même si le juge d’instruction s’est aperçu après avoir réalisé cet interrogatoire que celui-ci était irrégulier, il ne pouvait procéder à un second interrogatoire destiné à se substituer au premier sans qu’une décision de la chambre de l’instruction ait déclaré cet acte nul.
La nécessité pour le juge de motiver la peine prononcée en la justifiant par rapport aux faits et à la personne Cass.crim., 1er février 2017, n°15-84.511   Le Code pénal a instauré une obligation pour le juge de motiver la peine prononcée en la justifiant par rapport aux faits et à la personnalité, car il est existe un grand nombre de peines applicables ainsi que le principe d’individualisation de la peine.   Le juge a donc un large choix dans la peine applicable et doit pouvoir en justifier.   Fonctions de la peine et types de peine   La peine a deux fonctions principales selon le Code pénal (article 130-1) : la sanction et l’insertion/réinsertion.   Ces fonctions ont pour objectifs d’assurer la protection de la société, éviter la récidive ou la commission de nouvelles infractions, et restaurer l’équilibre social.   Un équilibre doit être trouvé dans la sanction, qui doit être suffisamment sévère pour éviter la récidive, mais ne doit pas non plus être excessivement sévère pour favoriser la réinsertion.   A cette fin, le Code pénal met à disposition des magistrats un large choix de peines :   -les peines criminelles sont constituées par une détention criminelle ou réclusion criminelle de dix ans à la perpétuité, mais peuvent également être accompagnées d’une amende (articles 131-1 et suivants du Code pénal) ;   -les peines délictuelles sont constituées par l’emprisonnement, la détention à domicile sous surveillance électronique, le travail d’intérêt général, l’amende, le jour-amende, les peines de stage, les peines restrictives ou privatives de droits et la sanction-réparation (articles 131-3 et suivants du Code pénal) ;   -les peines contraventionnelles sont constituées par l’amende, les peines restrictives ou privatives de droits, ainsi que la sanction-réparation (articles 131-12 et suivants du Code pénal).   Le magistrat peut également appliquer des peines complémentaires (articles 131-10 et suivants du Code pénal), ainsi que des aménagements de peine ab initio, c’est-à-dire dès le jugement.   Afin de l’aider dans le choix de la peine, le Code pénal prévoit le principe de l’individualisation de la peine.   Principe d’individualisation   L’article 132-1 du Code pénal prévoit que :   « Toute peine prononcée par la juridiction doit être individualisée ».   Ce principe signifie que la peine doit être ordonnée au regard de la personnalité de l’auteur de l’infraction mais pas seulement.   En effet, le Conseil constitutionnel a rappelé à plusieurs reprises que ce principe signifie la prise en considération de la personnalité de l’auteur, mais également des circonstances propres à chaque cas d’espèce, afin de ne pas faire obstacle au principe d’une répression effective des infractions (Conseil constitutionnel, décisions des 20 janvier 1981 et 9 aout 2007, DC n°80-127 et n°2007-554 ; décision QPC du 16 octobre 2015, n°2015-493).   En ce sens et en ce qui concerne la peine d’emprisonnement, l’article 132-19 du Code pénal prévoit une échelle de sévérité :   « Lorsqu’un délit est puni d’une peine d’emprisonnement, la juridiction peut prononcer une peine d’emprisonnement ferme ou assortie en partie ou en totalité du sursis pour une durée inférieure à celle qui est encourue. Elle ne peut toutefois prononcer une peine d’emprisonnement ferme d’une durée inférieure ou égale à un mois. Toute peine d’emprisonnement sans sursis ne peut être prononcée qu’en dernier recours si la gravité de l’infraction et la personnalité de son auteur rendent cette peine indispensable et si toute autre sanction est manifestement inadéquate. Dans ce cas, si la peine est inférieure ou égale à six mois, elle doit, sauf impossibilité résultant de la personnalité ou de la situation du condamné, faire l’objet d’une des mesures d’aménagement prévues à l’article 132-25. Dans les autres cas prévus au même article 132-25, elle doit également être aménagée si la personnalité et la situation du condamné le permettent, et sauf impossibilité matérielle. Le tribunal doit spécialement motiver sa décision, au regard des faits de l’espèce et de la personnalité de leur auteur ainsi que de sa situation matérielle, familiale et sociale conformément aux dispositions de l’article 464-2 du code de procédure pénale ».   Le juge n’a donc aucune obligation de prononcer une peine d’emprisonnement, il peut choisir d’appliquer une autre peine.   Il peut donc : -appliquer une autre peine que l’emprisonnement, -si cela semble inadapté aux faits et à la personnalité de l’auteur, il peut appliquer une peine d’emprisonnement avec sursis, -si cela n’est encore pas adapté, il peut appliquer un aménagement de peine, -et en dernier recours, il peut appliquer une peine d’emprisonnement ferme.   Ce choix doit être motivé.   Ce principe d’individualisation de la peine existe également pour la peine d’amende, qui peut varier en fonction des revenus et des charges de l’auteur (article 132-20 du Code pénal).   La Cour de cassation a eu l’occasion de rappeler ce principe dans un arrêt du 1er février 2017.   L’arrêt du 1er février 2017   En l’espèce, le maire d’une commune était condamné pour provocation à la discrimination, à la haine et à la violence à une peine d’amende de 10.000 euros et un an d’inéligibilité.   En effet, à l’occasion d’une réunion publique, il déclarait « Je vous rappelle quand même que les gens du voyage, que dis-je, les Roms, m’ont mis neuf fois le feu. Neuf fois des départs de feux éteints par le SDIS dont le dernier, ils se le sont mis eux-mêmes. Vous savez ce qu’ils font : ils piquent des câbles électriques et après ils les brûlent pour récupérer le cuivre et ils se sont mis à eux-mêmes le feu dans leurs propres caravanes. Un gag ! Ce qui est presque dommage, c’est qu’on ait appelé trop tôt les secours ! Mais je ne l’ai pas dit, je ne l’ai pas dit. Non mais parce que les Roms, c’est un cauchemar, c’est un cauchemar ».   Le requérant interjetait appel de cette décision, remettant en question la peine d’inéligibilité.   La Cour d’appel confirmait sa condamnation, au motif qu’il s’agissait d’un homme politique, maire de sa commune depuis 13 années, et que sa mission était d’assurer la sécurité de toutes les personnes se trouvant sur sa commune. A cela s’ajoutait la gravité des propos et la personnalité de l’auteur.   Le requérant formait un pourvoi en cassation, et soulevait les moyens suivants : -il avait fait usage de sa liberté d’expression dans le cadre d’un débat d’intérêt général, -la peine d’inéligibilité aurait un effet dissuasif sur les débats, -la peine d’inéligibilité n’était pas nécessaire, n’était pas proportionnée et n’était pas individualisée.   La Cour de cassation confirmait la décision de la Cour d’appel.   En premier lieu, la peine doit être justifiée au regard de la gravité des faits, de la personnalité de l’auteur et de sa situation personnelle, ce qui était le cas en l’espèce.   En second lieu, la peine était proportionnée ainsi que l’atteinte à sa liberté d’expression.   En conclusion : Si votre jugement n’est pas suffisamment motivé, vous pouvez interjeter appel ou former un pourvoi en cassation pour violation de l’article 132-1 du Code pénal.
Il n’est pas possible de contraindre la partie civile à comparaître devant la juridiction correctionnelle.   Cass., crim., 4 avril 2024, n°22-80.417   Le droit à un procès équitable Le droit à un procès équitable est un droit fondamental garanti à toute personne dans le cadre d’une procédure judiciaire. Ce droit est inscrit dans la Convention Européenne des Droits de l’Homme à l’article 6, qui dispose : « 1. Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle. Le jugement doit être rendu publiquement, mais l’accès de la salle d’audience peut être interdit à la presse et au public pendant la totalité ou une partie du procès dans l’intérêt de la moralité, de l’ordre public ou de la sécurité nationale dans une société démocratique, lorsque les intérêts des mineurs ou la protection de la vie privée des parties au procès l’exigent, ou dans la mesure jugée strictement nécessaire par le tribunal, lorsque dans des circonstances spéciales la publicité serait de nature à porter atteinte aux intérêts de la justice. Toute personne accusée d’une infraction est présumée innocente jusqu’à ce que sa culpabilité ait été légalement établie. Tout accusé a droit notamment à : a) être informé, dans le plus court délai, dans une langue qu’il comprend et d’une manière détaillée, de la nature et de la cause de l’accusation portée contre lui ; b) disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense ; c) se défendre lui-même ou avoir l’assistance d’un défenseur de son choix et, s’il n’a pas les moyens de rémunérer un défenseur, pouvoir être assisté gratuitement par un avocat d’office, lorsque les intérêts de la justice l’exigent ; d) interroger ou faire interroger les témoins à charge et obtenir la convocation et l’interrogation des témoins à décharge dans les mêmes conditions que les témoins à charge ; e) se faire assister gratuitement d’un interprète, s’il ne comprend pas ou ne parle pas la langue employée à l’audience. »     L’arrêt du 3 mai 2024 mettant l’accent sur la comparution de la partie civile En l’espèce, une personne a déposé plainte pour agression sexuelle sur personne dont la particulière vulnérabilité, due à une déficience physique ou psychique, était apparente ou connue de son auteur. Le prévenu a été condamné par le tribunal correctionnel à deux ans d’emprisonnement avec sursis probatoire. Le prévenu ainsi que le ministère public ont fait appel de la décision à titre incident. La partie civile, quant à elle, a formé appel incident sur les dispositions civiles. Il convient de préciser que la victime, citée à comparaître comme témoin des faits, ne s’est présentée ni à la confrontation, ni aux audiences, malgré les convocations, par peur, et au vu de son lourd handicap et du traumatisme causé par les faits. En l’occurrence, cela posait problème dans le cadre du respect du droit de la partie en défense à un procès équitable. En effet, au regard de l’article 6, §3, d) de la Convention Européenne des Droits de l’Homme, il doit être possible d’interroger les témoins dans le cadre d’un procès. Les poursuites reposant essentiellement sur les déclarations de la partie civile, il semblait nécessaire que celle-ci se présente. Toutefois, et comme la Cour de cassation le rappelle, aucune disposition du code de procédure pénale ne permet de contraindre la partie civile à comparaître devant la juridiction correctionnelle. Dès lors, les juges doivent rechercher les moyens qu’il est possible de mettre en œuvre afin de confronter les parties, et par conséquent respecter le droit au procès équitable dans son ensemble, ainsi que de vérifier que l’absence de la partie civile soit bien justifiée par une excuse légitime.   La Cour de cassation, dans cet arrêt, applique en droit interne la jurisprudence de la Cour européenne des Droits de l’Homme qui précise que les juges doivent rechercher tous les moyens possibles pour assurer une confrontation entre la victime et le prévenu (CEDH, 10 avril 2012, Tseber c/ République Tchèque, n°46203/08).   La nécessité d’un motif légitime d’absence de comparution à l’audience Cette décision met l’accent sur l’importance pour la partie civile d’apporter la preuve d’un motif légitime justifiant son absence à l’audience. La présence de la partie civile apparait nécessaire dès lors qu’elle a connaissance des faits en détails, ce qui paraît utile pour le juge dans le cadre de la décision qu’il a à prendre par la suite. En l’espèce, la partie civile n’avait pas apporté de preuves du handicap de la victime ni du traumatisme lié aux faits. Les juges auraient dû ordonner une expertise aux fins de vérifier l’état de santé de la victime. L’excuse légitime aurait ainsi pu être appréciée par les juges au regard de la situation physique et psychologique de la victime.
Le préjudice doit être certain pour être indemnisé. Ainsi un préjudice éventuel futur ne peut pas être indemnisé. Mais ce principe est complété par celui de la perte de chance. La perte de chance est la disparition certaine d’une éventualité favorable à la victime. On indemnise ici la perte de l’opportunité et non le gain qui aurait été procuré par cette opportunité si elle s’était réalisée. En pratique, le chiffrage de cette indemnisation est réalisé ainsi : le juge prend en compte le total des gains qui auraient pu être obtenus, et y applique un coefficient réducteur. La perte de chance peut être envisagée dans de nombreux cas, lorsqu’un élément futur devient impossible. Mais elle n’est pas toujours admise par la jurisprudence. En effet, en raison du principe de réparation intégrale, il y a lieu à vérifier si la chance perdue est bien certaine, et pas déjà comprise dans un autre poste d’indemnisation.   La perte de chance professionnelle   Après la consolidation, plusieurs postes de perte de chances professionnelles peuvent être indemnisés. Tout d’abord, on peut indemniser l’absence de salaire d’une victime étant en recherche d’emploi avant la survenance du dommage. Ainsi on peut estimer qu’elle aurait trouvé un emploi et que le dommage à générer une perte de chance de ces revenus. Ensuite, lors d’un dommage affectant la capacité à travailler, l’employé peut être indemnisé de la perte des gains futurs. Certains employés ont demandé une indemnisation indépendante, au titre de la perte de chance de gains. Cela visait la perte de chance d’une promotion, qui aurait engendré des revenus supérieurs. Mais la position de la Cour de cassation sur l’autonomie de cette indemnisation, n’est pas stable. Si elle a parfois admis cette indemnisation, elle l’a d’autres fois rejetée, au motif que cette perte était indemnisée par celle des gains futurs. C’est particulièrement le cas lorsque l’indemnisation se fait en l’état de rente, qui peut être majorée.   Cour de cassation – Deuxième chambre civile, 1 février 2024 (n° 22-11.448) : « La victime ne démontrait pas que, lors de l’accident, elle présentait des < chances > de promotion < professionnelle, à défaut de se prévaloir d’une formation ou d’un processus de nature à démontrer l’imminence ou l’annonce d’un avancement dans sa carrière ou encore d’une création d’entreprise. »     La perte de chance de réussite d’un concours   Il a pu être indemnisé la perte de chance de réussir un concours, pour un participant admissible aux écrits. La responsabilité de l’Etat avait été retenue. En l’espèce, le participant avait atteint l’âge limite, il n’aura donc pas pu reparticiper au concours. Cour administrative d’appel de Marseille 23 novembre 1999 : « compte tenu de cette circonstance et de la perte d’une chance sérieuse d’admission définitive, l’intéressé justifie d’un préjudice anormal et spécial »   La perte de chance de vie   Peut-on indemnise la perte de la chance de vivre ? C’est une question qui a été posée à la Cour de cassation en 2013. Le tribunal de 1ère instance avec octroyé environ 200 000 euros aux héritiers de la victime, décédée, pour perte de chance de vie. La Cour d’appel avait annulé cette décision, au motif que le droit de vivre en bonne santé pour une durée déterminée n’était pas un droit patrimonial, compte tenu des aléas de la vie. Le demandeur au pourvoi soutenait alors que l’aléa est un élément de la perte de chance qui n’empêche pas l’indemnisation. Mais la Cour de cassation dans un arrêt du 26 mars 2013, par la chambre criminelle, confirme l’arrêt de la Cour d’appel. Elle explique que « aucun préjudice résultant de son propre décès n’a pu naître, du vivant de la victime, dans son patrimoine et être ainsi transmis à ses héritiers ». Ainsi, pour que le préjudice de perte de chance de vie puisse être transmis aux héritiers du défunt, il faut que celui-ci existe dans le patrimoine de la victime, lors de sa vie. Mais puisque la perte certaine de chance de vie nécessite la mort, ce préjudice ne peut pas avoir exister dans le patrimoine de la victime, de son vivant. Il ne peut donc pas être transmis aux héritiers, et indemnisé.     Ainsi l’appréciation de la perte de chance est faite au cas par cas, in concreto, par la Cour de cassation et les juridictions, afin d’assurer la réparation intégrale des victimes, sans pertes ni gain.
Cass. Crim., 14 mai 2019, n°18-85.399 La conduite sous l’empire d’alcool est prévue par le code de la route à l’article L. 234-1. L’état alcoolisé est caractérisé par la présence d’un taux d’alcoolémie dans le sang ou dans l’air expiré supérieur au taux légal. « Même en l’absence de tout signe d’ivresse manifeste, le fait de conduire un véhicule sous l’empire d’un état alcoolique caractérisé par une concentration d’alcool dans le sang égale ou supérieure à 0,80 gramme par litre ou par une concentration d’alcool dans l’air expiré égale ou supérieure à 0,40 milligramme par litre est puni de deux ans d’emprisonnement et de 4 500 euros d’amende. » Le dépistage de l’imprégnation alcoolique peut être obligatoire ou facultatif, il est obligatoire lorsque le conducteur est impliqué dans un accident de la circulation ayant entraîné un dommage corporel, ou en cas d’infraction au code de la route punie par une peine complémentaire de suspension du permis de conduire. Le dépistage peut être facultatif, ce qui signifie que c’est laissé à la discrétion des forces de l’ordre. En effet, la loi n° 2011-267 du 14 mars 2011 a prévu à l’article L. 234-9 de permettre aux forces de l’ordre de procéder à un dépistage indépendamment de toute infraction préalable. C’est ce qu’on appelle un contrôle préventif. « Les officiers ou agents de police judiciaire de la gendarmerie ou de la police nationales territorialement compétents soit sur l’instruction du procureur de la République, soit à leur initiative peuvent, même en l’absence d’infraction préalable ou d’accident, soumettre toute personne qui conduit un véhicule ou qui accompagne un élève conducteur à des vérifications destinées à établir l’état alcoolique, qui sont soit réalisées immédiatement et sur les lieux, soit précédées d’épreuves de dépistage de l’imprégnation alcoolique par l’air expiré. Sur l’ordre et sous la responsabilité des officiers de police judiciaire, les agents de police judiciaire adjoints peuvent, même en l’absence d’infraction préalable ou d’accident, soumettre toute personne qui conduit un véhicule ou qui accompagne un élève conducteur à des épreuves de dépistage de l’imprégnation alcoolique par l’air expiré. » S’agissant du formalisme du contrôle d’alcoolémie, il est effectué sur l’ordre et sous la responsabilité de l’officier de police judiciaire ou d’un agent de police judiciaire depuis la loi n°2021-646 du 25 mai 2021. Un agent de police judiciaire adjoint peut pratiquer un contrôle d’alcoolémie sous la responsabilité d’un officier de police judiciaire, sans que ce dernier ne soit forcément présent sur les lieux du contrôle. Pour autant, une nouvelle exigence est prévue par la Chambre criminelle dans un arrêt du 14 mai 2019. En l’espèce, un individu conduisait sous l’empire d’un état alcoolique, il a fait l’objet d’un dépistage de son imprégnation alcoolique. Ce dépistage s’avère positif, L’individu a alors été poursuivi par le Tribunal de police d’Angoulême. L’individu soulève une exception de nullité du procès-verbal de constatation de l’infraction. En effet, le procès-verbal ne précisait pas la nature de l’ordre reçu de l’officier de police judiciaire concernant les heures et lieu du contrôle préventif effectué. Le Tribunal de police d’Angoulême dans son jugement du 26 juin 2018 a rejeté l’exception de nullité soulevée par le demandeur en invoquant que l’article L. 234-9 du code de la route permettant aux agents de police judiciaire et aux agents de police judiciaire adjoints de réalisés ces contrôles sur l’ordre et sous la responsabilité d’officiers de police judiciaire. Dès lors, le demandeur est reconnu coupable et est condamné à 135 € d’amende. L’individu forme alors un pourvoi en cassation. L’absence de la nature de l’ordre reçu de l’Officier de police judiciaire sur les heures et lieu d’un contrôle préventif entache-t-elle le procès-verbal d’un vice de procédure ? Dans son arrêt du 14 mai 2019, la Chambre criminelle casse et annule le jugement au motif qu’il fallait s’assurer que l’APJ adjoint avait bien reçu l’ordre d’effectuer un contrôle préventif aux heures et lieu de la constatation de l’infraction. Cet arrêt est très important puisqu’il limite par cette nullité de procédure le contrôle d’alcoolémie dans le cadre d’un contrôle préventif. En effet, le procès-verbal doit mentionner, le nom de l’officier de police judicaire, et s’il avait l’autorisation d’effectué un contrôle préventif aux heures et lieu de la constatation de l’infraction. Si ce n’est pas le cas, la procédure est viciée et ne peut donner lieu à une condamnation.
  Qu’est-ce qu’une composition pénale ? Elle fait partie des modes alternatifs aux poursuites proposés par le procureur de la République, la composition pénale est mise en place si la personne concernée reconnaît les faits dont elle est accusée. Cette mesure s’applique avant que la personne ne soit poursuivie devant le Tribunal correctionnel. Le procureur propose alors à l’auteur des faits une ou plusieurs mesures des applicables, qui sont toutes détaillées à l’article 41-2 du Code de procédure pénale. Par exemple, le procureur peut proposer à la personne ayant reconnu les faits de « remettre son véhicule », « ne pas rencontrer ou recevoir, pour une durée qui ne saurait excéder six mois, le ou les coauteurs ou complices éventuels », « accomplir, le cas échéant à ses frais, un stage de citoyenneté », entre autres. Cette liste contient 20 mesures, parmi lesquelles le procureur choisit une ou plusieurs, et les propose à l’auteur des faits : « 1° Verser une amende de composition au Trésor public. Le montant de cette amende, qui ne peut excéder le montant maximum de l’amende encourue, est fixé en fonction de la gravité des faits ainsi que des ressources et des charges de la personne. Son versement peut être échelonné, selon un échéancier fixé par le procureur de la République, à l’intérieur d’une période qui ne peut être supérieure à un an ; 2° Se dessaisir au profit de l’Etat de la chose qui a servi ou était destinée à commettre l’infraction ou qui en est le produit ; 3° Remettre son véhicule, pour une période maximale de six mois, à des fins d’immobilisation ; 4° Remettre au greffe du tribunal judiciaire son permis de conduire, pour une période maximale de six mois ; 4° bis Suivre un programme de réhabilitation et de sensibilisation comportant l’installation à ses frais d’un éthylotest anti-démarreur sur son véhicule, pour une période minimale de six mois et maximale de trois ans ; 5° Remettre au greffe du tribunal judiciaire son permis de chasser, pour une période maximale de six mois ; 6° Accomplir au profit de la collectivité, notamment au sein d’une personne morale de droit public ou d’une personne morale de droit privé chargée d’une mission de service public ou d’une association habilitées, un travail non rémunéré pour une durée maximale de cent heures, dans un délai qui ne peut être supérieur à six mois ; 7° Suivre un stage ou une formation dans un service ou un organisme sanitaire, social ou professionnel pour une durée qui ne peut excéder trois mois dans un délai qui ne peut être supérieur à dix-huit mois ; 8° Ne pas émettre, pour une durée de six mois au plus, des chèques autres que ceux qui permettent le retrait de fonds par le tireur auprès du tiré ou ceux qui sont certifiés et ne pas utiliser de cartes de paiement ; 9° Ne pas paraître, pour une durée qui ne saurait excéder six mois, dans le ou les lieux désignés par le procureur de la République et dans lesquels l’infraction a été commise ou dans lesquels réside la victime ; 10° Ne pas rencontrer ou recevoir, pour une durée qui ne saurait excéder six mois, la ou les victimes de l’infraction désignées par le procureur de la République ou ne pas entrer en relation avec elles ; 11° Ne pas rencontrer ou recevoir, pour une durée qui ne saurait excéder six mois, le ou les coauteurs ou complices éventuels désignés par le procureur de la République ou ne pas entrer en relation avec eux ; 12° Ne pas quitter le territoire national et remettre son passeport pour une durée qui ne saurait excéder six mois ; 13° Accomplir, le cas échéant à ses frais, un stage de citoyenneté ; 14° En cas d’infraction commise soit contre son conjoint, son concubin ou son partenaire lié par un pacte civil de solidarité, soit contre ses enfants ou ceux de son conjoint, concubin ou partenaire, résider hors du domicile ou de la résidence du couple et, le cas échéant, s’abstenir de paraître dans ce domicile ou cette résidence ou aux abords immédiats de celui-ci, ainsi que, si nécessaire, faire l’objet d’une prise en charge sanitaire, sociale ou psychologique ; les dispositions du présent 14° sont également applicables lorsque l’infraction est commise par l’ancien conjoint ou concubin de la victime, ou par la personne ayant été liée à elle par un pacte civil de solidarité, le domicile concerné étant alors celui de la victime. Pour l’application du présent 14°, le procureur de la République recueille ou fait recueillir, dans les meilleurs délais et par tous moyens, l’avis de la victime sur l’opportunité de demander à l’auteur des faits de résider hors du logement du couple. Sauf circonstances particulières, cette mesure est prise lorsque sont en cause des faits de violences susceptibles d’être renouvelés et que la victime la sollicite. Le procureur de la République peut préciser les modalités de prise en charge des frais afférents à ce logement pendant une durée qu’il fixe et qui ne peut excéder six mois ; 15° Accomplir, le cas échéant à ses frais, un stage de sensibilisation aux dangers de l’usage de produits stupéfiants ; 16° Se soumettre à une mesure d’activité de jour consistant en la mise en oeuvre d’activités d’insertion professionnelle ou de mise à niveau scolaire soit auprès d’une personne morale de droit public, soit auprès d’une personne morale de droit privé chargée d’une mission de service public ou d’une association habilitées à mettre en oeuvre une telle mesure ; 17° Se soumettre à une mesure d’injonction thérapeutique, selon les modalités définies aux articles L. 3413-1 à L. 3413-4 du code de la santé publique, lorsqu’il apparaît que l’intéressé fait usage de stupéfiants ou fait une consommation habituelle et excessive de boissons alcooliques. La durée de la mesure est de vingt-quatre mois au plus ; 17° bis Accomplir, le cas échéant à ses frais, un stage de sensibilisation à la lutte contre l’achat d’actes sexuels ; 17° ter Accomplir, le cas échéant à ses frais, un stage de responsabilité parentale ; 18° Accomplir à ses frais un stage de responsabilisation pour la prévention et la lutte contre les violences au sein du couple et sexistes ; 19° Accomplir, le cas échéant à ses frais, un stage de lutte contre le sexisme et de sensibilisation à l’égalité entre les femmes et les hommes ». Le procureur informe la personne concernée, qui pourra donner son accord ou non à la proposition. La mesure sera ensuite soumise à une validation par le président du tribunal.   A quelles infractions s’applique la composition pénale ? Selon l’article 41-2 CPP, la composition pénale peut être proposée aux personnes qui reconnaissent « avoir commis un ou plusieurs délits punis à titre de peine principale d’une peine d’amende ou d’une peine d’emprisonnement d’une durée inférieure ou égale à cinq ans, ainsi, le cas échéant, une ou plusieurs contraventions connexes qui consiste en une ou plusieurs des mesures suivantes ». L’article 41-3 ajoute qu’elle peut être également proposée aux personnes ayant commis des contraventions : « La procédure de composition pénale est également applicable aux contraventions ». Elle s’applique donc aux délits et contraventions, mais pas aux crimes.   Il existe des exceptions aux infractions pouvant faire objet d’une composition pénale : « Les dispositions du présent article ne sont pas applicables en matière de délits de presse, de délits d’homicides involontaires ou de délits politiques », selon l’article 41-2 du CPP.   Quelles sont les conséquences de la composition pénale ? Cette procédure s’appliquant avant que des poursuites ne soient engagées envers l’auteur des faits, « l’exécution de la composition pénale éteint l’action publique » (article 41-2 alinéa 9 CPP). Plus précisément, si la personne concernée accepte la mesure de composition pénale qui lui est proposée par le procureur, elle ne pourra plus être poursuivie par le Ministère Public et être renvoyée devant le tribunal correctionnel. Cependant, si la personne refuse la peine, ou ne l’exécute pas, le procureur a la possibilité de mettre en mouvement l’action publique.   Il est important de préciser que la composition pénale peut aussi être proposée à une personne morale : « Les dispositions des articles 41-2 et 41-3, en ce qu’elles prévoient une amende de composition et l’indemnisation de la victime, sont applicables à une personne morale dont le représentant légal ou toute personne bénéficiant, conformément à la loi ou à ses statuts, d’une délégation de pouvoir à cet effet reconnaît sa responsabilité pénale pour les faits qui lui sont reprochés » (article 41-3-1 A). Cet article prévoit un plafond au montant de l’amende : le « quintuple de l’amende encourue par les personnes physiques ».   Les similitudes de la composition pénale avec la CRPC et l’ordonnance pénale La CRPC, autrement appelée « plaider coupable », est une autre mesure qui peut être proposée par le procureur pour que l’auteur des faits évite de passer devant le tribunal correctionnel (voir notre article « Le fonctionnement de la CRPC »). L’ordonnance pénale est également une procédure simplifiée, qui évite une audience (voir notre article « Ordonnance pénale : quel recours ? »).   La composition pénale et la CRPC se basent toutes deux sur la reconnaissance de culpabilité, et sur le fait que celles-ci sont des mesures rapides évitant d’encombrer le Tribunal correctionnel. Elles doivent être homologuées par un magistrat du tribunal. Comme l’ordonnance pénale et la CRPC, la composition pénale s’applique aux délits et contraventions. Elle ne peut pas porter sur un crime (article 41-2 du CPP).   En conclusion La mesure de composition pénale est une bonne alternative aux poursuites. S’appliquant uniquement aux contraventions et aux délits, elle permet d’éviter la publicité d’un procès, et est applicable tant pour les personnes privées que pour les personnes morales.
POUR SAVOIR SI LA LEGITIME DEFENSE EST PROPORTIONNEE, IL FAUT ETUDIER LE MOYEN DE LA RIPOSTE ET NON LE RESULTAT Cass.crim., 17 janvier 2017, n°15-86.481   Définition de la légitime défense La légitime est définie par le Code pénal comme suit (article 122-5) : « N’est pas pénalement responsable la personne qui, devant une atteinte injustifiée envers elle-même ou autrui, accomplit, dans le même temps, un acte commandé par la nécessité de la légitime défense d’elle-même ou d’autrui, sauf s’il y a disproportion entre les moyens de défense employés et la gravité de l’atteinte. N’est pas pénalement responsable la personne qui, pour interrompre l’exécution d’un crime ou d’un délit contre un bien, accomplit un acte de défense, autre qu’un homicide volontaire, lorsque cet acte est strictement nécessaire au but poursuivi dès lors que les moyens employés sont proportionnés à la gravité de l’infraction ». La légitime défense représente donc une réponse à une atteinte injustifiée aux personnes ou aux biens, réponse qui, en d’autres circonstances, constituerait une infraction condamnable pénalement.   Afin de bénéficier de ce fait justificatif de légitime défense et éviter une condamnation, il convient de répondre à plusieurs critères : -Il faut tout d’abord constater une « attaque injustifiée » sur une personne : dès lors, une personne faisant l’objet d’une agression peut se défendre par la force, -Cette « attaque injustifiée » doit être réelle : l’attaque doit avoir lieu, être présente et ne pas être hypothétique. La jurisprudence rejette donc les cas de défense à titre préventif (Paris, 26 octobre 1999 ; BICC 2000. 358). -la réponse doit être accomplie dans le « même temps », c’est-à-dire être immédiate à l’attaque : la légitime défense ne saurait être retenue si la réponse n’a pas été immédiate après l’attaque (Cass. crim., 16 octobre 1979 : D. 1980. IR 522, obs. Puech ; Cass.crim., 17 janvier 2017, n°15-86.481), -elle doit répondre à la « nécessité de la légitime défense » : la personne attaquée doit se trouver dans une situation où elle n’a pas d’autre choix que de répondre par la force (Cass.crim., 24 février 2015, n°14-80.222), -enfin, la réponse doit être proportionnée à l’attaque.   Cette réponse peut intervenir face à une attaque envers soi-même ou envers autrui.   Ces critères s’appliquent également en cas d’attaque faite aux biens, précision faite par le Code pénal que l’homicide volontaire ne peut jamais être justifié par le crime ou le délit commis contre les biens.   Critère de proportionnalité de la défense Le critère de la proportionnalité de la réponse à une attaque injustifiée est le plus difficile à démontrer. La jurisprudence exige en effet que la réponse à l’attaque ne soit pas d’une violence trop importante par rapport à la gravité de l’attaque (Cass.crim., 24 février 2015, n°14-80.222). A titre d’exemple, un homicide volontaire ne pourra jamais être justifié par l’attaque injustifiée constituée d’une gifle. A ce titre, la Cour de cassation a précisé que ce critère de proportionnalité était étudié par rapport au moyen utilisé pour répondre et non par rapport au résultat (Cass.crim., 17 janvier 2017, n°15-86.481). En l’espèce, lors d’une dispute suite à un accident matériel, deux automobilistes en venaient aux mains. Le conducteur agressé tentait de fuir la scène, puis étant empêché de fuir, il se courbait pour parer aux coups du conducteur agresseur. Il se défendait en lançant sa main vers l’agresseur. Le conducteur agresseur chutait au sol et devenait paraplégique. Les magistrats ont reconnu l’état de légitime défense, au motif que le moyen utilisé pour se défendre, à savoir le fait de lancer sa main vers l’agresseur, était proportionné à l’attaque subie, et ce peu importe les conséquences finales sur l’agresseur. Les magistrats notaient qu’il était impossible d’assurer que la chute avait été provoquée par le coup (s’il avait effectivement touché l’agresseur) ou par la perte d’équilibre de l’agresseur en tentant d’éviter le coup. Le conducteur agressé avait été contraint de se défendre. La Cour de cassation complétait cette analyse en précisant que seule la proportion de la réponse doit être considérée, peu importe le résultat de cette réponse.   Dès lors, comme dans le cas d’espèce, il ne saurait être reproché à un individu d’avoir provoqué de graves conséquences si cet individu n’a fait que répondre de manière proportionnée à une attaque qu’elle subissait.   Actualités récentes La question de la légitime défense fait très souvent l’objet de questions, tant le critère de proportionnalité est important. Pour exemple, une femme s’est vue reconnaitre l’état de légitime défense, pour avoir tué son compagnon avec un coup de couteau dans le cœur. Les magistrats ont retenu que son compagnon, sous l’emprise d’alcool, s’était jeté sur elle et tentait de l’étrangler (https://www.sudouest.fr/faits-divers/pas-de-calais-une-femme-acquittee-du-meurtre-de-son-conjoint-la-legitime-defense-retenue-18098147.php).   De la même façon, l’état de légitime défense a été reconnu concernant un homme qui a tiré sur son neveu. Ce dernier était alcoolisé, s’était rendu chez son oncle en scooter dans la nuit, sans s’annoncer. Il entrait dans le jardin de son oncle, puis brisait une vitre et pénétrait dans le logement à 2H du matin, où se trouvaient la femme et la fille de son oncle. Son oncle lui tirait dessus. La Chambre de l’instruction a prononcé le non-lieu à poursuivre ce dernier (https://actu.fr/hauts-de-france/buigny-l-abbe_80147/homicide-pres-dabbeville-legitime-defense-tireur-reconnue_30665276.html).   Au contraire, l’état de légitime défense n’a pas été retenu pour un jeune homme ayant arraché l’oreille d’un autre individu. Alors qu’ils étaient alcoolisés, ils se battaient sur le parking d’une discothèque. Le premier donnait des coups de poing au second, ce dernier lui faisait alors une clé de bras et lui mordait l’oreille au point de l’arracher. Il était condamné à la peine de 8 mois d’emprisonnement ferme aménagée sous bracelet électronique et 8 mois d’emprisonnement avec sursis probatoire (https://actu.fr/bretagne/saint-malo_35288/il-lui-arrache-une-oreille-en-sortant-de-discotheque-a-saint-malo-et-plaide-la-legitime-defense_60959883.html).   De la même façon, l’état de légitime défense a été refusé dans le cadre d’une attaque à la bombe lacrymogène. Un individu était assis sur un banc, son vélo adossé au banc. Une personne qu’il ne connaissait pas l’abordait, faisait mine de le connaitre et lui demandait de lui rembourser la somme de 15 euros. Face au refus de rembourser cette somme, le passant lui saisissait la manche et faisait mine de partir avec son vélo. Le premier sortait une bombe lacrymogène, le second s’approchait de lui avec un air qu’il trouvait menaçant. Le premier l’attaquait alors avec la bombe lacrymogène. Il était condamné à suivre un stage de citoyenneté (https://www.lamanchelibre.fr/actualite-1097790-coutances-il-craint-une-agression-et-se-defend-la-legitime-defense-refusee).
Constitue une circonstance aggravante le fait pour un individu d’exercer des faits de violence sur son ancienne concubine, en raison d’un différend concernant le droit de visite et d’hébergement de leur enfant   Cass., crim., 2 mai 2024, n°23-85.986   Le principe de répression des violences conjugales en droit pénal français Les violences conjugales sont réprimées par l’article 222-13 du code pénal, qui prévoit que : « Les violences ayant entraîné une incapacité de travail inférieure ou égale à huit jours ou n’ayant entraîné aucune incapacité de travail sont punies de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende lorsqu’elles sont commises : (…) 4° ter Sur le conjoint, les ascendants ou les descendants en ligne directe (…) ; 6° Par le conjoint ou le concubin de la victime ou le partenaire lié à la victime par un pacte civil de solidarité ; (…) ».   Des violences commises par un conjoint, concubin, partenaire de pacte civil de solidarité, ancien conjoint, ancien concubin, ou ancien partenaire de pacte civil de solidarité : une circonstance aggravante   Au-delà de la répression prévue à titre principal par le code pénal, constitue une circonstance aggravante le fait que les violences soient réalisées par le conjoint, concubin ou partenaire lié à la victime par un pacte civil de solidarité, ou par un ancien conjoint, ancien concubin ou ancien partenaire lié à la victime par un pacte civil de solidarité. C’est ce que prévoit l’article 132-80 du code pénal. Cette circonstance est donc caractérisée dès lors que l’infraction est commise en raison de la relation existante ou ayant existé entre l’auteur des faits et la victime.   L’arrêt du 2 mai 2024 Il était question dans cet arrêt d’un individu ayant été poursuivi par le Procureur de la République pour des faits de violences ayant entraîné une Incapacité Temporaire de Travail inférieure à huit jours, avec la circonstance que l’auteur des faits est l’ancien concubin de la victime, et qu’il se trouve en état de récidive légale. En effet, les faits de violence ont eu lieu à l’occasion d’un différend relatif à l’exercice du droit de visite et d’hébergement sur l’enfant issu de l’ancienne relation de concubinage entre l’auteur des faits et la victime. Le tribunal correctionnel, dans sa décision, n’a pas retenu la circonstance aggravante, au motif que les violences étaient motivées par le sort de l’enfant, et non par l’ancienne relation de concubinage.  Les faits ont ainsi été qualifiés de violences ayant entraîné une Incapacité Temporaire de Travail inférieure à huit jours. Le ministère public a fait appel de la décision. La Cour de cassation a cassé l’arrêt de la Cour d’appel de Lyon, au motif que les faits se rapportaient à la prise en charge de l’enfant commun aux deux individus ; par conséquent, il s’agissait de faits commis en raison de l’ancienne relation de couple. La circonstance aggravante retenue par le Procureur de la République dans l’acte de poursuite aurait donc dû être maintenue.   La prise en compte des violences conjugales par le gouvernement   En 2022, les forces de sécurité ont enregistré près de 240 000 femmes victimes de violences commises par leur partenaire ou ancien partenaire. Ce chiffre est issu de l’enquête statistique nationale « Vécu et ressenti en matière de sécurité » (VRS) mise en place en 2022, dont les résultats ont été publiés en décembre 2023.   La lutte contre les violences faites aux femmes est une priorité gouvernementale. A cet effet, ont été créés des pôles spécialisés dans la lutte contre les violences intrafamiliales, qui dirigent le traitement des plaintes pour violences conjugales. Ces pôles spécialisés sont mis en place depuis le 1er janvier 2024.   Toutefois, même si le Code pénal reste neutre dans sa conception / qualification des violences conjugales, la réalité est toute autre. Les violences faites aux femmes prennent une grande place dans la sphère juridique et médiatique, mais il convient de rappeler que des violences sont aussi exercées sur des hommes, et que cette part de victimes n’est pas à négliger. A titre illustratif, une étude nationale menée par le Ministère de l’Intérieur sur les morts violentes au sein du couple en 2018 a relevé que sur l’année, 149 personnes sont décédées des suites de violences au sein du couple, dont 28 sont des hommes.
L’erreur judiciaire demeure l’un des échecs les plus redoutables de notre système pénal. Si l’enquête a pour objectif de faire la lumière sur les faits et de recueillir des preuves à charge et à décharge, elle n’est pas infaillible. Même menée avec rigueur, elle peut conduire à des conclusions erronées. Un récent dossier de violences familiales, que nous avons eu à défendre, illustre cette réalité. 1 – Les faits  L’affaire commence quand une jeune fille de 12 ans est trouvée dans la rue par des passants, en débardeur et sans chaussures. Un couple, famille d’accueil, la ramène chez eux pour la réchauffer. La femme témoigne : « j’ai pensé tout de suite à un viol car elle avait tous les stigmates d’une jeune fille violée, l’air hagard totalement sidérée ». Ils lui donnent un manteau et une paire de chaussures. La jeune fille pleure mais refuse de rentrer chez elle. La police arrive, mais elle refuse de parler. Après plusieurs demandes elle finit par expliquer avoir été frappée par sa mère avec une ceinture et un bâton, après être rentrée en retard. Elle dit que sa famille la « frappe pour un oui pour un non ». La femme ayant recueillie la jeune fille est auditionnée. Elle décrit le comportement de celle-ci comme : « Elle était en trauma total, elle était en état de sidération. Elle avait le regard hagard, les bras ballants, elle était vraiment froide comme un mort. »   2 – L’audition de la victime : La jeune fille explique être sortie un petit peu après les cours, et être arrivée en retard à un atelier de théâtre. Elle se serait alors faite « enguelée » par son beau-père et frappée par sa mère. Son récit est détaillé. Elle décrit des actes très violents de la part de sa mère, physiques comme verbaux. Elle dit avoir été frappée avec une ceinture, et un bâton en bois. Sa mère lui aurait lancé un objet à la figure. Elle dit « je me suis dis que si j’allais restée là j’allais mourir ». Elle raconte les propos de sa mère : « elle m’a dit qu’elle allait me tuer ». Quand le policier lui redemande si elle s’est faite menacée de mort, elle le confirme. La jeune fille relate des faits de violences habituelles qu’elle minimise : « Elle m’a déjà mis des coups de pieds et des tartes mais c’est pas vraiment frapper. […) Mme quand elle me frappait avec la ceinture je me disais que ce n’était rien, j’ai eu peur quand elle a ramené le bâton. » Elle décrit son beau-père comme un complice, qui donne à sa mère le bâton pour la frapper, mais ne la frappe jamais directement.   3 – Les mesures de protection et d’enquête Dans un entretien téléphonique avec l’ASE, la mère reconnait avoir porté une gifle à sa fille. Le beau-père assure qu’il n’y a pas de violences. Après la gifle, elle se serait mise à courir et serait tombée dans les escaliers en quittant le logement. Ils sont sous le choc. La jeune fille est placée en foyer afin de garantir sa sécurité. Un certificat médical est établi 12 jours après les faits. Le médecin de l’unité médico-judiciaire note une tristesse et résignation sur le plan psychologique, et des lésions cutanées qui pourraient être des stigmates de coups de ceinture sur l’avant-bras droit. Lors du rendez-vous, la jeune fille réitère ses propos. Un deuxième certificat fixe l’ITT à 5 jours. Une expertise psychiatrique est effectuée. Elle ne relève pas de mythomanie ou affabulation. Elle liste des crises d’angoisse et un état de stress en relation avec les faits subis. Elle relève un ITT psychologique de 8 jours. Les auditions des témoins, les certificats médicaux, et l’expertise psychologique : tout corrobore les propos de la victime. La mère est placée en garde à vue. 4 – Le procès Soudainement, peu de temps avant le procès, la jeune fille retire sa plainte et avoue avoir menti et inventé les faits depuis le début. En conflit avec sa mère, et souhaitant changer de collège et aller vivre avec son père, elle avait trouvé dans cette occasion un moyen de se séparer de sa mère. Ses parents étant séparés, elle ne voyait pas souvent son père. Celui-ci la gâtait beaucoup lors de ses visites. De plus, la victime avait été harcelée dans son collège, et malgré les sanctions imposées aux auteurs, elle ne s’y sentait pas à l’aise. Au procès, la mère, auteur présumée, est relaxée.   5 – Conclusion Ainsi, même si la jeune fille mentait, l’enquête a réussi à obtenir de nombreuses pièces donnant crédibilité à cette version. Rien, dans le déroulement de l’enquête, ne laissait présager une telle révélation. Aucune négligence manifeste, aucune omission. L’enquête avait même fait preuve de diligence et de méthode. Pourtant, elle n’a pas permis de déceler le mensonge, ni de protéger la mise en cause d’une erreur judiciaire imminente. Le dossier reposait sur sa plainte, les rapports des médecins, la vraisemblance de ses propos, la réitération de ceux-ci et leur aspect détaillé. Ainsi tous les éléments permettant de vérifier ses propos avait été récupérés, et validaient ses allégations. Ce cas soulève une question essentielle : comment concilier le nécessaire accueil de la parole des victimes avec le principe fondamental de présomption d’innocence ? Faut-il croire sans réserve, ou vérifier sans relâche ? La réponse n’est pas simple. Mais ce dossier rappelle avec force qu’un témoignage, aussi convaincant soit-il, doit toujours être examiné avec recul, rigueur et discernement.   Jugement anonymisé
  Dans une affaire que nous avons récemment défendue, une fille âgée de 15 ans, dénonce des violences par sa mère. Elle maintient sa déposition devant les policiers, ainsi que devant l’expert psychiatre. Mais lors de l’audience, elle change finalement de version et reconnaît avoir inventé les faits, en raison de désaccords avec sa mère. La mère est alors relaxée. Sa simple parole a pris une place très importante dans le procès, puisqu’il n’existait aucun témoin des violences alléguées. La place de la victime, et par conséquence de sa parole, dans le procès peut devenir déterminante quand les preuves matérielles sont inexistantes. C’est souvent le cas lors d’infraction d’atteintes sexuelles, ou de violences intra-familiales.   La protection des victimes se heurte parfois à celle des droits de la défense. Or si le procès est important pour la victime, il reste celui de l’accusé. La place de la victime, et sa prise en considération doit donc s’équilibrer avec le respect des droits de la défense et de la présomption d’innocence.     I – La souffrance de la victime   Un courant récent a entraîné une prise en compte grandissante de la souffrance de la victime, à la fois en raison de l’infraction, et du procès même. Ainsi, toute la procédure, du dépôt de plainte à l’exécution d’une peine (si condamnation) peut engendrer de fortes souffrances pour la victime. Celle-ci est replongée sans cesse dans les faits, questionnée sur des détails difficiles à évoquer. La remise en cause de la véracité de ses propos peut être vécu comme de la violence.   En outre, les victimes génèrent souvent plus d’empathie de la part du public suivant l’affaire ou en lisant les résumés dans les médias. La représentation d’une affaire dans les médias est souvent présentée par ses victimes.   Ainsi la souffrance des victimes est, légitimement, de plus en plus, reconnue. Mais il est nécessaire de limiter la responsabilité du condamné au préjudice résultant directement de l‘infraction.   Ainsi le 13 mai 2025, dans le procès pour agression sexuelle envers deux femmes, contre Gérard Depardieu, le Tribunal correctionnel de Paris a reconnu la victimisation secondaire subie par les victimes. Le Tribunal indemnise ici le préjudice moral subit par les victimes en raison de la défense « violente » des avocats de Gérard Depardieu.   Pauline DUFOURQ, avocate pénaliste, dénonce l’atteinte aux droits de la défense, ainsi que les dérives que pourrait entraîner la consécration de la victimisation secondaire dans les tribunaux.   « Cette extension des mécanismes de responsabilité est là encore extrêmement fragile. En effet, la ligne de défense choisie par un avocat, voire le traitement médiatique d’une affaire, ne saurait entraîner la responsabilité du prévenu, quand bien même ce positionnement pourrait légitimement heurter la victime. »     II – La parole de la victime   On assiste parfois à une sacralisation de la parole de la victime. Pour certains, sa contestation est un sacrilège. Si l’accusé est présumé innocent, la partie civile devient « présumée victime ».   Si nous restons loin d’atteindre un point où toute personne remettant en question la parole de la victime tomberait dans l’opprobre, le changement des mœurs demeure évident. Cette remise en question apparaît de plus en plus comme un déni des souffrances de la victime, une forme d’humiliation.   Les professionnels du droit, magistrats comme policiers, se retrouvent face à un problème compliqué qui nécessite l’accomplissement d’un équilibre fragile. D’un côté, la victime présumée, qu’on souhaite protéger et ne pas blesser de nouveau. De l’autre, les droits de la défense, qui nécessitent la remise en question de la victime, de façon impartiale.   Si la balance penche trop pour l’exercice des droits de la défense, la victime risque d’être psychiquement violentée par la procédure et l’audience, ou même de subir un déni de justice. Si la balance penche trop pour la victime, on risque une erreur judiciaire.   C’est ce qui aurait pu se produire dans notre dossier, que nous avons défendu en audience. Sans le retour de la victime sur ses propres témoignages, sa mère aurait été injustement condamnée.   III – La parole de l’enfant   La Convention internationale des droits de l’enfant du 20 novembre 1989 prévoit en son article 12 que « Les Etats parties garantissent à l’enfant qui est capable de discernement le droit d’exprimer librement son opinion sur toute question l’intéressant, les opinions de l’enfant étant dûment prises en considération eu égard à son âge et à son degré de maturité. » Ainsi les enfants ont un droit à la parole. Ils doivent pouvoir être entendus sur toutes les questions qui les concerne. Mais leurs opinions ne peuvent qu’être pris en considération avec un certain recul, dû au manque de maturité qui peut résulter de leur jeune âge. La France a été fortement marquée par l’affaire d’Outreau, qui a entrainé une remise en question de l’accueil des enfants et de leur parole par la justice.   La procédure d’audition Les mineurs sont auditionnés dans une salle spéciale, prévu à cet effet. L’audition est filmée. Art 706-52 du Code de procédure pénale : « Au cours de l’enquête et de l’information, l’audition d’un mineur victime de l’une des infractions mentionnées à l’article 706-47 [meurtre, torture, viol, agression sexuelles, traite d’humain, proxénétisme…] fait l’objet d’un enregistrement audiovisuel. Dans les mêmes conditions, l’audition d’un mineur victime de l’une des infractions prévues aux articles 222-33-2-2 [harcèlement] et 222-33-2-3 [harcèlement scolaire] du code pénal peut faire l’objet d’un enregistrement audiovisuel. » Cela permet au policier effectuant l’audition de ne pas avoir d’ordinateur, et de pouvoir simplement discuter avec l’enfant. Cela permet aussi de limiter le nombre d’audition, et d’avoir une version plus fidèle de l’audition que les procès-verbaux ordinaires. A l’issue de l’audition, un procès-verbal fidèle mot à mot à la discussion est rédigé. Le policier peut y ajouter le langage non-verbal (regards, mouvements…).   Formation des policiers Les policiers sont formés à recevoir la parole des enfants. Il leur est conseillé une suite d’étapes pour permettre le meilleur témoignage possible. Il convient donc de commencer par se présenter, et expliquer la procédure à l’enfant, ainsi que les « règles » de la discussion. L’enfant doit savoir qu’il peut ne pas comprendre une question, ou ne pas se souvenir des faits. Il ne doit pas être culpabilisé. Il n’est pas possible de forcer un enfant qui ne serait pas volontaire à parler. Mais le policier peut proposer de faire venir un autre policier à sa place, ou de fixer un rendez-vous un autre jour. Les questions posées doivent aller du général aux détails et être ouvertes ou à choix multiples, afin de ne pas influencer la parole de l’enfant. A la fin de l’audition, le policier explique la suite de la procédure à l’enfant et répond à ses questions.   Le discernement Le crédit donné à la parole d’un enfant dépend de sa capacité de discernement. Celle-ci correspond à sa capacité à comprendre la procédure dans laquelle il se trouve et les faits dénoncés. En France, le mineur est présumé doté de discernement à partie de 13 ans. Il est présumé ne pas avoir de discernement avant 13 ans. Mais cette présomption peut être renversée quand l’enfant montre un niveau de maturité suffisant. Art L. 11-1 Code la justice pénale des mineurs : « Les mineurs de moins de treize ans sont présumés ne pas être capables de discernement. Les mineurs âgés d’au moins treize ans sont présumés être capables de discernement. » L’absence de discernement n’empêche pas son audition. Cette absence permet juste d’analyser différemment les propos portés.   Valeur de la parole de l’enfant « Si la parole de l’enfant peut être l’élément déclencheur d’une enquête, elle ne doit pas et ne peut pas en être la pièce maîtresse. » L’audition du mineur victime – Chantal Zarlowski La parole de l’enfant est à prendre en compte, en considérant son âge et sa maturité. Plus l’enfant est jeune, plus ses propos doivent être pris avec précautions. L’enfant peut inconsciemment, ou consciemment, mentir ou altérer ses propos originaux. La première audition est généralement considérée comme la plus fidèle aux souvenirs de l’enfant, surtout si celle-ci est réalisée peu de temps après les faits. Les études montrent que plus il y a d’auditions, plus celles-ci se contredisent.   Conclusion :   Il est important de garder la parole de la victime au rang d’élément de preuve et non de manifestation de la vérité. L’accompagnement de la victime doit se faire en dehors du procès, par des professionnels compétents.  
La CIVI (Commission d’indemnisation des victimes d’infractions) La CIVI garantit l’indemnisation de certaines victimes de dommages corporels résultant d’une infraction pénale (ex : mort ; blessures volontaires ou involontaires ayant entraîné une infirmité permanente, une incapacité totale de travail d’un mois minimum ; viol ; agression sexuelle…). En cas de condamnation, la CIVI est tenue par la qualification retenue par la juridiction.     La SARVI (Service d’aide au recouvrement des victimes d’infractions) La SARVI permet aux victimes qui ont subi de faibles préjudices corporels ou matériels, ne remplissant pas les conditions d’accès à la CIVI, d’être indemnisées, sous réserve de la condamnation définitive de l’auteur des faits. Peut bénéficier de son aide toute personne ayant obtenu une décision émanant de la justice pénale rendue à compter du 1er octobre 2008 lui ayant accordé des dommages et intérêts et éventuellement le remboursement d’une partie ou de l’intégralité des frais de la procédure (article 706-15-1 du Code de procédure pénale). La victime peut agir, si elle n’a pas été indemnisée dans les 2 mois suivant la date de la décision définitive et, au plus tard, 1 an à compter de cette date (ou de la notification de la décision de rejet de la CIVI).     Le FGTI (Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d’autres infractions) Le FGTI a un rôle spécifique à l’égard des victimes d’actes de terrorisme instauré par l’article 9 de la loi du 9 septembre 1986. Le fonds accorde une indemnisation intégrale des préjudices corporels. Il est tenu, dans un délai de 1 mois à compter de la demande qui lui ait faite, de verser une ou plusieurs provisions à la victime qui a subi une atteinte à sa personne ou, en cas de décès de la victime directe, à ses ayants droit.    
(et notamment le bracelet antirapprochement)   Sous-titre : Quels sont les contours de cette interdiction et que signifie-t-elle précisément ?   Cadre légal L’interdiction judiciaire d’entrer en contact avec la victime ou potentielle victime d’une infraction peut intervenir à différents stades de la procédure pénale. Cette interdiction vise à éviter au prévenu ou à l’auteur de l’infraction de faire pression sur la victime, ou de réitérer les faits pour lesquels il a été condamné. –Dans le cadre de l’instruction : le Juge d’instruction ou le Juge des libertés et de la détention peuvent placer le mis en examen sous contrôle judiciaire (Article 138 du Code de procédure pénale) ou sous assignation à domicile sous surveillance électronique (Article 142-5 du Code de procédure pénale) le temps de l’instruction. Dans le cadre de ces deux mesures, ces magistrats peuvent imposer au mis en examen l’interdiction d’entrer en contact avec la victime, de quelque façon que ce soit (Article 138-1 du Code de procédure pénale). –Dans l’attente d’un jugement : Le prévenu peut être soumis à un contrôle judiciaire dans l’attente de l’audience de jugement, et être à ce titre soumis à des obligations et des interdictions. C’est notamment le cas de la convocation par procès-verbal avec placement sous contrôle judiciaire (Article 394 du Code de procédure pénale), décidée par le Procureur de la République. De la même façon, le prévenu peut être amené à refuser la comparution immédiate et à demander un délai pour préparer sa défense. Dans ces conditions, le Tribunal pourra le placer sous contrôle judiciaire le temps de la prochaine audience (Article 397-3 du Code de procédure pénale). –A la condamnation : le Tribunal peut condamner le prévenu à une peine d’emprisonnement assorti d’un sursis probatoire (ancien sursis avec mise à l’épreuve), c’est-à-dire un sursis dans le cadre duquel il devra respecter des interdictions et obligations. Dans ce cadre, le juge peut imposer une obligation de « S’abstenir d’entrer en relation avec certaines personnes, dont la victime, ou certaines catégories de personnes, et notamment des mineurs, à l’exception, le cas échéant, de ceux désignés par la juridiction » (Article 132-45 du Code pénal).   Cas spécifique des violences conjugales Dans le cas spécifique des violences conjugales, la législation prévoit la possibilité de placer le mis en examen ou le prévenu en attente de jugement sous un dispositif électronique spécifique, à savoir le bracelet anti-rapprochement (Article 138, 17bis, du Code de procédure pénale) : « 17° bis Respecter l’interdiction de se rapprocher d’une victime de violences commises au sein du couple prévue à l’article 138-3 et contrôlée par un dispositif électronique mobile anti-rapprochement ». Ce bracelet peut être mis en place dans le cadre d’un contrôle judiciaire (Article 138-3 du Code de procédure pénale). Cette mesure peut aussi être décidée par la juridiction de jugement, sous la forme d’une peine (Article 132-45, 18bis, du Code pénal). Selon l’article 132-45-1 du Code pénal, ce dispositif peut être mis en place avec le consentement de la victime et de l’auteur, en cas d’infraction punie d’au moins trois ans d’emprisonnement contre son conjoint, concubin ou partenaire de pacs, ancien ou actuel.   Moyen de contact interdits L’interdiction d’entrer en contact avec la victime est large et vise tout moyen de contact. Elle s’entend notamment du contact physique. Il est donc interdit à la personne soumise à cette interdiction de rencontrer physiquement la victime. Mais plus encore, cette interdiction s’étend à la prise de contact par téléphone ou par lettre (Cass.crim., 13 mai 2015, n°14-80.956). Le fait de passer par un tiers pour prendre contact est également inclus dans cette interdiction, notamment en passant par la voisine (Cass.crim., 13 mai 2015, n°14-80.956). De plus, il convient de noter que la prise de contact par le biais des réseaux sociaux est également incluse dans cette interdiction (https://lagazette-sqy.fr/2024/02/27/votreville/trappes/un-mari-a-contacte-plus-de-500-fois-sa-femme-alors-que-cela-lui-etait-interdit-par-la-justice/). Enfin, le fait que la victime prenne elle-même contact avec le prévenu ou le condamné, ou qu’elle manifeste la volonté de faire retirer cette interdiction, ne lève pas l’interdiction de contact pesant sur le prévenu ou le condamné (https://www.ouest-france.fr/pays-de-la-loire/nantes-44000/elle-supplie-le-tribunal-de-ne-pas-maintenir-l-interdiction-de-contacts-avec-son-conjoint-violent-95b25b28-a39c-11ed-a69f-2485525f016c).   Risques en cas de non-respect de cette interdiction En cas de non-respect par le prévenu ou le mis en examen de l’interdiction d’entrer en contact avec la victime, celui-ci risque la révocation du contrôle judiciaire, c’est-à-dire le retrait de cette mesure. Dans ce cas, le prévenu ou le mis en examen sera placé en détention provisoire le temps de l’instruction ou dans l’attente de son jugement (Article 141-2 du Code de procédure pénale). Dans le cadre d’un sursis probatoire, le condamné qui ne respecterait pas l’interdiction d’entrer en contact avec la victime risque la révocation de son sursis probatoire (Article 132-47 du Code pénal). Cela signifie qu’en cas de nouvelle condamnation, le Juge pourra décider d’appliquer tout ou partie de la peine sous sursis, sur avis du Juge de l’application des peines. Concrètement, si une personne était condamnée à la peine de 6 mois d’emprisonnement avec sursis probatoire pendant deux ans, et que l’interdiction de rentrer en contact avec la victime est violée, alors le Juge pourra décider d’imposer la peine de 6 mois d’emprisonnement fermes ou moins, en plus de la nouvelle peine liée à la nouvelle infraction. De plus, le Juge de l’application des peines peut lui aussi, sans intervention d’une nouvelle infraction, révoquer tout ou partie du sursis probatoire en cas de non-respect de cette interdiction. Il est donc primordial de respecter cette interdiction en toute circonstance, y compris lorsque c’est la victime qui prend contact.
Le décret n°2016-660 du 20 mai 2016, dit « décret MACRON », impose une obligation supplémentaire de justification de sa saisine aux demandeurs   Avant 2016, les demandeurs devant le Conseil des prud’hommes, salariés pour la majorité, pouvaient saisir le Conseil avec une requête brève. Il n’était pas requis une argumentation complète. Depuis ce décret n°2016-660 du 20 mai 2016, l’article R.1452-2 du Code du travail a évolué vers une nécessité de justifier sa demande. Que doit comporter la saisine du Conseil des prud’hommes ? L’article R.1452-2 du Code du travail, tel que modifié depuis le décret n°2016-660 du 20 mai 2016 en son article 8, prévoit que : « La requête est faite, remise ou adressée au greffe du conseil de prud’hommes. Elle comporte les mentions prescrites à peine de nullité à l’article 57 du code de procédure civile. En outre, elle contient un exposé sommaire des motifs de la demande et mentionne chacun des chefs de celle-ci. Elle est accompagnée des pièces que le demandeur souhaite invoquer à l’appui de ses prétentions. Ces pièces sont énumérées sur un bordereau qui lui est annexé. La requête et le bordereau sont établis en autant d’exemplaires qu’il existe de défendeurs, outre l’exemplaire destiné à la juridiction ». La mention à un « exposé sommaire des motifs de la demande » et « chacun des chefs de celle-ci » fait donc obstacle à une simple demande envoyée au Conseil de prud’hommes mais suppose des mentions obligatoires et notamment une précision dans la demande et sa motivation. L’article 57 du Code de procédure civile renvoie quant à lui à l’article 54, qui prévoit : « A peine de nullité, la demande initiale mentionne : 1° L’indication de la juridiction devant laquelle la demande est portée ; 2° L’objet de la demande ». Ces différents articles prévoient donc l’obligation pour le demandeur de motiver sa demande. A la façon du droit civil, le droit prud’hommale s’est donc doté d’une obligation de de motivation pesant sur le demandeur. En effet, la jurisprudence civile constante exige l’exposé des moyens de droit et de fait dans les actes de saisine (CA de PARIS, 17 janvier 2024, n°23/03728) : « En application de l’article 916 du code de procédure civile, la requête, remise au greffe de la chambre à laquelle l’affaire est distribuée, contient, outre les mentions prescrites par l’article 57 et à peine d’irrecevabilité, l’indication de la décision déférée ainsi qu’un exposé des moyens en fait et en droit ». Cette obligation ne pèse pas seulement lors de la saisine, mais pèse également dans le cadre des conclusions fournies tout au long de la procédure, comme le prévoit le nouvel article R.1453-5 du Code du travail : « Lorsque toutes les parties comparantes formulent leurs prétentions par écrit et sont assistées ou représentées par un avocat, elles sont tenues, dans leurs conclusions, de formuler expressément les prétentions ainsi que les moyens en fait et en droit sur lesquels chacune de ces prétentions est fondée avec indication pour chaque prétention des pièces invoquées ». En conclusions, il est impératif désormais de préciser sur quel texte juridique se fonde la demande et sur quel élément de fait (et donc sur quelle pièce).   La critique de cette modification Il a été reproché à ce décret de faire peser une charge trop lourde sur les salariés qui sont pourtant censés pouvoir se présenter seuls devant la juridiction, l’avocat n’étant pas obligatoire. Il a également été reproché à ce décret de rompre l’égalité entre les salariés et les employeurs (majoritairement en défense), car l’article R. 1452-2 du Code du travail impose au demandeur une motivation supplémentaire qui n’est pas sollicité du défendeur. Le Conseil d’Etat a répondu ces critiques (CE, 6ème et 5ème chambres réunies, 30 janvier 2019, n°401681) : « 13. Les obligations nouvelles, prévues par l’article 8 du décret attaqué, à la charge du justiciable qui entend présenter une requête devant le conseil de prud’hommes, permettent d’assurer l’information immédiate des parties et de la juridiction sur les données du litige et concourent, par suite, à la bonne administration de la justice. De telles obligations ne portent d’atteinte excessive ni au droit d’accès au juge ni au droit à un procès équitable garantis par l’article 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen ainsi que par les stipulations de l’article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Si, selon les requérants, ces formalités peuvent représenter une contrainte particulière pour certains justiciables, lesquels peuvent, au demeurant, être assistés ou représentés, en application de l’article R. 1453-2 du code du travail, par un autre salarié, un conjoint, un défenseur syndical ou un avocat, l’article 8 du décret attaqué ne méconnaît pas le principe d’égalité entre les justiciables. En deuxième lieu, le principe d’égalité ne s’oppose pas à ce que l’autorité investie du pouvoir réglementaire règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu’elle déroge à l’égalité pour des raisons d’intérêt général pourvu que, dans l’un comme l’autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l’objet de la norme qui l’établit et ne soit pas manifestement disproportionnée au regard des motifs susceptibles de la justifier. 15. Si l’article R. 1452-2 du code du travail impose au demandeur de produire avec sa requête les pièces qu’il souhaite présenter à l’appui de ses prétentions, l’article R. 1452-3 du même code se borne à prévoir que le greffe invite le défendeur à déposer ou à lui adresser les pièces qu’il entend produire. L’obligation ainsi faite au demandeur est destinée, dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice, à faciliter la mise en état et le traitement des affaires par la juridiction prud’homale. Une telle obligation n’est, toutefois, pas prescrite à peine de nullité. Il résulte, par ailleurs, de l’article L. 1454-1-2 du code du travail que les conseillers rapporteurs prescrivent au demandeur comme au défendeur toutes mesures nécessaires pour que l’affaire soit en état d’être jugée. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir qu’en soumettant les demandeurs et les défendeurs à des règles différentes en matière de production de pièces, les dispositions de l’article 8 du décret attaqué méconnaîtraient le principe d’égalité». Il ressort de cette décision que : -l’obligation de motiver sa saisine du Conseil de prud’hommes a pour objectif une bonne administration de la justice et de permettre à chacun dès le début de la procédure d’en comprendre les aspects (et donc de se défendre) ; -il n’existe pas d’inégalité avec les défendeurs, qui ont aussi une obligation de fournir leur argumentation, mais sans peine de nullité car ils subissent la procédure mais ne l’ont pas initié. Il faut en comprendre que l’objectif de cet article est d’éviter les saisines infondées ou fantaisistes.   Que faire, en tant que défendeur, en cas de mentions incomplètes ? L’article 54 du Code de procédure civile prévoit que l’absence de l’objet de la demande entraine la nullité de celle-ci. La jurisprudence civile constante exige en effet l’exposé des moyens de droit et de fait dans les actes de saisine (CA de PARIS, 17 janvier 2024, n°23/03728) : « En application de l’article 916 du code de procédure civile, la requête, remise au greffe de la chambre à laquelle l’affaire est distribuée, contient, outre les mentions prescrites par l’article 57 et à peine d’irrecevabilité, l’indication de la décision déférée ainsi qu’un exposé des moyens en fait et en droit. (…) Il reste que le non respect des articles 54 et 57 du code de procédure civile auquel l’article 916 renvoie est sanctionné par la nullité et non par l’irrecevabilité ». Il conviendra donc de vérifier que ces moyens existent, et en cas d’absence, de soulever « in limine litis » (c’est-à-dire avant toute demande au fond) la nullité de la saisine. ATTENTION : l’article 114 du Code de procédure civile prévoit que : « La nullité ne peut être prononcée qu’à charge pour l’adversaire qui l’invoque de prouver le grief que lui cause l’irrégularité, même lorsqu’il s’agit d’une formalité substantielle ou d’ordre public ». La simple demande de nullité ne suffira donc pas. Il convient d’expliquer au Conseil de prud’hommes en quoi cette saisine et l’absence d’objet vous a fait grief, c’est-à-dire que cela atteint vos intérêts légitimes.
La question est de savoir comment le mandat de dépôt à effet différé fonctionne et comment peut-il être utilisé par les avocats ?   Définition Le mandat de dépôt est défini par l’article 122 du Code pénal, en son alinéa 8, comme « l’ordre donné au chef d’établissement pénitentiaire de recevoir et de détenir la personne à l’encontre de laquelle il est décerné ». Ce mandat peut être décerné à l’occasion d’une audience de nature pénale, afin que la personne condamnée soit incarcérée immédiatement et débute sa peine à l’issue de l’audience.   Cependant, la loi du 23 mars 2019 a créé un nouveau mandat de dépôt : le mandat de dépôt à effet différé. Cette procédure permet au condamné de ne pas être incarcéré à l’issue de l’audience et de disposer d’un délai avant son incarcération, pour préparer celle-ci. Cette mesure a notamment pour objectif d’éviter le choc carcéral qui interviendrait brutalement à l’issue d’une audience pénale.   L’article 464-2 du Code de procédure pénale exige plusieurs conditions afin de décerner ce mandat : -la peine d’emprisonnement doit être ferme et supérieure à six mois, -le condamné doit être convoqué devant le Procureur de la République dans un délai de maximum un mois à l’issue de l’audience, -le juge doit spécialement motiver la raison pour laquelle il prononce une peine ferme, sans possibilité d’aménagement, au regard de la personnalité du condamné, des faits et de sa situation personnelle.   Ces conditions ont été validées par la Cour de cassation dans un arrêt du 11 mai 2021, n°20-84.412. La Cour a apporté un éclairage sur les conditions de cette mesure dans un tableau en fonction du quantum de la peine et les options du Tribunal en termes d’aménagement de la peine (Tableau aménagement de peine avec possibilité d’utiliser le mandat à effet différé)   Par ailleurs, l’incarcération doit avoir lieu dans les quatre mois suivants l’audience (Article D45-2-4 du Code de procédure pénale).   Il convient de préciser que l’individu convoqué devant le Procureur de la République ou à l’établissement pénitentiaire qui ne se présente pas pourra faire l’objet d’un mandat d’arrêt. La peine sera dès lors exécutée avec l’usage de la force publique (Article D45-2-7 du Code de procédure pénale).   Demande d’aménagement de peine : comment se servir du mandat de dépôt à effet différé ? Il convient d’ores et déjà de préciser qu’un mandat de dépôt à effet différé fait obstacle à toute demande immédiate d’aménagement de peine. Cela signifie que le condamné devra attendre d’être incarcéré avant de faire cette demande. Cependant, le temps passé en liberté avant cette incarcération peut être utile à la préparation de la demande d’aménagement de peine. En effet, l’incarcération doit avoir lieu dans les quatre mois suivants l’audience. Dans ce délai, le condamné et son avocat peuvent se rapprocher du Juge de l’application des peines et du Procureur de la République pour discuter d’un éventuel aménagement de peine, dans le cadre d’une procédure hors débat contradictoire. Ainsi, la demande d’aménagement de peine déposée à l’occasion de l’incarcération ne sera pas étudiée lors d’une audience mais sur dossier. Le condamné aura en conséquence une réponse à sa demande dans des délais plus restreints. Il convient dès lors à l’avocat du condamné de préparer la demande d’aménagement de peine avec le Juge de l’application des peines pour limiter à son client le temps passé en détention.   L’exécution provisoire de cette mesure L’exécution provisoire du mandat de dépôt à effet différé n’est pas automatique. L’article D45-2-1-1 du Code de procédure pénale prévoit qu’en cas de comparution immédiate ou de comparution différée, en cas de récidive ou en cas de peine d’emprisonnement d’au moins un an, le mandat de dépôt à effet différé ne peut être assorti d’une exécution provisoire.   Le mandat de dépôt à effet différé dans la pratique Dans une affaire de détournement d’héritage devant le Tribunal de CRUSSET, l’acteur principal des faits, un ancien notaire, a été condamné à la peine de 4 ans d’emprisonnement avec mandat de dépôt à effet différé (condamnation du 27 mars 2023) (https://france3-regions.francetvinfo.fr/auvergne-rhone-alpes/allier/vichy/detournement-d-heritages-le-tribunal-de-cusset-condamne-le-cerveau-de-l-affaire-a-4-ans-de-prison-ferme-2790938.html).   Toujours devant le Tribunal de CRUSSET, un homme a été condamné pour s’être fait passer pour un avocat (l’infraction d’exercice illégal de la profession d’avocat et escroquerie par usage de la fausse qualité d’avocat en récidive). Il avait en effet été démasqué par le Procureur alors qu’il plaidait. Il a été condamné le 22 décembre 2022 à deux d’emprisonnement ferme avec mandat de dépôt à effet différé (https://www.francebleu.fr/infos/faits-divers-justice/cusset-allier-le-faux-avocat-condamne-a-2-ans-ferme-1277205). Enfin, le 6 mars 2023, deux individus ont été condamnés pour escroquerie au sein d’une agence matrimoniale à cinq ans d’emprisonnement dont dix-huit mois avec sursis, donc trois ans et demi fermes. Ils avaient escroqué des clients en leur faisant croire qu’il avait trouvé leur âme sœur à l’étranger. Cette peine était assortie d’un mandat de dépôt à effet différé (https://www.capital.fr/entreprises-marches/les-parents-des-youtubeurs-swan-neo-condamnes-a-de-la-prison-pour-escroquerie-1462248).   L’actualité nous démontre que le mandat de dépôt à effet différé est d’ores et déjà appliqué en pratique et doit donc être sollicité par les avocats lorsque cela est possible, afin de permettre à leur client de préparer leur incarcération.   Sources : Note explicative de la Cour de cassation en matière d’aménagement de peine : https://www.courdecassation.fr/getattacheddoc/609a1d733ac0d473af616598/e75693d04fdf2479f2e213fc8df43fea
L’intention de nuire, élément essentiel dans la qualification d’envoi de messages électroniques malveillants Cass.crim., 11 janvier 2017, n°16-80.557   Définition de l’infraction : son élément matériel L’infraction prévue à l’article 222-16 du Code pénal est plus étendue que le seul envoi de messages malveillants. Elle comprend également les appels malveillants et les agressions sonores : « Les appels téléphoniques malveillants réitérés, les envois réitérés de messages malveillants émis par la voie des communications électroniques ou les agressions sonores en vue de troubler la tranquillité d’autrui sont punis d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende ». Concernant l’élément matériel, des messages peuvent être caractérisés de malveillants selon deux éléments : -la réitération de messages, c’est-à-dire l’envoi de minimum deux messages, -et leur caractère malveillant. La jurisprudence prend classiquement en compte la fréquence, la durée et les heures des appels pour les qualifier de malveillants, éléments applicables également aux messages (Cour d’appel de CAEN, 28 octobre 2011, n°11/00886). La Cour d’appel a cependant pu juger que la réitération de messages ne suffisait pas seule à caractériser cette infraction. Elle pouvait prendre en compte l’objectif de l’expéditeur des messages, objectif étranger en l’espèce à une volonté de nuire à l’expéditeur (Cour d’appel de DOUAI, 25 novembre 2010, n°09/04345). Plus encore, la jurisprudence prend en considération le contexte de l’envoi des messages (couple en instance de divorce partageant la garde de leur fille : Cour d’appel de RIOM, 6 juillet 2006, n°06/00279). La jurisprudence qualifie également de messages malveillants le fait de contacter une personne qui a manifesté son souhait de ne plus l’être (Cour d’appel de CAEN, 22 octobre 2008, n°07/01004). Cette infraction suppose donc l’envoi de plusieurs messages à caractère malveillant, ce caractère malveillant pouvant ressortir de l’heure d’envoi, du contenu, ou encore du contexte d’envoi ou de l’envoi de messages malgré la sollicitation de ne plus en recevoir.   L’élément moral : l’intention de nuire doit être démontrée De plus, l’infraction d’envoi de messages électroniques malveillants suppose une intention de nuire. Cette nécessité ressort de l’arrêt de la chambre criminelle de la Cour de cassation du 11 janvier 2017 (n°16-80.557) : En l’espèce, un enseignant de lycée était poursuivi pour avoir envoyé des messages à caractère sexuel à une élève de son établissement de 15 ans. Il était condamné par le Tribunal correctionnel du chef de diffusion de messages violents, pornographiques ou contraires à la dignité perceptible par un mineur. Il était cependant relaxé du chef d’appels téléphoniques malveillants et réitérés. Le condamné interjetait appel et la Cour d’appel jugeait au contraire que le condamné avait bien commis l’infraction d’envoi de messages électroniques malveillants aux motifs que le condamné a envoyé 16 messages au caractère « racoleur » à une mineur étudiant dans le même établissement et alors que cette dernière avait fait comprendre qu’elle souhaitait que ces messages stoppent. Par ailleurs, la Cour d’appel retenait que le caractère malveillant et volontaire de ces messages se déduisait de leur récurrence, du contexte ainsi que du contenu. Selon la Cour d’appel, ces messages avaient pour objectif de perturber cette mineure et de troubler sa tranquillité. La Cour de cassation a cependant cassé cet arrêt. Elle rappelle qu’il ne suffit pas à la Cour d’appel d’indiquer que les messages ont un caractère malveillant, elle doit également caractériser la volonté de nuire de leur auteur. Ainsi, la Cour de cassation sollicite que l’intention insufflée dans les messages soient prise en considération, et non uniquement le caractère malveillant, qui reste un élément subjectif et pouvant être déterminé par l’appréciation du destinataire.   Exemples d’infractions similaires dans l’actualité L’actualité démontre que cette infraction est régulièrement utilisée par les Tribunaux correctionnels afin de condamner un comportement ayant un impact important sur la vie des destinataires. A titre d’exemple, un homme a été condamné par le Tribunal correctionnel de LISIEUX pour avoir envoyé à son ex-femme 167 messages et l’avoir appelé 21 fois en moins d’un mois. Les droits du condamné sur son fils ayant été modifiés par le juge aux affaires familiales, il envoyait des messages à son ex-femme évoquant des « magouilles », une « aliénation » ou encore une « emprise » de la mère sur leur enfant. La victime déclarait subir ce comportement depuis 5 ans et être « vraiment fatiguée ». Le magistrat reconnaissait que les messages n’étaient pas menaçants mais qu’ils troublaient la tranquillité de la victime. Il était condamné à la peine de 4 mois avec sursis (https://www.ouest-france.fr/normandie/dives-sur-mer-14160/dives-sur-mer-avec-167-sms-et-21-appels-telephoniques-un-homme-condamne-pour-messages-malveillants-6a4ec1f4-405a-11ef-ae5b-bfe38155f8bc).   De la même façon, un jeune homme de 19 ans a été condamné à réaliser un stage de citoyenneté pour avoir envoyé plusieurs messages insultants à une jeune femme sur les réseaux sociaux, sur une période de trois mois. Il expliquait qu’elle avait témoigné de façon mensongère à son encontre dans une affaire de violence et qu’il l’avait donc insulté (https://actu.fr/societe/meuse-a-19-ans-il-est-condamne-a-un-stage-de-citoyennete-pour-avoir-envoye-des-messages-malveillants_61370304.html).   Enfin, un individu était condamné par le Tribunal correctionnel de COMPIEGNE pour avoir appelé ou envoyé des messages à 50 reprises à son ex-femme en deux jours. Il convient de noter qu’il avait été interdit de la contacter et qu’une procédure de divorce était en cours (https://www.oisehebdo.fr/2024/06/03/lassigny-relaxe-appels-malveillants-ex-femme/).   L’affaire BOOBA / BERDAH L’actualité connait en ce moment une affaire portant sur des messages malveillants dans le milieu des influenceurs, à savoir l’affaire BOOBA/BERDAH. Cette affaire a débuté lorsque le rappeur BOOBA dénonçait des manœuvres trompeuses d’influenceurs issus de l’agence de Magali BERDAH à partir de décembre 2021. Le rappeur BOOBA réussissait à collecter plusieurs plaintes et témoignages d’individus se disant arnaqués par ces influenceurs. Le rappeur déposait plainte en juillet 2022 contre l’agence de Magali BERDAH et X pour pratiques commerciales trompeuses et escroquerie en bande organisée. Une enquête était ouverte du chef de pratiques commerciales trompeuses auprès du Tribunal judiciaire de GRASSE. En parallèle, Magali BERDAH obtenait l’ouverture d’une enquête pour menace de mort, harcèlement par un moyen de communication électronique et injure publique à raison de l’origine et du sexe. Elle déclarait en effet avoir reçu 69.687 menaces et injures en deux mois et demi. Alors que ces faits se poursuivaient à mesure des interventions publiques du rappeur BOOBA la dénonçant, Magali BERDAH déposait plainte contre X en avril 2023 pour complicité de cyberharcèlement. Le 2 octobre 2023, le rappeur BOOBA était mis en examen pour harcèlement moral en ligne aggravé, notamment pour avoir envoyé au moins 487 messages en ligne la visant directement. Il était placé sous contrôle judiciaire lui interdisant tout contact avec Magali BERDAH. Le 28 mars 2024, la plainte pour manouvres frauduleuses du rappeur BOOBA contre Magali BERDAH était classée sans suite, en raison d’un manque de preuves. Au début d’année 2024, le rappeur BOOBA était toujours mis en examen, mais vingt-huit internautes ayant envoyés des messages malveillants à Magali BERDAH étaient condamnés à des peines de 4 à 18 mois d’emprisonnement (assorties pour certaines d’un sursis) pour avoir commis un cyberharcèlement.  
La loi du 21 avril 2021 a mis en place une présomption de culpabilité si le mineur a moins de 15 ans et le majeur a  5 ans de plus lors de la pénétration sexuelle Par un arrêt du 17 mars 2021 (20-86.318), la Chambre criminelle de la Cour de cassation a estimé que l’article 222-22-1 du code pénal n’a qu’une valeur interprétative. Malgré la modification de ce texte par une loi du 3 août 2018 pour y intégrer que l’autorité de fait permettant de caractériser la contrainte morale ou la surprise, et donc un viol, peut « être caractérisée par une différence d’âge significative entre la victime mineure et l’auteur majeur », la Cour de cassation a donc ici estimé que ce texte ne posait pas de présomption de non-consentement du fait de l’âge.   Cet arrêt est intervenu alors que réapparaissait à l’assemblée nationale et au sénat le débat sur l’introduction explicite en droit français d’une telle présomption. Une telle idée avait déjà été évoquée en 2018, mais un avis du Conseil d’Etat du 15 mars 2018 (n° 394437) mettait en avant le risque d’inconstitutionnalité d’une telle disposition.   La loi (n° 2021-478) du 21 avril 2021 visant à protéger les mineurs des crimes et délits sexuels et de l’inceste a tout de même repris cette idée, notamment au travers des articles 222-23-1 et 222-23-3 du code pénal tel qu’ils sont actuellement rédigés. Le premier de ces textes énonce que « constitue également un viol tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit, ou tout acte bucco-génital commis par un majeur sur la personne d’un mineur de quinze ans ou commis sur l’auteur par le mineur, lorsque la différence d’âge entre le majeur et le mineur est d’au moins cinq ans », quand le second prévoit pour cette infraction une peine de 20 années de réclusion criminelle. Une véritable infraction de viol sur mineur de 15 ans est donc consacrée en 2021, et elle permet de s’émanciper des difficultés à démontrer l’usage de violence, contrainte, menace ou surprise dans des rapports sexuels avec des mineurs, démonstration nécessaire pour caractériser le viol. La volonté de protéger les individus de moins de 15 ans contre l’influence de majeurs est donc telle que la loi prévoit désormais de sanctionner sans avoir à réunir les éléments constitutifs du viol. Une clause dite « Roméo et Juliette » a toutefois été instaurée pour tenter d’éviter tout abus. Elle se matérialise dans le fait que le mineur doit avoir moins de 15 ans, et que son partenaire sexuel doit être majeur et avoir plus de 5 ans de plus que lui.   L’objectif affiché est ici une meilleure protection des mineurs, en particulier de moins de 15 ans du fait de leur manque de conscience de la sexualité. Cette loi intervient dans un contexte de révélations multiples d’agressions sexuelles sur mineurs, et vise à contourner certaines décisions de justice qui ont été jugées choquantes par l’opinion publique, à l’instar de l’arrêt du 17 mars 2021. Dans cette affaire, le consentement d’une mineure avait été admis, ce qui avait écarté la qualification de viol, alors qu’elle avait eu des relations sexuelles à partir de ses 13 ans avec des pompiers de plus de 22 ans, pour lesquels elle vouait une véritable admiration et qui intervenaient souvent auprès d’elle. Ces dispositions législatives ne sont cependant pas sans poser de questions. Tout d’abord, le risque d’inconstitutionnalité n’est pas exclu, et seule une saisie par QPC du Conseil Constitutionnel pourrait répondre à cette question. En outre, la consécration d’une telle infraction entre en conflit avec l’infraction d’atteinte sexuelle qui existait déjà. Enfin, et en pratique, la question de la connaissance de l’âge du mineur par le majeur se posera toujours. Pour que l’article 222-23-1 trouve à s’appliquer, il conviendra de démontrer que le majeur connaissait ou ne pouvait ignorer que son partenaire mineur avait moins de 15 ans et était plus jeune que lui d’au moins 5 ans. Cette preuve pourra parfois être difficile à apporter, notamment pour des mineurs proches de leur 15ème anniversaire, et offrira ici une possibilité aux majeurs d’éviter le jeu de la présomption en se défendant sur ce terrain-là.
L’infraction se définit comme le comportement interdit par la loi sous peine de sanction pénale. Pour pouvoir caractériser une infraction pénale, il faut la réunion de 2 éléments : Un élément matériel   Un élément moral Le droit pénal a un encrage moral, il ne se satisfait pas de la simple imputation causale. L’article 121-3 du code pénal pose cette exigence de l’élément moral dans l’infraction. Cependant, cet article fait une distinction entre les fautes dites intentionnelle (l’auteur a voulu commettre l’infraction), des autres dites non-intentionnelle (l’auteur n’a pas souhaité que son comportement engendre le résultat causé), intentionnelle ou non un élément moral doit être caractérisé. Il se peut que l’individu n’ait pas souhaité transgresser la loi, il l’a fait malgré lui. Par exemple, il se peut qu’il ait commis une négligence ou une imprudence. L’infraction non-intentionnelle doit se caractérisée par une atteinte grave à la personne ou un risque d’atteinte grave à la personne. Le délit de mise en danger de la vie d’autrui est une infraction non-intentionnelle, on la retrouve à l’article 223-1 du code pénal. C’est le fait d’exposer directement à autrui à un risque immédiat de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente par la violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement.   La violation d’une obligation imposée par la loi ou le règlement La mise en place de ce délit ne peut se faire qu’à la condition que l’auteur enfreint une obligation particulière de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou par un règlement. La victime se doit de démontrer que l’auteur a violé une obligation imposée par la norme. Sans cette démonstration, le délit de mise en danger d’autrui ne peut pas être retenu. S’agissant de l’obligation en elle-même, elle doit interdire ou obliger un comportement précis. Si la règle est impersonnelle et générale, elle ne peut permettre à caractériser le délit.   Une violation manifestement délibérée Ce délit entre dans la catégorie des infractions non-intentionnelles, puisqu’elle suppose que son auteur n’avait pas la volonté de mettre la vie d’autrui en danger, mais plutôt de violé la règle établie. De ce fait, pour qualifier ce délit, la victime doit démontrer l’intention manifeste de l’auteur de violé l’obligation.     L’exposition d’autrui à un risque immédiat Le délit de mise en danger d’autrui suppose par ailleurs l’exposition directe d’autrui à un risque immédiat de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente. Le danger doit être établit de manière séparée avec la violation de la norme édictée. La simple violation à une norme ne suffit pas à caractériser le danger causer à autrui. Il revient aux juges du fond de justifier que la violation de la règle à causer un risque immédiat pour autrui. Nous pouvons prendre l’exemple d’un automobiliste qui roule au-delà de la limitation de vitesse, la Cour de cassation a pu considérer dans un arrêt du 16 décembre 2015 (15-80916), que cela ne constitue pas l’infraction de mise en danger d’autrui, même si la violation de cette règle est punie par une autre infraction. Les juges devront enfin caractériser clairement le lien de causalité direct et immédiat entre la violation de la règle et l’exposition au risque.   Les sanctions encourues Lorsque toutes ces conditions sont réunies, l’auteur du délit de mise en danger d’autrui encours une peine d’un an de prison et de 15 000 € d’amendes.   L’application de ce délit à l’affaire Lafarge   Crim., 16 janvier 2024, n°22-83.681 La société LAFARGE a construit une cimenterie dans le nord de la Syrie, elle a été mise en service en 2010 et est exploitée par une société de droit syrien qui est détenue à une grande majorité par la société LAFARGE. Entre 2012 et 2015, le pays sombre dans la guerre civile et l’Etat islamique sort vainqueur. La cimenterie reste ouverte et les salariés syriens continuent de travailler. En effet la société LAFARGE avait versé entre 4,8 et 10 Millions d’euros à l’Etat Islamique pour éviter de compromettre l’activité de la cimenterie. En novembre 2016, des associations ainsi que les salariés de la cimenterie ont porté plainte et se sont constitués partie civile auprès du juge d’instruction contre les chefs de financement d’entreprise terroriste, de complicité de crime de guerre et de crime contre l’Humanité, d’exploitation abusive du travail d’autrui et du délit de mise en danger de la vie d’autrui. En effet, les salariés syriens ont considéré, qu’ils étaient exposés à un risque de mort ou de blessures, en assurant la continuité de l’exploitation de la cimenterie, notamment en ne recevant pas de formation adéquate en cas d’attaque. En juin 2018, la société AFARGE est mise en examen des chefs précités. La société LAFARGE conteste cette mise en examen en faisant une requête en annulation de la mise en examen devant la chambre de l’instruction en arguant que le droit syrien ne prévoyait aucune obligation particulière de sécurité, de ce fait le délit de mise en danger d’autrui ne pouvait être caractérisé. Cette requête fut rejetée par la chambre d’instruction dans un arrêt du 24 octobre 2019. La société LAFARGE forme alors un pourvoi en cassation. La violation d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité par la loi ou le règlement d’un Etat étranger permet-elle de caractériser le délit de mise en danger de la vie d’autrui ? Dans son arrêt du 16 janvier 2024, la chambre criminelle de la Cour de cassation casse et annule l’arrêt de la chambre de l’instruction. En effet, la Cour considère que le délit de l’article 223-1 du code pénal ne peut être caractérisé qu’en présence d’une violation d’une obligation prévue par la loi française en s’appuyant sur l’article 34 et 37 de la Constitution. Le fait de caractériser de manière assez souple le délit en présence d’une violation à une obligation établie par une loi étrangère aura pour conséquence détendre l’incrimination, or cela contreviendrait au principe d’interprétation strict de la loi prévu à l’article 111-4 du code pénal.
La mise en danger de la vie d’autrui peut s’étendre à transmettre des informations personnelles sur internet afin d’exposer un tiers, selon la loi du 24 aout 2021   Un nouveau de délit de mise en danger de la vie d’autrui a été créé par la loi n°2021-1109 du 24 aout 2021 confortant le respect des principes de la République.   En effet, le délit de mise en danger d’autrui est classiquement prévu par l’article 223-1 du Code pénal, issu de la section « Des risques causés à autrui » : « Le fait d’exposer directement autrui à un risque immédiat de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente par la violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende. »   La loi du 24 aout 2021 a étendu ce délit à la diffusion, la révélation ou la transmission de toute information permettant d’identifier ou localiser une personne ou sa famille de sorte à créer un risque direct d’atteinte aux personnes ou aux biens, avec un nouvel article 223-1-1 du Code pénal : « Le fait de révéler, de diffuser ou de transmettre, par quelque moyen que ce soit, des informations relatives à la vie privée, familiale ou professionnelle d’une personne permettant de l’identifier ou de la localiser aux fins de l’exposer ou d’exposer les membres de sa famille à un risque direct d’atteinte à la personne ou aux biens que l’auteur ne pouvait ignorer est puni de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende ».   Le premier délit de mise en danger était issu d’un comportement risqué de l’auteur découlant d’une intention de violer une obligation particulière de prudence ou de sécurité, sans intention quant au résultat à savoir le décès ou la mutilation de la victime. Ce nouveau délit porte quant à lui sur l’intention d’exposer la personne ciblée à un risque d’atteinte que l’auteur ne pouvait ignorer, peu importe le résultat obtenu. Ce degré d’intention justifie ainsi ce nouveau délit et des peines plus importantes. Par ailleurs, les peines augmentent en fonction de la personne ciblée. Ce délit sera ainsi puni de 5 ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende s’il est commis à l’encontre d’un mineur, d’une personne vulnérable, d’une personne dépositaire de l’autorité publique telle que les agents de police ou de gendarmerie, d’un journaliste, de personnes chargées d’une mission de service public ou titulaires d’un mandat électif. Cette nouvelle version de la mise en danger d’autrui nécessite toutefois un élément moral à deux niveaux : La volonté d’exposer la personne ciblée ou sa famille à un risque direct d’atteinte, L’auteur ne doit pas pouvoir ignorer ce risque. Il en ressort que les juges devront a minima prouver que l’auteur du délit ne pouvait ignorer engendrer un risque pour la personne visée par la diffusion d’informations. Ce délit prévoit enfin la révélation, la transmission ou la diffusion de ces données identifiantes par « quelque moyen que ce soit », incluant les technologies numériques. A l’ère des télécommunications et des règlements de compte sur les réseaux sociaux, ce nouveau délit prend sens et vise à limiter les abus dans l’utilisation de ces moyens de c
Nécessité d’une information expresse ou non ? Cour de cassation, Chambre criminelle, 7 février 2017, 16-84.353 Les officiers de police judiciaire, sous l’autorité du procureur de la République, ont l’obligation de l’informer des motifs d’un placement en garde à vue afin que celle-ci soit valable. C’est ce qu’a rappelé la chambre criminelle de la Cour de cassation dans un arrêt du 25 juin 2013. La question était plus particulièrement de savoir si l’information donnée au procureur de la République devait être expresse ou si elle pouvait se déduire de la procédure. En l’espèce, deux individus étaient interpellés et placés en garde à vue après la mise en place de surveillances de véhicules, dans le cadre d’une enquête pour trafic de stupéfiants. L’officier de police judiciaire informait le procureur de la République que cette enquête avait abouti à l’interpellation et le placement en garde à vue des individus, sans précision quant à la qualification des faits notifiés. Le procureur de la République lui prescrivait de poursuivre l’enquête. La chambre de l’instruction, saisie d’une requête en nullité, jugeait qu’il se déduisait de ces éléments que le procureur était nécessairement informé des motifs du placement en garde à vue et qu’il opérait donc un contrôle effectif de la procédure et de cette mesure. La Cour de cassation jugeait au contraire, au visa des articles 62-2 et 63 alinéa 2 du Code de procédure pénale, qu’il ne peut se déduire de la procédure que le procureur de la République a connaissance des motifs d’un placement en garde à vue. Ces motifs doivent être expressément mentionnés dans un procès-verbal. Le défaut de cette information expresse fait nécessairement grief à la personne concernée, qui est donc en droit de déposer une requête en nullité. A retenir : Il faut donc rechercher si lors de l’avis à Parquet, une mention expresse des motifs de la garde à vue s’y trouve.
Sous-titre : L’usage de la visioconférence dans le cadre d’une expertise psychiatrique est interdit et fait nécessairement grief, justifiant l’annulation de l’expertise. Cass.crim., 22 novembre 2023, n°22-86.715   L’usage de la visioconférence dans le cadre de procédures judiciaires s’est étendu et concerne aujourd’hui de nombreux actes d’enquête. L’article 706-71 du Code de procédure pénale prévoit les actes d’enquête pouvant faire l’objet d’une visioconférence de manière limitative. Il s’agit notamment de l’interrogatoire ou de l’audition d’un prévenu ou mis en examen, d’une confrontation, la comparution du prévenu devant le Tribunal correctionnel, ou encore l’audition de témoins ou de parties civiles. Cet article prévoit également que l’audition d’experts peut avoir lieu par visioconférence. Cependant, cet article ne prévoit pas l’usage de la visioconférence dans le cadre de la réalisation de l’expertise. La question de cet usage dans ce cadre a été posée à la Cour de cassation.   En l’espèce, un individu a subi des violences et est décédé trois jours plus tard. Une information judiciaire a été ouverte et plusieurs suspects ont été mis en examen. Le Juge d’instruction avait ordonné la réalisation d’expertises psychiatriques des mis en examens, qui se sont déroulées en visioconférence. L’un des mis en examens a déposé une requête en annulation de son expertise, qui a été rejetée par la Chambre de l’instruction. Le mis en examen a dès lors formé un pourvoi en cassation, soulevant que l’article 706-71 du Code de procédure pénale ne prévoyait pas la réalisation d’expertises au moyen d’une visioconférence. Cette visioconférence était dès lors interdite et entrainait la nullité de l’expertise. Plus encore, le respect des règles de procédure était d’autant plus important que l’expertise est essentielle dans le cadre des droits de la défense. Enfin, le mis en examen soulevait que cette nullité n’avait aucun lien avec le fait que la défense n’avait émis aucune observation à la réception de la convocation mentionnant la visioconférence. La Cour de cassation a cassé l’arrêt de la Cour d’appel, au motif que l’article 706-71 du Code de procédure pénale prévoit la liste des actes de procédures pouvant faire l’objet d’une visioconférence. Elle déduit de cet article que l’usage de la visioconférence est interdit dans tout autre cas non prévu par la loi. Or, l’expertise psychiatrique ne fait pas partie des actes de procédure pouvant faire l’objet d’une visioconférence. La Cour de cassation juge dès lors que l’usage de la visioconférence est une cause de nullité de l’expertise, que cette nullité peut être soulevée par toute partie qui y a un intérêt, et que cette irrégularité fait nécessairement grief. Ainsi, en cas d’expertise réalisée en visioconférence, il convient d’envisager l’opportunité de déposer une requête en nullité sur le fondement de l’article 706-71 du Code de procédure pénale :   « Vu l’article 706-71 du code de procédure pénale : Selon le premier alinéa de ce texte, issu de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019, il peut être recouru au cours de la procédure pénale, aux fins d’une bonne administration de la justice, si le magistrat en charge de la procédure ou le président de la juridiction l’estime justifié, dans les cas et modalités prévus par cet article, à un moyen de télécommunication audiovisuelle. Il s’ensuit, d’une part, que l’usage d’un moyen de télécommunication audiovisuelle est limité aux cas prévus par le texte. D’autre part, cette disposition s’applique à tous les actes accomplis au cours de la procédure. Dès lors, le texte susvisé interdit le recours à un moyen de télécommunication audiovisuelle à l’occasion de l’examen de la personne mise en examen, du témoin assisté ou de la partie civile par les médecins et psychologues experts, auquel se réfère l’article 164, alinéa 3, du code de procédure pénale. Constitue une violation des règles relatives à l’établissement et à l’administration de la preuve en matière pénale la méconnaissance dudit texte, qui impose que l’examen d’une personne soit réalisé par l’expert, en sa présence, de sorte que toute partie qui y a intérêt a qualité pour invoquer la nullité tirée de la méconnaissance de ces dispositions. Une telle irrégularité fait nécessairement grief aux parties concernées. En écartant la demande d’annulation de l’expertise psychiatrique du demandeur, dont l’examen a été réalisé par visioconférence, la chambre de l’instruction a méconnu le texte susvisé. La cassation est, par conséquent, encourue».
Les conditions tenant à ce qu’un expert médical prenne part à une expertise toxicologique   Cour de cassation, chambre criminelle, 31 mai 2007, 07-80.928   Les examens scientifiques tels que les analyses toxicologiques requièrent l’intervention d’un expert pour être réalisés. L’article 60 du Code de procédure pénale prévoit que ces experts doivent : -être inscrits sur les listes d’experts des Cours d’appel OU -prêter serment par écrit d’apporter leur concours à la justice en leur honneur et en leur conscience.   Ces conditions d’intervention ont été rappelées par la Chambre criminelle de la Cour de cassation dans un arrêt du 31 mai 2007. La question était plus particulièrement de savoir si une pharmacienne pouvait intervenir sans prêter serment, alors même que la personne inscrite sur les listes des Cours d’appel était le service des urgences médico-judiciaires (UMJ) de l’établissement.   En l’espèce, la pharmacienne du laboratoire de toxicologie du service de pharmacie de l’Hôtel-Dieu a été requise pour réaliser une expertise toxicologique sur un individu placé en garde à vue. Une requête en nullité a été déposée devant la Chambre de l’instruction, selon laquelle seul le service des UMJ était inscrit sur les listes d’experts, de sorte que cette pharmacienne aurait dû prêter serment, ce qui n’a pas été fait. La Chambre de l’instruction a rejeté cet argumentaire au motif que l’Hôtel-Dieu était inscrit sur les listes en qualité de personne morale. Dès lors, la pharmacienne faisant partie de l’établissement hospitalier, elle n’avait pas à prêter serment. La Cour de cassation en a décidé autrement, jugeant que la pharmacienne exerçait dans un service distinct du service inscrit sur les listes d’experts, à savoir le service des UMJ. Elle aurait donc dû prêter serment conformément à l’article 60 du Code de procédure pénale. De sorte, que ces formalités n’ayant pas été respectées, la nullité était encourue.
Une audition libre est-elle nulle si la notification des droits a eu lieu après que le témoin aie reconnu les faits?   Cour de cassation, chambre criminelle, 15 décembre 2015, n°15-80.104   Le Code de procédure pénale prévoit la possibilité pour les enquêteurs d’entendre une personne en audition libre s’il existe des raisons plausibles de penser qu’elle a commis ou tenté de commettre une infraction. Si la découverte de ces raisons plausibles intervient lors d’une simple audition de témoin, il est fait obligation aux enquêteurs d’informer cette personne de ses droits issus de l’article 61-1 du Code de procédure pénale en cours d’audition, et notamment du droit de quitter à tout moment les locaux où elle est entendue. La question posée à la Cour de cassation a toutefois été celle de savoir si la notification de ces droits étaient obligatoires dans le cas où l’audition avait pris fin immédiatement après avoir découvert ces raisons plausibles de soupçonner le témoin. En l’espèce, le propriétaire d’un véhicule dont la vitesse excessive avait été constatée par cliché photographique était entendu en qualité de témoin. Au cours de l’audition, le propriétaire avait indiqué qu’il était possible qu’il soit l’utilisateur du véhicule au moment de l’infraction, et répondait « oui je n’ai pas trop le choix » à la question de savoir s’il reconnaissait les faits. Il était cité devant le Tribunal de Police pour excès de vitesse. Il soulevait la nullité de l’audition pour non-respect de l’obligation de lui notifier son droit de quitter les locaux dès lors que les agents avaient découvert qu’il avait pu commettre une infraction. La Cour d’appel reconnaissait que la notification de ses droits aurait dû être réalisée, mais constatait que l’audition avait pris fin dès la découverte de ces éléments, de sorte qu’il ne pouvait se prévaloir de la violation de ses droits. La Cour de cassation a cependant jugé que la notification de ces droits est obligatoire et que bien que l’audition ait pris fin après ces déclarations, le mis en cause avait été cité à comparaitre sur le fondement de cette audition. Dès lors, la notification aurait dû intervenir lors de l’audition, avant qu’elle ne prenne fin. L’audition libre doit ainsi être annulée, entrainant par voie de conséquence l’annulation des poursuites.
Les contours du secret de l’enquête et de l’instruction   L’article 11 du Code de procédure pénale dispose que « Sauf dans le cas où la loi en dispose autrement et sans préjudice des droits de la défense, la procédure au cours de l’enquête et de l’instruction est secrète. Toute personne qui concourt à cette procédure est tenue au secret professionnel dans les conditions et sous les peines prévues à l’article 434-7-2 du code pénal ».   Les personnes soumises au secret de l’enquête et de l’instruction Seules les personnes qui concourent à la procédure sont tenues au secret de l’enquête et de l’instruction. Peuvent notamment être cités les magistrats, inspecteurs de la sûreté, agents de police, experts, et les agents ou fonctionnaires auxquels les lois spéciales mentionnées à l’article 28 attribuent des pouvoirs de police judiciaire. En revanche, la partie civile, le mis en examen, mais également l’avocat ne sont pas soumis au secret de l’instruction (l’avocat est néanmoins tenu au secret professionnel).   La limite L’article 11 alinéa 3 du Code de procédure pénale prévoit que pour éviter la propagation d’informations parcellaires ou inexactes ou pour mettre fin à un trouble à l’ordre public ou lorsque tout autre impératif d’intérêt public le justifie, le procureur de la République peut, d’office et à la demande de la juridiction d’instruction ou des parties, directement ou par l’intermédiaire d’un officier de police judiciaire agissant avec son accord et sous son contrôle, rendre publics des éléments objectifs tirés de la procédure ne comportant aucune appréciation sur le bien-fondé des charges retenues contre les personnes mises en cause.   Les conséquences de la violation du secret de l’enquête et de l’instruction La violation du secret de l’enquête et de l’instruction entraîne la nullité de la procédure si la violation a été non pas postérieure mais concomitante à l’accomplissement d’un acte de la procédure et s’il en est résulté une atteinte aux intérêts d’une partie (Cass. crim, 25 janv. 1996, n° 95-85.560 ; Cass. crim, 11 juillet 2017, n° 17-80.313). La Cour de cassation a récemment précisé que la violation du secret cause nécessairement atteinte aux intérêts de la personne qu’elle concerne (Cass. crim, 10 janv. 2017, n° 16-84.740).   En outre, la violation du secret est une infraction pénale punie de 3 ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende (article 434-7-2 du Code pénal).
Modalités générales et différentes catégories de nullité en droit pénalLa nullité, de façon générale est la sanction de l’invalidité d’un acte juridique, ou d’une procédure, soit que la cause de la nullité réside dans l’absence de l’utilisation d’une forme précise qui est légalement imposée, soit qu’elle résulte de l’absence d’un élément indispensable à son efficacité.En matière pénale, la nullité sert à sanctionner tout manquement aux règles procédurales susceptible de compromettre l’équilibre des droits des parties. Institué par le législateur et la pratique judiciaire, la théorie des nullités vise donc à inciter les divers agents de la procédure à un meilleur respect des règles. L’article préliminaire du code de procédure pénale dispose en effet : « La procédure pénale doit être équitable et contradictoire et préserver l’équilibre des droits des parties […] » ⇒ Quels sont les différents types de nullité ? Le Code de procédure pénale distingue plusieurs catégories de nullité : • Les nullités textuelles et substantielles • Les nullités d’ordre public et d’ordre privé Les nullités textuelles Les nullités textuelles sont celles dont les textes prévoient la nullité de la violation des dispositions expressément consacrées. Ces dispositions prévues par le Code de procédure pénale peuvent aller de la mise en examen d’un suspect prévue par l’article 80-1 dudit code, à la possibilité pour un suspect de formuler des observations, droit prévu par l’article 77-2 dudit code. Les nullités substantielles En l’absence de précision textuelle, la jurisprudence peut considérer que la violation de cette disposition est susceptible de porter atteinte aux droits fondamentaux. Elle a par exemple considéré comme une nullité substantielle, le défaut d’information au procureur de la République, du placement d’un suspect en garde à vue. (Cass, crim, 10 mai 2001, n° 01-81.441) Les nullités d’ordre public Les nullités d’ordre public sont celles qui visent à sanctionner le manquement aux règles impératives au fonctionnement du système judiciaire. Ces nullités ont la particularité de ne nécessiter aucune démonstration d’un « grief » c’est-à-dire la violation automatique d’un droit fondamental. La jurisprudence a ainsi considéré comme relevant de la nullité d’ordre public :– les règles d’organisation et de composition des juridictions (Cass, crim, 10 janvier 1996 n°95-81591) ou encore les règles de compétence des juridictions (Cass, crim, 22 avril 1986 n°84-95.759) Les nullités d’ordre privé Les nullités d’ordre privé sont celles qui visent à sanctionner les violations qui portent nécessairement atteinte aux intérêts de la personne concernée.Ces nullités contrairement aux nullités d’ordre public, nécessitent la démonstration d’un grief La jurisprudence a ainsi considéré comme relevant de la nullité d’ordre privé : – l’absence de notification des droits à la personne placée en garde à vue (Cass, crim, 30 avril 1996, n°95-82.217) ou encore l’absence de notification au gardé à vue de la prolongation de la mesure (Cass, crim, 30 janvier 2001 n°00-87.155)– le non-respect du droit pour la personne gardée à vue de s’entretenir avec un avocat (Cass,crim, 9 mai 1994, n°94-80.802) – le non-respect de la règle de loyauté des enregistrements s’imposant à un officier de police judiciaire (Cass, crim 27 février 1996 n°95-81.366) ⇒ L’opportunité de la nullité Qui peut agir en nullité ? L’article 171 du Code de procédure pénale dispose : « Il y a nullité lorsque la méconnaissance d’une formalité substantielle prévue par une disposition du présent code ou toute autre disposition de procédure pénale a porté atteinte aux intérêts de la partie qu’elle concerne »Ainsi, la partie qui désire agir en nullité doit démontrer que la méconnaissance d’une règle de procédure a eu pour conséquence de porter atteinte à ses droits. La recevabilité de la requête en nullité L’article 170 du code de procédure pénal dispose : « En toute matière, la chambre de l’instruction peut, au cours de l’information, être saisie aux fins d’annulation d’un acte ou d’une pièce de la procédure par le juge d’instruction, par le procureur de la République, par les parties ou par le témoin assisté. » La chambre de l’instruction est donc la formation de jugement en charge de la recevabilité et de l’examen d’une requête en nullité. Quand la nullité peut-elle être soulevée ? L’article 385 alinéa 6 du Code de procédure pénale dispose que : « Les exceptions de nullité doivent être présentées avant toute défense au fond. » ⇒ Quelle est l’étendue de la nullité ? La jurisprudence a considéré que « l’irrégularité d’un acte de procédure n’entraîne l’annulation d’autres actes postérieurs qu’à la condition que ces derniers aient pour support nécessaire l’acte annulé. » (Cass, crim, 10 décembre 2003 n°03-83.344)Ainsi, « l’annulation d’un acte emporte l’annulation de tous les actes qui en dérivent. » (Cass, crim, 4 janvier 2005, n°04-84.876)
Le Conseil constitutionnel a jugé que l’absence totale de possibilité de soulever des nullités après l’ordonnance de renvoi était contraire à la Constitution.   Décision n°2023-1062 QPC du 28 septembre 2023   La décision du Conseil constitutionnel : une nouveauté dans la procédure pénale Avant cette décision du 28 septembre 2023, le Code de procédure pénale prévoyait un système de purge des nullités en son article 385 : « Le tribunal correctionnel a qualité pour constater les nullités des procédures qui lui sont soumises sauf lorsqu’il est saisi par le renvoi ordonné par le juge d’instruction ou la chambre de l’instruction ». Concrètement, le mis en examen avait l’opportunité pendant tout le temps de la procédure de soulever des nullités devant la Chambre de l’instruction près la Cour d’appel selon l’article 170 du Code de procédure pénale. Il appartenait donc au mis en examen d’être diligent pendant le temps de la procédure d’instruction. Quid alors des nullités une fois l’ordonnance de renvoi rendue ? Le droit antérieur ne prévoyait aucune exception : à compter du renvoi de l’affaire par le Juge d’instruction devant une juridiction de jugement, celle-ci ne pouvait connaitre des nullités de procédure. Cette législation était particulièrement injuste envers les individus qui prenaient connaissance d’un vice de procédure après renvoi de l’affaire et qui n’avaient, de fait, pas pu saisir la chambre de l’instruction durant le temps de la procédure. C’est dans ces conditions qu’une Question prioritaire de constitutionnalité était posée au Conseil, portant sur cette phrase : « sauf lorsqu’il est saisi par le renvoi ordonné par le juge d’instruction ou la chambre de l’instruction ». Le Conseil constitutionnel jugeait cette disposition contraire à la Constitution. En effet, la Constitution prévoit le droit à un recours effectif et la garantie des droits de la défense, ce qui n’est pas compatible avec une purge pure et simple des nullités à compter de la clôture de l’instruction. Il convient de prévoir des exceptions dans les cas où « le prévenu n’aurait pu avoir connaissance de l’irrégularité éventuelle d’un acte ou d’un élément de la procédure que postérieurement à la clôture de l’instruction ». Le Conseil constitutionnel jugeait ainsi que cette disposition devait être abrogée, et laissait une année au législateur pour modifier ses textes.   L’article 385 du Code de procédure pénale modifié L’article 385 du Code de procédure pénale a vu son premier alinéa remplacé par la loi n°2024-1061 du 26 novembre 2024 visant à sécuriser le mécanisme de purge des nullités. Le premier alinéa prévoit désormais que : « Le tribunal correctionnel a qualité pour constater les nullités des procédures qui lui sont soumises. Lorsqu’il est saisi par le renvoi ordonné par le juge d’instruction ou la chambre de l’instruction, il ne peut connaître que de moyens de nullité qui n’ont pu être connus par la partie qui les soulève avant la clôture de l’instruction ou avant l’expiration des délais d’un mois ou de trois mois prévus à l’article 175 ». Désormais, les prévenus pourront donc soulever des nullités devant la juridiction de jugement, à la condition de démontrer qu’ils n’ont pu connaitre ces nullités dans le temps de la procédure d’instruction. Si le Code de procédure pénale ne donne aucune indication sur les éléments de preuve qui pourraient être soulevés, la jurisprudence offrira prochainement des exemples concrets ouvrant les droits de la défense.
Les actes de procédure sont l’ensemble des actes réalisés durant l’enquête de police, ou lors de l’instruction. L’idée du législateur, est que la procédure pénale doit être exempt de tout vices, elle doit respecter des règles de fond et de forme ce qui constituent une garantie pour les justiciables. Ces actes font alors l’objet d’un contrôle, pour vérifier s’ils ne sont pas entachés d’une nullité. Ce contrôle peut être effectuer par la Chambre de l’instruction. La théorie des nullités visent à inciter les divers agents de la procédure à un meilleur respect des règles. L’article préliminaire du Code de procédure pénal dispose en effet : « La procédure pénale doit être équitable et contradictoire et préserver l’équilibre des droits des parties […] » Nous allons essayer de savoir quels sont les effets de la nullité d’un acte de procédure.   I/ Le principe : la suppression des actes de procédure nuls En vertu de l’article 174 du code de procédure pénal : « […] La chambre de l’instruction décide si l’annulation doit être limitée à tout ou partie des actes ou pièces de la procédure viciée ou s’étendre à tout ou partie de la procédure ultérieure et procède comme il est dit au troisième alinéa de l’article 206. Les actes ou pièces annulés sont retirés du dossier d’information et classés au greffe de la cour d’appel. Les actes ou pièces de la procédure partiellement annulés sont cancellés après qu’a été établie une copie certifiée conforme à l’original, qui est classée au greffe de la cour d’appel. Il est interdit de tirer des actes et des pièces ou parties d’actes ou de pièces annulés aucun renseignement contre les parties, à peine de poursuites disciplinaires pour les avocats et les magistrats. » Cet article nous indique que lorsqu’un acte ou une pièce de la procédure est frappé de nullité, ces derniers sont retirés du dossier. S’il y a annulation seulement partielle de l’acte ou de la pièce, la partie concernée est barrer. Il est interdit de tirer des actes et des pièces ou parties d’actes ou de pièces annulés aucun renseignement contre les parties. L’annulation d’un acte ou d’une pièce peut s’étendre à d’autres actes ou pièce, lorsque l’acte qui est annulé n’est pas le support nécessaire des actes ultérieurs.   II/ L’exception : la possibilité de se fonder sur un acte annuler Cependant, un arrêt de la Chambre criminelle est venu troubler l’utilisation de l’article 174.   Cass. Crim., 19 octobre 2021, n°20-82.172 Un journaliste effectuait une enquête sur la possible corruption d’un haut fonctionnaire, par ces révélations le Procureur de la République, prend un réquisitoire et demande à l’opérateur téléphonique d’obtenir la liste des appels téléphoniques du journaliste. Cela a permis de découvrir la personne susceptible d’avoir corrompu le fonctionnaire de police. Le mis en examen pour corruption a été soumis au contrôle de la Chambre de l’instruction visant à l’annulation des réquisitions téléphonique. La Chambre de l’instruction a fait droit à la demande par un arrêt du 24 février 2012. Le journaliste ayant vent de cette affaire porte plainte et se constitue partie civile du chef de collecte de données à caractère personnel par moyen frauduleux, déloyal, ou illicite. Le juge d’instruction a prononcé un non-lieu, mais le journaliste décide de faire appel de cette ordonnance devant la Chambre de l’instruction. Dans son arrêt du 29 novembre 2019, la Chambre de l’instruction confirme l’ordonnance de non-lieu, en se fondant sur l’article 174, en considérant que l’appel repose sur des réquisitions qui ont été annulées. Ce qui signifie qu’ils n’ont plus d’existence et ne peuvent donner lieu à des poursuites pour le délit de collecte de données à caractère personnel. Le requérant forme alors un pourvoi en cassation. La chambre criminelle ne va pas aller dans le sens de la chambre de l’instruction et casse et annule l’arrêt rendu le 29 novembre 20219. La Cour de cassation a jugé qu’il est possible de se fonder sur des actes annulés, en se fondant sur l’article 6-1 du code de procédure pénale. Le principe de l’article 174, s’est de considérer que lorsqu’un acte de procédure est annulé, on le reitre du dossier, ce qui signifie qu’il n’existe plus aux yeux de la justice. Le dernier alinéa de cet article dispose que la pièce annulée ne peut pas être utiliser contre le bénéficiaire de cette nullité. Néanmoins cet article doit s’articuler avec l’article 6-1 du code de procédure pénale qui prévoit la possibilité d’exercer des poursuites dans une procédure future sur une infraction qui implique la violation d’une règle de procédure à condition que le caractère illégal a été constaté par une décision définitive. En l’espèce, le journaliste soulève le délit de collecte de données à caractère personnel par moyen frauduleux, déloyal, ou illicite, en se fondant sur le réquisitoire annulé par la chambre de l’instruction. L’annulation de ce réquisitoire, lui a bénéficié autant qu’au requérant. Sa constitution de partie civile était possible, puisqu’elle ne portait pas atteinte aux droits du requérant à la nullité et qu’il s’agit d’une procédure distincte. On peut en conclure que L’utilisation d’une pièce annulée dans une procédure subséquente est possible lorsque cela ne porte pas atteinte aux droits du requérant à la nullité ayant bénéficié de l’annulation d’actes dès lors, l’interdiction découlant de l’article 174 du code de procédure pénale de tirer des actes annulés ne peut lui être opposée.  
Le Code de procédure pénale prévoit que dans certaines circonstances, l’auteur d’une infraction peut faire l’objet d’un déferrement. Cette mesure consiste à présenter cette personne devant le procureur de la République ou le juge d’instruction à l’issue de sa garde à vue. Le déferrement doit respecter certaines conditions prévues par le législateur.   Tout d’abord, selon l’article 803-2 du Code de procédure pénale, la personne déférée doit comparaître le jour même de la levée de sa garde à vue ou de sa retenue devant le magistrat ou, en cas d’ouverture d’une information, devant le juge d’instruction saisi de la procédure.   Néanmoins, l’article 803-3 du Code de procédure pénale précise qu’en cas de nécessité « la personne peut comparaître le jour suivant et peut être retenue à cette fin dans des locaux de la juridiction spécialement aménagés, à la condition que cette comparution intervienne au plus tard dans un délai de vingt heures à compter de l’heure à laquelle la garde à vue ou la retenue a été levée ».    Peut-on contester l’existence d’une nécessité justifiant une comparution dans un délai de 20h ?   La personne déférée peut agir en nullité de la mesure si elle estime qu’il n’existait aucune nécessité justifiant une comparution dans un délai de 20h. Par un arrêt du 13 juin 2018, la Cour de cassation a précisé qu’il incombe à la juridiction, saisie d’une requête en nullité de la rétention, de s’assurer de l’existence des circonstances ou contraintes matérielles ayant justifié la mise en œuvre de cette mesure (Cass. crim, 13 juin 2018, n° 17-85.940).    Peut-on agir en nullité en cas de non-respect du délai de 20h ?   A l’issue de ce délai de 20 h, si la personne déférée n’a toujours pas fait l’objet d’une comparution devant le juge et qu’elle n’a pas été remise en liberté, elle peut agir en nullité de la mesure. La nullité entraînera, de manière subséquente, la nullité du procès-verbal valant saisine du tribunal étant donné qu’il a pour support nécessaire la rétention du prévenu entaché d’illégalité. C’est ce qu’a affirmé la Cour de cassation dans un arrêt du 6 décembre 2005 (Cass. crim, 6 déc. 2005, n°05-82.450).   En l’espèce, un individu a été placé en garde à vue le 9 avril 2004 à 21h10. Cette dernière a été levée le 10 avril 2004 à 19h30. L’individu a été retenu dans les locaux de la juridiction prévus à cet effet et présenté le 11 avril au procureur de la République qui l’a invité, par procès-verbal, à comparaître devant le tribunal à l’audience du 13 avril. L’avocat du prévenu a invoqué la nullité de la mesure pour non-respect du délai légal de 20h.   La Cour d’appel, confirmé par la Cour de cassation a fait droit à sa demande en affirmant qu’il était impossible de s’assurer de la durée de la rétention, faute de connaître l’heure à laquelle le prévenu a été présenté devant le procureur de la République.   Quels sont les droits de la personne déférée ?   L’article 803-3 alinéa 4 dresse une liste des droits de la personne déférée :   La personne déférée doit avoir la possibilité de s’alimenter A sa demande, de faire prévenir par téléphone une des personnes visées à l’article 63-2 du Code de procédure pénale (ex : une personne avec laquelle elle vit habituellement, un parent, son employeur…) Être examinée par un médecin S’entretenir à tout moment avec son avocat   Un registre spécial doit être tenu afin de mentionner l’identité des personnes retenues, leurs heures d’arrivée et de conduite devant le magistrat ainsi que l’application des dispositions relatives au droit de la personne déférée.   Ce registre est tenu dans le local où la personne est retenue et il est surveillé par des fonctionnaires de la police nationale ou des militaires de la gendarmerie nationale sous le contrôle du procureur de la République.   Par un arrêt du 9 novembre 2021, la Cour de cassation a rappelé que ce registre permet d’effectuer des vérifications lorsqu’est alléguée la violation des garanties prévues par l’article 803-3 (Cass. crim, 9 nov. 2021, n° 21-82.606).  
La nécessité d’indices graves et concordants pour justifier d’une mise en examen L’article 79 du Code de procédure pénale prévoit qu’une information judiciaire doit obligatoirement être diligentée en matière de crime, elle est facultative en matière de délit et exceptionnelle en matière de contravention. Dans le cadre de cette information judiciaire, la personne mise en cause peut être placée sous le statut de mis en examen. Depuis la loi n°2000-516 du 15 juin 2000, l’article 80-1 du Code de procédure pénale impose que « le juge d’instruction ne peut mettre en examen que les personnes à l’encontre desquelles il existe des indices graves ou concordants rendant vraisemblable qu’elles aient pu participer, comme auteur ou comme complice, à la commission des infractions dont il est saisi ». Que signifie « indices graves ou concordants » ? La doctrine a eu l’occasion de préciser ce qu’il faut entendre par indices graves ou concordants : « plusieurs, soit au minimum deux indices accusateurs qui, pour donner une vraisemblance objective à la participation de l’intéressé aux faits reprochés, doivent être soit graves c’est-à-dire présenter une consistance telles qu’ils apportent en eux-mêmes la vraisemblance exigée, soit concordants, la vraisemblance résultant de leur recoupement alors même qu’ils ne présenteraient pas en eux-mêmes une consistante suffisante » (S. Guinchard et J.Buisson, Procédure pénale, 4e éd., LexisNexis, n°1746). Ainsi, selon S.Guichard et J.Buisson, « la simple accusation, non objective d’une victime ou d’un témoin entendus par le juge ou un OPJ en exécution d’une commission rogatoire ne suffit pas, à défaut d’un autre élément venant la corroborer, pour mettre en examen la personne accusée ». Afin de mieux cerner cette notion, la jurisprudence doit être étudiée. En effet, le Code de procédure pénal ne liste pas ces indices. Constituent des indices graves ou concordants : CA Montpellier, ch. instru., 19 févr. 2015, n° 2014/01144 (attouchements sexuels) : Des témoignages ayant constaté l’état de la victime, Le rapport du médecin qui l’a examiné, La découverte sur les lieux des faits de revues à caractère pornographique zoophile appartenant au masseur soupçonné, qui témoignent d’une approche singulière de la sexualité. CA Montpellier, 27 avril 2017, 17/00237 (injure et diffamation) : Les déclarations du mis en examen confirmant qu’il a tenu certains des propos figurant dans les pièces versées par les parties civiles.   CA Montpellier, 30 juin 2016, n°16/00390 (tentative d’assassinat) : Les déclarations accusatrices d’un autre mis en examen, L’exploitation de la téléphonie démontrant que le mis en examen a été en contact avec les autres mis en examen le jour des faits, et que son téléphone a déclenché des relais couvrant le lieu des faits sur la même période de temps, Le rapprochement avec une autre procédure décrivant un mode opératoire similaire, utilisé par les mis en examen.   CA Montpellier 06 novembre 2014, 14/00550 (complicité de trafic de stupéfiants) : La nature des relations liant l’auteur principal et le mis en examen, Des sachets similaires à ceux habituellement utilisés pour le conditionnement de cocaïne ont été retrouvés chez l’auteur principal de l’infraction, Le mis en examen a régulièrement accompagné l’auteur principal sur différents sites où ont eu lieu les transactions.   CA Aix-en-Provence, 4 avril 2006, CT0097 (recel de vol de véhicule) : Le mis en examen avait connaissance de l’achat des véhicules par l’intermédiaire de ses parents (auteurs de l’infraction principale), Il connaissait leur passé délinquant, Le mis en examen ne pouvait ignorer que le véhicule évalué par sa mère 150 000 francs avait été payé 20 000 francs puis revendu 98 000 francs aux parties civiles, Il ne pouvait ignorer que l’annonce de la revente avait été postée au nom de sa mère, Le mis en examen avait exigé le virement immédiat du produit de la vente.   Crim 29 juin 2021 n°21-82.232 (trafic de stupéfiants et association de malfaiteurs) : L’exploitation des sonorisations d’un suspect a mis en cause le mis en examen en le citant nommément, Le suspect a expliqué le rôle du mis en examen dans la commission des faits, Le carnet saisi au domicile du mis en examen a permis de découvrir les noms d’intermédiaires cités par le suspect.   Crim 08 juin 2021, n°21-81.839 (assassinat) : Des témoignages faisant état de relations compliquées entre les deux époux, Un enregistrement dans lequel le mis en examen menace sa femme de défenestration, Des déclarations des ex-compagnes du mis en examen évoquant sa violence envers elles, Des déclarations des parents de la victime décrivant sa violence envers cette dernière, Les déclarations du mis en examen admettant avoir giflé sa femme.   Crim 20 juin 2018, 14-80.543 (complicité d’enlèvement et de séquestration) : Le fils de la victime mettait formellement en cause l’organisation dont le mis en examen était le chef, Le mis en examen reconnaissait connaître le fils de la victime, Il l’aurait connu par l’intermédiaire d’un certain « Karim », prénom apparaissant à deux reprises au cours de la procédure, Lors de son interpellation, le mis en examen avait un ordinateur portable dans lequel était retrouvé une documentation relative aux faits.   Crim 05 juin 2018, n°17-87.524 (complicité de harcèlement moral au préjudice de salariés) : La priorité du mis en examen est de réussir un nouveau projet ayant pour conséquence le départ d’un nombre important de salariés ; cette volonté est corroborée par un document trouvé, La participation du mis en examen à 2 synthèses de tables rondes, l’une d’elles évoquant la nécessité d’organiser 4 500 départs internes chaque année et faisant état de stratégies visant à brusquer les salariés pour favoriser la mobilité externe forcée.   Crim 20 décembre 2017 n°17-81.758 (dénonciation calomnieuse) : Le mis en examen a déposé plainte contre la victime pour des violences volontaires par conjoint avec ITT inférieur à 8 jours, ayant abouti à une décision de relaxe, Il a dénoncé à la brigade des mineurs des faits de détention d’images à caractère pédopornographique, des faits d’agressions sexuelles et viols sur mineurs, classés sans suite, Le mis en examen a dénoncé des faits d’agressions sexuelles et viols sur mineurs de 15 ans, Il a dénoncé des faits d’usurpation de titre ayant conduit à un classement sans suite pour « absence d’infraction ».   Assemblée plénière 10 novembre 2017 n°17-82.028 (chantage et extorsion de fonds) : Le mis en examen était en possession de 2 enveloppes contenant chacune 40.000 euros en espèce et des exemplaires signés par les trois intéressés de l’engagement de renonciation à la publication du livre litigieux.   Crim 02 novembre 2017 n°16-87.260 (infraction à la législation sur les stupéfiants) : L’un des principaux mis en cause rendait fréquemment visite au mis en examen selon un mode opératoire répétitif, vraisemblablement lié à son trafic, Une somme de 15.000 euros en espèce a été découverte chez le mis en examen, Ce dernier a déclaré conserver cette somme pour quelqu’un dont il refusait de fournir l’identité, Le mis en examen n’a pas pu fournir d’explication sur un document découvert dans une enveloppe recensant des données évocatrices d’une comptabilité, Il a admis avoir été en contact avec l’un des principaux mis en cause pour des échanges de cannabis.   Crim 27 juillet 2016 n°16-83.024 (violences) : Le mis en examen était décrit par les témoins, Il se trouvait avec la victime, avec qui il avait un différend lié à des salaires impayés pour des travaux non déclarés, Les blessures supportées par la victime résultent, selon les constatations médicales, de l’utilisation d’une arme, du type de celle décrite par la victime, Les blessures supportées par le mis en examen pouvaient résulter de l’utilisation d’un objet tranchant.   Crim 19 janvier 2015, n°15-81.038 (escroquerie en bande organisée) : L’ensemble des investigations réalisées par le juge d’instruction, L’audition du mis en examen au cours de sa garde à vue.   Cass. crim 08 juillet 2015, n°15-81.192 (viol et administration de substances nuisibles) : Les aveux du mis en examen devant les enquêteurs, La concordance des déclarations de deux plaignantes, Les nombreuses similitudes relevées dans le mode opératoire de leur agresseur, La désignation formelle par les victimes, car elles le connaissaient de longue date, Le témoignage d’une partie civile qui a déclaré avoir constaté l’état second dans lequel s’était trouvée sa mère le soir des faits alors qu’ils dînaient avec le mis en examen, Le témoignage concernant les confidences d’une victime, Le résultat des expertises toxicologiques réalisées sur les victimes révélant l’administration de zolpidem, Les informations transmises par la caisse primaire d’assurance-maladie révélant que ce produit avait été prescrit au mis en examen à cinq reprises en deux ans.   Cass. crim, 19 mai 2015, n°14-88.306 (viols et agressions sexuelles aggravées) : Les déclarations de la plaignante, Les témoignages de ses parents et de ses frères.   Cass crim. 18 mars 2015 n°14-86. 680 (violation du secret professionnel et du secret de l’instruction) : Le mis en examen a produit dans une instance civile des pièces issues d’une instruction pénale en cours, sans y avoir été autorisé, ni même avoir sollicité une telle autorisation.   Cass. Crim. 25 septembre 2019 n°17-84.515 (blanchiment en bande organisée, opérations de placement, de dissimulation, ou de conversion du produit d’un crime ou d’un délit, organisation internationale pour transférer et blanchir des fonds) : L’existence de comptes bancaires détenus à l’étranger démontrant des transactions, L’interpellation du mis en examen lors d’un transfert de fonds entre banques, Les actes d’instruction réalisés au Brésil, démontrant des faits de corruption, de détournement de fonds publics, de faux, et d’association de malfaiteurs.   Cass. Crim. 5 décembre 2018, n°17-86.122 (faux et usage de faux, escroquerie) : L’existence de courriels démontrant que la mise en examen avait connaissance de l’illégalité de son arbitrage, Ces courriels démontraient également qu’elle avait connaissance de l’interdiction des changements de dates qu’elle apposait sur certains documents, L’étendue de la période concernée, La multiplication de ces courriels, Le ton employé portant instructions, La masse des opérations concernées.   Cass. Crim., 21 octobre 2015, n°15-81.032 (association de malfaiteurs en vue de commettre des dégradations punies d’au moins cinq ans d’emprisonnement, dégradations de biens appartenant au service public, pénétration dans une partie de voie ferrée non ouverte au public) : L’existence d’une vidéo YouTube et de photos et documents sur YouTube et Twitter mettant en scène une personne commettant les faits cités, et participant à l’organisation de ceux-ci, La reconnaissance par la mise en cause d’avoir déjà commis des dégradations sous l’identité de la personne visible dans ces fichiers, Une perquisition au domicile de la mise en cause, laquelle a permis de découvrir des bombes de peinture, des tee-shirts et stickers à l’effigie du groupe organisant les faits.   Cass. Assemblée Plénière, 12 mai 2023, n°22-80.057 (torture, crimes contre l’humanité et complicité de ces crimes) : Des actes passifs de complicité dans le cadre de faits de crimes contre l’humanité peuvent constituer des indices graves ou concordants : Le mis en cause s’était affecté volontairement au service militaire du régime syrien, et avait participé à la répression des civils, Il avait connaissance du nombre de morts causés par les sections qu’il avait rejoint volontairement, et que ces sections étaient armées, Il avait connaissance de leur but et de leurs moyens, et avait expliqué que « son travail était d’arrêter les manifestants et de les frapper avec une matraque», Il avait été félicité par ses supérieurs.   Cass. Crim., 24 mai 2018, n°18-81.202 (infractions à la législation sur les stupéfiants, association de malfaiteurs, infractions à la législation sur les armes et détention de faux documents administratifs) : Les conclusions des surveillances physiques, L’existence d’objets découverts lors de la perquisition au domicile du mis en examen, confirmant les faits : produits stupéfiants, sommes en numéraire, compteuse de billets, feuilles de compte, armes et munitions, L’interception des communications de la ligne téléphonique.   Cass. Crim., 11 décembre 2018, n°18-82.854 (tromperie et pratique commerciale trompeuse, travail dissimulé, complicité d’abus de biens sociaux et recel) : La saisie de documents de comptes-rendus et organigramme, démontrant que le mis en examen était haut placé dans la hiérarchie, Des contrats de scolarité signés par lui pour recruter des élèves, L’implication du mis en examen dans des paiements, La désignation des fonctions par le bulletin de paie, Le conjoint était au courant des pratiques dissimulatrices de l’organisation.   Cass. Crim., 20 décembre 2017, n°17-84.574 (corruption passive et blanchiment aggravé) : Les renseignements financiers contenus dans une note, La mise en place d’un avocat en tant que conseiller juridique personnel alors même que l’organisation internationale comptait un service juridique, Cet avocat se serait procuré la liste d’athlètes russes suspectés de dopage, se serait rendu en Russie, où il aurait tenté de retarder les sanctions liées au dopage en échange de sommes, alors que de son côté, le mis en examen aurait affirmé qu’un accord avait été trouvé pour que la Russie ne poursuive pas les athlètes accusés de dopage, Une somme d’argent a été versée sur le compte de l’avocat par deux fédérations sportives, Les deux fils du mis en examen avaient des positions de pouvoir dans ces deux fédérations internationales, L’existence d’un courrier prouvant qu’un des fils était impliqué dans des négociations, Deux des mis en cause ont confirmé qu’il existait un accord tendant à retarder les sanctions des athlètes dopés.   Cass. Crim., 26 avril 2017, n°17-80.979 (association de malfaiteurs, détention et transport de substances ou produits incendiaires ou explosifs en bande organisée, infraction à la législation sur les armes, détention d’arme malgré interdiction et recel) : L’interpellation en flagrant délit, La présence d’une cagoule sur le mis en examen, La présence d’armes et de bombes artisanales dans son véhicule (volé) et à son domicile, Son rythme de vie démontrant une volonté de se dissimuler.   Cass. Crim., 12 juillet 2016, n°16-82.692 (participation à un groupement ou entente terroriste) : Ils étaient armés, Ils agissaient sous la bannière de l’organisation, L’un d’eux a été photographié tenant une tête décapitée.   Assemblée plénière, 23 novembre 2007, n°05-17.975, n°06-10.039 (association de malfaiteurs, blanchiment en bande organisée) : L’utilisation de serveurs localisés en France, Des échanges interceptés sur des téléphones ayant une messagerie cryptée, La position hiérarchique très élevée du mis en examen, lui permettant d’effectuer les opérations litigieuses, L’identification du mis en examen comme collectionneur de liquidités, La présence de la compagne du mis en examen pour échanger une somme en bitcoins auprès d’un acheteur, Le versement de sommes suspectes sur le compte du mis en examen.   Cass. Crim., 13 avril 2005, n°05-80.668 (homicide involontaire) : Le rapport d’expertise judiciaire constatant des problèmes dans la prise en charge de la victime, Le rapport de docteurs constatant des « dysfonctionnements dans l’environnement opératoire», Le rapport d’expertise médicale constatant que la septicémie était une cause possible de décès (alors qu’une infection bactérienne, selon un autre rapport, aurait été la cause), Le rapport collectif et le rapport de témoins.   Cass. Crim., 22 novembre 2011, n°11-84.314 (viols incestueux et agressions sexuelles incestueuses aggravées) : Les déclarations de l’enfant, qui à elles seules ne caractérisent pas l’infraction, Les résultats d’une expertise gynécologique concluant à une compatibilité de l’hymen avec une pénétration vaginale.   Cass. Crim., 2 mars 2004, n°03-87.667 (infraction à la législation sur les stupéfiants) : La découverte d’une forte quantité de cocaïne dans le domicile du mis en examen, La découverte dans son domicile de caféine, d’argent en liquide, de références téléphoniques, de téléphones portables et de puces électroniques.   En revanche, ne constituent pas des indices graves ou concordants : Cass. crim 16 mars 2021, n°20-87.092 et Cass.crim 01 juin 2021 n°21-81.837 : La seule existence de raisons plausibles de soupçonner que la personne a commis les infractions reprochées ne permet pas de déduire l’existence d’indices graves ou concordants de sa participation à ces faits.   Cass. crim, 28 juin 2016, n° 15-86.946 (abandon matériel ou moral de mineurs et homicide involontaire) : Rien ne permettait de penser que le père aurait pu se réveiller plus tôt, s’il n’avait pas été alcoolisé, et rien ne permettait d’affirmer qu’une personne, dans un état normal, endormie dans son premier sommeil dans une chambre dont la porte était fermée, aurait réalisé plus tôt qu’un incendie s’était déclaré dans une chambre également fermée, située de l’autre côté du couloir.   Cass. crim 1er octobre 2003, n°03-82.909 (homicide involontaire) : Il ne pouvait être prouvé que la maladie des victimes trouvait son origine dans la consommation de viande servie dans les restaurants soupçonnés. D’autres sources alimentaires des victimes pouvaient en être à l’origine.   Cass. crim 14 avril 2015, n°14-85.335 et Cass. crim 11 décembre 2018 n°17-85.871 : (homicides et blessures involontaire, affaire de l’amiante) : Aucune négligence des prévenus n’a pu être démontrée. Ces derniers ne pouvaient, compte tenu des données scientifiques de l’époque, mesurer le risque d’une particulière gravité auquel ils exposaient les victimes.   Cass. crim., 19 juin 2019, n°18-85.533 (agression, violences commises avec usage d’une arme par destination, et menaces de mort) : La location prolongée de la voiture, le litige qui opposait les deux parties, et la présence du prévenu sur le lieu des faits le jour des faits ne constituent pas des indices suffisants pour le mettre en examen.   Cass. Crim., 27 novembre 2018, n°18-83.009 (enregistrement ou conservation des données à caractère personnel sensibles sans l’accord de l’intéressé) : La simple consultation de données relatives aux confessions des élèves dans sa commune, afin de parler de ces statistiques à la télévision, ne suffit pas pour incriminer un maire des chefs susvisés.   Cass. Crim., 13 septembre 2022, n°22-83.895 (agression sexuelle) : A l’occasion d’un bain naturiste, le mis en cause nu aurait touché l’entrejambe de la victime, également nue, avec un glaçon, et se collait à lui, avec le sexe en érection, sans le pénétrer. La victime, qui avait déjà refusé les attouchements, a dû se débattre pour s’éloigner. Ces faits, s’ils peuvent constituer une atteinte inappropriée, ne constituent pas des indices graves ou concordants d’une tentative de viol.   Comment contrôler la validité de la mise en examen ? Les indices graves ou concordants sont nécessaires à la mise en examen, à peine de nullité. A défaut, les mises en examen sont injustifiées et arbitraires et doivent faire l’objet d’un contrôle en vue de leur nullité. Ainsi, si le mis en examen souhaite contester l’existence de ces indices, il peut saisir la chambre de l’instruction auprès de la Cour d’appel. Dans un arrêt du 27 novembre 2018 (Cass. crim 27 nov. 2018, n°18-83.009), les juges de la Haute Cour ont considéré que la chambre de l’instruction doit se borner à vérifier s’il existe des indices graves ou concordants rendant vraisemblable que la personne ait pu participer, comme auteur ou comme complice à la commission de l’infraction. Par ailleurs, dans un arrêt rendu le 14 avril 2015, la Cour de cassation a précisé qu’il appartenait uniquement à la chambre de l’instruction de vérifier s’il existait des indices graves ou concordants. Il ne lui appartient pas de rechercher s’il existait un lien de causalité certain à ce stade de la procédure. Lorsqu’elle est saisie d’une demande en nullité, la chambre de l’instruction a uniquement pour rôle de rechercher, de manière objective, s’il existe des indices graves ou concordants permettant de constater l’implication du mis en examen dans la commission de l’infraction. François Cordier a rappelé la problématique principale de ce contentieux en précisant que « le contentieux ne peut porter que sur les indices graves ou concordants et non pas l’existence ou l’absence de charges ». Enfin, il convient de préciser que l’absence d’indices graves ou concordants n’est pas le seul élément pouvant entraîner la nullité d’une mise en examen. En effet, dans une décision rendue le 12 septembre 2018 (Cass. crim 12 sept. 2018, n°17-87.510), la Cour de cassation a jugé que l’absence d’un élément constitutif de l’infraction peut entrainer la nullité de la mise en examen, tout comme l’application du principe de la non-rétroactivité de la loi pénale dans le temps. En conclusion, pour qu’un individu soit mis en examen, il est nécessaire qu’il existe à son encontre des indices graves ou concordants rendant vraisemblable qu’il ait pu participer, comme auteur ou comme complice, à la commission de l’infraction. En cas de contestation, une requête doit être formée devant la chambre de l’instruction qui devra uniquement vérifier, de manière objective, s’il existe de tels indices.
La Cour de cassation, dans un arrêt du 23 janvier 2018, a rappelé l’obligation d’impartialité d’un expert judiciaire   Cour de cassation, Chambre criminelle, 23 janvier 2018, 16-82.523 Selon le principe de la présomption d’innocence, toute personne suspectée ou poursuivie reste innocente tant que sa culpabilité n’a pas été établie (article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme). Ce principe fait obstacle à toute affirmation de la culpabilité du prévenu de manière prématurée, notamment de la part d’un expert judiciaire. L’expert doit en effet être impartial et répondre uniquement aux questions qui lui sont posées par l’autorité judiciaire, conformément aux dispositions de cet article 6 de la Convention. Ce principe a encore été rappelé par la Cour de cassation le 23 janvier 2018. Toutefois, la question est de savoir si le défaut d’impartialité de l’expert judiciaire a pour conséquence la nullité de l’expertise. En l’espèce, l’expert judiciaire avait notamment pour mission de « faire toutes observations utiles à la manifestation de la vérité ». Le rapport d’expertise comprenait des observations sur la culpabilité du prévenu, l’expert expliquait notamment que ce dernier avait « tenté » de lui « faire comprendre qu’il n’y était pour rien », ou encore qu’ « il ne fait aucun doute que M. X…, au prétexte de « vouloir faire du Voltaire » a eu des agissements répétés qui ont eu pour effet une dégradation des conditions de travail. Cette dégradation a porté atteinte aux droits de Mme A… ainsi qu’à sa dignité ». Les assertions malheureuses démontraient une partialité éventuelle de de cet expert. Le prévenu déposait en conséquence une requête en nullité, soulevant que le principe d’impartialité de l’article 6 de la Convention s’appliquait également à l’expert, de sorte que la violation de ce principe devait entrainer la nullité des rapports d’expertise. La Cour d’appel rejetait ce moyen de nullité au motif que les questions posées à l’expert et ses réponses étaient en relation avec la mission qui lui était confiée, à savoir l’examen psychologique du prévenu. La Cour de cassation a au contraire jugé que par ces réponses, l’expert affirmait en réalité explicitement la culpabilité du prévenu. Ces faits étaient de nature à porter atteinte au principe de la présomption d’innocence et de l’obligation pour l’expert d’être impartial, ayant pour conséquence la nullité de cette expertise. Il convient de rappeler que la nullité d’un acte entraine la nullité des actes subséquents, de sorte que les actes de procédure découlant directement d’un rapport d’expertise annulé doivent à leur tour être annulés.
Relaxe dans une affaire de violences involontaires en raison des nullités Arrêt de la Cour d’Appel de Paris  Notre client contrôlé positif à la consommation de produit stupéfiant était poursuivi pour violences involontaires par imprudence avec la circonstance aggravante de la consommation de produit stupéfiant. Il a été relaxé par la Cour d’Appel de Paris en raison des nullités soulevées par notre cabinet.Arrêt de la Cour d’Appel de Paris
Le défaut d’accès à l’intégralité des pièces de la procédure constitue une violation des droits de la défense, entrainant la nullité de la procédure.   Le droit à un procès équitable et à préparer sa défense Toute personne citée à comparaitre devant un tribunal dispose du droit à un procès équitable, comme cela est prévu par l’article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des libertés fondamentales et des droits de l’Homme : « Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle ».   Ce droit à un procès équitable comprend plusieurs composantes, et notamment le respect des droits de la défense : « 3. Tout accusé a droit notamment à : a) être informé, dans le plus court délai, dans une langue qu’il comprend et d’une manière détaillée, de la nature et de la cause de l’accusation portée contre lui ; b) disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense ; c) se défendre lui-même ou avoir l’assistance d’un défenseur de son choix et, s’il n’a pas les moyens de rémunérer un défenseur, pouvoir être assisté gratuitement par un avocat d’office, lorsque les intérêts de la justice l’exigent ; d) interroger ou faire interroger les témoins à charge et obtenir la convocation et l’interrogation des témoins à décharge dans les mêmes conditions que les témoins à charge ; e) se faire assister gratuitement d’un interprète, s’il ne comprend pas ou ne parle pas la langue employée à l’audience». Il ressort de cet article l’importance de permettre à toute personne de pouvoir préparer sa défense, afin de bénéficier d’un procès équitable.   L’accès à la procédure pénale : composante des droits de la défense En droit français, le droit à préparer sa défense passe notamment par le droit à obtenir une copie de la procédure, comprenant les éléments à charge et à décharge contre le prévenu. Il est en effet essentiel que le prévenu connaisse les éléments qui lui sont reprochés afin de pouvoir s’en expliquer, ou les contredire avec des éléments de preuve contraires. L’article R.155 du Code de procédure pénale prévoit en ce sens que tout prévenu ou accusé peut obtenir une copie de la procédure dans son intégralité pour l’exercice des droits de la défense : « En matière criminelle, correctionnelle et de police, hors les cas prévus par l’article 114, il peut être délivré aux parties : (…) 2° Avec l’autorisation du procureur de la République ou du procureur général selon le cas, expédition de toutes les autres pièces de la procédure, notamment, en ce qui concerne les pièces d’une enquête terminée par une décision de classement sans suite. Toutefois, cette autorisation n’est pas requise lorsque des poursuites ont été engagées ou qu’il est fait application des articles 41-1 à 41-3 et que la copie est demandée pour l’exercice des droits de la défense ou des droits de la partie civile ».   Il en ressort qu’un prévenu cité à comparaitre devant un tribunal peut demander une copie de la procédure en vue de préparer l’audience et sa défense, et doit obtenir l’intégralité de la procédure, c’est-à-dire : -les actes d’enquêtes, -les éventuelles annexes. Pour exemple, si la procédure comporte un CD avec les vidéosurveillances sur lesquelles se sont fondés les enquêteurs, le prévenu doit pouvoir en obtenir une copie. La question se pose de connaitre les conséquences d’un défaut d’accès à ces pièces.   Le défaut d’accès à l’intégralité de la procédure entraine la nullité de ladite procédure La jurisprudence a précisé les conséquences d’un défaut d’accès à l’intégralité de la procédure, à savoir la nullité de la procédure. En effet, par deux arrêts de 1996, la Cour de cassation a pris pour fondement de ses décisions le principe suivant : « Qu’il s’ensuit que toute personne ayant la qualité de prévenu ou d’accusé est en droit d’obtenir, en vertu de l’article 6, § 3, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, non pas la communication directe des pièces de la procédure, mais la délivrance, à ses frais, le cas échéant par l’intermédiaire de son avocat, de la copie des pièces du dossier soumis à la juridiction devant laquelle elle est appelée à comparaître ». La Cour juge dès lors que les exceptions de nullité de la procédure fondées sur le défaut de communication des pièces du dossier doivent être accueillies : « Mais attendu qu’en prononçant ainsi, et alors que les dispositions réglementaires de l’article R. 155.2°, du Code de procédure pénale, soumettant à autorisation du ministère public la délivrance aux parties de copie de pièces de la procédure, ne sauraient faire obstacle aux droits de la défense, la cour d’appel a méconnu les textes et principes ci-dessus rappelés » (Cass.crim., 12 juin 1996, n°95-82.735) ; (Cass.crim., 2 octobre 1996, n°95-82.290). Cette jurisprudence a été réitérée le 6 janvier 2010 : « Mais attendu qu’en statuant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si le prévenu avait pu obtenir la copie de l’intégralité des pièces du dossier soumis à la juridiction du second degré, et notamment de celles au vu desquelles le ministère public avait conclu à l’irrecevabilité de l’opposition, la cour d’appel n’a pas justifié sa décision » (Cass.crim., 6 janvier 2010, n°09-83.897).   Il convient dès lors, en cas de défaut de transmission de la copie de l’intégralité de la procédure qui a été sollicitée, de soulever une exception de nullité sur le fondement de ces principes. Les termes « intégralité » n’est pas anodin et incite à notre sens à une application littérale de cette règle issue de la jurisprudence.
Un rappel par la Cour de cassation des limites de la saisine du juge d’instruction, et des recours possibles par le mis en examen   Le 8 juin 2017, la chambre criminelle de la Cour de cassation a rappelé les limites de la saisine du Juge d’instruction, et a rappelé que le mis en examen a qualité pour contester la régularité des actes accomplis par le Juge d’instruction en méconnaissance de ces limites, y compris lorsque les actes ne portent pas sur sa personne directement. Cour de cassation, Chambre criminelle, 8 juin 2017, 17-80.709 Il convient de rappeler que le Juge d’instruction, enquêtant dans le cadre d’une instruction judiciaire, est limité dans ses actions par sa saisine. Conformément à l’article 80 du Code de procédure pénale, le Juge d’instruction ne peut informer que sur réquisitoire introductif du procureur de la République. Ce réquisitoire a pour objet de délimiter les faits dont est saisi le Juge d’instruction. Conformément au même article, en cas de découverte de nouveaux faits, le Juge d’instruction ne peut informer de son propre chef mais doit les transmettre au procureur de la République. Ce dernier pourra prendre un réquisitoire supplétif, pour étendre la saisine du Juge d’instruction, ou prendre un réquisitoire introductif distinct en vue de l’ouverture d’une information judiciaire distincte. Le Juge d’instruction peut toutefois opérer des vérifications sommaires pour établir la vraisemblance de ces nouveaux faits. Dans le cas d’espèce, le Juge d’instruction était saisi de faits de viols aggravés mais découvrait de potentiels faits nouveaux d’enlèvement et de tentative d’assassinat. Il entendait le fils du mis en examen en qualité de témoin, pour obtenir plus d’informations sur ces faits. Il procédait toutefois à une audition complète du témoin qui incriminait le mis en examen, et hors présence d’un avocat. Sur le fondement de ces nouveaux faits et de cette audition, le Juge d’instruction transmettait le dossier au procureur de la République qui délivrait des réquisitions supplétives. Le Juge d’instruction poursuivait dès lors le mis en examen pour ces nouveaux faits. Ce dernier déposait une requête en nullité pour irrégularité de l’audition du témoin et des actes subséquents. La chambre de l’instruction rejetait sa requête au motif qu’il n’avait pas qualité pour agir contre cette audition. La Cour de cassation a infirmé cette argumentation en rappelant le cadre de la saisine du Juge d’instruction, mais plus encore en rappelant que le mis en examen a qualité pour contester tout acte du Juge d’instruction méconnaissant les limites de sa saisine. En conclusion, le mis en examen n’a pas besoin d’être visé par un acte du Juge d’instruction pour en contester la validité, dès lors que cet acte est pris en méconnaissance des limites de la saisine du Juge.
Cass.crim., 19 septembre 2017, n°17-81.016   Seule la chambre de l’instruction de la Cour d’appel est habilitée à examiner la régularité des procédures et peut ainsi prononcer leur nullité en tout ou partie (article 206 du Code de procédure pénale).   La Cour de cassation, dans un arrêt du 19 septembre 2017, a été amenée à rappeler ce principe.   En l’espèce, un individu était poursuivi dans le cadre d’une procédure criminelle et était entendu par le Juge d’instruction lors d’un interrogatoire de première comparution à l’issue duquel il était mis en examen. En matière criminelle, l’article 116-1 du Code procédure pénale impose que ces interrogatoires fassent l’objet d’un enregistrement. Or, l’enregistrement n’avait pas été réalisé. Ainsi, immédiatement après l’interrogatoire de première comparution, le Juge d’instruction a procédé à un second interrogatoire de première comparution, avec enregistrement. Le mis en examen refusait de faire des déclarations dans le cadre de ce second interrogatoire. Le mis en examen et son conseil déposaient une requête en nullité des deux interrogatoires ainsi que de la décision de placement en détention provisoire subséquente, au motif que le second interrogatoire avait pour objectif de se substituer au premier interrogatoire, car le Juge le considérait entaché de nullité. La Chambre d’instruction de la Cour d’appel de PARIS rejetait le moyen de nullité au motif que le Juge d’instruction n’a pas cherché à substituer le second interrogatoire au premier mais a réalisé une simple opération matérielle. Elle considérait également que l’immédiateté et la continuité des deux interrogatoires, reportés sur des procès-verbaux successifs, les rendait indivisibles. Le second interrogatoire était donc en réalité une copie du premier interrogatoire.   La Cour de cassation en a jugé autrement. En effet, elle a cassé l’arrêt de la chambre de l’instruction au motif que seule cette chambre peut examiner la régularité des procédures. Ainsi, le juge d’instruction qui réalise un acte, estime qu’il est entaché de nullité et le réalise de nouveau, empiète sur les attributions de la Chambre de l’instruction et commet un excès de pouvoir.  
L’absence d’identification de la personne ayant accès au traitement des systèmes LAPI et FOVES est-elle susceptible d’annuler les procès-verbaux relatifs aux informations délivrées par ce traitement ? Arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation en date du 5 avril 2022, n°21-84.078 Le système de Lecture Automatique des Plaques d’Immatriculation (LAPI) est un système de reconnaissance optique des caractères des plaques d’immatriculation grâce à des caméras. Le Fichier des Objets et Véhicules volés (FOVeS) est quant à lui une base de données recensant les objets ou véhicules signalés ou volés. Ces deux dispositifs permettent aux services de police, de gendarmerie et des douanes de comparer des plaques d’immatriculation avec les véhicules signalés et de faciliter ainsi la constatation d’infractions, comme le prévoit l’article L.233-1 du Code de la sécurité intérieure. La consultation des traitements de données ainsi récoltées n’est toutefois pas autorisée pour tous les agents de ces services. L’article L.233-2 du Code de la sécurité intérieure prévoit que  seuls « les agents individuellement désignés et dûment habilités des services de police et de gendarmerie nationales spécialement chargés de ces missions peuvent avoir accès à ces traitements ». La question dès lors posée par cet arrêt est de savoir si l’absence d’identification de la personne ayant accédé à ce traitement est susceptible d’annuler les procès-verbaux relatifs aux informations délivrées par ce traitement ? La Chambre criminelle de la Cour de cassation a jugé qu’il importe peu que l’agent ayant recueilli les données issues du traitement soit identifié, car il n’a pas besoin d’habilitation spéciale pour les détenir. L’identité devant apparaitre sur ces procès-verbaux est celle des agents habilités à accéder aux données car il doit s’agir d’un agent dûment habilité à le faire. Dès lors, les procès-verbaux ne mentionnant pas cette identité doivent être annulés.
Qu’est-ce qu’un acte subséquent au sens de la procédure pénale dans le cadre de l’annulation d’un procès-verbal ? La procédure pénale prévoit des règles concernant les actes y figurant, lesquelles, si elles ne sont pas respectées, peuvent faire l’objet d’une annulation des actes visés par les juges. Cette nullité ne porte toutefois pas seulement sur l’acte lui-même mais porte également sur les actes dits subséquents. Il n’existe pas de définition légale de cet acte subséquent, rendant son identification difficile pour les avocats. La question est donc celle de savoir ce qu’est un acte subséquent ? Cour de Cassation, Chambre criminelle, du 4 juin 1969, 69-91.071 L’acte subséquent est défini par cet arrêt comme un acte concomitant ou ultérieur à l’acte annulé, excluant ainsi tous les actes antérieurs à l’acte annulé. L’acte subséquent est également l’acte ayant un lien de causalité direct avec l’acte annulé.   Plusieurs éléments vont permettre d’identifier ce lien de causalité : -l’acte annulé était le préalable nécessaire aux actes subséquents, -les actes subséquents sont les actes faisant référence à l’acte annulé, -l’acte annulé doit avoir été le support nécessaire et exclusif des actes subséquents.   L’acte subséquent est ainsi l’acte concomitant ou postérieur à l’acte annulé, faisant référence à cet acte car il en découle directement, il n’existe que parce que l’acte annulé a existé.   Références : Cour de Cassation, Chambre criminelle, du 8 décembre 1998, 98-85.683 Cour de Cassation, Chambre criminelle, du 28 mars 2000, 00-80.090 Cour de Cassation, Chambre criminelle, du 19 avril 2000, 00-80.357 Cour de cassation, criminelle, Chambre criminelle, 21 juin 2016, 16-80.126
Dans le cas où un expert non inscrit sur les listes nationales est désigné par un juge d’instruction, celui-ci doit motiver cette décision, selon la Cour de cassation   Cour de cassation, Chambre criminelle, 13 novembre 2008, 08-81.446 Par un arrêt du 13 novembre 2008, la chambre criminelle de la Cour de cassation a rappelé le formalisme que doivent respecter les juges d’instruction lors de la désignation d’un expert. En effet, l’article 157 du Code de procédure pénale prévoit que : « Les experts sont choisis parmi les personnes physiques ou morales qui figurent sur la liste nationale dressée par la Cour de cassation ou sur une des listes dressées par les cours d’appel dans les conditions prévues par la loi n° 71-498 du 29 juin 1971 relative aux experts judiciaires. A titre exceptionnel, les juridictions peuvent, par décision motivée, choisir des experts ne figurant sur aucune de ces listes. » Se pose dès lors la question de la motivation nécessaire à la désignation d’un expert non inscrit sur ces listes. En l’espèce, le juge d’instruction avait désigné un expert inscrit sur les listes pour réaliser une mission. Les parties civiles déposaient par la suite une requête aux fins de complément d’expertise. Or l’expert n’était, depuis sa première mission, plus inscrit sur les listes mais était devenu expert honoraire. Le juge d’instruction le désignait malgré tout. La chambre de l’instruction, saisie d’une requête en nullité, jugeait que ce choix était motivé par deux éléments suffisants selon elle : Ayant réalisé la première mission d’expertise, il avait une très bonne connaissance du dossier ; Il était parfaitement qualifié pour remplir sa mission. La Cour de cassation a cependant cassé l’arrêt de la chambre de l’instruction au motif que l’ordonnance de désignation de l’expert ne comportait aucune motivation. En conclusion, le juge d’instruction doit désigner un expert inscrit sur les listes prévues par l’article 157 du Code de procédure pénale, ou motiver sa décision d’en désigner un non inscrit autrement que par sa compétence et sa connaissance du dossier.
Comment un prévenu peut-il former opposition à l’ordonnance pénale proposée par le Procureur de la République ?   Qu’est-ce qu’une ordonnance pénale ? L’ordonnance pénale est une procédure simplifiée de jugement. Le Procureur de la République, s’il juge les faits simples et établis, qu’il détient toutes les informations nécessaires à l’établissement d’une peine et que les faits sont d’une faible gravité, peut recourir à cette procédure. Cette procédure peut porter sur des délits ou des contraventions, mais ne peut en aucun cas porter sur un crime. L’article 495 du Code de procédure pénale liste les délits concernés, notamment les délits au Code de la route, le vol, la dégradation ou détérioration d’un bien public ou privé, ou encore l’usage de stupéfiants. Cette procédure n’est cependant pas applicable aux mineurs, en cas de citation directe, en cas de récidive légale, et dans les cas où l’infraction a été commise en même temps qu’un délit ou une contravention pour lesquels la procédure simplifiée n’est pas applicable. Il convient de noter qu’une peine d’emprisonnement ne pourra pas être prononcée dans le cadre de l’ordonnance pénale. Seul le Procureur de la République peut prendre la décision de recourir à une ordonnance pénale, puis transmet le dossier et ses réquisitions au Président du Tribunal. Le Président décide alors seul et hors la présence du prévenu de la relaxe ou de la condamnation, et de la peine. Contrairement à une audience devant le Tribunal correctionnel, il n’y a pas d’audience publique, pas de débat contradictoire, et le prévenu ne pourra répondre aux questions ou faire des observations au soutien de ses intérêts.   Quel recours contre une ordonnance pénale ? L’ordonnance pénale est signifiée au prévenu par lettre recommandée avec avis de réception. Elle peut également être signifiée à l’oral. Le prévenu a un délai de 30 jours en cas de contravention (article R43 du Code de procédure pénale) ou 45 jours en cas de délit (article 495-3 du Code de procédure pénale) pour former opposition à l’ordonnance pénale. Ce délai court à compter de l’envoi de la lettre recommandée, ou de la connaissance de l’ordonnance pénale dans le cas où le prévenu n’aurait pas reçu la lettre. Le prévenu peut faire opposition par lettre recommandée au greffier en chef, ou par déclaration au greffier en chef. Une fois le délai d’opposition expiré et en cas d’absence de recours, l’ordonnance est exécutable.   Le prévenu peut-il faire opposition par le biais de son avocat ? Cour de cassation – Chambre criminelle, 4 avril 2023 / n° 22-86.375 La Cour de cassation a rappelé le 4 avril 2023 que l’opposition à une ordonnance pénale peut être réalisée par le prévenu lui-même, par son avocat ou par fondé de pouvoir spécial. La Cour d’appel avait considéré que cela signifiait que l’avocat devait bénéficier d’un pouvoir spécial pour former opposition à une ordonnance pénale. La Cour de cassation a cassé cet arrêt de la Cour d’appel au motif que l’opposition par avocat et l’opposition par fondé de pouvoir spécial sont des notions différentes. De sorte que l’avocat n’a pas à justifier d’un pouvoir spécial pour former opposition.
Le renforcement des sanctions de l’outrage sexiste depuis le 1er avril 2023   La loi n°2018-703 du 3 août 2018 renforçant la lutte contre les violences sexuelles et sexistes a créé l’outrage sexiste à l’article 621-1 du Code pénal. La loi n° 2023-22 du 24 janvier 2023 d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur a abrogé cet article pour créer le nouvel article 222-33-1-1 qui entrera en vigueur le 01 avril 2023. L’outrage sexiste est le fait « d’imposer à une personne tout propos ou comportement à connotation sexuelle ou sexiste qui soit porte atteinte à sa dignité en raison de son caractère dégradant ou humiliant, soit créé à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante ». Définition de l’infraction Cette définition est similaire à celle du harcèlement sexuel mais pour caractériser l’outrage sexiste, il n’est pas nécessaire qu’il y ait une répétition des propos ou des comportements à connotation sexuelle. La circulaire du 3 septembre 2018 relative à la présentation de la loi du 3 août 2018 précise que l’outrage sexiste est une contravention destinée à réprimer le phénomène de harcèlement de rue. Sa création a pour objectif de combler un vide juridique en incriminant des comportements qui échappaient à toute sanction pénale. 2. Situation relevant de cette infraction La circulaire a ensuite dressé une liste de situations pouvant relever de la qualification d’outrage sexiste : des propositions sexuelles, certaines attitudes non verbales telles que des gestes imitant ou suggérant un acte sexuel, des sifflements, des bruitages obscènes ou encore des commentaires dégradants sur l’attitude vestimentaire ou l’apparence physique de la victime que ces faits se produisent dans un lieu public mais également dans un lieu privé. 3. Sanction  L’ancien article 621-1 du Code pénal prévoyait que l’infraction était punie d’une amende prévue pour les contraventions de la 4ème classe d’un montant maximal de 750 euros. En revanche, elle était réprimée d’une amende prévue pour les contraventions de la 5ème classe dont le montant peut atteindre 1 500 euros lorsqu’une circonstance aggravante était caractérisée (ex : infraction commise par une personne qui abuse de l’autorité que lui confèrent ses fonctions, sur un mineur de quinze ans, par plusieurs personnes agissant en qualité d’auteur ou de complice…). La loi du 24 janvier 2023 a abrogé cet article dans l’objectif de sanctionner plus sévèrement cette infraction en raison d’une persistance de ces faits dans l’espace public. Ainsi, le nouvel article 222-33-1-1 concerne uniquement l’outrage sexiste aggravé qui sera intégré dans le Code pénal après le viol, les agressions sexuelles et le harcèlement sexuel. L’outrage sexiste aggravé sera désormais constitutif d’un délit puni d’une amende de 3 750 euros d’amende. L’auteur de cette infraction s’exposera également à des peines complémentaires prévues à l’article 222-48-5 du Code pénal. En ce qui concerne l’outrage sexiste simple, celui-ci sera créé par décret et une amende pour les contraventions de 5ème classe est prévue. 4. Similitude avec d’autres infractions La difficulté principale de cette infraction est sa similitude avec des infractions sexuelles qui existent déjà dans notre ordre juridique et de manière subséquente, l’expose à un risque de concours de qualification. Pour prévenir ce risque, le législateur a prévu au sein de l’article relatif à l’outrage sexiste que celui-ci est applicable uniquement lorsque les faits ne relèvent pas de la qualification de violences n’ayant entraîné aucune ITT ou une ITT inférieure à 8 jours (222-13), d’exhibition sexuelle (222-32), de harcèlement sexuel (222-33), de harcèlement moral (222-33-2-2) et de harcèlement scolaire (222-33-2-3).
L’outrage sexiste ou sexuel a été créé par la loi du 3 aout 2018 renforçant la lutte contre les violences sexuelles ou sexistes. Cette infraction a pour objet de réprimer des comportements à caractère sexuel ou sexiste ayant lieu une unique fois. En effet, lors de la présentation du projet de loi, cette infraction était ainsi présentée : « la définition de l’outrage sexiste est directement inspirée de celle du délit de harcèlement sexuel, mais sans l’exigence de répétition des faits, qui interdit actuellement de réprimer des actes commis de façon isolée » (rapport n°778). L’outrage sexuel ou sexiste correspond notamment au harcèlement de rue, des actes commis de manière isolée mais ayant un impact sur les victimes de ces faits. Un nouveau délit a par ailleurs été créé par la loi du 24 janvier 2023 : le délit d’outrage sexuel ou sexiste aggravé.   Définition L’outrage sexiste ou sexuel est défini comme le fait d’imposer à une personne tout propos ou comportement à connotation sexuelle ou sexiste. De plus, ces propos doivent avoir une conséquence : –porter atteinte à la dignité de la personne visée en raison de son caractère dégradant ou humiliant, -ou créer à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante.   Sont notamment considérés comme des outrages sexistes ou sexuels : -les propositions sexuelles à un inconnu, -les propos dégradants sur le genre féminin, -le fait de siffler une inconnue dans la rue en raison de son genre ou de sa tenue, -des propos déplacés sur la tenue d’une personne à connotation sexiste ou sexuelle.   Ces faits peuvent avoir lieu en n’importe quelle occasion et n’importe quel lieu.     Outrage sexiste ou sexuel simple : une contravention L’article R.625-8-3 du Code pénal prévoit l’outrage sexuel ou sexiste simple c’est-à-dire un acte isolé sans forme d’aggravation particulière. Dans ces cas, une contravention de 5ème classe est prévue : l’amende peut atteindre 1.500 euros. Il s’agit du degré de contravention le plus élevé. De plus, toute personne reconnue coupable d’outrage sexuel ou sexiste peut subir les peines complémentaires de travail d’intérêt général jusque 120 heures et de participation à un stage de sensibilisation.   Outrage aggravé : un délit Avec la loi du 24 janvier 2023, le législateur a souhaité donner plus d’importance à cette infraction en érigeant en délit l’outrage sexuel ou sexiste aggravé. Ainsi, selon l’article 222-33-1-1 du Code pénal, est concerné l’outrage commis : -par une personne abusant de son autorité liée à ses fonctions, -sur un mineur, quel que soit son âge, -sur une personne vulnérable, -sur une personne en situation de dépendance, -par plusieurs auteurs ou complices, -dans les transports en communs et les transports publics particuliers (taxi, VTC), -en raison de l’orientation sexuelle ou l’identité de genre, vraie ou supposée, -en état de récidive.   Dans ce cadre, l’outrage est puni d’une amende de 3.750 euros.   L’outrage sexiste ou sexuel dans la jurisprudence La jurisprudence comprend quelques exemples d’outrages sexuels ou sexistes dans la rue ou sur le lieu de travail. A titre d’exemple, un homme a été condamné pour agression sexuelle pour avoir porté une claque sur les fesses de la victime, et pour outrage sexuel pour lui avoir dit qu’elle était une « pute » et « t’as des gros seins » dans un bus (https://www.lemonde.fr/police-justice/article/2018/09/25/premiere-condamnation-pour-outrage-sexiste_5359937_1653578.html). Cette infraction a également été retenue contre un moniteur et gérant d’une autoécole qui avait des propos à connotation sexuelle et sexiste tel que « Je me serais bien fait une blondinette », « il y a des claques sur le cul qui se perdent », et insistait pour que ses élèves portent des jupes (https://www.sudouest.fr/pyrenees-atlantiques/pau/bearn-un-patron-d-auto-ecole-condamne-pour-ses-propos-deplaces-envers-sa-salariee-et-une-eleve-12286733.php). Enfin, le fait de tenir des propos déplacés à connotation sexuelle, de tenter d’obtenir des faveurs sexuelles de ses collègues et de tenter d’embrasser une collègue a pu être qualifié d’outrage sexuel par un tribunal de police (Cour d’appel de DOUAI, 30 juin 2023, n°21/01239). Il s’agit cependant d’une infraction récente et difficile à appliquer, les faits étant généralement commis hors la présence de forces de l’ordre et avec peu d’éléments de preuve pour les victimes.
Les changements apportés par la loi du 22 décembre 2021   Avant l’entrée en vigueur de la loi n° 2021-1729 du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l’institution judiciaire, chaque personne placée sous écrou pouvait bénéficier d’un crédit de réduction de peine et d’une réduction supplémentaire de peine. Cette loi a supprimé ces réductions de peine. Désormais, le juge de l’application des peines peut accorder une réduction de peine uniquement en cas de bonne conduite et d’efforts sérieux de réinsertion. Néanmoins, les nouvelles dispositions insérées par la loi ne sont applicables qu’aux personnes placées sous écrou à compter du 1er janvier 2023 quelle que soit la date de commission de l’infraction. Les personnes placées sous écrou avant cette date demeurent donc soumises à l’ancien régime du code de procédure pénale dans sa rédaction antérieure à la présente loi.   Le régime applicable aux personnes placées sous écrou avant le 1er janvier 2023 :   Le crédit de réduction de peine : L’ancien article 721 du Code de procédure pénale prévoyait que chaque condamné bénéficiait de manière automatique d’un crédit de réduction de peine. Néanmoins, celui-ci pouvait être retiré en cas de mauvaise conduite.   Comment était calculée la réduction de peine ? 3 mois : pour la première année 2 mois : pour les années suivantes 7 jours : pour la partie de peine inférieure à une année pleine ou pour une peine de moins de 1 ans Pour les peines inférieures à 1 an, le total de la réduction de peine ne pouvait excéder 2 mois. Exemple : un individu a été condamné à 5 ans d’emprisonnement. 3 (1ère année) x 2 (2ème année) x 2 (3ème année) x 2 (4ème année) x 2 (5ème année) = 11 La personne pourra donc bénéficier d’une réduction de peine de 11 mois.   La réduction supplémentaire de la peine L’ancien article 721-1 du Code de procédure pénale prévoyait qu’une réduction supplémentaire de la peine pouvait être accordée aux condamnés qui manifestent des efforts sérieux de réadaptation sociale (ex : passer avec succès un examen scolaire, universitaire ou professionnel, justifier de progrès réels dans le cadre d’un enseignement ou d’une formation …). A la différence du crédit de réduction de peine, la réduction supplémentaire de peine n’était pas automatique mais était accordée par le juge de l’application des peines.   Comment était calculée la réduction supplémentaire de la peine ? L’ancien article 721-1 du Code de procédure pénale prévoyait que cette réduction supplémentaire de peine ne pouvait excéder trois mois par année d’incarcération ou sept jours par mois lorsque la durée d’incarcération restant à subir était inférieure à une année.   Le régime applicable aux personnes placées sous écrou à compter du 1er janvier 2023 : Le nouvel article 721 du Code de procédure pénale dispose que « une réduction de peine peut être accordée par le juge de l’application des peines, après avis de la commission de l’application des peines, aux condamnés exécutant une ou plusieurs peines privatives de liberté qui ont donné des preuves suffisantes de bonne conduite et qui ont manifesté des efforts sérieux de réinsertion ». L’octroi de cette réduction de peine n’est donc plus automatique dès le placement sous écrou de la personne condamnée. En ce qui concerne le calcul de cette réduction de peine, elle ne peut excéder 6 mois par année d’incarcération et quatorze jours par mois pour une durée d’incarcération inférieure à un an.   Comment sont appréciés la bonne conduite et les efforts sérieux de réinsertion ? Le législateur a précisé que les preuves suffisantes de bonne conduite sont appréciées en tenant compte notamment de l’absence d’incidents en détention, du respect du règlement intérieur de l’établissement ou des instructions de service, de l’implication dans la vie quotidienne ou du comportement avec le personnel pénitentiaire ou exerçant à l’établissement, avec les autres personnes détenues et avec les personnes en mission ou en visite. Les efforts sérieux de réinsertion sont appréciés en tenant compte notamment du suivi avec assiduité d’une formation scolaire, universitaire ou professionnelle ayant pour objet l’acquisition de connaissances nouvelles, des progrès dans le cadre d’un enseignement ou d’une formation et de l’engagement dans l’apprentissage de la lecture, de l’écriture et du calcul, de l’exercice d’une activité de travail, de la participation à des activités culturelles.
Lorsque plusieurs infractions ont été commises avant qu’un jugement définitif n’ait été rendu, on parle de « concours d’infractions ». Ce dernier est prévu aux articles 132-2 et suivants du Code pénal.    Lorsque les faits distincts font l’objet d’une seule procédure : En droit français, en cas de concours d’infractions, les peines ne se cumulent pas. En effet, le législateur a prévu à l’article 132-3 du Code pénal que « chacune des peines encourues peut être prononcée. Toutefois, lorsque plusieurs peines de même nature sont encourues, il ne peut être prononcé qu’une seule peine de cette nature dans la limite du maximum légal le plus élevé. Chaque peine prononcée est réputée commune aux infractions en concours dans la limite du maximum légal applicable à chacune d’entre elles ». Exemple : un individu a commis un vol (puni de 3 ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende). Avant d’avoir été définitivement condamné pour ce vol, il commet une escroquerie (punie de 5 ans d’emprisonnement et de 375 000 euros d’amende). L’individu pourra être condamné pour vol et escroquerie. Néanmoins, pour ces 2 infractions, sa peine ne pourra excéder 5 ans d’emprisonnement et 375 000 euros d’amendes.     Lorsque les faits font l’objet de procédures distinctes : Lorsque les faits ont fait l’objet de plusieurs jugements de condamnations, la règle du non-cumul reste le principe. Or, si le second juge condamne l’individu sans avoir connaissance de la peine prononcée par le premier juge, il y a un risque que les peines cumulées dépassent le maximum légal le plus élevé. Ainsi, le législateur a prévu à l’article 132-4 du Code pénal que la confusion totale ou partielle des peines de même nature peut être ordonnée soit par la dernière juridiction appelée à statuer, soit dans les conditions prévues par le code de procédure pénale. Exemple : si le premier juge a condamné l’individu a une peine de 2 ans d’emprisonnement pour vol et que le second condamne ce même individu à une peine de 4 ans d’emprisonnement pour escroquerie, la peine d’emprisonnement s’élève in fine à 6 ans. L’individu peut donc demander une confusion des peines afin que celle-ci soit abaissée à 5 ans (maximum légal du délit d’escroquerie, qui est l’infraction la plus sévèrement réprimée).   Les exceptions : L’article 132-7 du Code pénal prévoit que les contraventions se cumulent entre celles et avec celles encourues ou prononcées pour des crimes ou délits en concours. De même, pour certains délits, la règle du non-cumul ne s’applique pas. L’article 434-23 du Code pénal relatif à l’usurpation d’identité prévoit que « les peines prononcées pour ce délit se cumulent, sans possibilité de confusion, avec celles qui auront été prononcées pour l’infraction à l’occasion de laquelle l’usurpation a été commise ». De même, l’article 434-31 du Code pénal relatif à l’évasion dispose que « les peines prononcées pour le délit d’évasion se cumulent, sans possibilité de confusion, avec celles que l’évadé subissait ou celles prononcées pour l’infraction à raison de laquelle il était détenu ».
Qu’est ce qu’un mineur au sens de l’alinéa 2 de l’article 729-3 du Code de procédure pénale ? Arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation en date du 1er juin 2022, n°21-84.648  Le législateur, sensible aux obligations familiales des personnes condamnées, a adopté le 15 juin 2000 la possibilité pour ces personnes d’obtenir une libération conditionnelle anticipée afin d’exercer l’autorité parentale sur leur enfant de moins de 10 ans (article 729-3 du Code de procédure pénale). L’alinéa 2 de cet article pose toutefois une réserve : cet aménagement de peine ne peut être accordé dans les cas où la personne condamnée a commis un délit ou un crime sur un mineur. La question posée étant de savoir si la minorité s’entend du point de vue pénal (15 ans) ou civil (18 ans) ? La Chambre criminelle de la Cour de cassation est venue dissiper ces interrogations en jugeant que la minorité visée par l’article 729-3, alinéa 2, du Code de procédure pénale, est la minorité civile fixée à 18 ans. Dès lors, tout délit ou crime commis sur un mineur de moins de 18 ans sera de nature à faire obstacle à la libération conditionnelle parentale.
L’OFFICIER DE POLICE A QUI LE PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE A ORDONNE DE FAIRE COMPARAITRE PAR LA FORCE UNE PERSONNE DEVANT LA JUSTICE NE PEUT PENETRER DANS SON DOMICILE SANS AUTORISATION Arrêt de la Chambre Criminelle de la Cour de Cassation en date du 22 Février 2017, n°16-82.412 Ici, le procureur avait demandé aux policiers d’aller chercher un homme soupçonné de violences avec arme pour le faire comparaitre devant lui, conformément à l’article 78 du Code de procédure pénale. N’étant pas présent, les policiers ont pénétré chez lui et ont attendu son retour. La procédure est annulée, car les policiers n’ont pas été autorisés à pénétrer de force dans son domicile par une autorisation spécifique délivrée par un juge.
LA COUR D’ASSISES NE PEUT FIXER UNE PERIODE DE SURETE EGALE AUX DEUX-TIERS DE LA PEINE LORSQUE L’ACCUSE A ETE CONDAMNE A UNE PEINE DE RECLUSION CRIMINELLE A PERPETUITE Arrêt de la Chambre Criminelle de la Cour de Cassation en date du 12 Mars 2014, n°13-83.536 Après avoir déclaré coupable de meurtre, viol, destruction du bien d’autrui par un moyen dangereux pour les personnes, en récidive, un individu, la Cour d’Assise l’a condamné à la réclusion criminelle à perpétuité et fixé aux deux-tiers de la peine la durée de la période de sûreté, or une telle peine ne peut pas être prononcée car il convient de fixer la durée exacte de la peine, ne pouvant excéder 22 ans.
En enquête préliminaire, les agents de police judiciaire peuvent procéder à une perquisition dès lors qu’ils agissent sous le contrôle de l’officier de police judiciaire   Cour de cassation, Chambre criminelle, 7 décembre 2021, 20-82.733   La perquisition est une mesure d’investigation prévue aux articles 56 et suivants du Code de procédure pénale en matière de flagrance et à l’article 76 du même code dans le cadre d’une enquête préliminaire. Cette mesure d’investigation peut se définir comme « la recherche dans un lieu clos qui permet à l’officier de police judiciaire de se transporter au domicile de personnes qui paraissent avoir participé au crime ou détenir des pièces ou objets relatifs aux faits incriminés afin de mettre la main sur des pièces à conviction » (T. Garé et C. Ginestet, droit pénal, procédure pénale, 14e éd., Dalloz).   Le régime de la perquisition est strictement encadré par le législateur.   Le respect des horaires de la perquisition En principe, tant en matière de flagrance qu’en préliminaire, une perquisition ne peut débuter entre 21h et 06h du matin (article 59 du Code de procédure pénale). Néanmoins, une perquisition qui a débutée avant 21h peut valablement se poursuivre après cette heure. Par exception, en matière de stupéfiants, de proxénétisme, de criminalité organisée et de terrorisme, sous certaines conditions les perquisitions peuvent débuter en dehors de ces horaires.   La présence du suspect dans le lieu perquisitionné Dans une enquête de flagrance, l’article 57 du Code de procédure pénale prévoit que la perquisition doit s’effectuée en présence de la personne suspectée. A défaut, l’officier de police judiciaire devra l’inviter à désigner un représentant de son choix. Dans l’impossibilité de procéder à une telle désignation, l’officier de police judiciaire devra choisir 2 témoins en dehors des personnes relevant de son autorité administrative. En revanche, dans le cadre d’une enquête préliminaire, l’article 76 du Code de procédure pénale dispose que les perquisitions ne peuvent être effectuées sans l’assentiment exprès de la personne chez laquelle l’opération a lieu. Si cette personne refuse, et que les nécessités de l’enquête l’exigent, le procureur de la République peut demander au juge des libertés et de la détention d’ordonner la perquisition. Néanmoins, il doit s’agir d’une enquête portant sur un crime ou un délit puni d’une peine d’emprisonnement d’une durée égale ou supérieur à 3 ans.   La personne habilitée à effectuer la perquisition En enquête préliminaire, seule un officier de policier judiciaire peut effectuer une perquisition. Cette compétence exclusive se déduit de l’article 56 du Code de procédure pénale. En enquête préliminaire, la perquisition peut être réalisée tant par un officier de police judiciaire que par un agent de police judiciaire. En effet, la Cour de cassation a considéré dans un arrêt du 7 décembre 2021 que « les agents de police judiciaire peuvent, en enquête préliminaire, et au contraire de l’enquête de flagrance, procéder à une perquisition dès lors qu’ils agissent sous le contrôle de l’officier de police judiciaire » (Cass.crim 7 déc. 2021, 20-82.733). Dans cet arrêt, la Cour de cassation a précisé que l’existence de ce contrôle doit être établie par une mention expresse au procès-verbal de perquisition ou peut résulter, à défaut, d’une mention spécifique dans les pièces de procédure. L’effectivité de ce contrôle ne peut donc pas être déduit du seul visa du commissaire de police apposé sur le soit-transmis de clôture de la procédure au procureur de la République, l’existence du contrôle d’un officier de police judiciaire sur les perquisitions sans mentionner aucune autre pièce de nature à en établir la réalité. L’exercice de ce contrôle est une condition de la régularité de la recherche de la preuve et son absence constitue un vice de procédure. La nullité de la mesure pourra donc être encourue à condition de démontrer l’existence d’un grief. L’existence du grief exigé par ce texte est établie lorsque l’irrégularité elle-même a occasionné au requérant un préjudice, qui ne peut résulter de sa seule mise en cause par l’acte critiqué (Cass. Crim., 7 septembre 2021, n° 20-87.191).
Analyse de l’étude du Ministère de la Justice: quelles condamnations ressortent le plus souvent pour les personnes morales ?   Le ministère de la justice vient de publier une étude statistique dans laquelle on apprend qu’en 2015 plus de 5000 condamnations ont été prononcées à l’encontre de personnes morales. En 2000 seules 200 étaient concernée par ces condamnations (Infostat Justice, n° 154, « Le Traitement judiciaire des infractions commises par les personnes morales »). Cependant, cette augmentation ne traduit pas forcément un durcissement de la politique pénale face au monde des affaires. C’est même le contraire puisqu’il apparait que la responsabilité pénale de la personne morale prend souvent le pas sur celle de ses décideurs et dirigeants. Quel est alors le caractère dissuasif des poursuites pénales dans la mesure où, toujours en 2015, dans 55% des affaires jugées, la personne morale était poursuivie seule, le dirigeant, lui, échappant aux poursuites.  Une amende dans la majorité des peines prononcées Lorsque la réponse pénale apportée à une infraction n’est pas une mesure alternative, soit dans 71 % des cas, comme la simple régularisation, la peine prononcée est alors de manière quasiment systématique une amende. Cela concerne 96% des peines prononcées pour un montant de 17 000€. Par ailleurs, pour 3 personnes morales sur 4 condamnées la somme de l’amende était inférieure à 6000€. Soit des sommes bien en deçà des montants des amendes prononcées par les autorités administratives indépendantes comme l’Autorité de la concurrence ou l’Autorité des marchés financiers. Qu’en est-il des peines dissuasives Bien évidemment sous ces chiffres se cache une forte différence en fonction des matières concernées mais ils révèlent cependant une répression mesurée. Aussi, les peines complémentaires réellement dissuasives, comme par exemple l’interdiction d’exercer une activité, ne sont même pas mentionnées.  Elles seraient prononcées trop rarement pour faire l’objet d’un traitement statistique. Les autorités, subissant sans doute le mal de moyens face à des litiges toujours plus complexes, semblent avoir fait de la citation directe le mode de comparution le plus fréquent des personnes morales devant les tribunaux correctionnels.
Une absence qui ne justifie pas toujours un second procès En matière pénale, il n’est pas rare qu’un justiciable, absent à son audience, découvre après coup qu’il a été condamné. La première réaction est souvent la suivante : « Je vais faire opposition ». Pourtant, cette voie de recours n’est pas toujours ouverte. Le Code de procédure pénale encadre strictement les cas dans lesquels une opposition est recevable. Si vous avez été valablement convoqué à l’audience mais que vous ne vous y êtes pas présenté volontairement, vous ne pouvez pas faire opposition. Le législateur et la jurisprudence réservent cette voie aux seules hypothèses où le justiciable n’a pas été régulièrement informé de la tenue du procès.    Le principe : l’opposition, une voie de recours exceptionnelle L’opposition permet à un prévenu jugé en son absence d’être rejugé dans les mêmes conditions, comme s’il comparaissait pour la première fois. Mais ce droit n’est ouvert que si le jugement a été rendu “par défaut”, c’est-à-dire sans convocation régulière ou personnelle, ou en cas d’empêchement légitime non connu du tribunal.  Article 489 du Code de procédure pénale : « Le jugement contradictoire rendu en l’absence du prévenu, lorsqu’il n’a pas été cité à personne ni représenté à l’audience, peut faire l’objet d’une opposition, sauf si la citation a été faite à domicile et retirée. »  Autrement dit, si vous avez été cité à personne (en main propre), par huissier, officier de police judiciaire, ou via une lettre recommandée retirée, le jugement n’est pas “par défaut” mais “contradictoire à signifier”. Dans ce cas, vous ne pouvez pas faire opposition. Vous ne pouvez que faire appel dans un délai de 10 jours à compter de la signification du jugement.    Une jurisprudence constante : pas d’opposition en cas de convocation régulière La jurisprudence pénale est constante sur ce point : la régularité de la convocation exclut le droit à opposition. Plusieurs arrêts viennent souligner que seule une absence de notification personnelle ou une irrégularité de la citation peut permettre de former une opposition.  Cass. crim., 19 octobre 1999, n° 99-85.935 : Le jugement rendu en l’absence du prévenu est nul si la citation n’a pas respecté le délai de dix jours prévus à l’article 552 du Code de procédure pénale. Cela signifie que si la convocation est trop tardive (moins de 10 jours avant l’audience), le jugement peut être annulé, et l’opposition redevenir recevable.  Article 552 du Code de procédure pénale : « Sauf disposition contraire, le délai entre la citation et la comparution est au moins de dix jours si la citation n’est à personne. » Cette exigence garantit les droits de la défense : le temps de préparer son audience est un droit fondamental. Principe constant : L’opposition est irrecevable si le prévenu a été cité à personne et ne s’est pas présenté à l’audience sans motif légitime. Dans ce cas, le jugement est contradictoire à signifier, au sens des articles 410 et 498 du Code de procédure pénale, et seule la voie de l’appel est ouverte.  Article 410 CPP : « Est contradictoire le jugement rendu en présence du prévenu, ou après que le prévenu a été cité à personne ou représenté à l’audience. »  Article 498 CPP : « Le jugement rendu par défaut ou contradictoire peut être frappé d’appel dans un délai de dix jours à compter de sa signification. »    Que peut faire un prévenu jugé en son absence malgré sa convocation ? Si vous avez été valablement convoqué, que ce soit : Par citation en main propre (huissier ou OPJ), Par lettre recommandée avec accusé de réception retirée, Ou par procès-verbal de signification régulière, …alors vous ne pourrez pas faire opposition. Votre seule possibilité est de faire appel dans les dix jours suivant la signification du jugement. Ce recours peut permettre d’obtenir une audience devant une juridiction d’appel pour faire valoir vos arguments et contester la peine prononcée.   Conclusion : la responsabilité du justiciable face à la convocation L’idée selon laquelle on pourrait volontairement ne pas se présenter à l’audience et espérer faire “redémarrer” le procès par opposition est une erreur de droit. L’opposition n’est pas une seconde chance automatique. Elle suppose que le justiciable n’ait pas été informé dans les formes, ou qu’un empêchement réel ait empêché sa comparution sans faute de sa part.  En droit pénal, le respect de la procédure garantit les droits, mais impose aussi des devoirs à chaque justiciable : prendre au sérieux toute convocation et agir dans les délais.
Une lenteur judiciaire qui interroge les droits fondamentaux Il n’est pas rare qu’un justiciable soit confronté à une procédure pénale qui s’étire sur de nombreuses années, parfois plus d’une décennie. L’instruction piétine, les actes d’enquête tardent, et les décisions se font attendre. Face à cette situation, une question revient souvent : peut-on tenir un agent de l’État – magistrat, greffier ou enquêteur – personnellement responsable de cette lenteur ? La réponse est nuancée : non, on ne peut pas engager directement la responsabilité d’un agent de l’État pour la durée excessive d’une procédure. Mais il est possible d’engager la responsabilité de l’État lui-même, au titre d’un dysfonctionnement du service public de la justice.   Le principe : une responsabilité de l’État, non des individus En droit français, la justice est rendue au nom de l’État. Les magistrats et agents judiciaires bénéficient donc d’une immunité fonctionnelle : ils n’engagent pas leur responsabilité personnelle pour les actes accomplis dans l’exercice de leurs fonctions, sauf exception très étroite (faute personnelle détachable du service). En revanche, si la procédure a duré de manière manifestement excessive, l’État peut être tenu responsable, en application de l’article L. 141-1 du Code de l’organisation judiciaire, issu de la loi du 5 juillet 1972 : L’État est tenu de réparer le dommage causé par le fonctionnement défectueux du service de la justice. […] Cette responsabilité n’est engagée que par une faute lourde ou un déni de justice. La lenteur excessive d’une instruction pénale, sans justification sérieuse au regard de la complexité du dossier, peut constituer un déni de justice, même sans démonstration d’une faute lourde.   Une jurisprudence constante en faveur du droit à un délai raisonnable La Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) et la Cour de cassation rappellent régulièrement que le droit à un procès dans un délai raisonnable est un principe fondamental de l’État de droit (article 6 -1 de la Convention EDH). CEDH, Capuano c. Italie, 25 juin 1987 : une durée de procédure excessive constitue en soi une violation du droit au procès équitable. Le juge national peut donc être saisi pour obtenir la réparation d’un préjudice moral ou matériel, causé par l’attente injustifiée, les conséquences professionnelles ou les troubles dans les conditions d’existence.   Quelle démarche engager ? Saisine du Tribunal judiciaire de Paris La responsabilité de l’État pour dysfonctionnement de la justice relève exclusivement du Tribunal judiciaire de Paris. Le demandeur doit : Démontrer la durée anormale de la procédure (ex. : plus de 10 ou 15 ans sans avancée notable) ; Justifier d’un préjudice personnel, direct et certain (angoisse, atteinte à la vie privée, impossibilité de tourner la page…) ; Et expliquer pourquoi cette durée est injustifiée, au regard de la complexité et du volume de l’affaire. L’action est dirigée contre l’Agent judiciaire de l’État (AJE), représentant de l’État devant les juridictions civiles. Saisine éventuelle de la CEDH Si les recours internes sont épuisés, il est également possible de saisir la Cour européenne des droits de l’homme, dans un délai de 4 mois à compter de la dernière décision. La CEDH peut condamner l’État à verser une indemnité pour violation du droit à un délai raisonnable. En pratique : pas de responsabilité directe de l’agent judiciaire Il peut être tentant, pour un justiciable dont le dossier est resté bloqué pendant quinze ans, de pointer la responsabilité du magistrat instructeur. Pourtant, ce n’est juridiquement pas possible. La lenteur relève du fonctionnement global du service public de la justice, et non d’un manquement personnel d’un agent. Il ne s’agit pas d’un oubli ponctuel ou d’un acte malveillant (ce qui relèverait d’une faute personnelle), mais d’un dysfonctionnement structurel ou organisationnel. Et cela, seul l’État peut en répondre.   Conclusion : oui, l’État peut être poursuivi pour la durée excessive d’une procédure, mais pas son agent Le justiciable victime d’une procédure anormalement longue dispose bien d’un recours pour obtenir réparation, mais il doit s’adresser à l’État, non à l’agent. C’est un principe fondamental de notre droit : la responsabilité des institutions prime sur celle des individus, dès lors que ceux-ci agissent dans le cadre de leurs fonctions.  Un conseil : toute situation de procédure pénale inactive depuis plusieurs années doit faire l’objet d’une analyse par un avocat. Celui-ci pourra envisager une action en responsabilité contre l’État ou une relance de l’instruction.
Dans quelles circonstances un policier peut-il contraindre par la force, un individu à se rendre au commissariat ?   Le législateur a prévu une liste limitative de situations dans lesquelles un policier peut contraindre par la force un individu à se rendre au commissariat.   En cas de flagrant délit En vertu de l’article 53 du Code de procédure pénale, le flagrant délit est caractérisé dès lors que le crime ou le délit se commet actuellement, qu’il vient de se commettre ou lorsque dans un temps très voisin de l’infraction la personne est poursuivie par la clameur publique ou est trouvée en possession d’objets ou présente des traces ou indices, laissant penser qu’elle a participé au crime ou au délit. Ainsi, un individu soupçonné dans le cadre d’une enquête de flagrance peut être conduit de force au commissariat par un policier pour être présenté devant un officier de police judiciaire.   Dans le cadre d’une enquête préliminaire L’article 78 du Code de procédure pénale énonce les cas dans lesquels un individu peut être conduit de force au commissariat dans le cadre d’une enquête préliminaire : « L’officier de police judiciaire peut contraindre à comparaître par la force publique, avec l’autorisation préalable du procureur de la République, les personnes qui n’ont pas répondu à une convocation à comparaître ou dont on peut craindre qu’elles ne répondent pas à une telle convocation. Le procureur de la République peut également autoriser la comparution par la force publique sans convocation préalable en cas de risque de modification des preuves ou indices matériels, de pressions sur les témoins ou les victimes ainsi que sur leur famille ou leurs proches, ou de concertation entre les coauteurs ou complices de l’infraction ».   La vérification d’identité Les officiers de police judiciaire peuvent, dans certaines circonstances procéder à des contrôles d’identité. Cependant, lorsque l’individu contrôlé refuse de justifier de son identité ou n’est pas en mesure de le faire, il peut être retenu sur place ou être conduit au commissariat afin de vérifier son identité. Il convient tout de même de préciser que l’individu ne peut pas être retenu au-delà du temps qui est strictement nécessaire à une telle vérification sans que ce délai ne puisse dépasser 4 heures (8 heures à Mayotte).   Le mandat de recherche Le mandat de recherche est un acte délivré par un magistrat à l’encontre d’un individu à l’encontre duquel il existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu’il a commis ou tenté de commettre une infraction. L’article 122 du Code de procédure pénale le définit comme « l’ordre donné à la force publique de rechercher la personne à l’encontre de laquelle il est décerné et de la placer en garde à vue ». Les policiers chargés d’exécuter le mandat de recherche sont donc habilités à interpeller un individu et à le conduire par la force au commissariat.   En ce qui concerne l’interpellation de l’individu, il est utile de préciser que l’usage des menottes ou entraves ne doit pas être systématique. En effet, selon l’article 803 du Code de procédure pénale « Nul ne peut être soumis au port des menottes ou des entraves que s’il est considéré soit comme dangereux pour autrui ou pour lui-même, soit comme susceptible de tenter de prendre la fuite ». Ainsi, si un individu ne fait pas usage de la force et décide de se laisser emmener au commissariat, le port de menottes ou entraves ne saurait être justifié.
Le principe de réparation intégrale du préjudice est bien illustré par l’analyse d’un poste de dépense important tel que le logement. En effet, pour accéder à un logement adapté à son handicap, la victime débourse souvent des frais très conséquents. La nomenclature Dintilhac défini les frais de logement adapté comme : « frais que doit débourser la victime directe à la suite du dommage pour adapter son logement à son handicap et bénéficier ainsi d’un habitat en adéquation avec son handicap ». Cette indemnisation se situe en phase post-consolidation du handicap. Une indemnisation pré-consolidation est possible au titre du post de préjudice temporaire. L’accès à un logement adapté peut passer par l’adaptation du logement actuel de la victime, que celle-ci soit locataire ou propriétaire. Lorsque des travaux d’aménagement ne sont pas possible dans ce logement, la victime peut se voir indemniser les frais nécessaires à l’acquisition et l’adaptation d’un nouveau logement.   1° L’adaptation du logement actuel La première mesure d’adaptation possible, et privilégiée, est la réalisation de travaux dans le logement actuel de la victime. Les travaux nécessaires sont déterminés par un expert, en fonction du niveau de handicap de la victime, puis chiffrés par des techniciens assistant les parties. L’indemnisation est fixée par le juge, en fonction de la situation et des besoins individuels de la victime. Ces aménagements peuvent être réalisé dans le logement loué par la victime, s’ils ne sont pas trop importants, dans le logement qu’elle possède, ou dans le logement d’un proche si la victime y réside de façon permanente. Exemples : aménagement de la cuisine ou de la salle de bain. La victime peut apporter la preuve des frais d’aménagement par tous moyens. Exemples : devis, facture…   2° Le déménagement vers un logement adapté Lorsque le maintien dans le logement initial n’est pas possible, la victime peut justifier d’un besoin de changer de logement. C’est à elle de démontrer qu’elle ne peut pas aménager son logement existant. Exemple : Nécessité d’une chambre et salle de bain supplémentaire pour l’accueil d’une tierce personne aidante ; Victime paraplégique logeant dans un immeuble sans ascenseur ; Nécessité d’aménagements suffisamment lourds pour être incompatible avec le caractère provisoire d’une location.   Changement de location Lorsque la victime locataire change de logement pour une nouvelle location adaptée à ses besoins, elle est indemnisée du surcoût de loyer lié au nouvel appartement.   Acquisition d’une propriété L’achat d’un logement peut s’avérer nécessaire, notamment pour y réaliser des travaux importants. Il a été plaidé par les compagnies d’assurance que seuls les frais d’aménagement du logement acquis devraient être indemnisés, au motif que l’acquisition d’un logement conduirait à un enrichissement injustifié de la victime. Mais depuis 1996 et de façon constante, la Cour de cassation admet que lorsque l’achat d’une résidence est nécessaire, par exemple pour pouvoir y réaliser des aménagements importants, le coût total de l’acquisition peut être indemnisé. La nécessité d’acquisition du logement doit alors être une conséquence directe des séquelles du dommage. La Cour de cassation rappelle cette position dans son arrêt de la 2ème chambre civile du 17 octobre 2024 (n°22-19.795) : « En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si, compte tenu de l’importance des travaux d’aménagement et du caractère provisoire de la location, l’acquisition d’un logement mieux adapté n’était pas nécessaire pour permettre à la victime de bénéficier de manière pérenne d’un habitat adapté au handicap causé par l’accident, la cour d’appel a privé sa décision de base légale. »   Lorsque le logement est acquis avec un conjoint, la part payée par le conjoint de la victime n’est pas indemnisée. Sont aussi indemnisés à ce titre, les frais de déménagement et d’emménagement. L’indemnisation d’aménagement supplémentaires dans le nouveau logement est toujours possible.     Conclusion : L’évaluation de l’indemnisation des frais de logement adaptée est faite au cas par cas par les juges du fond. L’indemnisation suppose toujours la preuve du lien de causalité direct entre le dommage et l’aménagement effectué. Lorsque ce lien est démontré, l’indemnisation couvre les frais de déménagements, de travaux, de surcoût de loyer et même d’acquisition d’un logement.
Suis-je toujours responsable des dommages causés par mon salarié ?   Aux termes de l’article 1242 alinéa 1er du Code civil « On est responsable non seulement du dommage que l’on cause par son propre fait, mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre, ou des choses que l’on a sous sa garde ». L’alinéa 5 précise que les commettants sont responsables des dommages causés par leurs préposés dans les fonctions auxquelles ils les ont employés.   Pour engager la responsabilité du commettant en raison du dommage causé par son préposé, plusieurs conditions doivent être remplies :   Une faute du préposé   L’existence d’une faute du préposé, au sens de l’article 1240 du Code civil doit être caractérisée. Ainsi, pour pouvoir engager la responsabilité du commettant, il est nécessaire de démontrer l’existence d’une faute, d’un dommage et d’un lien de causalité.   Un lien de préposition   La jurisprudence a apporté des précisions sur ce qu’il faut entendre par « lien de préposition ». Ainsi, le lien de subordination, d’où découle la responsabilité mise à la charge des commettants suppose essentiellement que ceux-ci ont le droit de faire acte d’autorité en donnant à leurs préposés des ordres ou des instructions sur la manière de remplir, à titre temporaire ou permanent, avec ou sans rémunération, les emplois qui leur ont été confiés pour un temps et un objet déterminé (Cass. crim, 7 nov. 1968, n° 68-90.118).   Un contrat de travail implique donc l’existence d’un lien de préposition.   Une faute en lien avec l’exercice des fonctions du préposé   L’engagement de la responsabilité du commettant nécessite l’existence d’une faute commise par le préposé en lien avec ses fonctions. Dans l’hypothèse où le préposé n’a pas agi en lien avec l’exercice de celles-ci, il convient de s’intéresser à l’existence d’un abus de fonction. Ce dernier exonère le commettant de sa responsabilité.   Selon la Cour de cassation « le commettant s’exonère de sa responsabilité si son préposé a agi hors des fonctions auxquelles il était employé, sans autorisation, et à des fins étrangères à ses attributions » (Cass. ass. Plénière 19 mai 1988).   Ces 3 conditions cumulatives doivent être démontrées. Or, en pratique, il est très difficile pour le commettant de s’exonérer de sa responsabilité en démontrant l’existence de ces 3 conditions.   Exemples :  Vol : n’a pas agi hors de ses fonctions le préposé d’une entreprise de nettoyage auteur d’un vol dans les locaux d’une bijouterie que son entreprise était chargée de nettoyer, dès lors qu’il a agi sur le lieu de son travail, pendant le temps et à l’occasion de celui-ci (2civ, 22 mai 1995, n°92-19.172).   Viols et agressions sexuelle : absence d’abus de fonction pour un professeur de musique ayant commis des actes de viols et agressions sexuelles sur plusieurs de ses élèves dans la mesure où il a agi sur son lieu de travail et pendant son lieu de travail. Par conséquent, il n’a pas agi hors des fonctions auxquelles il était employé (2civ, 17 mars 2011, n°10-14.468).   Harcèlement moral : absence d’abus de fonction pour un harcèlement moral dans la mesure où les faits ont été commis au temps et sur les lieux du travail, étaient connus de la direction de la société qui n’est pas intervenue pour les faire cesser (Cass. crim, 28 mai 2013, n°11-88.009).   En conclusion, le commettant n’engage pas sa responsabilité en cas d’abus de fonctions de son préposé. Néanmoins, il est en pratique très difficile pour un commettant de démontrer l’existence d’un abus de fonction étant donné que celui-ci suppose que le préposé ait agi hors des fonctions auxquelles il est employé.
L’actualité du préjudice corporel en 2021 La limitation de l’indemnisation des préjudices moraux des enfants à naitre  (Civ.2ème, 11 mars 2021, n°19-17.384) Il était reconnu à l’enfant simplement conçu depuis l’arrêt du 14 décembre 2017 (Civ, 2ème, 14 décembre 2017, n°16-26.687) un préjudice moral en cas de décès de l’un de ses proches.  La décision concernait un enfant à naître qui avait perdu son père suite à un accident de voiture. La question se posait alors de savoir si la décision avait vocation à s’étendre aux frères et sœurs ou encore aux grands-parents. Dans l’arrêt du 11 mars 2021, c’est, en revanche, un coup d’arrêt qui est porté par le juge du droit à cette possibilité d’être indemnisé pour la disparition d’un proche avant la naissance, la deuxième chambre civile estimant qu’un enfant né plusieurs années après la disparition de sa sœur de 10 ans ne peut, faute d’avoir été conçu avant cette disparition, invoquer de préjudice moral. La solution se comprend au regard du principe qui fonde, depuis 2017, la réparation des préjudices moraux des enfants à naître. C’est, en effet, en application de la maxime de l’infans conceptus que la jurisprudence accepte désormais de réparer ces préjudices extrapatrimoniaux estimant qu’il est de l’intérêt des enfants simplement conçus d’être considérés comme nés au moment de la disparition d’un de leurs parents. Cette fiction ne peut bien entendu fonctionner que si l’enfant était conçu au moment du décès de ce proche. Elle doit, en revanche, être écartée lorsque la conception de l’enfant est intervenue après la disparition du parent concerné. Le fondement de cette solution est assez flou car on peine à voir les différences de souffrances entre ces deux situations. Dans les deux cas, c’est l’absence du parent à compter de la naissance qui cause un préjudice à l’enfant. Peu importe la date de disparition du parent, le plus important étant que celle-ci survienne avant la naissance de l’enfant. C’est la réalité des préjudices subis qui devrait conditionner le choix de la réparation, plutôt que perceptions juridiques. Quelle influence doit jouer l’état antérieur d’une victime sur son indemnisation ? (Civ. 2e, 8 avril 2021, no 20-10.621) Depuis de nombreuses années, il y avait une distinction entre les prédispositions pathologiques latentes et les prédispositions pathologiques patentes de la victime. Si les prédispositions pathologiques de la victime n’étaient pas révélées avant l’accident, celles-ci ne pouvaient pas être prises en compte pour réduire le montant de l’indemnisation en application du principe de réparation intégrale. Si les prédispositions pathologiques de la victime étaient connues avant l’accident, celles-ci pourraient venir minorer le montant de la réparation. En revanche, la transformation radicale d’un état antérieur patent ouvre de nouveaux droits à une indemnisation intégrale. La situation du borgne devenu aveugle est souvent invoquée pour illustrer cette exception qui trouve aujourd’hui d’autres domaines d’application. Il en est ainsi de cet accidenté de la route devenu totalement invalide et qui, bien qu’affecté par une incapacité antérieure, s’est vu dans l’impossibilité de poursuivre une activité professionnelle et de mener une vie qualifiée jusqu’alors de normale par l’expertise (Civ. 2e, 19 juillet 1966).   L’arrêt rendu par la deuxième chambre civile le 8 avril 2021 s’inscrit dans la lignée de ces solutions. Une salariée souffrait d’une rupture de la coiffe des rotateurs de l’épaule prise en charge dans le cadre d’une maladie professionnelle. Elle est ensuite victime d’un accident du travail qui aggrave sa pathologie. Dans la mesure où cette aggravation ne peut pas être rattachée à une incapacité antérieure de la victime, la Cour de cassation estime qu’il est justifié de l’indemniser intégralement au titre de l’accident du travail. Ici pourtant un doute existait sur l’évolution possible de la pathologie originelle de la victime qui aurait pu entrainer une incapacité. Ce doute est ici ignoré par la Haute juridiction au profit de la victime dès lors que les séquelles relevant de la maladie professionnelle de celles liées à l’accident du travail ne peuvent être dissociées. La dévalorisation sociale (Civ. 2e, 6 mai 2021, no 19-23.173 et no 20-16.428) La deuxième chambre civile de la Cour de cassation accepte le 6 mai 2021 d’indemniser, à titre autonome, la dévalorisation sociale subie par la victime directe en raison de son exclusion permanente du monde du travail. La Cour reconnaît l’existence de la part extra patrimoniale de l’incidence professionnelle. Les juges ont fini par prendre en considération la dimension sociale apportée par le travail et à quel point il était vecteur d’épanouissement individuel. En l’espèce, la victime d’un accident ferroviaire a subi un traumatisme crânien important, laissant persister un déficit fonctionnel permanent évalué par les experts à 90 %. Elle est donc dans l’impossibilité absolue de reprendre une activité professionnelle. Sa tutrice forme un pourvoi en cassation contre l’arrêt rendu par la cour d’appel de Limoges le 26 septembre 2019. Elle reproche aux magistrats d’avoir exclu la réparation de tout préjudice lié à l’incidence professionnelle. Elle précise que la victime, par l’effet de l’accident, a subi une perte de son « identité sociale » au-delà, et en sus, de la perte financière. La deuxième chambre civile de la Cour de cassation, indique alors que les juges auraient dû rechercher « si n’était pas caractérisée l’existence d’un préjudice résultant de la dévalorisation sociale ressentie par la victime du fait de son exclusion définitive du monde du travail, indemnisable au titre de l’incidence professionnelle », et ce indépendamment des pertes de gains purement économiques. L’incidence professionnelle est répertoriée selon la nomenclature Dintilhac parmi les postes de préjudices patrimoniaux. Ce poste de préjudice compte aujourd’hui six sous-catégories différentes. L’indemnisation des frais de reclassement professionnel, la perte de droits à la retraite et la réparation de perte de chance professionnelle possèdent une dimension économique. Pour autant, la perte d’épanouissement au travail, l’augmentation de la pénibilité de l’emploi, ou encore la dévalorisation sur le marché du travail ne possèdent aucune incidence financière. La décision de la Cour de cassation reconnait qu’une victime de dommage puisse se prévaloir devant les juges d’un désœuvrement social provoqué par la privation d’une activité professionnelle. Cette solution intervient après la crise sanitaire et l’impossibilité de sociabiliser par le travail mettant ainsi en avant son importance. (Jean-Baptiste Prévost, « L’incidence professionnelle : la reconnaissance de la fonction symbolique et sociale du travail », Gaz pal., 2021, n°32, p. 79) La dévalorisation sociale est retenue clairement par la Cour de cassation comme une composante de l’incidence professionnelle qui se distingue des pertes de gains professionnels futurs qui seraient déjà indemnisés par une rente viagère. Le cumul est possible sans conduire à une double indemnisation. Ainsi, la Cour de cassation satisfait l’obligation de réparation intégrale en indemnisation les conséquences économiques de l’accident et l’indemnisation du désœuvrement social. La réparation des préjudices par ricochet (Civ. 1re, 30 juin 2021, no 19-22.787) Le préjudice sexuel La Cour de cassation considère que le préjudice sexuel une fois constaté doit être par ricochet indemnisé pour les conjoints victimes eux aussi, de ce poste de préjudice. Il s’agit de l’application du principe de réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime. Elle est traditionnellement indemnisée par le biais des préjudices extra patrimoniaux exceptionnels. Ce qui implique que le préjudice sexuel ne possède pas de poste d’indemnisation qui soit autonome. La Cour de cassation indique également qu’en cas de décès « les conséquences personnelles éprouvées par la victime indirecte, à la suite du décès de son conjoint, telles que la privation de relations sexuelles avec lui, sont indemnisées au titre du préjudice d’affection ». En cas de survie, les juges considèrent qu’il s’agit d’un préjudice extra patrimonial exceptionnel et en cas de décès d’une indemnisation au titre du préjudice d’affection. Cependant dans le cas d’une indemnisation au titre de la solidarité nationale d’un accident médical non-fautif, les préjudices de la victime indirecte éprouvés du vivant de la victime directe n’ouvrent pas droit à réparation. En conclusion, la réparation accordée par la Cour de cassation aux victimes par ricochet de préjudice sexuel est mitigée et gagnerait à obtenir un poste de préjudice qui soit indépendant. La perte d’assistance du conjoint décédé La cour d’appel de Paris à condamner au titre de son préjudice économique l’ONIAM à indemniser l’époux d’une victime décédée des années après avoir subi une opération cardiaque au cours de laquelle sont survenues des complications provoquant un taux d’incapacité permanente de 90 %. Le préjudice économique résultait alors de la privation de l’assistance fournie par son épouse dans les actes de la vie quotidienne qu’il était incapable d’effectuer lui-même. La cour en a déduit que la perte de cette assistance suite au décès de celle-ci, constituait un préjudice économique indemnisable au titre de la solidarité nationale et à alloué pour l’avenir une rente trimestrielle viagère à l’époux de la victime directe. A l’avenir il serait pertinent que les dépenses liées à l’assistance constituent une indemnisation à part entière. Ainsi que l’expliquent certains auteurs, il est important qu’une évaluation précise et adaptée soit effectuée « pour chiffrer le préjudice économique permettant de compenser la perte d’industrie du défunt dont les services familiaux peuvent parfois représenter une valeur non-négligeable » (M. Le Roy, J-D. Le Roy, et F. Bibal, L’évaluation du préjudice corporel, LexisNexis, Coll. Droit&professionnels, 21e éd., 2018)   CF Revue sur l’actualité juridique du préjudice corporel
L’indemnisation d’un préjudice corporel expliquée en chiffres « Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. » (Article 1240 du Code civil) Définition du préjudice corporel : le préjudice corporel est définit comme une atteinte à l’intégrité physique de la personne c’est-à-dire tout ce qui porte atteinte au corps humain. Il peut être réparé par la mise en mouvement de l’action civile pour une action en réparation d’un dommage directement causé par une infraction. Le dommage doit être : Actuel: c’est-à-dire exister au moment du mouvement de l’action civile. Personnel: l’action civile en réparation n’appartient qu’à celui qui a subi le dommage Direct : le dommage doit être rattaché à l’infraction par un lien de cause à effet. La victime doit très rapidement faire constater son préjudice et l’infraction par un médecin pour prétendre à une indemnisation. L’examen médical déterminera les lésions, et l’incapacité totale du travail (ITT). A savoir : la durée de l’ITT détermine les suites de la procédure. Les violences ayant entrainé une ITT inférieure ou égale à 8 jours sont contraventionnelles. Les violences ayant entrainé une ITT supérieur à 8 jours constituent un délit. I/ L’indemnisation A/ L’indemnisation en droit commun L’indemnisation est particulière à chacun, le barème d’indemnisation du préjudice corporel dépend la situation de chaque victime. Il n’existe pas de barème indemnisation préjudice corporel officiel imposé par le législateur. Il existe cependant des barèmes indicatifs dans les tribunaux, ainsi qu’auprès des assureurs. L’indemnisation va varier selon la victime. Elle va varier selon la juridiction saisie, selon si le dossier est traité à l’amiable ou par décision de justice. Les différents préjudices relevés du préjudice corporel subi sera fixé par un médecin expert qui se référa à la nomenclature Dintilhac qui liste de manière non exhaustive les préjudices qui ouvrent droit à réparation. Les juridictions peuvent retenir un certain nombre de postes d’indemnisation. Chaque poste d’indemnisation est quantifié financièrement et variera selon la victime. L’objectif alors de réparer intégralement le préjudice afin de « replacer la victime dans l’état le plus proche de celui où elle se trouvait avant la survenance du dommage ». Il faut réparer le préjudice sans perte, ni profit pour la victime. (Cour de Cass, civ, 2ème, 28 oct 1954) B/ l’indemnisation contractuelle C’est le contrat et son contenu qui fait la loi des parties. L’indemnisation proposé par le contrat suite à un préjudice corporel peut se référer au droit commun mais également être plus avantageux car il dépend de la volonté des parties. Le contrat d’assurance suite à un accident de voiture peut prévoir une indemnisation basée sur le droit commun ou des clauses particulières qui ne font pas référence au droit commun. Le conducteur de véhicule terrestre à moteur ne sera pas indemnisé de la même manière par son assureur s’il a un accident pour lequel il est en faute. La faute du conducteur est selon le contrat d’assureur la plupart du temps de nature à limiter son indemnisation. Les règles du contrat peuvent alors faire varier les règles du droit commun. II/ L’indemnisation du préjudice corporel Toutes les conséquences directes et certaines du dommage doivent être indemnisés sans perte ni profit selon l’adage « le dommage, tout le dommage, rien que le dommage. » L’indemnisation des préjudices s’organise autour de deux grands groupes de postes. Il existe alors : Les préjudices patrimoniaux qui indemnisent les préjudices économiques de la victime, temporaires ou permanents Les préjudices extrapatrimoniaux sont dépourvus d’une valeur économique et comprennent de nombreux préjudices morales, physiques et psychologique. Les préjudices patrimoniaux et extrapatrimoniaux sont soit temporaires avant consolidation, puis permanents après consolidation. La consolidation a été défini par la Commission de réflexion sur la doctrine et la méthodologie de l’évaluation du dommage corporel comme « le moment ou les lésions se fixent et prennent un caractère permanent tel qu’un traitement n’est plus nécessaire si ce n’est pour éviter une aggravation, et qu’il est possible d’apprécier un certain degré d’incapacité permanente réalisant un préjudice définitif. » La date de consolidation est alors primordial pour évaluer le dommage corporel. Tant qu’il n’y a pas de date de consolidation il n’y a pas de réparation possible, seulement des provisions à valoir sur les préjudices. Comment procéder au chiffrage du préjudice corporel ?   A/ Les préjudices patrimoniaux 1) les préjudices patrimoniaux temporaires (avant consolidation) a) les dépenses de santés actuelles Selon Dinthilhac les dépenses de soins avant consolidation sont constituées par tous les frais de santé ayant un lien de causalité entre les dépenses engagées et l’accident. Les frais doivent alors être justifiés par des factures, décompte, feuille de soin ou de remboursement, avec toutes les précisions nécessaires telle que la date, le montant, la nature et les remboursements. Ces frais doivent être intégralement indemnisés. b) les frais divers Il s’agit de tous les frais non susceptibles d’être pris en charge par des organismes sociaux. Il s’agit de tous les frais annexes ayant un lien direct avec le préjudice subi comme les frais de transport afin de consulter des médecins, le recours à une technicienne de surface, les frais de garde des enfants mais aussi les frais de recours à une tierce personne pour porter assistance au quotidien. La liste n’est pas exhaustive, elle comporte tous les frais temporaires apportés, dont la preuve et le montant son établis, et qui imputable à l’accident à l’origine du dommage. Ces frais une fois apportés et justifiés doivent être intégralement indemnisés. c) la perte de gains professionnels actuels La perte de gains professionnels actuels correspond aux pertes de salaires, de rémunération et de revenus salariaux, ou artisanaux pendant la période d’arrêt d’activité professionnelle imputable à l’accident. Les pertes correspondent aux arrêts de travail délivrés par le médecin à condition qu’il existe un lien de causalité avec l’accident. Cette indemnisation est pour les personnes actives et non pour les personnes non actives. Les gains ne peuvent pas être hypothétiques. (Cass.2ème civ, 3 juillet 2014, n°13-22.416) La perte de revenu nets correspond alors au salaire net gagné par la victime avant son accident. 2) les préjudices patrimoniaux permanents (après consolidation) a) les dépenses de santé futures Selon Dintilhac, « les dépenses de santé futures sont les frais hospitaliers, médicaux […] rendus nécessaires par l’état pathologique de la victime après consolidation. » C’est alors au médecin de se prononcer sur les soins médicaux, paramédicaux nécessaire après consolidation pour éviter une aggravation, tout en justifiant l’imputabilité des soins à l’accident. Le médecin doit préciser si les frais sont occasionnels comme un traitement médical limitée ou des séances de kinésithérapeute ou des frais viagers qui existeront toujours la vie de la victime comme des médicaments prescrits à vie, des matériaux pour pallier à certains handicaps etc. b) les frais de logement et véhicule adapté Les frais de logement concernent les frais permanent permettant à une victime de bénéficier d’un logement en adéquation avec son handicap. Il comprend les travaux d’adaptation nécessaire, l’attribution prioritaire aux logements sociaux. Le besoin d’un véhicule adapté peut également être indemnisé selon la nécessité existante de se déplacer. L’indemnisation doit réparer le besoin d’un logement mieux adapté. La prise en charge peut être partiel ou totale. (Cour d’appel de Paris, 25 mars 2014, n°12/01149, Cass.2ème civ, 5 février 2015, n°14-16.015) c) l’assistance permanente par tierce personne Il est nécessaire de constater la perte d’autonomie pour bénéficier d’assistance d’une tierce personne. La perte d’autonomie doit être imputable au fait dommageable. Le médecin expert déterminera le nombre d’heures correspondant aux besoins de la victime et précisera les types de tierce personne nécessaires. Pour calculer l’indemnité il faut alors prendre en compte : La durée Le cout horaire: qui dépendra du type d’assistance nécessaire. Il n’y a pas de cumul possible entre logement thérapeutique et l’assistance permanente par tierce personne. d) les pertes de gains professionnelles futurs et l’incidence professionnelle L’objectif est d’évaluer le retentissement du dommage sur les gains professionnels futurs et l’incidence sur la vie professionnelle. Selon la nomenclature de Dintilhac les pertes réparent les pertes de gains liées à un changement d’activité ou à l’impossibilité de travaillement partiellement, ou totalement selon la situation antérieure de la victime. Ce n’est pas possible en cause d’absence d’incapacité permanente. (Cass. 2ème civ, 7 mars 2019) Les différences seraient également importantes si la victime exerçait une activité professionnelle avant l’accident et a une inaptitude partielle à l’exercice de sa profession ou une inaptitude totale à l’exercice de sa profession. Il existe aussi l’incapacité totale à l’exercice de toute profession. Lorsqu’une victime est sans profession au moment de l’accident, il est possible de chercher à évaluer les pertes de gains professionnels futurs. Il sera pris en compte l’âge, le parcours scolaire, le niveau d’étude. La Cour de Cassation dans sa 2ème chambre le 9 avril 2009 a considéré que pour un étudiant la perte de chance doit être mesurée à la chance perdue. Le poste incidence professionnelle vient compléter la perte de gains professionnelle. Il a pour but d’indemniser la dévalorisation sur le marché du travail, la pénibilité ou l’obligation d’abandonner la profession exercée avant le dommage. Il indemnise alors : La perte de chance définie par la Cour suprême par un arrêt du 21 novembre 2006 n°05-15.674. L’incidence sur la retraite : il est garanti par la loi aux invalides une pension aux taux plein Les frais de reclassement professionnel, de formation, d’aménagement ou de changement de poste La pénibilité accrue au travail La dévalorisation sur le marché du travail. e) le préjudice scolaire, universitaire ou de formation L’objectif est d’indemniser la perte d’année d’étude consécutive à la survenance du dommage. Ce poste est distinct des autres et autonome. La perte d’une ou plusieurs années d’études sont indemnisés forfaitairement tout comme le changement d’orientation à caractère permanent causé par l’accident. (CA Bordeaux, 3 juillet 2017, n°16/01843, Cass.2ème civ 18 mai 2017, n°16-11.190) B/ Les préjudices extra patrimoniaux 1) les préjudices extra patrimoniaux temporaire (avant consolidation) a) le déficit fonctionnel temporaire (DFT) Le groupe de travail Dintilhac a séparé la sphère professionnelle de la victime par deux préjudices distincts, par les pertes de gains professionnels actuels et la sphère personnelle est prise en compte par le déficit fonctionnel temporaire. Le DFT regroupe la fonction qui est à l’origine de la gêne, mais également les troubles dans l’existence, dans la vie courante. Il sera indemnisé plusieurs périodes de gênes temporaires dont le caractère partiel ou total est déterminé par le médecin en pourcentage. Le médecin expert indiquera les durées séquentielles et/ou les dates de début et de fin à l’aide de pourcentage. Le calcul de l’indemnisation se fait ensuite en prenant comme base le smic/ jour divisé par deux et multiplié par le nombre de jour de DFT et le pourcentage déterminé par le médecin Par exemple : 2021 le smic jour est à 58.59 euros nets divisé par deux est égale à 29 euros nets. Si le médecin estime le DFT à 100% pendant 30 jours alors le calcul est de 30 x 29 = 870 euros. Si le médecin estime le DFT à 25% pendant 10 jours alors le calcul est de 10 x (25% de 29) = 72.5 euros Ce déficit ne couvre que la période de la date de l’accident à la date de consolidation. (Cour de Cass, 2ème ch.civ, 8 dec 2016, n°13-22.961). b) les souffrances endurées (SE) Les souffrances endurées ou pretium doloris a été consacrée par la nomenclature de Dintilhac en 2005. Il s’agit d’indemniser les souffrances tant physiques que morales endurées par la victime du fait des atteintes à son intégrité, à sa dignité et à son intimité et des traitements, interventions, hospitalisations qu’elle a subis depuis l’accident jusqu’à la consolidation. Les souffrances ont été quantifiées selon une échelle numérique à 7 degrés enrichie par les médecins experts de demi degrés afin de cerner la réalité des souffrances subies. Selon le barème de l’indemnisation du préjudice corporel des Cours d’Appel de septembre 2020 : L’indemnisation des souffrances endurées et du préjudice esthétique permanent en fonction de la cotation médico-légale peut être la suivante : 1/7 Très léger Jusqu’à 2.000 euros 2/7 Léger 2.000 à 4 000 euros 3/7 Modéré 4 000 à 8 000 euros     4/7 Moyen 8 000 à 20 000 euros     5/7 Assez important 20 000 à 35 000 euros     6/7 Important 35 000 à 50 000 euros 7/7 Très important 50 000 à 80 000 euros     Tout à fait exceptionnel 80      00 euros et plus Le médecin devra préciser les motifs qui l’ont conduit à retenir une cotation plutôt qu’une autre. Les souffrances endurées incluent également la douleur morale avant consolidation. (Cass.2ème ch.civ, 16 sept 2010, n°09-69.433) Une femme victime d’une agression avaient eu d’allouée une somme globale de 14 000 euros pour les souffrances endurées avec un préjudice moral évalué à 10 000 euros. (Cass.2ème civ, 11 sept 2014, n°13-24.344) c) le préjudice esthétique temporaire (PET) Le PET était auparavant indemnisé au poste des souffrances endurées ou du préjudice esthétique permanent. Il a été introduit par le groupe de travail Dintilhac pour tenir compte des dommages esthétiques graves comme les grands brulés : « la victime subissait bien souvent des atteintes physiques […] aux conséquences personnelles très préjudiciables, liées à la nécessité de se présenter dans un état physique altéré. » Pour prononcer l’existence d’un dommage esthétique temporaire, distinct de tout autre poste, l’expert prend en compte quatre items : la nature, la localisation, l’étendue et la durée des doléances. Il devra en déduire le poste correspondant en argumentant. Ce préjudice est autonome et nécessite une indemnisation personnelle. Il est également mesuré sur une échelle de 7. La chambre criminelle considère que le préjudice esthétique temporaire se confond avec le préjudice esthétique permanent. Il existe une divergence entre les juges du fond. (Cass, ch. Crim, 18 fev 2014, n°12-87.629) 2) les préjudices extra patrimoniaux permanents (après consolidation) a) le déficit fonctionnel permanent (DFP) Selon Dintilhac, ce poste de préjudice doit réparer la perte du potentiel physique, soit l’autonomie personnelle que vit la victime dans ses activités journalières, ainsi que tous les déficits fonctionnels spécifiques qui demeurent après la consolidation. Il s’ajoute les phénomènes douloureux et les répercussions psychologiques, et notamment le préjudice moral et les troubles dans les conditions d’existence (personnelles, familiales et sociales) Il inclut selon la Cour de cassation « les atteintes aux fonctions psychologiques, la perte de la qualité de vie et les troubles ressentis par la victime dans ses conditions d’existence personnelles, familiales et sociales. » (Cass, 2èmeciv, 29 juin 2017, n°16-17.864) L’indemnité réparant le déficit fonctionnel est fixée en multipliant le taux du déficit fonctionnel par une valeur du point. La valeur du point est elle-même fonction du taux retenu par l’expert et de l’âge de la victime à la consolidation. Elle est d’autant plus élevée que le taux est plus fort et que l’âge de la victime est plus faible b) le préjudice d’agrément Ce poste de préjudice répare l’impossibilité pour la victime de pratiquer régulièrement une activité spécifique sportive ou de loisirs et non plus, comme auparavant, la perte de qualité de vie subie après consolidation laquelle est prise en compte au titre du déficit fonctionnel permanent (Cass. 2e Civ., 28 mai 2009, n° 08-16.829 ; Civ. 2e, 9 févr. 2017, no 16-11.219) La jurisprudence des cours d’appel ne limite pas l’indemnisation du préjudice d’agrément à l’impossibilité de pratiquer une activité sportive ou de loisirs exercée antérieurement à l’accident. Elle indemnise également les limitations ou les difficultés à poursuivre ces activités. (Civ. 2ème, 29 mars 2018, n°17-14.499), ainsi que l’impossibilité psychologique de pratiquer l’activité antérieure (Civ. 2ème, 5 juillet 2018, n° 16-21,776). Pour la période avant la consolidation, le préjudice d’agrément n’est pas autonome et inclus dans le déficit fonctionnel temporaire. c) le préjudice esthétique permanent Pour évaluer le préjudice l’expert devra qualifier le dommage esthétique uniquement en fonction de l’importance de la lésion provoquant une disgrâce et de son emplacement vis-à-vis du regard des autres dans les conditions normales de la vie sociale. Il doit alors motiver son choix sur les éléments constitutifs de ce dommage. Afin d’individualisé l’indemnisation et sur la base de la cotation retenue par l’expert, l’indemnisation prend en compte l’âge, le sexe, la nature et la localisation de l’atteinte esthétique. Elle est notée en fonction de la cotation médico-légale sur une échelle de 7. Selon le barème de l’indemnisation du préjudice corporel des Cours d’Appel de septembre 2020 : L’indemnisation des souffrances endurées et du préjudice esthétique permanent en fonction de la cotation médico-légale peut être la suivante : 1/7 Très léger Jusqu’à 2.000 euros 2/7 Léger 2.000 à 4 000 euros 3/7 Modéré 4 000 à 8 000 euros     4/7 Moyen 8 000 à 20 000 euros     5/7 Assez important 20 000 à 35 000 euros     6/7 Important 35 000 à 50 000 euros 7/7 Très important 50 000 à 80 000 euros     Tout à fait exceptionnel 80      00 euros et plus d) Le préjudice sexuel Le préjudice sexuel correspond à l’impossibilité totale ou partielle où se trouve la victime, du fait des séquelles traumatiques qu’elle présente, soit d’accomplir l’acte sexuel, soit de procréer ou de se reproduire d’une manière normale. Il convient de distinguer trois types de préjudices de nature sexuelle : Le préjudice morphologique lié à l’atteinte aux organes sexuels résultant du dommage subi, Le préjudice lié à l’acte sexuel lui-même qui repose sur la perte du plaisir lié à l’accomplissement de l’acte sexuel (perte de l’envie ou de la libido, perte de la capacité physique de réaliser l’acte sexuel, perte de la capacité à accéder au plaisir), Le préjudice lié à une impossibilité ou difficulté à procréer (ce préjudice pouvant notamment chez la femme se traduire sous diverses formes comme le préjudice obstétrical etc.). Il n’existe pas de taux et l’évaluation se fait au cas par cas en fonction des conséquences précises du dommage, de l’âge et de la situation de la victime. Le préjudice sexuel temporaire est pris en compte dans le déficit fonctionnel temporaire. (Cass, 2ème civ, 11 déc. 2014, n°13-28.774) e) le préjudice d’établissement Le préjudice d’établissement correspond à la perte d’espoir ou de chance d’avoir une vie de famille et un projet dans une vie « normale ». (CA Lyon, 7 avril 2016, n°14/01908) Il concerne les personnes jeunes atteintes d’un handicap grave. Le fait d’avoir déjà des enfants ou d’être en mesure d’en concevoir ne permet pas de retenir le préjudice d’établissement. (Cour d’appel de Riom, 20 novembre 2018, n°17/00856) f) les préjudices permanents exceptionnels Il s’agit de préjudice atypique, en raison de la nature des victimes, des circonstances de l’accident ou de la nature de l’accident à l’origine du dommage. Il s’agit par exemple des victimes collectifs ou individuels d’attentats. C/ Les victimes indirectes Les victimes indirectes sont les proches, compagnon, mari et enfants d’une victime directe d’un fait dommageable. 1/ préjudices patrimoniaux a) perte de revenu des proches A la suite d’un accident, des proches peuvent être amenés à arrêter leur activité professionnelle pour assurer une présence. Les parents d’un mineur victime d’un accident peuvent arrêter leur activité et dans ce cas souffrir d’un préjudice. b) frais divers Les frais divers de déplacement ou d’hébergement peuvent également être remboursés sur justificatif et par la justification du fait dommageable. 2/ préjudices extra-patrimoniaux a) préjudice d’affection Il s’agit du préjudice moral causé par les blessures, handicaps, les souffrances subies par la victime directe. Il sera indemnisé en fonction de l’importance du dommage et l’existence d’une relation affective réelle avec la victime. b) préjudices exceptionnels Les troubles dans l’existence des proches de victime suite à un handicap ou un préjudice sexuel par ricochet sur le conjoint doivent être indemnisés de manière personnalisé et limitée aux personnes qui partagent une communauté de vie avec la victime. CONCLUSION : Pour conclure, le chiffrage du préjudice corporel doit obligatoirement couvrir tout le dommage et rien que le dommage. C’est-à-dire prendre en compte les préjudices patrimoniaux et extra-patrimoniaux temporaires, et ce avant consolidation puis permanent après consolidation. La survenance de la consolidation est d’une grande importance pour établir le chiffrage. L’absence de consolidation rend le chiffrage provisoire. Il est impératif de vérifier que tous les différents préjudices indemnisables apparaissent dans le chiffrage. Il arrive bien souvent que dans le rapport d’expertise, l’expert ne fasse pas état des dépenses de santé, des soins futurs ou des pertes de gain professionnelles futurs ainsi que l’incidence professionnelle. Il sera alors essentiel de rajouter les postes d’indemnisations qui pourraient manquer à l’expertise afin d’obtenir le chiffrage du préjudice corporel. Les victimes indirectes d’un dommage corporel doivent également être prises en compte lorsque les faits l’indiquent.        
L’état d’inconscience m’empêche-t-il d’invoquer le préjudice des souffrances endurées ?   Le préjudice des souffrances endurées est un préjudice extrapatrimonial qui peut être invoqué par la victime au titre des préjudices subis avant ou après la consolidation de son dommage. La nomenclature Dintilhac a défini les souffrances endurées comme « les souffrances physiques et psychiques, ainsi que des troubles associés, que doit endurer la victime ». La question qui s’est donc posée était celle de savoir si une victime peut invoquer ce préjudice alors qu’elle se trouve dans un état d’inconscience. Dans un arrêt du 25 juin 2019, la Cour de cassation a répondu à cette problématique (Cass. crim, 25 juin 2019, n°18-82.655).   En l’espèce, après avoir été poursuivi pour homicide involontaire sous l’emprise de stupéfiants, le prévenu a été condamné à payer diverses sommes aux parties civiles notamment la somme de 15 000 euros au titre des souffrances endurées. La Cour d’appel a énoncé qu’il ne résulte pas du certificat médical que l’état comateux de la victime la privait de toute conscience et des douleurs endurées par les multiples lésions et fractures dont elle souffrait. La Cour de cassation a confirmé cette décision en affirmant que l’état d’inconscience n’est pas de nature à réduire ou à exclure la réparation du préjudice corporel.    Comment est évalué ce préjudice ? Selon le référentiel Mornet, pour chiffrer ce préjudice, l’expert évalue les souffrances endurées sur une échelle à 7 degrés (1 correspondant à « très léger » et 7 à « exceptionnel »). Ensuite, pour connaître le montant de l’indemnisation, un barème donne une fourchette correspondant à chaque degré de cette échelle : 1/7 Très léger : Jusqu’à 2.000 euros 2/7 Léger : 2.000 à 4.000 euros 3/7 Modéré : 4.000 à 8.000 euros 4/7 Moyen : 8.000 à 20.000 euros 5/7 Assez important : 20.000 à 35.000 euros 6/7 Important : 35.000 à 50.000 euros 7/7 Très important : 50.000 à 80.000 euros Exceptionnel : 80.000 euros et plus   Pour plus de détail, voir l’article « INDEMNISATION / Comment optimiser son indemnisation après un accident de la circulation »
Le préjudice esthétique temporaire et permanent : une distinction essentielle en droit du dommage corporel Le préjudice esthétique, une composante clé du droit du dommage corporel, se réfère à l’altération de l’apparence physique d’une victime à la suite d’un accident, d’une négligence ou d’une faute d’un tiers. Une atteinte à l’apparence physique peut avoir des répercussions significatives sur la vie personnelle, professionnelle et sociale de la victime. Dans le cadre de l’indemnisation des victimes, il est crucial de distinguer entre le préjudice esthétique temporaire et permanent, en raison des différences notables dans leur impact sur la victime, leur durée et leur caractère irréversible. Le préjudice esthétique temporaire Le préjudice esthétique temporaire désigne une altération de l’apparence physique qui, bien que visible et souvent traumatisante à court terme, est appelée à disparaître avec le temps, ou grâce à des soins médicaux appropriés. Les séquelles de ce type de préjudice sont généralement transitoires et ne laissent pas de trace permanente. Exemples et évaluation du préjudice esthétique temporaire Ce type de préjudice peut résulter de divers incidents, tels que des accidents, des interventions chirurgicales ou des traitements médicaux temporaires. Les exemples incluent : Cicatrices post-opératoires : cicatrices qui s’atténuent avec le temps grâce à des soins médicaux ou à des traitements esthétiques. Œdèmes ou hématomes : résidu d’un accident, qui disparaît en quelques jours ou semaines. Brûlures superficielles : cicatrices légères guérissant après un traitement médical. L’évaluation du préjudice esthétique temporaire repose sur plusieurs critères : L’intensité de l’altération physique : une altération mineure, comme une petite ecchymose, aura un impact beaucoup moins significatif qu’une cicatrice importante. La durée de la défiguration : la période durant laquelle la victime est défigurée joue un rôle crucial dans l’appréciation du préjudice. Plus la défiguration dure longtemps, plus l’indemnisation est importante. L’impact psychologique : les souffrances morales, telles que la gêne sociale ou l’anxiété liées à l’apparence, sont également prises en compte. La jurisprudence reconnaît que, même pour un préjudice esthétique temporaire, la souffrance émotionnelle est un facteur déterminant pour l’indemnisation. Dans l’arrêt de la Cour d’appel de Paris du 12 mars 2019, il a été jugé qu’un préjudice esthétique temporaire, comme une brûlure au visage, justifie une indemnisation en raison de la souffrance morale causée pendant la période de cicatrisation. Le préjudice esthétique permanent Le préjudice esthétique permanent résulte d’une altération définitive de l’apparence physique. Contrairement au préjudice temporaire, l’atteinte à l’apparence est irréversible et laisse des séquelles visibles qui affectent durablement la vie de la victime, tant sur le plan psychologique que social.     Exemples de préjudice esthétique permanent Les blessures qui entraînent un préjudice esthétique permanent peuvent inclure des accidents graves, des interventions chirurgicales traumatisantes ou des pathologies ayant des conséquences irréversibles sur l’apparence physique. Les exemples typiques incluent : Cicatrices profondes : cicatrices visibles et permanentes qui ne peuvent pas être corrigées par des traitements médicaux. Amputation : la perte d’un membre ou d’une partie du corps, ayant un impact esthétique majeur et irréversible. Déformations faciales : accidents graves ou maladies entraînant des déformations irréversibles du visage ou du corps. L’évaluation du préjudice esthétique permanent se fonde sur des critères similaires à ceux du préjudice temporaire, mais l’impact psychologique et social est pris en compte de manière beaucoup plus significative. Les experts médicaux utilisent souvent une échelle de 1 à 7 pour évaluer la gravité du préjudice, le niveau 7 représentant un préjudice esthétique particulièrement grave et dégradant. Jurisprudence et indemnisation du préjudice esthétique permanent En matière de préjudice esthétique permanent, la jurisprudence reconnaît qu’il doit être indemnisé indépendamment du préjudice fonctionnel, c’est-à-dire des atteintes aux capacités physiques ou fonctionnelles de la victime. En effet, l’indemnisation du préjudice esthétique permanent tient compte à la fois de l’impact physique et des conséquences sociales et psychologiques durables de l’altération de l’apparence. La Cour de cassation, dans un arrêt du 28 janvier 2016, a affirmé que l’indemnisation du préjudice esthétique permanent devait être distincte de l’indemnisation pour préjudice fonctionnel et évaluer son impact sur la vie quotidienne de la victime. Ainsi, dans une affaire jugée par la Cour d’appel de Lyon en 2021, une victime ayant subi une défiguration permanente au visage à la suite d’un accident de la route a obtenu une indemnisation élevée, non seulement pour la douleur physique, mais aussi pour la gêne sociale et les difficultés personnelles liées à son apparence. Conclusion Le préjudice esthétique, qu’il soit temporaire ou permanent, constitue un aspect essentiel du droit du dommage corporel. Il est crucial de distinguer ces deux types de préjudice, car leur évaluation et leur indemnisation diffèrent en fonction de la durée, de l’intensité et des répercussions psychologiques sur la victime. La jurisprudence et les principes établis par la Cour de cassation affirment que le préjudice esthétique, qu’il soit temporaire ou permanent, doit être réparé de manière équitable, en tenant compte des souffrances physiques et psychologiques vécues par la victime. Cela garantit une indemnisation juste, tenant compte de l’impact global de l’atteinte à l’apparence de la victime, qu’elle soit transitoire ou irréversible.
Les étapes pour qu’une victime d’un dommage corporel obtienne indemnisation   En matière de responsabilité civile, le dommage est l’une des conditions nécessaires pour obtenir une indemnisation. Celui-ci peut être corporel, matériel et/ou moral. Le dommage corporel est l’atteinte portée à l’intégrité physique d’une personne. Pour pouvoir donner lieu à une indemnisation, le dommage doit être certain, direct et personnel. En droit de la responsabilité civile, il existe un principe fondateur qui est celui de la réparation intégrale du préjudice. Ainsi, l’auteur des faits doit indemniser intégralement le dommage et rien que le dommage c’est-à-dire sans qu’il ne résulte un appauvrissement ou un enrichissement pour la victime. Ce principe découle de l’article 1240 du Code civil selon lequel « Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ». C’est sur la base de ce principe que sera effectué le calcul de l’indemnisation afin que celle-ci corresponde à la réalité du préjudice subi par la victime. Dans cet article, seront listées les différentes étapes pour obtenir une indemnisation en cas de dommages corporels.   1.Faire constater le dommage  La victime doit faire constater son dommage par un médecin. Il peut s’agir d’un médecin libéral ou encore d’un service d’urgence. Le certificat médical établi par ce médecin mentionnera les dommages subis par la victime et les éventuelles ITT.   2.La désignation de l’avocat et du médecin-conseil   Le rôle de l’avocat : En cas de dommages corporels, la victime a intérêt à se faire assister par un avocat qui l’assistera tout au long de la procédure pour défendre ses intérêts. En outre, l’avocat aura pour rôle de qualifier juridiquement les constatations médicales et d’évaluer les préjudices subis par la victime.   Le rôle du médecin-conseil :  De la même manière que l’avocat, le médecin-conseil assiste et défend les intérêts de la victime tout au long de la procédure et notamment lors de l’expertise médicale. Lors de cette expertise, il prendra soin de vérifier que l’ensemble des préjudices subis par la victime soient pris en compte.   Constituer un dossier médical Pour pouvoir être indemnisé, la victime doit constituer un dossier médical. Celui-ci doit être le plus complet possible. Ce dossier médical est constitué de l’ensemble des documents permettant de prouver les circonstances dans lesquels le dommage s’est produit ainsi que les conséquences de celui-ci. Il peut notamment être constitué des pièces justificatives suivantes : Certificat médical Compte rendu d’hospitalisation Correspondance entre médecins Procès-verbaux Photographies des blessures Arrêt de travail Attestation de témoin Justificatif relatif à la situation familial (ex : livret de famille) Activité sportive ou de loisirs réalisés antérieurement à la survenance du dommage   A ce stade, le rôle de l’avocat et du médecin-conseil est essentiel car ils aident la victime afin de lui permettre de constituer le dossier médical le plus complet.   3.La réalisation d’une expertise Cette étape est cruciale dans l’évaluation du préjudice car l’expert va déterminer l’étendue du dommage et déterminer si les préjudices sont en lien avec le dommage. Cet expert est désigné par le juge. La demande doit être faite par le biais d’un référé :   Devant les juridictions pénales si les faits sont constitutifs d’une infraction pénale (articles 156 et suivants du Code de procédure pénale)   Devant les juridictions civiles si l’auteur des faits est un sujet de droit civil (articles 263 et suivants du Code de procédure civile)   Devant les juridictions administratives si l’auteur du dommage est un préposé d’un organisme public (articles R621-1 et suivants du Code de justice administrative)   L’expert a l’obligation de répondre aux questions de la mission (articles 238 du Code de procédure civile, 161 du Code de procédure pénale et R621-9 du Code de justice administrative). Ainsi, le rôle de l’avocat est essentiel car il sera chargé d’exposer de façon précise les questions qu’il souhaite poser à l’expert. En outre, au cours de cette expertise, la présence du médecin-conseil est fondamentale pour défendre au mieux les intérêts de la victime et s’assurer que l’ensemble des préjudices soient pris en compte sans les imputer à un état antérieur. A l’issue de cette expertise, l’expert va remettre un rapport. C’est sur la base de ce rapport que l’avocat va procéder au chiffrage des préjudices.   4.L’évaluation des préjudices subis par la victime Le dommage fait naître des préjudices patrimoniaux et/ou extrapatrimoniaux. Les préjudices patrimoniaux représentent la perte subie ou le gain manqué. Les préjudices extrapatrimoniaux englobent les atteintes portées à un intérêt qui n’est pas pécunier, donc à un intérêt moral. Ces différents postes de préjudices ont été regroupés au sein de la nomenclature Dintilhac. Cette liste, non exhaustive, n’a aucune valeur normative mais est cependant utilisée par les tribunaux ainsi que par les experts. Cette nomenclature effectue une distinction entre les préjudices temporaires (avant consolidation) et permanents (après consolidation) : Les préjudices patrimoniaux temporaires (avant consolidation) Dépenses de santé : il s’agit des frais hospitaliers, médicaux, paramédicaux et pharmaceutiques et assimilés qui ont été à la charge de la victime avant la consolidation. Pertes de gains professionnels : il s’agit des répercussions du dommage sur la sphère professionnelle de la victime jusqu’à sa consolidation. Assistance temporaire par tierce personne : ce poste comprend les dépenses qui visent à indemniser le coût pour la victime de la présence nécessaire d’une tierce personne pour l’assister de manière quotidienne du jour de l’accident jusqu’à la consolidation. Il est important de préciser que l’assistance bénévole, même d’un membre de la famille, n’exclut pas l’indemnisation de ce préjudice. C’est ce qu’a affirmé la Cour de cassation dans un arrêt du 22 mai 2019 (Civ 1ère, 22 mai 2019, n°18-14.063). De plus, les juges de la Haute Cour ont pris le soin de rappeler que ce poste de préjudice englobe l’assistance dans les actes de la vie quotidienne mais également l’assistance dans la sphère professionnelle. Frais divers : ce poste vise à indemniser les frais susceptibles d’être exposés par la victime avant la date de consolidation (ex : honoraires des médecins, frais de transports…).   Les préjudices patrimoniaux permanents (après consolidation) Dépenses de santé : ce poste comprend les frais hospitaliers, médicaux, paramédicaux, pharmaceutiques et assimilés, même occasionnels, postérieurs à la consolidation de la victime. Frais de logement adapté : il s’agit des frais qui sont à la charge de la victime pour adapter son logement à son handicap ou des frais liés à l’acquisition d’un logement mieux adapté après la consolidation. Frais de véhicule adapté : ce poste de préjudice vise à indemniser les dépenses nécessaires pour procéder à l’adaptation d’un véhicule aux besoins de la victime atteinte d’un handicap permanent. Assistance permanente par tierce personne : elle concerne les dépenses qui visent à indemniser, le coût pour la victime de la présence nécessaire d’une tierce personne pour l’assister de manière quotidienne après la consolidation. Perte de gains professionnels : elle vise à indemniser la victime de la perte ou de la diminution de ses revenus consécutive à l’incapacité permanente, partielle ou totale, à laquelle elle est désormais confrontée dans la sphère professionnelle (ex : perte de l’emploi, emploi exercé à temps partiel…). Par un arrêt rendu le 24 juillet 2019 (n°4086624), le Conseil d’Etat a considéré que la victime qui se trouve privée de toute possibilité d’exercer un jour une activité professionnelle en raison d’un accident corporel survenu dans son jeune âge, peut obtenir une indemnisation au titre de la perte de gain professionnel. La seule circonstance qu’il soit impossible de déterminer le parcours professionnel qu’elle aurait suivi ne fait pas obstacle à ce que soit réparé le préjudice qui doit être regardé comme présentant un caractère certain résultant de la perte des revenus qu’une activité professionnelle lui aurait procuré et de la pension de retraite consécutive. Préjudice scolaire, universitaire ou de formation : ce poste a pour objet de réparer la perte d’année(s) d’études scolaires, universitaires, de formation ou autre consécutive à la survenance du dommage (ex : retard dans l’apprentissage, modification d’orientation…).   Préjudice extrapatrimoniaux temporaires (avant consolidation) Déficit fonctionnel temporaire : il a pour objet d’indemniser l’incapacité totale ou partielle subie par la victime dans sa sphère personnelle du jour de l’accident jusqu’à la consolidation (ex : périodes d’hospitalisation, perte de la qualité de vie et des joies usuelles de la vie courante…). Souffrances endurées temporaires : ce poste comprend l’indemnisation de toutes les souffrances physiques et psychiques, ainsi que des troubles associés, que doit endurer la victime du jour de l’accident jusqu’à celui de la consolidation. Il est important de préciser que la Cour de cassation considère que l’état d’inconscience de la victime n’est pas de nature à réduire ou à exclure le préjudice résultant des souffrances endurées (Cass. crim, 25 juin 2019, n°18-82.655). Préjudice esthétique temporaire : il vise à indemniser les conséquences de l’altération de l’apparence physique temporaire de la victime.   Préjudice extrapatrimoniaux permanents (après consolidation) Déficit fonctionnel permanent : ce préjudice est relatif à l’atteinte portée aux fonctions physiologiques de la victime (telle que la réduction du potentiel physique, psychosensorielle ou intellectuelle), qui demeure même après la consolidation. Souffrances endurées permanentes : ce poste de préjudice a pour objet l’indemnisation des souffrances physiques et psychiques, ressenties par la victime de façon permanente après la consolidation. Préjudice d’agrément : il vise à réparer la perte de la qualité de vie et les troubles dans les conditions d’existence que la victime rencontre au quotidien après la consolidation ainsi que la gêne ou l’impossibilité pour la victime de pratiquer régulièrement une activité sportive ou de loisirs. Par un arrêt du 29 mars 2018, la Cour de cassation a considéré que pour invoquer le préjudice d’agrément, la limitation de l’activité sportive ou de loisirs peut suffire (2 civ, 29 mars 2018, n° 17-14.499). Préjudice esthétique permanent : ce poste de préjudice vise à indemniser les conséquences permanentes de l’altération de l’apparence physique de la victime. Ce poste de préjudice englobe les conséquences dommageables de l’apparence physique, notamment des hématomes, cicatrices, des troubles de la voix ou de l’élocution mais également des anomalies dans la démarche. Préjudice sexuel : il vise à réparer les préjudices touchant à la sphère sexuelle qui inclut le préjudice morphologique (atteinte aux organes sexuels primaires et secondaires), le préjudice lié à l’acte sexuel lui-même qui repose sur la perte du plaisir et le préjudice lié à une impossibilité ou une difficulté à procréer. Préjudice d’établissement : ce poste de préjudice cherche à indemniser la perte d’espoir, de chance ou de toute possibilité de réaliser un projet de vie familiale en raison de la gravité du handicap permanent, dont reste atteinte la victime après sa consolidation. La Cour de cassation a précisé qu’en cas de séparation ou de dissolution d’une précédente union, la victime peut invoquer le préjudice d’établissement même si elle a déjà pu, par le passé, réaliser un projet familial (Civ 2e, 4 juillet 2019, n°18-19.592). En revanche, en l’absence de séparation ou de dissolution d’une précédente union, la Cour de cassation refuse d’indemniser la victime sur le fondement du préjudice d’établissement. Préjudices permanents exceptionnels : ce poste a pour objet d’indemniser, à titre exceptionnel, tel ou tel préjudice extrapatrimonial permanent, particulier et non indemnisable au titre d’un autre poste (ex : impossibilité physique d’accomplir des gestes strictement liés à sa culture).
La gestion de l’indemnisation d’un préjudice spécifique d’angoisse des victimes d’actes de terrorisme   Cass., civ.2, 27 octobre 2022, n°21-12.881   Le Fonds de garantie des victimes d’actes de terrorisme et d’autres infractions (FGTI) La victime d’un acte de terrorisme, ou ses ayant droit, peut demander l’indemnisation de son préjudice auprès du Fonds de Garantie des victimes des actes de Terrorisme et d’autres Infractions (FGTI). Cela est régi par les articles L422-1 et suivants du code des assurances.   Les conditions de nationalité Lorsque les faits ont eu lieu en France, toutes les victimes et ayant droit peuvent saisir le FGTI pour être indemnisé de leur préjudice, peu importe leur nationalité. Toutefois, lorsque les faits se sont déroulés à l’étranger, seules les victimes de nationalité française peuvent demander l’indemnisation de leur préjudice auprès du FGTI. Dans cette situation, les ayant droit peuvent être de n’importe quelle nationalité.   Le délai pour agir La victime ou les ayant droit peuvent saisir le FGTI pour bénéficier d’une indemnisation jusqu’à dix ans après la date de consolidation du dommage.   L’arrêt du 27 octobre 2022 Par un arrêt du 27 octobre 2022, la Cour de cassation a précisé les modalités d’indemnisation d’une victime d’un dommage corporel. Il était question d’une personne de nationalité française demandant l’indemnisation de son préjudice au titre de souffrances endurées et d’un préjudice spécifique situationnel d’angoisse pour des faits d’enlèvement à l’étranger par un groupe terroriste et séquestration sous la menace d’atteinte à la vie pendant plus de trois ans. La cour d’appel avait accordé une indemnisation totale de 864 918,30 euros au titre des pertes de gains professionnels futurs, de l’incidence professionnelle, du déficit fonctionnel permanent et des souffrances endurées. Le FGTI reprochait à la cour d’appel d’avoir indemnisé, parmi ces sommes, deux fois le poste d’incidence professionnelle. La Cour de cassation a confirmé la décision rendue par la cour d’appel et précise que la cour d’appel a appliqué correctement le principe de réparation intégrale du préjudice de la victime, sans perte ni profit. En effet, la juridiction d’appel a indemnisé la victime d’une part pour l’incidence professionnelle, en raison de l’inactivité professionnelle de la victime, l’empêchant de s’épanouir professionnellement et lui faisant perdre une partie de son existence sociale, et d’autre part pour le déficit fonctionnel permanent en raison des séquelles de la victime entraînant des atteintes aux fonctions physiologiques et une perte de qualité de vie et des troubles dans les conditions d’existence personnelles, familiales et sociales. Dès lors, la cour d’appel n’avait pas indemnisé la victime deux fois pour le même poste de préjudice. Les sommes allouées à la victime ont donc été maintenues.   Une problématique actuelle Les menaces terroristes et actes de terrorisme dont fait face la France depuis plusieurs mois / années entrainent le déploiement du niveau « Urgence attentat » du plan Vigipirate, appliqué sur l’ensemble du territoire national. Dès lors, il semble important que la question de l’indemnisation des dommages corporels soit mise en avant afin que toutes les victimes et leurs ayant droit aient connaissance de leur possibilité de bénéficier d’une indemnisation du préjudice corporel subi.
  L’évaluation du préjudice corporel est une opération aussi délicate que décisive. Elle repose traditionnellement sur l’expertise médicale humaine, guidée par la nomenclature Dintilhac et des barèmes indicatifs. Pourtant, à l’heure où l’intelligence artificielle (IA) s’immisce dans de nombreux domaines de la santé et du droit, une question s’impose : l’IA est-elle en passe de transformer, voire d’améliorer, l’évaluation du dommage corporel ? Entre espoir d’objectivité, défis éthiques et risques d’automatisation excessive, l’avenir semble partagé entre innovation et prudence. Une évaluation médicale encore trop hétérogène Actuellement, l’évaluation d’un préjudice corporel repose sur des critères médicaux (atteintes fonctionnelles, douleurs, séquelles, etc.) mais aussi sur une part d’appréciation subjective du médecin expert. Deux experts peuvent parfois aboutir à des conclusions différentes pour un même patient. Cette hétérogénéité engendre des risques d’inégalités dans l’indemnisation, notamment en fonction du tribunal saisi, de la spécialité de l’expert ou de la méthodologie appliquée. C’est dans ce contexte que l’IA, avec ses capacités d’analyse massive de données et de détection de régularités, apparaît comme un outil prometteur pour uniformiser, rationaliser, voire fiabiliser cette évaluation. L’apport potentiel de l’intelligence artificielle L’IA peut intervenir à plusieurs niveaux de l’évaluation du dommage corporel : Analyse de dossiers médicaux : grâce au traitement automatique du langage, des algorithmes peuvent extraire les informations cliniques pertinentes à partir de dossiers complexes. Assistance au diagnostic et à l’évaluation fonctionnelle : certains outils d’IA sont capables de prédire l’évolution des séquelles, de modéliser la perte de capacité, voire de suggérer une quantification du déficit fonctionnel permanent (DFP). Comparaison avec des cas similaires : en s’appuyant sur des bases de données de jurisprudence ou de décisions d’expertise, l’IA peut proposer des évaluations comparatives, contribuant à une meilleure égalité de traitement. De tels outils pourraient assister les experts, sans les remplacer, en leur fournissant une aide à la décision fondée sur des données objectives, historiques et statistiquement fondées. Des limites techniques, éthiques et juridiques Toutefois, l’introduction de l’IA dans un domaine aussi sensible soulève de nombreuses interrogations. La première est celle de l’opacité : les algorithmes, notamment ceux dits « boîte noire », ne permettent pas toujours de justifier la logique ayant conduit à une recommandation. Or, la réparation du dommage corporel est un droit fondamental qui exige transparence et contradiction. Ensuite, le risque de déshumanisation est réel. Le préjudice corporel ne se réduit pas à des chiffres : il englobe la douleur, la souffrance morale, la perte d’autonomie ou encore le préjudice d’agrément. Autant d’éléments difficilement quantifiables, qui exigent une écoute et une sensibilité humaine que l’IA ne saurait remplacer. La Cour de de justice de l’Union européenne a considéré au sujet du traitement des données des passagers que : « les autorités compétentes ne peuvent prendre, en vertu de l’article 7, paragraphe 6, première phrase, de la directive PNR, aucune décision produisant des effets juridiques préjudiciables à une personne ou l’affectant de manière significative sur la seule base du traitement automatisé de données PNR, ce qui implique, dans le cadre de l’évaluation préalable, qu’elles doivent prendre en compte et, le cas échéant, faire prévaloir le résultat du réexamen individuel opéré par des moyens non automatisés par l’UIP sur celui obtenu par les traitements automatisés. » CJUE, n° C-817/19, Arrêt de la Cour, Ligue des droits humains contre Conseil des ministres, 21 juin 2022 Enfin, se pose la question de la responsabilité : qui serait responsable en cas d’erreur d’évaluation liée à un outil algorithmique ? L’expert ? Le concepteur du logiciel ? Le juge ? Le flou juridique actuel impose une vigilance particulière. Le rapport Villani (2018) sur l’intelligence artificielle en France souligne que l’IA doit rester « sous le contrôle de l’homme » dans toutes ses applications critiques, notamment dans les domaines juridiques et médicaux. Vers une intelligence artificielle « augmentée » et encadrée Plutôt que de remplacer l’expert, l’IA pourrait l’assister de manière éthique et encadrée. L’objectif serait de concevoir une « intelligence augmentée », c’est-à-dire un outil d’aide à la décision, contrôlé par le médecin, validé par les autorités sanitaires et soumis au contradictoire judiciaire. Des expérimentations existent déjà, notamment dans les compagnies d’assurance et certains cabinets d’expertise médicale, mais elles restent marginales et souvent confidentielles. Il devient donc crucial de développer une réglementation claire, qui encadre l’usage de ces technologies tout en garantissant les droits des victimes.  
Pour invoquer le préjudice d’agrément, la limitation de l’activité sportive ou de loisirs peut suffire (2 civ, 29 mars 2018, n° 17-14.499)   En matière de responsabilité civile, le dommage est l’une des conditions nécessaires pour obtenir une indemnisation. Celui-ci peut être corporel, matériel et/ou moral. Le dommage corporel est l’atteinte portée à l’intégrité physique d’une personne. Ce dommage fait naître des préjudices patrimoniaux ou extrapatrimoniaux. Les préjudices patrimoniaux représentent la perte subie ou le gain manqué. Les préjudices extrapatrimoniaux englobent les atteintes portées à un intérêt qui n’est pas pécunier, donc à un intérêt moral. Au titre de ces préjudices extrapatrimoniaux, il existe le préjudice d’agrément. Après une longue hésitation sur la définition du préjudice d’agrément, la Cour de cassation l’a défini dans un arrêt du 28 mai 2009 (2 civ, 28 mai 2009, n°08-16.829) « le préjudice d’agrément vise exclusivement l’indemnisation du préjudice lié à l’impossibilité pour la victime de pratiquer régulièrement une activité spécifique sportive ou de loisirs ». Cette définition est appliquée de manière constante par la Cour de cassation. Ainsi, pour pouvoir invoquer ce préjudice, l’exercice de cette activité doit être antérieure à la survenance du dommage et pratiquée de manière régulière. Une difficulté s’est donc posée dans l’arrêt rendu par la 2ème chambre civile le 29 mars 2018 (2 civ, 29 mars 2018, n° 17-14.499). En l’espèce, après avoir été victime d’une agression, un individu a saisi une commission d’indemnisation des victimes d’infractions afin d’obtenir réparation de ses préjudices. Au titre de ces préjudices, il a invoqué le préjudice d’agrément. En effet, avant son agression, la victime pratiquait en compétition de nombreuses activités sportives. Or, depuis son agression, il continuait de pratiquer régulièrement des activités sportives mais de manière moins intense. Son état physique le permettait uniquement de pratiquer ces activités de manière modérée non plus pour participer à des compétitions sportives mais dans une finalité thérapeutique. La question qui se posait était celle de savoir si la victime pouvait invoquer le préjudice d’agrément alors qu’elle continuait à pratiquer régulièrement une activité sportive mais de façon modérée. La Cour de cassation a répondu par l’affirmative en considérant que « le préjudice d’agrément est constitué par l’impossibilité pour la victime de continuer à pratiquer régulièrement une activité spécifique sportive ou de loisirs ; que ce poste de préjudice inclut la limitation de la pratique antérieure ».
Explications sur le préjudice d’angoisse de mort imminente, un préjudice récemment consacré   Définition Préjudice récent et complexe, il a été défini par la Cour d’appel d’AIX-EN-PROVENCE comme « la souffrance morale et psychologique liée à la conscience d’une mort imminente » et « suppose un état de conscience, et pendant un temps suffisant pour envisager sa propre fin » (CA d’AIX EN PROVENCE, 30 juin 2016, n°15/07185). La Cour d’appel de DOUAI l’a défini comme « le préjudice résultant pour la victime, de la douleur engendrée par la conscience du caractère inéluctable de sa mort prochaine » (CA de DOUAI, 12 avril 2018, n°17/0363). Le préjudice d’angoisse de mort imminente est donc constitué de la souffrance que vit la victime liée à la conscience de sa mort prochaine. Ce préjudice est complexe car il nécessite une condition essentielle à sa démonstration, difficile à prouver. Condition d’existence de ce préjudice Le préjudice d’angoisse de mort imminente peut résulter de faits très différents, tels qu’une attaque ou d’un accident notamment de la circulation. La seule condition essentielle d’existence porte sur la conscience de la victime de sa mort prochaine. La Cour de cassation a précisé cette condition à plusieurs reprises : – « le choc traumatique a été si violent que M. X… est resté inconscient, qu’il n’a pu être réanimé et que son décès a été quasi-instantané ; que les juges en concluent que la victime n’a pu se rendre compte de ce qu’il lui arrivait et que sa souffrance morale n’est pas établie » (Cass.crim., 5 octobre 2010, n°09-87.385). – « préjudice subi par la victime entre l’accident et son décès du fait de ses blessures et de l’angoisse d’une mort imminente, l’arrêt retient que l’agonie de la jeune fille a duré une dizaine de minutes et a été particulièrement pénible » (Cass.crim., 26 mars 2013, n°12-82.600).   La Cour de cassation retient ainsi une notion de temps écoulé entre les faits et le décès, et une notion de souffrance vécue durant ce laps de temps. Un décès immédiat fait ainsi obstacle à la reconnaissance de ce préjudice, la victime n’a en effet pas le temps de se rendre compte qu’elle va décéder. Cependant, si la victime reste en vie encore un certain temps après l’accident et vit des souffrances physiques et psychologiques importantes durant ce délai, le préjudice d’angoisse de mort imminente est reconnu.     Quid de la victime dans le coma ? La question a été posée, pour la victime se trouvant dans un état de coma avant son décès, de la conscience de sa mort prochaine. La Cour de cassation a jugé que la conscience de la mort prochaine étant la condition essentielle de ce préjudice, la seule constatation de la violence des souffrances que la victime aurait pu subir ne suffit pas : « n’ayant pas repris conscience, n’avait pas pu se rendre compte de la gravité de son état et de l’imminence de sa mort ; Attendu qu’en se déterminant ainsi, alors que le préjudice d’angoisse de mort imminente ne peut exister que si la victime est consciente de son état, la cour d’appel a justifié sa décision » (Cass.crim., 27 septembre 2016, n°15-83.309), dans le cas d’un homme tombé dans le coma après son accident et pendant quelques heures, avant son décès sur la table d’opération. Préjudice autonome ? La nomenclature Dintilhac prévoit parmi les postes de préjudices extrapatrimoniaux le préjudice des souffrances endurées, défini comme les souffrances tant physiques que morales endurées par la victime du fait des atteintes à son intégrité, à sa dignité et à son intimité et des traitements, interventions, hospitalisations qu’elle a subis depuis l’accident jusqu’à la consolidation. Bien que cette nomenclature ne soit pas limitative, une divergence a existé durant de nombreuses années au sein des chambres de la Cour de cassation sur l’appartenance ou non de ce préjudice d’angoisse de mort imminente aux souffrances endurées. La Chambre criminelle de la Cour de cassation considérait en effet que le préjudice d’angoisse de mort imminente était un préjudice autonome, donnant ainsi lieu à une indemnisation spécifique : « Attendu qu’en statuant ainsi, la cour d’appel a justifié sa décision, dès lors que, sans procéder à une double indemnisation, elle a évalué séparément les préjudices distincts constitués par les souffrances endurées du fait des blessures et par l’angoisse d’une mort imminente » (Cass.crim., 23 octobre 2012, n°11-83.770). Les Première et Deuxième chambres civiles de la Cour de cassation jugeaient au contraire que ce préjudice était intégré dans le préjudice lié aux souffrances endurées. -« Mais attendu, d’une part, que, le préjudice moral lié aux souffrances psychiques et aux troubles qui y sont associés étant inclus dans le poste de préjudice des souffrances endurées, quelle que soit l’origine de ces souffrances, l’angoisse d’une mort imminente éprouvée par la victime ne peut justifier une indemnisation distincte qu’à la condition d’avoir été exclue de ce poste » (Cass., 1ère civ., 26 septembre 2019, n°18-20.924). -« Qu’en statuant ainsi, alors que le préjudice moral lié aux souffrances psychiques et aux troubles qui y sont associés étant inclus dans le poste de préjudice temporaire des souffrances endurées, quelle que soit l’origine desdites souffrances, le préjudice lié à la conscience de sa mort prochaine, qualifié dans l’arrêt de préjudice d’angoisse de mort imminente, ne peut être indemnisé séparément » (Cass., 2ème civ., 2 février 2017, n°16-11.411).   La Chambre mixite de la Cour de cassation a cependant mis fin à ce débat par un arrêt du 25 mars 2022, désormais le préjudice d’angoisse de mort imminente est un préjudice autonome : « C’est, dès lors, sans indemniser deux fois le même préjudice que la cour d’appel, tenue d’assurer la réparation intégrale du dommage sans perte ni profit pour la victime, a réparé, d’une part, les souffrances endurées du fait des blessures, d’autre part, de façon autonome, l’angoisse d’une mort imminente » (Cass., chb. Mixte, 25 mars 2022, n°20-15.624).
L’INDEMNISATION DU PREJUDICE PERMANENT EXCEPTIONNEL Cour de cassation, Chambre civile 1, 20 octobre 2021, 19-23.229 Afin de comprendre les explications ci-dessous, il convient de rappeler la définition des deux notions suivantes : Le préjudice permanent exceptionnel permet d’indemniser les situations dans lesquelles «il existe des préjudices atypiques » liés à une spécificité tenant, soit au handicap permanent dont reste atteinte la victime, soit aux circonstances ou à la nature de l’accident à l’origine du dommage. Le déficit fonctionnel permanent indemnise la réduction définitive du potentiel physique, psycho-sensoriel et intellectuel. Une victime souffrant de paresthésie dans le bras droit suite à une coronarographie peut-elle cumuler une indemnisation au titre du déficit fonctionnel permanent  et au titre du préjudice permanent exceptionnel ? La victime peut cumuler une indemnisation au titre du déficit fonctionnel permanent et au titre du préjudice permanent exceptionnel. En l’espèce, une victime souffre de paresthésie (fourmillements, picotements) dans le bras droit après avoir subi une coronarographie (forme de radiographie par rayon X) qui a mal fonctionné. Des examens ultérieurs relèvent la présence de plusieurs corps étrangers métalliques identifiés comme des parties du guide d’introduction utilisé lors de la coronarographie. La Cour de cassation considère qu’il existe un déficit fonctionnel permanent compte tenu de la paresthésie dans le bras droit de la victime, qui limite ses gestes et entrave ses activités ordinaires. La Cour de cassation considère qu’il existe également un préjudice permanent exceptionnel en raison de la présence de fragments de guide dans le corps de la victime et du risque d’évolution permanent de son état de santé. En effet, ces éléments provoquent une angoisse chez la victime. Ainsi, pour être indemnisé au titre du préjudice permanent exceptionnel, ce préjudice doit être caractérisé indépendamment du déficit fonctionnel permanent. Un tel cumul est très rare et cette décision de la Cour de cassation est tout à fait remarquable. En effet, il a été jugé que la sensation d’avoir un corps étranger dans l’avant-bras constitue un préjudice propre, au-delà du déficit fonctionnel permanent, et de nature exceptionnelle. Elle retient alors l’existence d’un préjudice permanent exceptionnel, notion qui figurait dans la nomenclature de Dintilhac mais qui était très rarement retenue par la Cour de cassation.
APPRECIATION SOUVERAINE DES JUGES DU FOND DE L’EVALUATION DES PREJUDICES PROFESSIONNELS DES JEUNES VICTIMES Peut-on cumuler une indemnisation au titre de l’incidence professionnelle et au titre des gains professionnels futurs ?   Avant d’aborder le fond de la question, il convient de rappeler la définition des deux notions suivantes : L’indemnisation au titre de l’incidence professionnelle correspond à « l’impossibilité pour la victime de réaliser une carrière professionnelle tant du point de vue personnel que social », L’indemnisation au titre des gains professionnels futurs correspond à « la différence entre le revenu net moyen français et sa capacité de gain ». Cour de cassation, Chambre civile 2, 14 octobre 2021, 20-13.537 Est-ce qu’un mineur de 10 ans souffrant de troubles de l’attention-concentration suite à un accident de la circulation peut être indemnisé au titre de l’incidence professionnelle ? Comme énoncé ci-dessus, la Cour de cassation définie l’incidence professionnelle comme « l’impossibilité pour la victime de réaliser une carrière professionnelle tant du point de vue personnel que social ». En l’espèce, un mineur de 10 ans victime d’un accident de la circulation, dont découle des troubles de l’attention-concentration avec des décrochages attentionnels fréquents et une capacité d’abstraction limité, demandait à être indemnisé au titre de l’incidence professionnelle. La Cour de cassation retient une indemnisation à ce titre. Est-ce que le préjudice de perte de gains professionnels futurs est cumulable avec le préjudice d’incidence professionnelle ? Comme énoncé ci-dessus, selon la Cour de cassation, la perte de gains professionnels futurs correspond à « la différence entre le revenu net moyen français et sa capacité de gain ». La Cour rappelle que l’indemnisation de l’incidence professionnelle est cumulable avec l’indemnisation des pertes de gains professionnels futurs car il s’agit de deux préjudices distincts. Dès lors que les séquelles de la victime l’empêche d’exercer un emploi qualifié et à temps plein, il en découle une perte de gains professionnels futurs. L’indemnisation d’une perte de gains professionnels futurs d’une jeune victime n’est donc pas conditionnée par la preuve de revenus antérieurs à la survenance de l’accident.    Comment calculer le montant de l’indemnisation de la perte de gains professionnels futurs lorsque l’on n’a aucune lisibilité sur le salaire qu’aurait eu le mineur de 10 ans devenu majeur et si ce dernier n’avait pas eu d’accident ? Les juges du fond ont un pouvoir souverain d’appréciation pour calculer le montant de l’indemnisation d’une jeune victime qui ne percevait pas de gains professionnels à la date du dommage. Mais comment savoir combien aurait gagné le jeune homme dans le futur ? Ils prennent donc en compte, pour l’avenir, la privation de ressources professionnelles engendrée par le dommage et ce en référence soit à la valeur du salaire médian qu’elle aurait pu percevoir, soit à la valeur du SMIC. Pour cela, les juges du fond tiennent compte de divers paramètres tels que l’âge de la victime à la date de l’accident, son parcours scolaire ou universitaire et ses orientations professionnelles. En l’espèce, la Cour de cassation s’est référée à la valeur du salaire médian (toutes professions confondues) pour indemniser le mineur de 10 ans victime d’un accident de la circulation. Cour de cassation, Chambre civile 2, 16 septembre 2021, 20-10.712 Comment calculer le montant de l’indemnisation de la perte de gains professionnels futurs d’une universitaire victime d’un accident de la circulation lorsqu’elle était seulement en 2ème année de psychologie ? Ici, retenir le salaire médian de l’ensemble de la population pose naturellement question. En effet, de par l’entame de son cursus universitaire, cette étudiante ne pouvait-elle pas espérer mieux que le salaire médian ou que le SMIC ? Les juges du fond apprécient souverainement le montant de l’indemnisation de la perte de gains professionnels futurs d’une jeune femme de 20 ans, en 2ème année de psychologique, victime d’un accident de la circulation. En effet, le niveau scolaire de la victime démontrait qu’elle avait 60% de chance d’accéder à la profession de psychologue clinicienne. Dès lors, l’indemnisation au titre des gains professionnels futurs devra correspondre à  60% du salaire moyen d’une psychologue clinicienne. En cas de préjudice hypothétique, les juges peuvent donc indemniser la victime à hauteur d’une perte de gains professionnels (et non pas simplement à l’avantage qu’aurait procuré cette chance si elle s’était réalisée).
Suspension du délai de prescription en cas d’amnésie médicamenteuse et de minorité : une avancée jurisprudentielle majeure La question de la prescription de l’action publique en matière d’infractions sexuelles soulève régulièrement des débats, notamment lorsque les victimes se trouvent dans l’incapacité d’agir en raison de circonstances exceptionnelles. La Cour de cassation, dans un arrêt du 21 juin 2023 (Crim. 21 juin 2023, F-B, n° 23-80.106), a apporté des précisions essentielles en reconnaissant que l’amnésie médicamenteuse provoquée par une anesthésie peut constituer un obstacle insurmontable à l’exercice des poursuites, justifiant ainsi la suspension du délai de prescription de l’action publique. Une affaire marquante : des infractions sexuelles commises sous anesthésie L’affaire à l’origine de cet arrêt concernait un chirurgien soupçonné d’avoir commis plusieurs centaines d’infractions sexuelles sur des patients, dont certains étaient mineurs, au cours d’interventions médicales ou lors de phases périopératoires. Ces actes avaient été découverts à la suite de la saisie de documents en 2017, mettant en évidence des agressions sexuelles et viols perpétrés alors que les victimes étaient endormies ou sous l’effet de médications altérant leur conscience. Mis en examen en 2020, le praticien a contesté la recevabilité de certaines poursuites, invoquant la prescription de l’action publique pour 85 faits. Le juge d’instruction et la chambre de l’instruction de la Cour d’appel de Rennes ont cependant considéré que la prescription n’était pas acquise pour plusieurs de ces faits, une décision confirmée en partie par la Cour de cassation. L’amnésie médicamenteuse : un obstacle insurmontable justifiant la suspension du délai de prescription L’un des arguments avancés par la défense était que l’absence de souvenir des victimes ne pouvait être considérée comme un obstacle insurmontable assimilable à la force majeure. Toutefois, la Cour de cassation a adopté une approche plus protectrice des victimes, estimant que l’amnésie médicamenteuse, résultant d’une anesthésie ou de prémédications, pouvait effectivement constituer un empêchement de fait à l’exercice de l’action publique. Cette reconnaissance a une portée particulièrement importante, car elle ouvre la voie à la suspension du délai de prescription tant que la victime demeure dans l’incapacité matérielle de porter plainte ou d’avoir conscience des faits subis. Cela permet d’éviter qu’un prévenu ne puisse échapper à la justice en raison des effets d’une médication ayant supprimé la mémoire des victimes. La question de la minorité des victimes L’arrêt soulève également la question du départ du délai de prescription pour les victimes mineures. En droit français, la prescription des infractions sexuelles sur mineur ne commence à courir qu’à partir de la majorité de la victime. Cependant, le mis en examen a contesté cette disposition en affirmant que l’autorité qu’il exerçait en tant que médecin ne pouvait être assimilée à une autorité parentale ou à un contrôle direct sur les victimes. Il en déduisait que le délai de prescription aurait dû commencer à courir à la date des faits et non à la majorité des patients concernés. La Cour de cassation a rejeté cet argument en confirmant que, conformément à la jurisprudence constante, le départ du délai de prescription est bien retardé jusqu’à la majorité des victimes mineures, garantissant ainsi une meilleure protection des enfants victimes d’abus sexuels.   Un renforcement des droits des victimes Cet arrêt illustre la volonté des juridictions de mieux prendre en compte la situation des victimes d’infractions sexuelles en adaptant les règles de prescription à leur vulnérabilité. La reconnaissance de l’amnésie médicamenteuse comme un empêchement insurmontable renforce l’arsenal juridique permettant de lutter contre l’impunité des agresseurs. Toutefois, cette décision soulève également des questions quant à sa mise en œuvre concrète. Comment établir avec certitude qu’une victime n’a pas eu conscience des faits subis pendant une longue période ? Quels critères objectifs pourront être retenus pour déterminer le moment à partir duquel la prescription peut commencer à courir ? Autant de questions qui devront être précisées par la jurisprudence future. Conclusion Par cet arrêt du 21 juin 2023, la Cour de cassation affirme une approche protectrice en matière de prescription des infractions sexuelles. La reconnaissance de l’amnésie médicamenteuse comme un obstacle insurmontable renforce les droits des victimes et permet de lutter plus efficacement contre l’impunité des auteurs d’agressions sexuelles. Il conviendra toutefois de suivre l’évolution de la jurisprudence pour s’assurer que cette décision ne donne pas lieu à des difficultés d’application et garantisse un juste équilibre entre les droits des victimes et ceux de la défense.  
Sous certaines conditions, la victime d’un viol sur mineur peut agir contre son agresseur même après l’expiration du délai de prescription   La loi du 21 avril 2021 visant à protéger les mineurs des crimes et délits sexuels et de l’inceste a mis en place une « prescription glissante » en matière de viol sur mineur. En principe, l’article 7 alinéa 3 du Code de procédure pénale prévoit qu’un viol commis sur un mineur se prescrit par 30 années révolues à compter de la majorité de ce dernier. Cependant, le législateur a mis en place une prescription glissante au sein de ce même article en permettant à la victime d’un viol d’agir contre son agresseur, même après l’expiration de ce délai de prescription si 3 conditions sont réunis :   L’auteur des faits a commis une nouvelle infraction sexuelle L’auteur des faits doit avoir commis une seconde infraction sexuelle. Il peut s’agir d’un viol mais également d’une autre agression sexuelle ou d’une atteinte sexuelle. En revanche la première infraction doit nécessairement être un viol.   La seconde infraction doit avoir été commise sur un autre mineur Pour pouvoir bénéficier de cette prescription glissante, la seconde infraction doit nécessairement avoir été commise sur un autre mineur.   La seconde infraction doit avoir été commise avant l’expiration du délai de prescription de la première infraction  Si la seconde infraction a été commise après l’expiration du délai de prescription de la première infraction, la victime ne pourra pas bénéficier de la prescription glissante et ainsi agir en justice contre son agresseur.    La première infraction se prescrira donc à quelle date ? Si ces 3 conditions sont réunies, la victime de la première infraction pourra agir en justice jusqu’à la date de prescription de la seconde infraction.   La prescription glissante bénéficie uniquement aux victimes de viol commis après son entrée en vigueur ? Les lois relatives aux délais de prescription sont d’application immédiate (article 112-2 in fine du Code de procédure pénale). Ainsi, les victimes de viol sur mineur peuvent bénéficier de cette prescription glissante, même si les faits ont été commis avant le 21 avril 2021 à condition qu’ils ne soient pas prescrits.
Comment s’y retrouver dans les délais de prescription après la loi du 27 février 2017 ?  Il existe différents délais de prescription : le délai en matière d’action publique (a) et le délai qui concerne l’exécution de la peine (b). A chaque règle son exception, des délais dérogatoires sont également prévus (c). L’existence d’une prescription a plusieurs raisons. Le droit considère que la société a un droit à l’oubli. En effet, plus le temps passe, plus il existe une impossibilité technique d’établir des preuves. De plus, le système judiciaire serait profondément inefficace si toutes les infractions étaient imprescriptibles. L’intervention du législateur au mois de février 2017 nécessite quelques clarifications.   a. Les délais de prescription en matière d’action pénale La loi du 27 février 2017 vient allonger les délais en matière délictuelle et criminelle. > En effet, l’article 7 du Code de procédure pénale prévoit que « L’action publique des crimes se prescrit par vingt années révolues à compter du jour où l’infraction a été commise ». > Puis, l’article 8 du Code de procédure pénale dispose que « L’action publique des délits se prescrit par six années révolues à compter du jour où l’infraction a été commise ». > Les contraventions sont toujours prescrites après le délai d’un an.  Afin de déterminer le délai de prescription, il est nécessaire de pouvoir déterminer le point de départ de celui ci. En principe, le délai court à compter du jour de la commission de l’infraction. Cependant, il existe différentes catégories d’infractions : > Les infractions instantanées qui sont commises en un seul acte, > Les infractions continues qui durent dans le temps, > Les infractions d’habitudes qui sont constituées par la répétition d’au moins deux actes. En général, la jurisprudence a admis que le point de départ du délai est le jour de la commission du dernier acte infractionnel. Pour cela, il faudrait que l’infraction puisse être valablement constatée. Ainsi, il existe des infractions dites occultes ou dissimulées qui sont dérogatoires. Ces dernières sont définies comme étant celles qui ne peuvent pas être connues soit de l’autorité publique, soit de la victime. Mais encore, celles dont « l’auteur accomplit délibérément toute manœuvre caractérisée tendant à en empêcher la découverte ». (Article 9-1 Code de procédure pénale) Dans le cas d’une infraction occulte, le délai de prescription pour les délits est de 12 ans et pour les crimes de 30 ans.   Certains actes interrompent le délai de prescription Les actes interruptifs permettent d’effacer le temps écoulé pour revenir au délai initial. L’article 9-2 du Code de procédure pénale prévoit les actes qui interrompent le délai de prescription. Ainsi, sont des actes interruptifs : > Le réquisitoire du ministère public > La demande d’ouverture d’une information > La requête de placement sous contrôle judiciaire ou mise en détention provisoire > La plainte avec constitution de partie civile > La comparution volontaire, la citation, la convocation par procès-verbal, la comparution immédiate > Les réquisitions aux fins d’enquête (en matière de presse) > Tout acte tendant à rechercher et à poursuivre l’auteur d’une infraction pénale notamment les actes d’enquête ou d’instruction > Tout jugement ou arrêt s’il ne comporte pas de nullité Certains actes ne sont pas interruptifs contrairement à ce qu’on peut penser. C’est le cas  du classement sans suite d’une affaire qui ne constitue pas un acte interruptif de prescription. Dans le même sens, depuis le 11 juillet 2012 (Cass, crim.,, n°11-87583), la plainte simple adressée au procureur de la République n’interrompt pas la prescription.   Certains actes suspendent le délai de prescription Le délai de prescription est dit suspendu dans la mesure où un obstacle de droit ou de fait empêche d’exercer des poursuites. Toutefois, la suspension n’implique pas l’effacement du délai déjà acquis. Par exemple, les infractions occultes engendrent la suspension du délai de prescription.   Qu’en est il des actes commis avant la loi du 27 février 2017 ? La loi du 27 février 2017 est entrée en vigueur le 1ermars 2017, elle est d’application immédiate. Autrement dit, si une infraction a été commise et qu’elle était prescrite avant l’entrée en vigueur de cette loi, alors les nouveaux délais de prescription ne s’appliquent pas. 1erexemple : Imaginons des faits de violences (délit) commis au mois de janvier 2013. Ce délit étant définitivement prescrit au mois de janvier 2016 (dans le cas où aucunes poursuites pénales n’auraient été engagées entre 2013 et 2016), les dispositions de la loi de février 2017 ne lui sont pas applicables. Cependant si, l’infraction commise n’est pas prescrite avant le 1ermars 2017 alors ce sont les nouveaux délais qui sont applicables. 2èmeexemple : Un meurtre est commis en mars 2015. À cette date, la prescription de l’action pénale est de 10 ans. Dès lors, ce crime n’est pas prescrit au mois de mars 2017. Aussi, l’action de ce crime ne sera pas prescrite en 2025 mais bien en mars 2035.   Les infractions ayant un délai de prescription dérogatoire > Les délais dérogatoires pour les personnes mineures Certaines infractions connaissent un délai de prescription différent, c’est le cas des infractions commises sur les mineurs. Lorsqu’un individu mineur est victime d’un délit ou d’un crime, le délai de prescription commence à courir à partir de sa majorité, soit à l’âge de 18 ans. Par exemple, d’après l’article 7 du Code de procédure pénale, certains crimes se prescrivent après 30 ans : – Le meurtre ou l’assassinat – Les tortures ou actes de barbaries – Le viol Ainsi, paradoxalement au regard des peines encourues, l’assassinat d’une personne mineure se prescrira 30 ans après la commission des faits mais le viol sur une personne mineure se prescrira 30 ans après la majorité de la victime. De la même manière, d’après l’article 8 du Code de procédure pénale, certains délits se prescrivent après 10 ans: – Traite des êtres humains – Le proxénétisme – Le recours à la prostitution – La corruption – La proposition sexuelle[1]par un majeur – La pédopornographie -L’incitation à se soumettre à une mutilation sexuelle D’autres se prescrivent après 20 ans révolus, c’est le cas : -Des violences ayant entrainé une incapacité totale de travail supérieure à huit jours -Des agressions sexuelles[2]autre que le viol -Des atteintes sexuelles[3] > Les délais dérogatoires pour les personnes majeures Selon l’article 7 du Code de procédure pénale, certains crimes se prescrivent par 30 années révolues, c’est le cas pour : -Les actes de terrorisme -Le trafic de stupéfiants commis en bande organisée -Le blanchiment d’argent issu de l’infraction ci-dessus -L’eugénisme -Le clonage reproductif -Les actes commis en vue d’une disparition forcée -Les infractions concernant les armes nucléaires, biologiques ou chimiques -La divulgation d’informations d’intérêts fondamentaux à un autre Etat Selon l’article 8 du Code de procédure pénale, certains délits se prescrivent après 20 années révolues : -La contrebande -La participation à une association de malfaiteurs -La prolifération d’armes de destruction massive -Les délits en relation avec le terrorisme   b. Le délai de prescription en matière d’exécution de la peine Au même titre que la possibilité d’engager des poursuites contre un individu, une fois qu’une condamnation est prononcée définitivement, il existe alors un délai de prescription qui court pour ce qui concerne l’exécution de la peine. > En effet, l’article 133-4 du Code pénal prévoit que le délai de prescription pour l’exécution d’une peine concernant une contravention est de 3 années à compter de la date où la condamnation est définitive. > L’article 133-3 du Code pénal prévoit que le délai de prescription d’une peine concernant un délit est de 6 ans. > L’article 133-2 du Code pénal prévoit que le délai de prescription d’une peine concernant un crime est de 20 ans à compter de la date où la condamnation est définitive. Néanmoins, même si la peine est prescrite, certaines conséquences perdurent. Par exemple, chaque personne condamnée pour la commission d’une infraction aura une inscription sur son casier judiciaire, peu importe qu’elle ai exécutée ou non sa peine. Par conséquent, d’après les articles 132-9 et suivants de Code pénal, en cas de récidive, les précédentes infractions seront tout de même prises en compte.   Les actes interruptifs de la prescription de la peine De la même manière, certains actes peuvent interrompre le délai pour l’exécution de la peine. L’article 707-1 du Code de procédure pénale prévoit que « La prescription de la peine est interrompue par les actes ou décisions du ministère public, des juridictions de l’application des peines et, pour les peines d’amende ou de confiscation relevant de leur compétence, du Trésor ou de l’Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués, qui tendent à son exécution. » Ainsi, il s’avère que tout acte visant à la bonne exécution de la peine interrompt le délai de prescription.   c. L’existence de délais dérogatoires à la prescription  En matière d’action publique : quels sont-ils ? – Les délais de prescription en droit de la presse sont plus courts, le délai est de 3 mois en principe (certaines infractions se prescrivent après un an, c’est le cas des injures discriminatoires par exemple). – Les délais sont plus longs pour certains crimes. Par exemple : le terrorisme, le trafic de stupéfiants en bande organisée ou le clonage sont prescrits après 30 ans. -Certains délits comportent une durée de prescription plus longue notamment, les délits commis sur des mineurs. -Le crime contre l’humanité est le seul à être imprescriptible.   En matière d’exécution de la peine : quels sont-ils ? -Pour certains crimes, le délai est de 30 ans à compter de la décision définitive de condamnation. C’est le cas par exemple, des crimes contre l’espèce humaine, les crimes relatifs au trafic de stupéfiants et les crimes de guerre. – Pour certains délits, le délai est de 20 ans à compter de la décision définitive de condamnation. C’est le cas par exemple, des délits relatifs au trafic de stupéfiants ou aux délits de guerre.   [1]La proposition sexuelle est définit par la suggestion d’une personne majeure d’avoir une relation sexuelle avec un mineur de quinze ans. [2]L’agression sexuelle est constituée par tout acte sexuel autre que la pénétration lorsqu’il est commis avec violence, contrainte, menace ou surprise. [3]L’atteinte sexuelle est caractérisée par tout acte sexuel sur un mineur de quinze ans même si celui ci était consentant.  
Une exception légale pour le viol sur mineur   Depuis la loi du 21 avril 2021, l’article 7 du Code de procédure pénale prévoit un mécanisme inédit : la prescription glissante en matière de viol sur mineur. Concrètement, lorsqu’un auteur de viol sur mineur commet, avant l’expiration du délai de prescription de ce premier fait, une nouvelle infraction sexuelle sur un autre mineur, la prescription du premier viol est suspendue. Ce dispositif vise à mieux protéger les victimes de violences sexuelles, dans un contexte où le silence, la peur et les blocages psychologiques retardent souvent la révélation des faits. Mais cette avancée soulève une interrogation : le bénéfice de la prescription glissante doit-il rester réservé au seul viol sur mineur ?   Une protection inégalitaire des victimes ?   En l’état actuel du droit, ce mécanisme n’est applicable qu’au viol sur mineur, à l’exclusion : Des agressions sexuelles (même graves) sur mineur, Des violences sexuelles sur majeurs, Des violences physiques répétées ou conjugales.   Une telle restriction soulève plusieurs limites : Deux victimes d’infractions comparables peuvent bénéficier de délais d’action radicalement différents, simplement en fonction de l’âge au moment des faits. Un agresseur multirécidiviste pourrait échapper à la justice pour des faits anciens, même en cas de récidive avérée, s’il s’agit de victimes majeures.   Or, la gravité de l’infraction et la récurrence des comportements doivent logiquement primer sur la qualification stricte ou l’âge de la victime, dans une logique de cohérence du droit pénal.   Une extension justifiée au regard des enjeux de société   L’évolution de la parole des victimes – notamment depuis le mouvement #MeToo – a mis en lumière le temps nécessaire pour dénoncer les violences sexuelles, qu’elles concernent des enfants ou des adultes. Certaines victimes mettent plusieurs décennies à parler, souvent lorsque d’autres témoignages apparaissent ou que l’auteur est impliqué dans une nouvelle affaire.   Dans ce contexte, étendre la prescription glissante à d’autres infractions sexuelles graves (agressions sexuelles, viols sur majeurs) permettrait :   De mieux lutter contre les auteurs en série, De valoriser la parole différée des victimes, D’éviter des classements sans suite uniquement fondés sur le temps écoulé.   Cela contribuerait également à une plus grande équité devant la justice, en assurant un traitement cohérent des faits de même nature.   Mais une extension juridiquement risquée ?   Toutefois, une telle réforme poserait plusieurs défis juridiques :   Le principe de légalité pénale impose que les règles de prescription soient claires, prévisibles et strictement interprétées. Le Conseil constitutionnel et la Cour européenne des droits de l’homme pourraient y voir une atteinte excessive à la sécurité juridique si la prescription devient trop flexible ou incertaine. Enfin, certains auteurs s’inquiètent d’un glissement vers un droit pénal de l’émotion, où le temps long de la mémoire individuelle remplacerait les bornes fixes de l’action publique.   Et surtout comment enquêter et obtenir la manifestation de la vérité si longtemps après les faits ?   Conclusion : une réforme à manier avec prudence   L’extension du mécanisme de la prescription glissante à d’autres infractions sexuelles est une question  qui se pose sur le plan humain et sociétal.   Mais elle prévoir des risques, et s’accompagner de garanties procédurales solides, afin d’assurer un équilibre entre effectivité de la répression et protection des droits fondamentaux.
Absence du principe de la loyauté de la preuve pour les particuliers et possibilité des preuves obtenues après la commission d’une infraction   Aux termes de l’article 427 du Code de procédure pénale « Hors les cas où la loi en dispose autrement, les infractions peuvent être établies par tout mode de preuve et le juge décide d’après son intime conviction ». Le principe est donc celui de la liberté de la preuve.   Les particuliers sont-ils soumis au principe de la loyauté de la preuve ? A la différence des autorités de poursuites, les personnes privées ne sont pas soumises au principe de la loyauté de la preuve (cf : voir article « Les policiers peuvent-ils user d’un stratagème afin d’obtenir la preuve que j’ai commis une infraction ? »). Ainsi, elles peuvent apporter la preuve d’une infraction même de manière déloyale. Dans un arrêt du 27 janvier 2010, la Cour de cassation a considéré qu’aucune disposition légale ne permet aux juges répressifs d’écarter des moyens de preuve remis par un particulier aux services d’enquête au seul motif qu’ils auraient été obtenus de façon illicite ou déloyale (Cass. crim, 27 janv. 2010, n° 09-83.395). Il peut donc s’agir d’enregistrements, de photographies mais également de messages.    Est-il possible de commettre une infraction pour apporter la preuve d’une autre infraction ? La Cour de cassation admet des preuves obtenues après la commission d’une infraction. Dans un arrêt du 11 juin 2002, la Cour de cassation a jugé recevable la production en justice d’une preuve obtenue en violation du secret de l’instruction. En effet, un journaliste a produit des documents soumis au secret de l’instruction afin de pouvoir établir la preuve d’une infraction pénale (Cass. crim, 11 juin 2002, n° 01-86.685). De même, dans un arrêt du 31 janvier 2012, les juges de la Haute Cour ont admis une preuve obtenue en violation du secret professionnel. En l’espèce, un tiers a enregistré une conversation entre des avocats et leur client. Une telle conversation est soumise au secret professionnel et son enregistrement constitue donc une violation de ce secret. Néanmoins, la Cour de cassation a considéré que cet enregistrement constitue une preuve recevable qui peut être discutée contradictoirement, et que la transcription de cet enregistrement, qui a pour seul objet d’en matérialiser le contenu, ne peut davantage donner lieu à annulation (Cass. crim, 31 janv. 2012, n° 11-85.464).
La provocation à l’infraction et la provocation à la preuve   Le principe : la liberté de la preuve  Aux termes de l’article 427 du Code de procédure pénale « Hors les cas où la loi en dispose autrement, les infractions peuvent être établies par tout mode de preuve et le juge décide d’après son intime conviction ». Le principe qui gouverne la preuve est donc celui de la liberté de la preuve. Il peut donc s’agir d’enregistrements, de témoignages ou encore d’empreintes digitales. Néanmoins, ce principe n’est pas absolu. Les autorités judiciaires ne peuvent apporter des preuves de manière déloyale. 2 . La limite : la loyauté de la preuve  L’interdiction des provocations policières à l’infraction Les autorités judiciaires ne peuvent provoquer à l’infraction pour obtenir la preuve de celle-ci. La provocation à l’infraction consiste dans le fait de pousser le suspect à commettre une infraction afin d’obtenir des preuves. La Cour de cassation a jugé dans un arrêt du 11 mai 2006 que porte atteinte au principe de la loyauté des preuves et au droit à un procès équitable la provocation à la commission d’une infraction par un agent de l’autorité publique ou par son intermédiaire. La déloyauté d’un tel procédé rend irrecevables en justice les éléments de preuve ainsi obtenus (Cass. crim, 11 mai 2006, n° 05-84.837). En l’espèce, à la demande de la brigade des mineurs, un individu s’est connecté à un site de rencontre homosexuel en se faisant passer pour un adolescent de 14 ans et est entré en contact avec le prévenu. Ce dernier a accepté de lui transmettre des images de mineurs à caractère pornographique. Les deux hommes ont pris rendez-vous et l’homme a été interpellé par les policiers. La Cour de cassation a considéré que l’agent avait, à l’instigation des policiers, incité le prévenu à lui transmettre de telles images. Ainsi, les autorités judiciaires ont provoqué à la commission de l’infraction. La licéité de la provocation à la preuve A la différence de la provocation à l’infraction, la provocation à la preuve est licite. Elle consiste dans le fait de faire usage d’un stratagème permettant d’obtenir la preuve d’une infraction pénale. Contrairement à la provocation à l’infraction, l’auteur des faits ne sera pas conduit par les autorités de poursuite à commettre cette infraction. Exemples de provocation à la preuve : La Cour de cassation a considéré que constitue une provocation à la preuve le fait pour un officier de police judiciaire informé par un tiers de la possible commission d’infractions, de contacter, à l’aide d’un numéro de téléphone diffusé par elle sur internet, la société mettant en vente un véhicule susceptible d’avoir été acquis en leasing à l’aide d’un dossier contenant des pièces falsifiées, et de se rendre au rendez-vous fixé par le commercial qui l’a rappelé à cette fin, sans prendre aucun engagement ni faire une quelconque autre demande (Cass. crim, 12 sept. 2018, n° 17-87.498). Les juges de la Haute Cour ont précisé qu’il ne s’agissait pas d’une provocation à la commission d’une infraction laquelle était déjà réalisée s’agissant du détournement d’un véhicule acquis initialement en leasing et déjà mis en vente sur internet avant le terme de ce crédit, soit sans être propriétaire. Dans une autre affaire, la Cour de cassation a également considéré que des policiers peuvent répondre à une annonce de vente immobilière en se présentant comme acquéreurs et fixer un rendez-vous avec l’auteur du vol dans le but de l’appréhender dès lors que le procédé n’a en rien déterminé les agissements de la personne mis en examen (Cass. crim 15 déc. 2015, n° 15-84.373). Attention : la provocation à la preuve ne peut toutefois pas être admise si les enquêteurs ont fait usage d’un stratagème constituant un procédé déloyal de recherche des preuves (Cass. ass. plén. 6 mars 2015, n°14-84.339).   En conclusion, il convient de distinguer entre la provocation à l’infraction et la provocation à la preuve. Si les enquêteurs ont poussé l’auteur des faits à commettre l’infraction afin d’obtenir une preuve, il s’agit d’une provocation à l’infraction qui n’est pas admise en droit.  En revanche, si les agissements des enquêteurs ont uniquement consisté à obtenir une preuve sans déterminer les agissements de l’agent, il s’agit d’une provocation à la preuve qui est autorisée sauf s’ils ont fait usage d’un stratagème constituant un procédé déloyal de recherche des preuves.
Le juge d’instruction doit renouveler la procédure d’information en cas de reprise ou de poursuite de l’information postérieurement à la notification de l’avis de fin d’information Cass.crim., 6 janvier 2015, n°13-88.227 Rappel des issues possibles de la procédure d’information  La clôture de l’information L’article 175 du code de procédure pénale dispose que dans le cadre de la clôture de l’information, le juge d’instruction doit : Communiquer au procureur de la République le dossier d’information, Prévenir les avocats des parties ou les parties elles-mêmes de la fin de l’information, Et adresser aux avocats des parties ou parties elles-mêmes une copie des réquisitions du procureur de la République. Les parties peuvent formuler des demandes ou requêtes auprès du juge d’instruction dans un délai d’un mois « si une personne mise en examen est détenue » ou de trois mois dans les autres cas. Lorsque l’information est reprise ou poursuivie postérieurement à la notification de l’avis de fin d’information, le juge d’instruction doit renouveler la procédure de fin d’information. Le renvoi du dossier au juge d’instruction par la chambre d’instruction Aux termes de l’article 206 du code de procédure pénale, la chambre d’instruction est compétente pour vérifier la régularité des procédures qui lui sont soumises. Si la chambre d’instruction constate une cause de nullité au sein de la procédure, elle doit prononcer la nullité de l’acte en cause, puis évoquer et procéder aux actes d’instruction relevant de sa compétence, ou renvoyer le dossier au juge d’instruction afin de poursuivre l’information. Arrêt du 6 janvier 2015, rappel strict de la compétence et la procédure d’information En l’espèce, une société a porté plainte et s’est constituée partie civile pour des faits de diffamation publique envers un particulier. Suite à des investigations infructueuses relatives à l’auteur de l’acte, le juge d’instruction avait notifié aux parties la fin de l’information par un avis et communiqué le dossier de la procédure au procureur de la République. Le même jour, les parties ont sollicité des mesures d’instruction supplémentaires. Le juge d’instruction a délivré une commission rogatoire aux fins demandées, puis a rendu une ordonnance de non-lieu sans communiquer aux parties les réquisitions du ministère public ni le nouvel avis de fin d’information. La chambre de l’instruction a refusé d’annuler l’ordonnance de renvoi et de renvoyer la procédure au juge d’instruction aux fins de régularisation. La Cour de cassation a cassé la décision de la chambre de l’instruction au motif que le juge d’instruction doit renouveler la procédure d’information si celle-ci est reprise ou poursuivie postérieurement à la notification de fin d’information. En effet, dans cette décision, le juge d’instruction aurait dû délivrer un nouvel avis de fin d’information aux parties, et ce dernier avait aussi l’obligation d’évoquer et procéder aux actes d’instruction relevant de sa compétence, ou de renvoyer le dossier au juge d’instruction pour poursuivre l’information, ce qu’il n’avait pas effectué. Quid en cas d’appel du Parquet ? Il ressort de cette jurisprudence l’importance du respect de la procédure d’information. Le cas échéant, les actes peuvent être entachés de nullité. Par conséquent, il en ressort qu’en n’appliquant pas correctement la procédure d’information, le délai d’instruction et de jugement du dossier se retrouve allongé. C’est la raison pour laquelle la Cour de cassation a pris soin de rappeler les éléments procéduraux relatifs à la clôture et la reprise de l’information. Une application généralisée de cette règle Dans un arrêt du 22 novembre 2023, les juges ont eu l’occasion de préciser que le versement au dossier de pièces demandées par le juge d’instruction, après l’avis de clôture, sans qu’elles figurent auparavant à la procédure ni qu’elles aient été soumises à un examen contradictoire, constitue une poursuite de l’instruction. Dans une telle hypothèse, il est nécessaire de renouveler la procédure d’information et donc de délivrer, après le versement des pièces au dossier, un nouvel avis de fin d’information. Il était question dans cette affaire « d‘arrestation, enlèvement, détention ou séquestration arbitraires pour faciliter la commission d’un crime, tentative d’extorsion avec arme, en bande organisée, et associations de malfaiteurs, en récidive ». (Cass.crim., 22 novembre 2023, n°23-85.205)
Un fonctionnaire peut-il utiliser le droit de sa taire lors d’une procédure disciplinaire ?   Le droit de se taire : définition Le droit de se taire peut être défini comme le fait de pouvoir faire ou s’abstenir de faire des déclarations pouvant éclairer le juge quant à sa culpabilité. Ce droit découle du principe de présomption d’innocence, prévu à l’article 9 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 :   « Tout homme étant présumé innocent jusqu’à ce qu’il ait été déclaré coupable, s’il est jugé indispensable de l’arrêter, toute rigueur qui ne serait pas nécessaire pour s’assurer de sa personne doit être sévèrement réprimée par la loi. »   Ce droit de se taire s’applique aux peines prononcées par les juridictions répressives, mais aussi aux sanctions ayant le caractère d’une punition.   Les droits d’un fonctionnaire poursuivi disciplinairement Lorsqu’un fonctionnaire fait l’objet d’une procédure disciplinaire, ses droits sont énoncés, tels que le droit de se faire communiquer l’intégralité du dossier disciplinaire le concernant, mais aussi le droit d’être assisté du défenseur de son choix, comme le prévoient l’article 19 de la loi du 13 juillet 1983, ainsi que les articles L. 532-4 et L. 532-5 du code général de la fonction publique. Cependant, aucune disposition ne garantit au fonctionnaire le droit de se taire.   La QPC du 4 octobre 2024 En l’espèce, un fonctionnaire a fait l’objet d’une procédure disciplinaire. Ses droits de communication du dossier et d’assistance lui ont été énumérés. Une Question Prioritaire de Constitutionnalité a été formulée par ce fonctionnaire concernant le droit de se taire dans le cadre d’une procédure disciplinaire, contestant l’article 19 de la loi du 13 juillet 1983, et les articles L. 532-4 et L. 532-5 du code général de la fonction publique, en ce qu’ils ne prévoient pas expressément le droit pour le fonctionnaire de se taire.   Le Conseil constitutionnel a considéré que ces dispositions étaient contraires à la Constitution, en ce qu’elles méconnaissent les exigences de l’article 9 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen. Cette décision a pour conséquence l’abrogation de ces dispositions appliquée au 1er octobre 2025. Cela implique l’adoption d’une nouvelle loi garantissant aux fonctionnaires le droit de se taire lors d’une procédure disciplinaire. Dans l’attente de cette nouvelle disposition, le fonctionnaire doit être informé de son droit de se taire devant le conseil de discipline.   L’extension du droit de se taire Le droit de se taire est expressément garanti à tous les stades d’une procédure pénale, de la garde à vue à l’audience devant un juge. Cette décision du Conseil constitutionnel vient alors étendre le champ d’application de ce droit aux procédures disciplinaires.
Quelles sont les causes entraînant une extinction de l’action publique ?   L’action publique est l’action exercée par le ministère public à l’égard d’un individu ayant commis une infraction dans l’objectif de lui appliquer une peine.   L’article 1er du Code de procédure pénale dispose que « l’action publique pour l’application des peines est mise en mouvement et exercée par les magistrats ou par les fonctionnaires auxquels elle est confiée par la loi. Cette action peut aussi être mise en mouvement par la partie lésée, dans les conditions déterminées par le présent code. »   Néanmoins, dans certaines circonstances, cette action publique peut être éteinte. L’article 6 alinéa 1er du Code pénal précise que l’action publique pour l’application de la peine s’éteint dans 5 hypothèses :   La mort du prévenu La mort de la personne poursuivie éteint l’action publique. Aucune peine ne peut donc être prononcée à son encontre.   La prescription   La prescription des infractions est le délai pendant lequel un individu ayant commis une infraction peut être poursuivi afin d’être condamné. En principe, les délais sont les suivants :   20 ans pour les crimes à compter du jour où l’infraction a été commise (article 7 du Code de procédure pénale)   6 ans pour les délits à compter du jour où l’infraction a été commise (article 8 du Code de procédure pénale)   1 an pour les contraventions à compter du jour où l’infraction a été commise (article 9 du Code de procédure pénale)   Il existe certains délais spéciaux notamment pour les délits de presse (la prescription est de 3 mois), mais également pour les crimes contre l’humanité (ces crimes sont imprescriptibles). En principe, une fois le délai de prescription écoulé, l’individu ne peut plus être poursuivi et condamné.   Il convient toutefois de prendre en compte les actes ou obstacles qui interrompent ou suspendent la prescription. En effet, lorsque le délai de prescription est interrompu, le délai déjà écoulé « s’efface », pour donner lieu au départ d’un nouveau délai identique au délai initial.   A contrario, la suspension arrête temporairement le délai de prescription. Ce dernier recommence à courir où il s’était arrêté, une fois l’obstacle de droit ou de fait disparu.   L’amnistie L’amnistie est prévue à l’article 133-9 du Code pénal « L’amnistie efface les condamnations prononcées. Elle entraîne, sans qu’elle puisse donner lieu à restitution, la remise de toutes les peines. Elle rétablit l’auteur ou le complice de l’infraction dans le bénéfice du sursis qui avait pu lui être accordé lors d’une condamnation antérieure ». Ainsi, il est interdit à toute personne qui, dans l’exercice de ses fonctions, a connaissance de condamnations pénales, de sanctions disciplinaires ou professionnelles ou d’interdictions, déchéances et incapacités effacées par l’amnistie, d’en rappeler l’existence sous quelque forme que ce soit ou d’en laisser subsister la mention dans un document quelconque.   L’abrogation de la loi pénale La disparition de la loi pénale fait obstacle à toute poursuite à l’égard d’un l’individu ayant commis les faits auparavant incriminés. Cette impossibilité de poursuivre l’individu se justifie par le principe de légalité prévu à l’article 111-3 du Code pénal selon lequel « Nul ne peut être puni pour un crime ou pour un délit dont les éléments ne sont pas définis par la loi, ou pour une contravention dont les éléments ne sont pas définis par le règlement. ». De même, lorsque les faits poursuivis cessent d’être punissables avant qu’une décision définitive ne soit intervenue, l’individu ne peut plus être condamné pour ces faits.   La chose jugée La chose jugée est prévue notamment à l’article 368 du Code de procédure pénale « Aucune personne acquittée légalement ne peut plus être reprise ou accusée à raison des mêmes faits, même sous une qualification différente ». La Cour de cassation a eu l’occasion de préciser que l’autorité de la chose jugée ne peut être valablement invoquée que lorsqu’il existe une identité de cause, d’objet et de parties entre les 2 poursuites. A titre d’exemple, la relaxe d’un prévenu du chef d’abus de confiance ne met pas d’obstacles à une nouvelle poursuite pour des faits constitutifs d’abus de biens sociaux (Cass. crim, 2 avr. 1990, n° 88-81.264). Cependant, en raison de l’autorité de la chose jugée, un prévenu relaxé des poursuites de harcèlement sexuel ne peut être ensuite valablement poursuivi pour agressions sexuelles aggravées pour les mêmes faits (Cass. crim, 19 janv. 2005, n° 04-81.686).
Les modalités de la technique d’infiltration utilisée par la police judiciaire   L’infiltration consiste, pour un officier ou un agent de police judiciaire, à surveiller des personnes suspectées de commettre un crime ou un délit en se faisant passer, auprès de ces personnes, comme un de leurs coauteurs, complices ou receleurs. Ainsi, l’officier ou l’agent de police judiciaire est autorisé à faire usage d’une identité d’emprunt. Néanmoins, ces actes ne peuvent constituer une incitation à commettre des infractions (cf : voir article « les policiers peuvent-ils user d’un stratagème afin d’obtenir la preuve que j’ai commis une infraction ? »).   Quels actes l’agent peut-il commettre dans le cadre de cette infiltration ? Aux termes de l’article 706-82 du Code de procédure pénale, l’agent infiltré peut commettre ces actes sans être déclaré pénalement responsable : Acquérir, détenir, transporter, livrer ou délivrer des substances, biens, produits, documents ou informations tirés de la commission des infractions ou servant à la commission de ces infractions Utiliser ou mettre à disposition des personnes se livrant à ces infractions des moyens de caractère juridique ou financier ainsi que des moyens de transport, de dépôt, d’hébergement, de conservation et de télécommunication   L’opération d’infiltration peut-elle être autorisée pour toutes les infractions ? L’opération d’infiltration est soumise à une procédure particulière car elle est applicable uniquement à la criminalité et à la délinquance organisées. L’article 706-81 du Code de procédure pénale précise que l’infiltration est possible lorsque les nécessités de l’enquête ou de l’instruction concernant l’un des crimes ou délits entrant dans le champ d’application des articles 706-73 et 706-73-1 le justifient. Les infractions suivantes relèvent notamment de la criminalité et de la délinquance organisées : Les crimes de meurtre commis en bande organisée Les crimes et délits d’enlèvement et de séquestration commis en bande organisée Les crimes et délits de trafic de stupéfiants Le crime de vol en bande organisée Le crime de torture et d’actes de barbarie commis en bande organisée   Quelle autorité est compétente pour autoriser une infiltration ? Selon l’article 706-81 alinéa 1er du Code de procédure pénale « le procureur de la République ou, après avis de ce magistrat, le juge d’instruction saisi peuvent autoriser qu’il soit procédé, sous leur contrôle respectif, à une opération d’infiltration ». A peine de nullité, cette autorisation doit être délivrée par écrit et doit être spécialement motivée. Elle mentionne la ou les infractions qui justifient le recours à cette procédure et l’identité de l’officier de police judiciaire sous la responsabilité duquel se déroule l’opération.   Quelle est la durée d’une infiltration ? L’infiltration ne peut excéder quatre mois. Cependant, elle peut être renouvelée dans les mêmes conditions de forme et de durée. Le magistrat qui a autorisé l’opération peut, à tout moment, ordonner son interruption avant l’expiration de la durée fixée.
La mise en liberté d’office du détenu en l’absence d’interrogatoire : l’arrêt crucial de la Cour de cassation du 19 décembre 2023 Le 19 décembre 2023, la chambre criminelle de la Cour de cassation a rendu un arrêt qui vient clarifier une question essentielle dans la procédure pénale : celle de la mise en liberté d’office d’un détenu en l’absence d’interrogatoire devant le juge d’instruction. Ce jugement vient rappeler l’importance des délais d’instruction et des conditions dans lesquelles un prévenu peut demander à être entendu, tout en rappelant les limites légales qui encadrent cette procédure. À travers cette décision, la Cour a statué sur la question de savoir si, en cas de non-respect des délais d’interrogatoire, un détenu pouvait revendiquer sa mise en liberté d’office. Les faits de l’affaire et la question juridique posée Dans cette affaire, le prévenu, mis en examen pour des faits graves d’infractions aux législations sur les stupéfiants, les armes et le blanchiment aggravé, se trouvait en détention provisoire depuis plusieurs mois. À l’issue de sa dernière comparution, le délai de quatre mois prévu par l’article 82-1 du Code de procédure pénale était écoulé sans que le juge d’instruction ne l’ait entendu. En conséquence, le prévenu a formulé une demande de mise en liberté d’office, arguant que l’absence d’interrogatoire dans les délais impartis violait ses droits, en particulier ceux garantis par la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, ainsi que la Constitution. Cette question a été soumise à la Cour de cassation, qui a été amenée à se prononcer sur la conformité des dispositions du Code de procédure pénale avec les principes fondamentaux du droit pénal. Le prévenu soutenait que le législateur aurait dû prévoir une mise en liberté automatique lorsque l’interrogatoire devant le juge d’instruction n’était pas effectué dans le délai de quatre mois, estimant qu’en l’absence de telle mesure, il y avait une violation de ses droits fondamentaux. L’arrêt de la Cour de cassation et la position du législateur Dans sa décision, la chambre criminelle de la Cour de cassation a rejeté la demande du prévenu et a souligné que les dispositions de l’article 82-1 du Code de procédure pénale ne prévoient pas la mise en liberté d’office du détenu en cas d’absence d’interrogatoire dans les délais impartis. Selon la Cour, la législation en vigueur n’impose pas cette sanction automatique de libération, contrairement à ce que soutenait le prévenu. La Cour de cassation a estimé que les textes législatifs sont suffisamment clairs à ce sujet et que le législateur n’était pas tenu d’édicter une règle de mise en liberté d’office dans ce cas précis. Bien que le prévenu puisse demander à être entendu par le juge d’instruction après quatre mois, l’absence d’interrogatoire ne conduit pas à une libération d’office, sauf si d’autres irrégularités dans la procédure étaient constatées. Le rôle de l’article 82-1 du Code de procédure pénale et son application L’article 82-1 du Code de procédure pénale permet à toute personne mise en examen de demander à être entendue par le juge d’instruction à l’expiration d’un délai de quatre mois à compter de la dernière comparution. Ce dispositif vise à garantir que la personne mise en examen soit entendue dans un délai raisonnable. Cependant, cet article ne comporte aucune mention explicite d’une mise en liberté automatique si l’interrogatoire n’a pas lieu dans les délais. Ainsi, la question se posait de savoir si l’absence d’audition dans ce délai justifiait, en soi, la libération du détenu. La chambre criminelle a affirmé que le droit de la défense et les droits fondamentaux du prévenu sont respectés par les délais imposés et par les possibilités de solliciter l’audition du juge d’instruction, sans qu’il soit nécessaire d’ajouter une règle de mise en liberté automatique. Pour la Cour, la mise en détention provisoire d’un prévenu reste une mesure exceptionnelle, justifiée par la nécessité de garantir le bon déroulement de l’enquête et de prévenir toute obstruction à la justice. L’importance de la procédure pénale et des délais d’instruction Cet arrêt soulève plusieurs enjeux importants concernant l’équilibre à maintenir entre le respect des droits de la défense et les impératifs de l’instruction pénale. D’un côté, il est essentiel de garantir que l’instruction soit menée dans des délais raisonnables, afin de ne pas porter atteinte aux droits du prévenu, notamment en ce qui concerne la durée de la détention provisoire. D’un autre côté, la Cour de cassation rappelle que la mise en liberté d’office en l’absence d’un interrogatoire pourrait avoir des conséquences néfastes sur le déroulement de l’enquête et la préservation de l’ordre public. Cet arrêt met en lumière la rigueur de la procédure pénale, qui prévoit déjà des mécanismes de contrôle de la durée de la détention provisoire, comme les décisions de prolongation de la détention par le juge des libertés et de la détention. En revanche, il n’envisage pas que l’absence d’un interrogatoire dans les délais prévus entraîne systématiquement une libération, et cela afin de maintenir un équilibre entre les droits du prévenu et la nécessité de garantir une instruction complète et effective.       Conclusion En conclusion, l’arrêt rendu par la Cour de cassation le 19 décembre 2023 rappelle la discipline imposée par le Code de procédure pénale en matière de délais d’instruction. Si les prévenus ont le droit d’être entendus dans un délai raisonnable, le législateur a fait le choix de ne pas instaurer une mise en liberté d’office en cas de non-respect de ces délais, estimant qu’une telle mesure pourrait nuire à l’ordre public et à l’efficacité de l’enquête. Cette décision clarifie donc les attentes en matière de droit à l’audition, tout en préservant l’équilibre entre les droits de la défense et la nécessité d’une instruction approfondie.
Dans quels cas un suspect peut-il être placé sur écoute téléphonique ?   Dans le cadre d’une enquête préliminaire ou de flagrance :   Les infractions concernées L’article 706-95 du Code de procédure pénale prévoit que si les nécessités de l’enquête de flagrance ou de l’enquête préliminaire relative à l’une des infractions relatives à la criminalité et à la délinquance organisées l’exigent, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire peut, à la requête du procureur de la République, autoriser l’interception, l’enregistrement et la transcription de correspondances émises par la voie des communications électroniques. Relèvent notamment de la criminalité et de la délinquance organisées : Les crimes de meurtre commis en bande organisée Les crimes et délits d’enlèvement et de séquestration commis en bande organisée Les crimes et délits de trafic de stupéfiants Le crime de vol commis en bande organisé Le crime de tortures et d’actes de barbarie commis en bande organisée   La durée de la mesure Ces opérations réalisées sous le contrôle du juge des libertés et de la détention sont autorisées pour une durée maximum de 1 mois, renouvelable une fois.   Dans le cadre d’une instruction : Les infractions concernées L’article 100 du Code de procédure pénale dispose qu’en matière criminelle et en matière correctionnelle, si la peine encourue est égale ou supérieure à 3 ans d’emprisonnement, le juge d’instruction peut, lorsque les nécessités de l’information l’exigent, prescrire l’interception, l’enregistrement et la transcription de correspondances émises par la voie des communications électroniques.   La durée de la mesure Cette décision est prise pour une durée maximum de 4 mois et les écoutes sont effectuées sous le contrôle du juge d’instruction.   Les conditions communes : La décision d’interception doit être écrite. L’article 100-1 précise que cette décision est motivée par référence aux éléments de fait et de droit justifiant la nécessité de ces opérations.   Seule la personne visée par l’enquête peut être placée sur écoute ?  La personne visée par l’enquête, le mis en examen mais également des tiers peuvent être placés sur écoute.   Un individu dont les écoutes ont été retranscrites au dossier peut-il demander la nullité de la mesure dans la mesure où il n’est ni titulaire, ni utilisateur de la ligne ? La Cour de cassation a précisé que toute personne dont les écoutes ont été retranscrites au dossier a qualité pour agir même si la mesure a été réalisée sur une ligne dont elle n’est ni titulaire, ni utilisatrice (Cass. crim, 15 janvier 2003, n° 02-87.341).
Qu’est-ce qu’une CRPC ? Une CRPC, autrement appelée « plaider-coupable », permet d’éviter les poursuites. C’est une reconnaissance, par l’auteur des faits, de sa culpabilité. A la suite de celle-ci, le procureur de la République lui proposera une peine. Cette procédure s’applique de deux manières : L’auteur des faits est convoqué, sur décision du procureur de la République L’auteur des faits, s’il a été convoqué en justice, ou a fait l’objet d’une citation directe, peut demander à ce que la procédure CRPC soit appliquée. Il fait cela en envoyant une lettre recommandée avec AR au procureur (Circulaire CRIM 04-12 E8 du 2 septembre 2004, article 2.1.2) Lors de l’entretien entre la personne concernée et le procureur de la République, un avocat doit obligatoirement être présent (article 495-8 du CPP) : « la personne ne peut renoncer à son droit d’être assistée par un avocat ».   La décision de peine doit être homologuée par une ordonnance motivée, rendue le jour même par le président du Tribunal Judiciaire, en présence de la personne concernée (article 495-9 CPP).   Quelles infractions sont passibles d’une CRPC ? Selon l’article 495-7 du CPP, « pour tous les délits, à l’exception de ceux mentionnés à l’article 495-16 et des délits d’atteinte volontaires et involontaires à l’intégrité des personnes et d’agressions sexuelles prévues aux articles 222-9 à 222-31-2 du code pénal lorsqu’ils sont punis d’une peine d’emprisonnement d’une durée supérieure à cinq ans », il est possible d’appliquer une CRPC. L’article 495-16 du CPP mentionne donc les exceptions, les infractions qui ne peuvent faire l’objet d’une CRPC : « Les dispositions de la présente section ne sont applicables ni aux mineurs de dix-huit ans ni en matière de délits de presse, de délits d’homicides involontaires ou de délits politiques ».   La CRPC s’applique notamment aux infractions dont la peine est prévisible, ou à celles qui ne justifient pas d’une audience devant le tribunal correctionnel (Circulaire CRIM 04-12 E8 du 2 septembre 2004, article 1.2.2.3 et article 1.2.2.4).   Quelles peines peuvent être proposées ? Selon l’article 495-8 du Code de procédure pénale, « le procureur de la République peut proposer à la personne d’exécuter une ou plusieurs des peines principales ou complémentaires encourues ».   Les peines principales sont notamment des peines d’emprisonnement ou des amendes : Si une peine d’emprisonnement est proposée elle ne peut excéder trois ans, « ni excéder la moitié de la peine d’emprisonnement encourue», c’est-à-dire celle que l’auteur risquerait s’il passait devant le tribunal correctionnel.   Selon l’article 495-11 du CPP, « Lorsque la peine homologuée est une peine d’emprisonnement ferme, la personne est, selon les distinctions prévues au deuxième alinéa de l’article 495-8, soit immédiatement incarcéré en maison d’arrêt, soit convoquée devant le juge de l’application des peines, à qui l’ordonnance est alors transmise sans délai ».   Une amende est également possible, sous les mêmes conditions : son montant ne peut être supérieur au montant de l’amende encourue.   Les peines complémentaires sont celles qui sont déjà prévues pour le délit reproché, à l’article 131-10 du Code pénal, et peuvent se constituer de « une ou plusieurs peines complémentaires qui, frappant les personnes physiques, emportent interdiction, déchéance, incapacité ou retrait d’un droit, injonction de soins ou obligation de faire, immobilisation ou confiscation d’un objet, confiscation d’un animal, fermeture d’un établissement ou affichage de la décision prononcée ou diffusion de celle-ci par la presse écrite, soit par tout moyen de communication au public par voie électronique ». Par exemple, une personne coupable d’un délit ou d’une contravention pourrait se faire retirer son permis de conduire ou de chasser (article 131-10 Code pénal). La Cour administrative d’appel de Lyon a pu juger que pour des faits d’usage et détention d’un faux document d’identité, la personne concernée a pu être condamné, par la voie d’une CRPC, à une interdiction de retour sur le territoire français pendant deux ans (Cour administrative d’appel de Lyon – 5ème chambre B – formation à 3, 21 février 2019, n°18LY03873). Il serait également possible d’effectuer des stages. Pour un délit de conduite sous l’emprise d’un état alcoolique, la peine prononcée fut de soixante-dix heures de travail d’intérêt général, et dix mois de suspension de son permis de conduire (Cass. Crim. 14 avril 2021, n°20-83.607).   Quelles suites sont possibles après une proposition de peine ? La personne concernée peut refuser la proposition du procureur. Elle passera alors devant un tribunal, qui ne peut pas la condamner à une peine plus lourde que celle qui avait été proposée par le procureur : « En cas d’appel d’une ordonnance rendue en application de l’article 495-11, la cour évoque l’affaire et statue sur le fond sans pouvoir prononcer une peine plus sévère que celle homologuée par le président du tribunal ou le juge délégué par lui, sauf s’il y a appel par le ministère public » (article 520-1 CPP). Si le magistrat saisi refuse l’homologation de la peine proposée, l’auteur des faits devra, dans les mêmes conditions que s’il n’avait pas accepté la peine, passer devant le tribunal correctionnel (article 495-12 CPP). Après un refus d’homologation, il est impossible pour le procureur de la République de proposer une deuxième procédure de CRPC : « Il se déduit de l’article 495-12 du code de procédure pénale, interprété à la lumière des travaux parlementaires relatifs aux lois n° 2004-204 du 9 mars 2004 et n° 2018-898 du 23 octobre 2018, qu’une nouvelle proposition de peine ne saurait autoriser, après un refus d’homologation, la mise en oeuvre d’une autre comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité » (Cass. Crim., 17 mai 2022, n°21-86.131).
Cass. Crim., 27 mai 2009, n°09-82.115 La mise en place d’un dispositif de captation d’image et de son à l’insu d’un individu est prévu à l’article 706-96 du Code de procédure pénal : « Il peut être recouru à la mise en place d’un dispositif technique ayant pour objet, sans le consentement des intéressés, la captation, la fixation, la transmission et l’enregistrement de paroles prononcées par une ou plusieurs personnes à titre privé ou confidentiel, dans des lieux ou véhicules privés ou publics, ou de l’image d’une ou de plusieurs personnes se trouvant dans un lieu privé. » Ce dispositif était pendant très longtemps entre les mains exclusives du juge d’instruction lors de l’instruction mais face à une criminalité de plus en plus organisée, on a octroyé de plus en plus de pouvoir au procureur de la République dans le cadre de l’enquête. S’agissant des faits, un individu a été mis en examen pour recel de véhicules volés et de falsification de leur immatriculation. Lors de l’enquête préliminaire, les enquêteurs ont mis en place un dispositif de captation d’image dans l’allée centrale d’un parking d’une copropriété dont l’accès nécessite l’usage d’une télécommande. Le mis en examen a saisi la Chambre de l’instruction et a une soulevé une nullité. En effet, il demande l’annulation d’actes de la procédure et en particulier la captation des vidéo-surveillances, en faisant valoir qu’elles n’avaient pas été autorisée par un juge et qu’elles avaient été effectuées dans un lieu privé à usage d’habitation, inaccessible à des vues extérieures et clos, l’usage d’une clef étant nécessaire pour y entrer. La chambre de l’instruction déboute le mis en examen, et déclare que l’installation du dispositif de captation d’image dans l’allée centrale du parking d’une copropriété est valable. En effet, La chambre de l’instruction considère que le parking relève des parties communes de la copropriété, l’accord du syndic de copropriété suffit, sans qu’il n’y ait lieu à demander l’autorisation à un juge. De plus, le parking n’étant pas un lieu privé, le mis en examen n’étant titulaire d’aucun droit, n’a pas la qualité de contester la mise en place de ce dispositif sur le fondement du respect à la vie privée. Un pourvoi en cassation est formé. L’autorisation du syndic de copropriété de procéder à un dispositif de captation de vidéo-surveillance dans les parties communes, enlève-t-elle l’obligation de demander l’autorisation à un juge ? Dans son arrêt du 9 mai 2009, la Chambre Criminelle de la Cour de cassation a considéré que les parties communes d’une copropriété étaient un lieu privé, de ce fait les enquêteurs auraient dû demander l’autorisation à un juge. Cet arrêt nous apprend deux choses, en premiers lieu que lors de la phase d’enquête les policiers ne peuvent pas mettre en place un dispositif de captation d’image et de son sans autorisation préalable. En deuxième lieu, que les parties communes d’une copropriété sont des lieux privés, et que même avec l’accord du syndic, il faut demander l’autorisation à un juge.   I/ Les autorités compétentes pour la captation d’image et de son 1.Un dispositif ouvert uniquement à l’instruction La loi n°2004-2049 du 9 mars 2004, a prévu un dispositif pour lutter contre la criminalité organisée, avec la possibilité de mettre en place une installation de captation du son et des images. Ce dispositif est introduit à l’article 706-96 du Code de procédure pénal. L’utilisation de ce dispositif est autorisée qu’au cours d’une information judiciaire, sous le contrôle du juge d’instruction, et uniquement pour les infractions énumérées par l’article 706-73 du code de procédure pénale. Par le biais d’une commission rogatoire et après avis du procureur de la République, il ordonne aux officiers et agents de police judiciaire de mettre en place le dispositif de captation des images et du son, sans le consentement des intéressés. C’est un dispositif attentatoire à la vie privée, en effet, face au développement des moyens technologique d’investigation, les parties invoquent de plus en plus des demandes d’annulation de pièce pour violation de l’intimité de la vie privée. De ce fait, l’application de ce dispositif n’est possible que pour les infractions les plus graves, tel que le terrorisme ou les infractions liées au crime organisé (Crime de meurtre commis en bande organisé, Crime de tortures et d’actes de barbarie commis en bande organisée, Crimes et délits de trafic de stupéfiant, Crime de vol commis en bande organisée). Cette intrusion dans la vie privée des individus, justifiait leur exclusivité entre les mains du juge d’instruction. Assurément, la mis en place de ce dispositif ne pouvait avoir lieu lors de l’enquête, que se soit de flagrance ou préliminaire. La Chambre Criminelle de la Cour de cassation la rappeler plusieurs fois : « Mais attendu qu’en statuant ainsi, alors que constitue une ingérence dans l’exercice du droit au respect de la vie privée et du domicile le fait, pour des enquêteurs, de photographier […], les plaques d’immatriculation des véhicules se trouvant à l’intérieur d’une propriété privée non visible de la voie publique […], immixtion, opérée en enquête préliminaire, n’est prévue par aucune disposition de procédure pénale, » (Cass. Crim., 27 mars 2007, n°06-89.444)   « Mais attendu qu’en prononçant ainsi, par des motifs inopérants, alors que, les parties communes d’une copropriété constituant un lieu privé, les opérations de captation et de fixation d’images effectuées en l’espèce ne répondaient pas aux conditions de l’article 706-96 du code de procédure pénale, la chambre de l’instruction a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus énoncé ; » (Cass. Crim., 27 mai 2009, n°09-82.115)   Cependant, l’interdiction prononcée par la Chambre criminelle de procéder à un dispositif de captation d’image et de son lors de la phase d’enquête disparaitra par le biais d’une loi du 3 juin 2016 qui a pour but de renforcer les moyens de lutte contre la criminalité organisée.   2.L’élargissement de la mise en place du dispositif lors de l’enquête Cette loi n°2016-731 du 3 juin 2016 est d’une grande importance concernant l’évolution, de la pratique, puisqu’elle offre la possibilité aux enquêteurs par le biais du Procureur de la République de mettre en place le dispositif de captation d’image et de son lors de l’enquête, tant en flagrance ou en préliminaire. C’est le juge des libertés et de détention qui autorise ces opérations à la requête du procureur de la République pour une durée maximale d’un mois, renouvelable une fois dans les mêmes conditions. L’article 706-96-1 u Code de procédure pénal dispose que : « Au cours de l’enquête, en vue de mettre en place le dispositif technique mentionné à l’article 706-96, le juge des libertés et de la détention peut autoriser l’introduction dans un véhicule ou un lieu privé, y compris hors des heures prévues à l’article 59, à l’insu ou sans le consentement du propriétaire ou du possesseur du véhicule ou de l’occupant des lieux ou de toute personne titulaire d’un droit sur ceux-ci. Ces opérations, qui ne peuvent avoir d’autre fin que la mise en place du dispositif technique, sont effectuées sous son contrôle. Le présent alinéa s’applique également aux opérations ayant pour objet la désinstallation du dispositif technique ayant été mis en place. »    II/ Les lieux appropriés à la mise en place de la captation du son et de l’image 1. Les lieux publics L’article 230-47 du Code de procédure pénal prévoit qu’il est possible lors de l’enquête ou de l’instruction de procéder à un dispositif de captation de l’image dans un lieu public, sans qu’il y ait une autorisation de la part du juge des libertés et de détention. En revanche, cette mesure doit être décider par le Procureur de la République. En effet, la Cour de cassation a considéré qu’il ressort du pouvoir d’enquête du parquet reconnu par les articles 39-3 et 41 du code de procédure pénale la possibilité d’utiliser le dispositif de captation d’images sur la voie publique à la condition que cette mesure ait été décidée par lui et non par les enquêteurs (Crim. 8 déc. 2020, n° 20-83.885).   2. Les lieux privés Comme sous-entendu dans l’arrêt du 27 mars 2009, lorsque nous sommes dans un lieu privé, la captation d’image doit être autorisé par un juge. Même lorsqu’il s’agit des parties communes d’une copropriété et même que le syndic soit d’accord. Attention, lorsque le dispositif de vidéosurveillance est installé par le propriétaire dans les parties communes de son immeuble. Cela échappe aux prévisions de l’articles 706-96. Dès lors l’exploitation des images de vidéosurveillance est régulière de la part des policiers (Crim. 6 mars 2013, no 12-87.810).    
Les conditions tenant à la visite de véhicules par la police, qu’ils soient en circulation, arrêtés ou utilisés comme habitation   L’article 78-2-2 du Code de procédure pénale donne la possibilité aux OPJ d’effectuer des « visites de véhicules circulant, arrêtés ou stationnant sur la voie publique ou dans des lieux accessibles au public », dans le cadre d’enquêtes ou de contrôles d’identité. Il y a deux conditions pour justifier une telle visite : – Il doit exister « à l’égard du conducteur ou d’un passager une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu’il a commis, comme auteur comme complice, un crime ou un délit flagrant », selon l’article 78-2-3 du Code de procédure pénale. – Cette opération doit avoir été autorisée au préalable par le procureur de la République, qui aura défini le temps et l’espace applicables, sans qu’il y ait besoin qu’il démontre l’existence d’indices prouvant la commission d’une infraction pour que ses réquisitions soient valides (confirmé dans un arrêt Civ. 2e, 19 février 2004). La période de temps donnée à la police judiciaire pour visiter les véhicules stationnant ou circulant dans un lieu public donné ne peut excéder vingt-quatre heures, avec la possibilité d’une prolongation. Seul un OPJ (officier de police judiciaire) peut effectuer cette visite, contrairement aux contrôles d’identité, qui peuvent être effectués par un APJ (agent de police judiciaire) ou un APJA (agent de police judiciaire adjoint), qui restent néanmoins soumis au contrôle de l’OPJ. Dans un arrêt du 28 septembre 2010, la Cour a expliqué que la présence d’un OPJ est nécessaire, et qu’un APJ qui est sous le contrôle d’un OPJ ne peut pas effectuer seul une telle visite. En l’espèce, un contrôle avait été effectué dans une voiture vide sans que le conducteur ou un témoin soit présent. L’APJ ayant effectué la visite était « sous le contrôle d’un officier de police judiciaire », mais ce dernier n’avait pas « personnellement procédé à la visite du véhicule ». Un OPJ doit donc effectuer la visite de véhicule, ou tout du moins être présent lors de celle-ci.     Cette règle est établie à des fins de respect de « la vie privée et du droit à la propriété de la personne visée par l’acté » (Crim. 13 octobre 2020). Le non-respect de l’obligation qu’un OPJ effectue la visite de véhicule peut entraîner la nullité de l’acte de procédure.   – Les véhicules en circulation En cas de visite d’un véhicule qui est en circulation, les OPJ, assistés des APJ ou APJA si nécessaire, doivent uniquement immobiliser le véhicule pendant le temps qui est nécessaire à la visite (article 78-2-2 CPP).   – Les véhicules arrêtés : la condition de présence du propriétaire, du conducteur, ou d’un témoin Un véhicule arrêté doit obligatoirement être visité en présence de son propriétaire ou de son conducteur. Dans un arrêt du 23 février 2022, la Cour de cassation donne un exemple d’application de la règle de présence obligatoire, en sanctionnant une fouille effectuée sur suspicion d’une infraction liée au trafic de stupéfiants, sans que le conducteur ou un témoin soit présent. La Cour décide de l’annulation de la procédure, confirmant donc la nécessité absolue de la présence du conducteur ou du propriétaire du véhicule pour la validité d’une telle procédure. Par exception, si le conducteur, ou le propriétaire, ne peut pas être trouvé par la police, les agents peuvent demander à toute personne aux environs d’être témoin, tant qu’il n’existe pas de risque d’atteinte à la sécurité des personnes et des biens, et tant que cette personne n’exerce pas des fonctions de police. Par exemple, un voisin (Cour d’appel de Toulouse, 28 février 2007) ou un passant peuvent être sollicité par la police. Cependant, un APJA ayant assisté l’OPJ dans la visite n’est pas un témoin valable (Crim. 13 septembre 2022).   – Les véhicules à usage d’habitation Un camping-car, une caravane, ou un autre véhicule dont le propriétaire peut prouver qu’il y habite effectivement, peuvent constituer des véhicules à usage d’habitation. Un véhicule utilisé comme habitation est soumis au régime de la perquisition ou visite domiciliaire, donc ne peut pas être visités par la police judiciaire dans les mêmes conditions que les véhicules cités avant.   – Que se passe-t-il lorsqu’une infraction est découverte pendant la visite ? Si une infraction est découverte pendant la fouille, la police doit obligatoirement dresser un procès-verbal, qui contiendra les mentions de lieu, dates et heures de début et de fin de la visite. Une copie sera obligatoirement donnée à la personne concernée, et l’autre sera communiquée au procureur de la République. Si la personne concernée ne reçoit pas une copie du procès-verbal, cela rend la procédure irrégulière et ouvre droit à son annulation (Cour d’appel de Toulouse, 5 novembre 2010). Si la police judiciaire recherchait une infraction spécifique lors de leur visite, le fait de découvrir un autre type d’infraction ne cause pas une irrégularité de la procédure (Civ. 2e, 19 février 2004).
  Selon la Circulaire du 3 février 2011, l’ayant institué, L’AGRASC est « un établissement public à caractère administratif placé sous la tutelle conjointe du ministère de la Justice et du ministère du Budget », basé à Paris. En d’autres termes, l’AGRASC est un établissement géré par le ministre de la Justice et le ministre du Budget, qui saisit les sommes d’argent et autres biens découverts lors de procédures pénales. L’Agence s’occupe donc de garder les biens, de les rendre aux propriétaires dans certaines circonstances, ou de les utiliser dans divers buts. Rattachée au « Titre XXX du Livre IV du code de procédure pénale » par la Circulaire de 2011, l’AGRASC est donc une Agence qui collabore avec les juridictions et participe à la procédure pénale en saisissant les biens découverts lors de procédures pénales.   Qui sont les acteurs principaux de l’AGRASC ? Il y a plusieurs organes de direction : Le directeur général Le directeur principal de l’AGRASC, selon l’article R.54-4 du CPP, est un « magistrat de l’ordre judiciaire nommé par arrêté du ministre de la justice pour une durée de trois ans renouvelable ». C’est lui qui s’occupe de la gestion générale et du budget de l’Agence. Il la représente en justice, et veille à son bon fonctionnement. Le secrétaire général Il seconde le directeur dans toutes ses tâches, et est nommé « par arrêté du ministre du budget » (article R.54-4 du CPP).   La nomination du secrétaire général et du directeur général de l’AGRASC repose donc sur une collaboration entre deux ministères : celui de la Justice, et celui du Budget. L’AGRASC est effectivement une Agence reposant sur une « tutelle conjointe » (Circulaire de 2011). Le conseil d’administration Le conseil d’administration de l’AGRASC se réunit deux fois par an, et se prononce sur « les programmes généraux d’activité de l’établissement public », ou « le rapport annuel d’activité de l’établissement » (article R.54-3 CPP). Les membres du conseil sont définis selon l’article R.54-1 du Code de procédure pénale, et comportent, entres autres, « ‘sept’ représentants de l’Etat, membres de droit », « le directeur des affaires criminelles et des grâces », « le secrétaire général du ministère de la justice », « le directeur général des finances publiques », « le directeur général de la police nationale », « le directeur général de la gendarmerie nationale », « le directeur général des douanes et des droits indirects », et « le directeur du budget ou son représentant ».     Quelles sont les missions de l’AGRASC ? Selon le site https://lannuaire.service-public.fr/gouvernement/05b02f3e-ff94-4cb9-969c-b09d66f6b318 : « L’Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués (AGRASC) remplit les principales missions suivantes : assurer la gestion centralisée de toutes les sommes saisies dans le cadre des procédures pénales en France ; procéder à l’ensemble des ventes avant jugement de biens meubles saisis ; procéder à l’ensemble des publications, auprès des services de publicité foncière pour les saisies et confiscations pénales immobilières ; gérer, sur mandat de justice, tous les biens complexes qui lui sont confiés ». L’AGRASC a donc deux types de missions : les missions «qui lui seront impérativement confiées par les juridictions », et les missions « facultatives, qu’elle accomplira sur mandat de justice » (Circulaire du 3 février 2011).   Les missions impératives Entre autres, l’AGRASC s’occupe principalement de la gestion des sommes saisies. Cependant, la création de l’agence a aussi permis d’informer les victimes et d’indemniser les parties civiles/ La saisie de sommes lors de procédures pénales : L’AGRASC s’occupe des sommes saisies à l’occasion de procédures pénales, qui peuvent être des scellés numéraires (sommes en espèces), de sommes inscrites au crédit d’un compte, ou de créances (Circulaire de 2011, article I.1). Les sommes sont déposées sur le compte de l’agence, qui est « tenu à la Caisse des dépôts et des consignations (CDC), compte qui sera rémunéré au taux des consignations ».   L’information des victimes et l’indemnisation des parties civiles : L’article 706-161 du Code de procédure pénale prévoit que l’agence « peut informer les services compétents et les victimes, à leur demande ou à son initiative, sur les biens qui sont restitués sur décision de justice, afin d’assurer le paiement de leurs créances, notamment fiscales, douanières, sociales ou de dédommagement ». Cette mission rentre dans le champ assez large de la mission de gestion des sommes ou biens saisis à laquelle l’AGRASC est soumise. En effet, l’article 706-164 du même code explique cette mission davantage : une partie civile qui « a bénéficié d’une décision définitive lui accordant des dommages et intérêts en réparation du préjudice qu’elle a subi du fait d’une infraction pénale ainsi que des frais en application des articles 375 ou 475-1 » est recevable à demander des dommages et intérêts, et peut « obtenir de l’Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués que ces sommes lui soient payées par prélèvement sur les fonds ou sur la valeur liquidative des biens de son débiteur dont la confiscation a été décidée par une décision définitive et donc l’agence est dépositaire ». Les missions facultatives   Aide et assistance aux juridictions comme mission générale : L’AGRASC collabore étroitement avec les juridictions, et a même été « conçue, de façon générale, comme un outil au service des juridictions, pouvant être saisie de toute question portant sur les saisies, les mesures conservatoires ou les confiscations » (Circulaire de 2011, article II.1.). L’agence a donc été créée dans une volonté de centraliser les saisies effectuées lors de procédures pénales, et est tenue d’informer et d’aider les juridictions. En effet, selon Antoine Lefèvre, dans un Rapport d’information n°421 déposé le 15 février 2017, le but de la création de l’AGRASC est de « faciliter la possibilité, pour les magistrats, de saisir des éléments du patrimoine des délinquants afin, le cas échéant, de pouvoir ensuite les confisquer – qu’il s’agisse de comptes bancaires, de biens immobiliers, ou de biens plus ‘atypiques’ comme les œuvres d’art, les bateaux ou voitures de luxe, etc » (Pour que le « crime ne paie pas » : consolider l’action de l’AGRASC (Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués) – Sénat (senat.fr)). Gestion de certains biens sur mandat de justice : Dans un premier cas de figure, un bien saisi peut être confié à l’agence, sous deux conditions : S’il y a défaillance ou une indisponibilité du propriétaire ou du détenteur du bien Si la vente par anticipation du bien n’est pas envisagée Il convient de préciser qu’un bien saisi ne revient pas automatiquement à l’agence, contrairement aux sommes saisies. Un bien reste sous la responsabilité de son propriétaire ou détenteur « jusqu’à la mainlevée de la saisie ou de la confiscation du bien saisi » (article 706-143 du CPP). Dans un deuxième cas de figure, les biens saisis peuvent être confiés à la gestion de l’agence s’ils nécessitent « pour leur conservation ou leur valorisation, des actes d’administration » (article 706-160, 1° du CPP). La Circulaire du 3 février 2011 ne donnant cependant pas d’exemples de quels types de biens pourraient être concernés par cette disposition, il est probable que les biens concernés soient des biens qui nécessitent une attention toute particulière, et ne peuvent être simplement entreposés ou gardés. La coopération internationale L’AGRASC peut être saisie de plusieurs demandes émanant d’une autorité étrangère : « assurer la gestion des biens saisis, procéder à l’aliénation ou à la destruction des biens saisis ou confisqués et procéder à la répartition du produit de la vente » (article 706-160, 6° du CPP). Elle sera saisie par les magistrats de l’autorité étrangère.   En pratique : dans quel cadre est-ce que l’AGRASC peut-elle saisir les sommes découvertes lors de procédures pénales ? Les sommes saisies le sont uniquement dans le cadre de procédures pénales, par exemple, dans le cadre d’une interpellation ou d’une perquisition. Les sommes d’argent peuvent provenir de diverses sources : Si elles sont inscrites sur un compte bancaire, elles seront déposées sur le compte bancaire par un virement (Circulaire de 2011, article I.1.1.). Dans le cas de saisie de numéraires, c’est-à-dire de biens meubles corporels, celle-ci s’effectue par un dépôt sur le compte bancaire de l’agence (Circulaire de 2011, article I.1.2.). Cette procédure implique une étroite collaboration entre l’AGRASC et les juridictions, qui autorisent le dépôt et fournissent à l’agence toutes les informations complémentaires permettant d’identifier les sommes déposées. Une fois saisies, les sommes d’argent sont placées sur un compte de dépôt (article R.54-8 du CPP). Dans quels cas l’AGRASC dispose-t-elle des sommes saisies ? Si l’origine des sommes ne peut être déterminée : L’article 706-59 du CPP prévoit que dans ce cas, les sommes « sont transférées à l’Etat à l’issue d’un délai de quatre ans après leur réception ». Cependant, « en cas de décision de restitution postérieure au délai de quatre ans, l’Etat rembourse à l’agence les sommes dues ». Si le propriétaire ne réclame pas les sommes : Il existe un délai de deux mois après la mise en demeure pour que le propriétaire de la somme saisie la réclame. Le cas échéant, l’article 706-160, 4° du CPP donne « à l’agence un monopole concernant l’exécution des ventes avant jugement ». Si le propriétaire de la somme en numéraire est soumis à des dettes qu’il n’a pas réglées : La somme d’argent saisie par l’AGRASC peut être utilisée pour éponger tout ou une partie des dettes du propriétaire. Il ne pourra donc pas se faire rembourser par la suite.
Quelles possibilités sont offertes aux suspects en cas d’enquête préliminaire qui dure depuis au moins une année ?   L’enquête préliminaire, prévue par les articles 75 et suivants du Code de procédure pénale, est le mode d’enquête le plus courant. Dans ce cadre, le Procureur de la République ordonne aux enquêteurs de procéder à tous les actes qu’il juge nécessaire à la manifestation de la vérité. Cependant, ce cadre n’est pas limité dans le temps, en conséquence les enquêtes préliminaires peuvent s’éterniser, sans que les suspects ne puissent voir leur situation clarifiée. Or, les droits de la défense à ce stade de l’enquête étaient inexistants, de sorte que les suspects ne pouvaient qu’attendre la décision du Procureur de la République sur les suites données à la procédure. L’article 77-2 du Code de procédure pénale, modifié par la loi n°2021-1729 du 22 décembre 2021, est venu apporter des solutions à cette problématique et a étoffé les droits de la défense dans ce cadre d’enquête.   Droit à obtenir une copie de la procédure, sous réserves que le Procureur en décide ainsi, et à formuler des observations Cet article prévoit que les avocats et les parties à la procédure, à savoir les suspects et les plaignants pourront avoir accès au dossier pénal, en tout ou partie, sous réserves que le Procureur de la République en décide ainsi. Puis, ils pourront formuler des observations, notamment sur : « la régularité de la procédure, sur la qualification des faits pouvant être retenue, sur le caractère éventuellement insuffisant de l’enquête, sur la nécessité de procéder à de nouveaux actes qui seraient nécessaires à la manifestation de la vérité et sur les modalités d’engagement éventuel des poursuites ou le recours éventuel à la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité ».   Droit à demander une copie de la procédure et formuler des observations passé une année L’article 77-2 prévoit que le suspect encourant une peine privative de liberté peut demander au Procureur de la République d’avoir accès au dossier pénal afin de formuler des observations. Cette solution est conditionnée par des délais ou une atteinte à la présomption d’innocence : « 1° Si la personne a été interrogée dans le cadre d’une audition libre ou d’une garde à vue qui s’est tenue il y a plus d’un an ; 2° S’il a été procédé à une perquisition chez la personne il y a plus d’un an ; 3° S’il a été porté atteinte à la présomption d’innocence de la personne par un moyen de communication au public. Le présent 3° n’est pas applicable lorsque les révélations émanent de la personne elle-même ou de son avocat, directement ou indirectement, ou que l’enquête porte sur des faits relevant des articles 706-73 ou 706-73-1 ou relevant de la compétence du procureur de la République antiterroriste ». Dès lors que l’une de ces conditions est remplie, cette demande peut être réalisée par déclaration au greffe ou par lettre recommandée avec avis de réception. On comprend qu’il s’agit là d’offrir à un suspect l’opportunité d’accélérer l’issue d’une enquête préliminaire qui durerait depuis longtemps. Durant un délai d’un mois à compter de la réception de cette demande, le Procureur de la République ne peut prendre de décision sur la poursuite des faits, hormis : -l’ouverture d’une information, -le renvoi en comparution immédiate, -le renvoi en comparution différée, -la convocation devant le Tribunal correctionnel par procès-verbal, -la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité. Les observations ainsi formulées sont versées au dossier pénal et le Procureur de la République apprécie les suites à y donner. Il convient de noter que le silence vaut décision de refus de communiquer la procédure, décision qui peut être remise en cause devant le Procureur général près la Cour d’appel. Le Procureur de la République peut refuser la communication de cette procédure, par une décision motivée et pour une durée maximum de six mois, si l’enquête est toujours en cours ou en cas de risque d’atteinte à l’efficacité des investigations.   L’impossibilité de poursuivre l’enquête préliminaire au-delà de deux ans après l’un des actes évoqués sans proposition d’accéder au dossier L’article 77-2 du Code de procédure pénale prévoit enfin que l’enquête pénale ouverte depuis plusieurs années ne peut se poursuivre sans que l’accès au dossier pénal ne soit proposé aux suspects et aux plaignants. En effet, dès lors qu’un délai de deux ans s’est écoulé après la garde à vue du suspect, son audition, ou la perquisition de son domicile, le Procureur doit proposer aux parties d’accéder au dossier afin qu’elles puissent formuler des observations.   On comprend dès lors que l’objectif de cet article est d’éviter les enquêtes préliminaires qui s’éternisent, laissant les suspects comme les plaignants dans l’ignorance durant plusieurs années.
Le seul marquage d’un chien spécialisé devant la porte d’un appartement dans une enquête relative à des produits stupéfiants suffit à caractériser la flagrance (Cass. crim, 11 déc. 2019, n°19-82.457)   En droit français, il existe 3 cadres d’enquêtes : L’enquête de flagrance L’enquête préliminaire L’information judiciaire (celle-ci ne sera pas évoquée dans cet article)   L’enquête de flagrance L’enquête de flagrance est prévue aux articles 53 et suivants du Code de procédure pénale. L’article 53 prévoit que « est qualifié crime ou délit flagrant le crime ou le délit qui se commet actuellement, ou qui vient de se commettre. Il y a aussi crime ou délit flagrant lorsque, dans un temps très voisin de l’action, la personne soupçonnée est poursuivie par la clameur publique, ou est trouvée en possession d’objets, ou présente des traces ou indices, laissant penser qu’elle a participé au crime ou au délit ». En outre, par un arrêt du 22 janvier 1953, la Cour de cassation a précisé qu’une enquête de flagrance ne peut être diligentée que s’il existe des « indices apparent d’un comportement délictueux » (Cass. crim, 22 janv. 1953, Isnard). C’est ainsi que dans son arrêt du 11 décembre 2019, la Cour de cassation a considéré que le seul marquage du chien spécialisé devant la porte de l’appartement constitue un ‘indice objectif et apparent d’un comportement suspect, caractérisant la flagrance.   L’enquête préliminaire L’enquête préliminaire est une enquête par défaut prévue à l’article 75 du Code de procédure pénale. Celle-ci sera diligentée dans l’hypothèse où les conditions de la flagrance ne seront pas réunies.   Les distinctions entre l’enquête de flagrance et l’enquête préliminaire La durée de l’enquête : L’enquête de flagrance ne peut excéder 8 jours. Néanmoins, le procureur de la République peut décider la prolongation, dans les mêmes conditions, de l’enquête pour une durée maximale de 8 jours (article 53 alinéa 2 et 3 du Code de procédure pénale). Depuis la loi du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l’institution judiciaire, la durée d’une enquête préliminaire ne peut excéder deux ans à compter du premier acte de l’enquête, y compris si celui-ci est intervenu dans le cadre d’une enquête de flagrance (article 75-3 alinéa 1er du Code de procédure pénale).   L’obligation des actes d’enquêtes en continue L’enquête de flagrance doit obligatoirement se dérouler sans discontinuité durant 8 jours (article 53 alinéa 2 du Code de procédure pénale). A contrario, en enquête préliminaire, le législateur n’exige pas que l’enquête soit exercée de manière continue.   Les pouvoirs des enquêteurs En enquête de flagrance, les enquêteurs disposent de plus de pouvoirs coercitifs en raison de l’urgence de la procédure. A titre d’exemple, en enquête de flagrance, une perquisition peut s’effectuer sans l’assentiment de l’individu chez qui la perquisition a lieu (article 56 du Code de procédure pénale). Or, en enquête préliminaire, la perquisition ne peut s’effectuer sans l’assentiment de l’individu sauf si le juge des libertés et de la détention l’autorise (article 76 du Code de procédure pénale).
LES PROPOS PROFERES DANS UNE COUR D’IMMEUBLE COMPORTANT 16 APPARTEMENTS ET A LAQUELLE LE PUBLIC A ACCES ONT UN CARACTERE PUBLIC Arrêt de la Chambre Criminelle de la Cour de Cassation en date du 8 Avril 2014, n°12-87.497 Un homme a été cité devant le Tribunal Correctionnel pour injure publique à caractère racial et ce dernier a été condamné pour avoir proférés ces injures dans une cour d’immeuble comportant seize appartements et à laquelle le public a accès, ce qui caractérise la volonté de l’auteur de rendre ses paroles publiques.
LE RECEL DE CHOSES EST CONSTITUE SI LA CHOSE RECELEE EST PRODUITE EN JUSTICE PAR LE DEMANDEUR ET NON PAR LE DEFENDEUR Arrêt de la Chambre Criminelle de la Cour de Cassation en date du 05 Janvier 2017, n°15-86.484 La jurisprudence légitime la commission de divers délits lorsqu’ils ont été commis pour pouvoir se défendre en justice. Cette « excuse » ne vaut que si vous êtes défendeur au procès, celui qui subit la procédure, et non le demandeur, celui qui initie la procédure.
Le recel successoral est une fraude commise par un héritier cherchant à rompre l’égalité du partage en dissimulant ou détournant des biens de la succession, ou en cachant l’existence d’un cohéritier.   Pour établir l’existence d’un recel successoral, deux éléments doivent être réunis : Un élément matériel : un acte ou un procédé commis par un héritier ayant pour effet de rompre l’égalité dans le partage successoral. Un élément intentionnel : la mauvaise foi ou l’intention frauduleuse de l’auteur de l’acte, agissant dans le but déterminé de rompre cette égalité. La preuve de ces éléments incombe à la partie qui invoque l’existence de manœuvres frauduleuses. La preuve de l’élément intentionnel est souvent la plus difficile à rapporter, car elle implique de sonder la volonté de son auteur. Moyens de preuve de l’élément intentionnel du recel successoral : La preuve de l’élément intentionnel peut se faire par tous moyens, y compris par témoins et présomptions. En pratique, il est utile de multiplier les éléments de preuve concordants pour forger la conviction du juge, tels que : Des attestations de témoins démontrant que le receleur avait connaissance de la fragilité du défunt et en a usé pour s’avantager au détriment des autres héritiers. La copie des relevés bancaires du défunt sur les dix années précédant son décès, illustrant l’ampleur des sommes tirées sur ses comptes bancaires, dont a bénéficié le receleur. La copie éventuelle des chèques dont a bénéficié le receleur. Les justificatifs des revenus du défunt au moment de la réalisation de ces dons manuels, illustrant l’importance de ceux-ci, les rendant incompatibles avec la définition du simple présent d’usage. La copie du dossier médical du défunt, illustrant une baisse de ses facultés cognitives précisément à la période où le receleur a commencé à être avantagé par rapport aux autres héritiers. Les pièces d’une enquête pénale souvent diligentée à la suite d’une plainte pour abus frauduleux de l’état d’ignorance ou de la situation de faiblesse du défunt, comportant des PV d’auditions, des relevés de comptes bancaires obtenus sur réquisition des organismes bancaires. Les pièces du dossier du juge des tutelles si le défunt faisait l’objet d’une mesure de protection avant son décès (habilitation familiale, curatelle/tutelle…). Cas dans lesquels l’élément intentionnel du recel successoral a été admis : Une multitude de comportements peuvent caractériser l’existence d’un recel successoral. Ainsi, le recel a notamment été reconnu dans les cas suivants : La dissimulation d’un héritier. La production d’un faux testament. La dissimulation d’une libéralité ou de dons manuels autrefois accordés par le défunt. La réticence d’un héritier donataire à fournir les renseignements demandés par le notaire et les autres héritiers. La cession à vil prix de parts de sociétés. La non-révélation d’une donation déguisée sous forme d’une acquisition immobilière réalisée par le donataire et financée en réalité par le défunt. Sanctions du recel successoral : L’héritier reconnu coupable de recel successoral encourt plusieurs sanctions cumulatives, notamment : La déchéance de l’option successorale : l’héritier sera alors réputé accepter purement et simplement la succession. Il devra ainsi assumer les dettes successorales, si besoin, sur son patrimoine personnel. Si le recel porte sur une donation rapportable ou réductible, ce rapport ou cette réduction doit être fait et l’héritier ne pourra y prétendre à aucune part. Il n’aura droit à aucune part dans les biens ou droits recelés, qui seront retirés de l’actif successoral et partagés entre les autres héritiers. L’héritier coupable de recel doit restituer tous les fruits et revenus issus des biens recelés, depuis l’ouverture de la succession ; il devra également rapporter les intérêts de la somme détournée, ou les fruits du bien soustrait. Jurisprudence pertinente : Un arrêt de la première chambre civile de la Cour de Cassation, du 12 juin 2014, pourvoi n°13-17.074, a précisé qu’il importe peu que la fraude aux droits des cohéritiers ait été commise de concert avec le défunt ou même organisée par celui-ci. Un autre arrêt de la Cour de Cassation du 27 mars 2019, n°18-13.141, a également reconnu le recel successoral dans un cas où un héritier avait volontairement omis de déclarer une donation importante faite par le défunt, privant ainsi les autres héritiers de leurs droits légitimes.   En conclusion, la preuve de l’élément intentionnel du recel successoral repose sur la réunion d’indices concordants démontrant la volonté frauduleuse de l’héritier. L’assistance d’un avocat est essentielle pour collecter et constituer les éléments de preuve nécessaires à la reconnaissance du recel successoral et à l’application des sanctions appropriées.  
LE RECEPISSE DE CONVOCATION PAR TELECOPIE DE L’AVOCAT DOIT FIGURER A LA PROCEDURE Arrêt de la Chambre Criminelle de la Cour de Cassation en date du 3 Décembre 2013, n°13-86.208 Le Juge des libertés et de la détention a, par ordonnance, prolongé une détention provisoire et l’intéressé a interjeté appel considérant que son avocat n’avait pas été régulièrement convoqué au débat contradictoire préalable à la prolongation de la détention. Les juges vont ici considérer que le dossier de la procédure ne comportant aucun justificatif de la convocation, donc le récépissé de la convocation par télécopie, la Chambre d’Instruction a méconnu la loi.
Dans quels cas je suis en état de récidive légale et de réitération d’infractions ?   La récidive Il convient de distinguer entre la récidive en matière criminelle, délictuelle puis contraventionnelle.   En matière criminelle Il y a récidive légale si un individu commet un crime après avoir déjà été condamné définitivement pour un crime ou pour un délit puni de 10 ans d’emprisonnement par la loi (article 132-8 du Code pénal).   Les conséquences de la récidive : Si le maximum de la réclusion criminelle ou de la détention criminelle pour ce crime est de 15 ans : le maximum de la peine est porté à 30 ans   Si le maximum fixé par la loi pour ce crime est de 20 ans ou 30 ans : le maximum de la peine de la réclusion criminelle ou de la détention criminelle est la perpétuité   En matière délictuelle La récidive légale en matière délictuelle peut être caractérisée dans plusieurs hypothèses :   Tout d’abord, il y a récidive légale si une personne physique, déjà condamnée définitivement pour un crime ou pour un délit puni de 10 ans d’emprisonnement par la loi, commet, dans le délai de 10 ans à compter de l’expiration ou de la prescription de la précédente peine, un délit puni de la même peine (article 132-9 alinéa 1er du Code pénal)   Ensuite, il y a également récidive si une personne physique, déjà condamnée définitivement pour un crime ou pour un délit puni de dix ans d’emprisonnement par la loi, commet, dans le délai de 5 ans à compter de l’expiration ou de la prescription de la précédente peine, un délit puni d’une peine d’emprisonnement d’une durée supérieure à 1 an et inférieure à 10 ans (article 132-9 alinéa 2 du Code pénal).   Enfin, lorsqu’une personne physique, déjà condamnée définitivement pour un délit, commet, dans le délai de 5 ans à compter de l’expiration ou de la prescription de la précédente peine, soit le même délit, soit un délit qui lui est assimilé au regard des règles de la récidive (article 132-10 du Code pénal).   Concernant les délits assimilés : le législateur a prévu une liste limitative de délits assimilés aux articles 132-16 et suivants du Code pénal. A titre d’exemple, selon l’article 132-16 « le vol, l’extorsion, le chantage, l’escroquerie et l’abus de confiance sont considérés, au regard de la récidive, comme une même infraction ».   La conséquence de la récidive : Le maximum des peines d’emprisonnement et d’amende encourues est doublé.   En matière contraventionnelle Dans les cas où le règlement le prévoit, il y a récidive lorsqu’une personne physique, déjà condamnée définitivement pour une contravention de la 5e classe, commet, dans le délai d’un an à compter de l’expiration ou de la prescription de la précédente peine, la même contravention (article 132-11 du Code pénal). En revanche, si la loi prévoit que la récidive d’une contravention de la 5e classe constitue un délit, la récidive est constituée si les faits sont commis dans le délai de trois ans à compter de l’expiration ou de la prescription de la précédente peine.   La conséquence de la récidive : Le maximum de la peine d’amende encourue est porté à 3 000 euros.    La réitération d’infractions L’article 132-16-7 du Code pénal dispose que « Il y a réitération d’infractions pénales lorsqu’une personne a déjà été condamnée définitivement pour un crime ou un délit et commet une nouvelle infraction qui ne répond pas aux conditions de la récidive légale ».   La conséquence de la réitération d’infractions : Les peines se cumulent sans limitation de quantum et sans possibilité de confusion de peines avec celles définitivement prononcées lors de la précédente condamnation.  
Analyse des conséquences éventuelles de ce projet de loi sur le droit pénal Les titres IV et V du projet de loi de programmation pour la justice concernent le droit pénal. Ce texte vise à proposer une réforme globale dans le but de transformer la justice. Qu’en est-il concernant le droit pénal ? Le projet de loi de programmation de la justice Toutes les réformes du droit pénal de ces 20 dernières années ont eu pour but d’apporter des réponses à des évènements judiciaires marquants pour l’opinion publique. La procédure pénale est donc devenue de plus en plus complexe. Ainsi le projet de loi de programmation pour la justice veut la transformer et la simplifier afin de « faciliter le travail de l’ensemble des acteurs de la chaîne pénale ». Cette réforme de la justice a donc été pensée en tenant compte des rapports relatifs aux 5 chantiers de la justice, dont deux concernent le droit pénal, pour répondre efficacement aux attentes des justiciables et de ceux qui rendent la justice. Le projet de loi de programmation de la justice est une entreprise titanesque puisque toutes les réformes seront menées de front. Un choix judicieux et courageux car les imbrication sont profondes entre les différents pans de la justice et il aurait été artificiel de modifier la procédure civile, la carte judiciaire et la procédure pénale de manière distincte. Fil directeur de cette réforme : la numérisation. Les titres IV et V qui concernent le droit pénal Le titre IV : simplification et renforcement de l’efficacité de la procédure pénale Les dispositions de ce titre s’inspirent du chantier de la justice qui concerne la simplification de la procédure pénale. Les articles 24 et 25 du projet de loi L’article 24 du projet de loi traite du dépôt de plainte en ligne et de la mise en place d’un dossier numérique unique. A compter de la plainte et jusqu’au jugement ce dossier sera ouvert à tous les acteurs avec des droits d’accès différents (policiers, magistrats, justiciables, avocats). La constitution de partie civile devant le tribunal correctionnel interviendra donc de manière dématérialisée. L’article 25, lui aussi visant à la simplification de la justice, vient renforcer la cohérence des dispositions relatives aux interceptions par la voie des communications électroniques et à la géolocalisation, en prévoyant que ces actes seront désormais possibles, tant au cours de l’enquête qu’au cours de l’instruction, pour les crimes et les délits punis d’au moins trois ans d’emprisonnement, sur décision motivée selon les cas du juge des libertés et de la détention ou du juge d’instruction. En cas de délit puni d’une peine d’emprisonnement inférieure à 3 ans et si la victime le demande, les interceptions seront possibles sur une ligne dont elle est titulaire. Enfin, en cas d’urgence, elles pourront être autorisées par le procureur de la République pour une durée maximale de vingt-quatre heures. Articles 30 et 31 : une vision pragmatique de la réforme de la justice Les articles 30 et 31 témoignent quant à eux de la vision pragmatique de la réforme. Le premier de ces texte autorise la prolongation de la garde à vue aux seules fins de permettre un défèrement pendant les heures ouvrables. Le deuxième permet la prolongation par le procureur de l’enquête de flagrance à l’issue des 8 jours et pour une même durée quand la procédure concerne un délit puni d’au moins 3 ans d’emprisonnement au lieu des 5 auparavant. L’article 40 : le tribunal criminel départemental L’article 40 se concentre sur les dispositions relatives au jugement des crimes et envisage l’expérimentation du tribunal criminel départemental. A l’heure actuelle ce sont les jurés, des citoyens ordinaires qui tranchent les questions de culpabilité et de peine dans les cours d’assises, à l’exception des affaires de terrorisme et de trafic de stupéfiants en bande organisée. Or la justice criminelle pâtit depuis plusieurs années de délais de jugement trop longs et de la correctionnalisation croissante de certains crimes. Du côté des accusés comme des victimes il était indispensable d’agir.Une nouvelle instance va donc être expérimentée : le tribunal criminel départemental. Il sera composé de juges professionnels et sera compétent pour juger les crimes passibles de 15 à 20 ans d’emprisonnement. Le tribunal criminel départemental ne sera pas compétent si les faits sont commis en récidive. Articles 41, 42 et 43 : le parquet national antiterroriste Enfin, les articles 41, 42 et 43 du projet de loi permettent de créer le parquet national antiterroriste. Celui-ci se substituera à la compétence actuelle du procureur de la République de Paris, pour les infractions terroristes, les crimes contre l’humanité, les crimes et délits de guerre et les infractions relatives à la prolifération d’armes de destruction massive et de leurs vecteurs. Positionné près du tribunal de grande instance de Paris, il pourra requérir la réalisation d’enquêtes de tout procureur de la République. Le titre V : renforcer l’efficacité et le sens de la peine Le projet de loi se fixe comme objectif ambitieux de « redonner son sens à la peine et de renforcer son efficacité, tant lors de son prononcé que lors de son exécution ». Enfermer moins pour sanctionner mieux. Ainsi l’article 44 réécrit l’échelle des peines correctionnelles pour mentionner la nouvelle peine de détention à domicile et créer la peine  autonome de détention à domicile sous surveillance électronique. Elle pourra être prononcée pour des délits punis d’une peine d’emprisonnement allant de 15 jours à un an. L’article 46, lui, réforme les conditions de prononcé des peines d’emprisonnement en interdisant de prononcer une peine d’emprisonnement ferme d’une durée inférieure ou égale à un mois.
La Cour de cassation a pu considérer que regretter de ne pas pouvoir commettre un crime n’équivaut pas à constituer l’infraction de menace de crime ou de délit Arrêt de la Chambre Criminelle de la Cour de Cassation en date du 5 Décembre 2017, n°16-84.961 Ici, un contribuable excédé déclara à un des contrôleurs des impôts « qu’il avait de la chance d’être handicapé, sinon il serait déjà passé par la fenêtre ». Pour les magistrats, l’infraction de menace de commettre un crime ou un délit contre une personne exige « l’annonce » d’un crime possible. Dès lors, regretter de ne pas pouvoir défenestrer quelqu’un n’est pas menacer de le faire.
LA DEMANDE DE RENVOI DE L’AFFAIRE PEUT ETRE FORMEE PAR TELECOPIE EN L’ABSENCE DE COMPARUTION DU PREVENU OU DE L’AVOCAT Arrêt de la Chambre Criminelle de la Cour de Cassation en date du 25 Février 2014, n°13-81.554 Un avocat a demandé le renvoi d’une affaire par télécopie parvenue avant l’audience, ce qui est permis par la Cour de Cassation. Celle-ci ne considère pas qu’il s’agît d’un défaut de comparution du prévenu, ou de l’avocat.
La victime d’un accident peut demander réparation de son préjudice au propriétaire d’un véhicule stationné n’ayant pas causé de dommage à la victime, ni causé cet accident (2e civ., 15 déc. 2022, n°21-11.423)   En l’espèce, un individu circulant sur son scooter avait été percuté par un véhicule puis éjecté sur le capot d’un deuxième véhicule. Le scooter continuant sa course a ensuite heurté un troisième véhicule en stationnement. La loi Badinter de 1985 permet aux victimes d’un accident de la circulation d’obtenir la réparation de leur préjudice. Cette loi est entrée en vigueur dans l’objectif de faciliter leur indemnisation dès lors qu’un véhicule terrestre à moteur est impliqué dans cet accident. La loi ne donne aucune définition du véhicule terrestre à moteur. La doctrine l’a définit comme « un engin circulant sur le sol, muni d’une force motrice et pouvant transporter des choses ou des personnes ». Ainsi, une voiture, un scooter, une motocyclette ou encore un tracteur sont considérés comme des véhicules terrestres à moteur dès lors qu’ils sont utilisés pour transporter des choses ou des personnes. Quid du véhicule régulièrement stationné à quelques mètres du lieu de l’accident, n’ayant joué aucun rôle dans sa réalisation ni causé de dommage à la victime ?  Pour relever du champ d’application de la loi, plusieurs conditions doivent se cumuler :   Un accident de la circulation   Avant toute chose, il est nécessaire de démontrer qu’un accident est survenu. Il n’existe aucune définition légale de l’accident. Néanmoins, un accident est nécessairement fortuit ou aléatoire. Un accident volontaire ne peut pas entrer dans le champ d’application de cette loi (2e civ., 12 déc. 2002, n°00-17.433). Ensuite, la notion de circulation n’englobe pas seulement les accidents survenant lorsque le véhicule utilise sa fonction de déplacement. Sont aussi concernés les véhicules à l’arrêt, en stationnement ou abandonnés sur la voie publique ou dans un lieu privé. Il faut tout de même préciser qu’un véhicule à l’arrêt, mais utilisé dans sa fonction d’outil est exclu du champ d’application de cette loi (ex : moissonneuse batteuse, benne basculante d’un camion à l’arrêt…).   Une implication du véhicule dans l’accident   La jurisprudence considère qu’un véhicule est impliqué dans un accident de la circulation lorsqu’il est intervenu d’une manière ou d’une autre dans cet accident. C’est ainsi que la Cour de cassation a jugé dans sa décision du 15 décembre 2022 que les collisions successives qui sont intervenues dans un même laps de temps et dans un enchaînement continu constituent un accident complexe, dans lequel ce véhicule est impliqué. Elle a également rappelé que dans un accident complexe, la victime est en droit de demander l’indemnisation de son préjudice à l’assureur de l’un quelconque des véhicules impliqués, même si elle n’a pas été en contact avec celui-ci.   Peut-on être indemnisé même si le véhicule n’est pas à l’origine du dommage ? Il n’est pas nécessaire que le véhicule ait joué un rôle dans la réalisation du dommage, ni qu’il soit à l’origine de l’accident. C’est la raison pour laquelle est utilisé le terme « d’implication » au détriment de « causalité ». Il faut également préciser que le comportement et la position normale du véhicule n’excluent pas l’engagement de la responsabilité du conducteur ou du propriétaire, même lorsque le véhicule est à l’arrêt ou stationné.   Qui doit prouver cette implication ? En principe, la charge de la preuve incombe à la victime. Néanmoins, il existe une présomption qui permet ainsi de renverser la charge dès lors que le véhicule en mouvement est entré en contact avec le siège du dommage. Dans cette hypothèse, le véhicule est présumé impliqué dans l’accident. Lorsque le véhicule n’est pas entré en contact directement avec le siège du dommage, c’est à la victime de prouver que le véhicule est intervenu à quelque titre que ce soit et à quelque moment que ce soit dans cet accident.   Un dommage Il est nécessaire de démontrer l’existence d’un dommage en lien avec cet accident.   Finalement, même si la doctrine et la jurisprudence définissent le véhicule comme un engin circulant sur le sol, peu importe que celui-ci ait été en mouvement ou à l’arrêt pour permettre à la victime d’être indemnisé dès lors que celui-ci est impliqué dans l’accident et qu’un dommage a été causé à la victime.    
Définition et conditions de mise en œuvre d’une réquisition judiciaire   Une réquisition judiciaire est un acte permettant à un officier de police judiciaire, à un agent de police judiciaire, au Procureur de la République ou au juge d’instruction d’obtenir la communication d’informations intéressant l’enquête. La communication de ces informations se matérialise par le recueil de documents ou de données informatiques.   Les conditions de la réquisition Les réquisitions judiciaires sont prévues aux articles 60-1 du Code de procédure pénale pour l’enquête de flagrance, 77-1-1 pour l’enquête préliminaire et 99-3 et suivants dans le cadre de l’ouverture d’une information judiciaire.   Selon ces articles, les officiers de police judiciaire, les agents de police judiciaire et le juge d’instruction en cas d’ouverture d’une information judiciaire peuvent agir sans aucune autorisation. En revanche, les officiers de police judicaire ou les agents de police judiciaire doivent obtenir l’autorisation du procureur de la République dans le cadre d’une enquête préliminaire.   Ensuite, la loi n’impose pas le respect d’une forme particulière. Néanmoins en pratique, elle est généralement écrite sous forme de procès-verbal de réquisition).    Le destinataire de la réquisition La réquisition est adressée à toute personne physique ou morale susceptible de détenir des documents ou des données informatiques. Elle peut aussi être adressée à toute personne, physique ou morale, de droit privé ou de droit public, qu’elle soit mise en cause, victime, témoin ou encore tiers à la procédure.   La finalité de la réquisition  La réquisition a pour objectif de recueillir des informations, mêmes contenues dans des systèmes informatiques ou de traitement de données nominatives dans l’objectif de parvenir à la manifestation de la vérité. En outre, elle permet d’obtenir la réalisation d’expertises scientifiques.   Le délai légal pour répondre à une réquisition   La loi prévoit qu’une réponse doit être apportée « dans les meilleurs délais ».   Il est vivement conseillé d’adresser tous les documents et réponses en même temps. Toutefois, si l’une des questions nécessite un temps d’investigation trop long, il est possible de répondre sur les autres points et de faire une réponse d’attente pour la question concernée.   Le fait de ne pas répondre dans les meilleurs délais est puni d’une amende correctionnelle de 3 750 euros.   Est-il obligatoire de répondre à une réquisition ?   Le législateur prévoit qu’il est obligatoire de de répondre à une réquisition judiciaire.   Néanmoins, il est possible de refuser de répondre à une réquisition en cas de motif légitime limitativement énuméré par la loi. On peut notamment citer le secret professionnel des journalistes.   Ainsi, le fait de refuser de répondre à une réquisition sans motif légitime est puni d’une amende de 3 750 euros.   Informations pratiques :   En cas de réception d’une réquisition judicaire, il est nécessaire de vérifier les points suivants :   Le fondement légal de la réquisition L’auteur de la réquisition L’autorisation du procureur de la République dans le cadre d’une enquête préliminaire L’objet de la réquisition Les infractions visées dans la réquisition La personne visée par la réquisition   Lorsque la réquisition est réalisée par un , elle doit être autorisée par le Procureur de la République.
Suis-je toujours responsable du dommage causé par mon enfant mineur ?    L’article 1242 du Code civil dispose que « On est responsable non seulement du dommage que l’on cause par son propre fait, mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre, ou des choses que l’on a sous sa garde (…) Le père et la mère, en tant qu’ils exercent l’autorité parentale, sont solidairement responsables du dommage causé par leurs enfants mineurs habitant avec eux ».   1.Les conditions légales   L’exercice de l’autorité parentale Pour pouvoir engager la responsabilité des parents, ces derniers doivent exercer leur autorité parentale à l’égard de leur enfant. Selon l’article 371-1 du Code civil « L’autorité parentale est un ensemble de droits et de devoirs ayant pour finalité l’intérêt de l’enfant. Elle appartient aux parents jusqu’à la majorité ou l’émancipation de l’enfant (…) ».   La cohabitation de l’enfant avec ses parents La cohabitation est une notion juridique. Celle-ci résulte de la résidence habituelle de l’enfant au domicile des parents ou de l’un d’eux (Cass. crim, 20 janvier 2000, n° 98-14.479). Ainsi, l’exercice du droit de visite et d’hébergement ne fait pas cesser la cohabitation du mineur avec celui des parents qui exercent sur lui le droit de garde. De même, le fait que le mineur soit en vacances chez ses grands-parents ne fait pas cesser la cohabitation.   La minorité de l’enfant Pour pouvoir engager la responsabilité des parents en cas de dommage causé par leur enfant, ce dernier doit être mineur. La minorité s’apprécie au moment de la réalisation du dommage.   Le fait de l’enfant Par deux célèbres arrêts du 9 mai 1984 (Ass. Plén. 9 mai 1984, Fullenwarth, 79-16.612) et du 10 mai 2000 (2 civ, 10 mai 2001, Levert, n° 99-11.287), la Cour de cassation a considéré que le simple fait de l’enfant, ayant causé un dommage à un tiers suffit pour engager la responsabilité de ses parents. Ainsi, il n’est pas nécessaire que l’enfant ait commis une faute.   2.Les causes d’exonération de la responsabilité des parents Les parents ne peuvent s’exonérer en démontrant qu’ils n’ont commis aucune faute. En effet, par un arrêt du 19 février 1997, la Cour de cassation a considéré que seule la force majeure ou la faute de la victime peut exonérer le père de la responsabilité de plein droit encourue du fait des dommages causés par son fils mineur habitant avec lui (2civ, 19 fév. 1997, Bertrand, n° 94-21.111).    En conclusion, au regard de la position jurisprudentielle, il est aujourd’hui très difficile pour les parents de s’exonérer de leur responsabilité suite au dommage causé par leur enfant. En effet, le simple fait de leur enfant ayant causé un dommage permet d’engager leur responsabilité et ils ne peuvent invoquer le fait qu’ils n’ont commis aucune faute ou encore que l’enfant ne cohabitait pas matériellement avec eux au moment de la réalisation du dommage.   C’est la raison pour laquelle l’assurance de responsabilité civile est restée quasi obligatoire lors de la scolarisation d’un enfant.  
En cas d’immobilisation ou de mise en fourrière du véhicule, la restitution reste possible   Après un contrôle de police, une immobilisation du véhicule peut être envisagée. L’immobilisation est « l’obligation faite au conducteur ou au propriétaire d’un véhicule, dans les cas prévus au présent code, de maintenir ce véhicule sur place ou à proximité du lieu de constatation de l’infraction en se conformant aux règles relatives au stationnement » (R325-2 alinéa 1er du Code de la route). Cette immobilisation peut être ordonnée par l’officier de police judiciaire, avec l’autorisation préalable du procureur de la République, en cas de constatation d’un délit ou d’une contravention de la 5ème classe pour lesquels la peine de confiscation du véhicule est encourue. Si la juridiction ne prononce pas la peine de confiscation, le véhicule devra être remis au propriétaire (L325-1-1 du Code de la route). En outre, les officiers ou agents de police judiciaire peuvent, avec l’autorisation préalable donnée par tout moyen du représentant de l’État dans le département où l’infraction a été commise, faire procéder à titre provisoire, à l’immobilisation et à la mise en fourrière du véhicule notamment pour les infractions suivantes : En cas de conduite en état d’ivresse manifeste ou lorsque l’état alcoolique défini à l’article L234-1 est établi au moyen d’un appareil homologué   Lorsqu’est constaté le dépassement de 50 km/h ou plus de la vitesse maximale autorisée   En cas de non-respect du contrôle technique L’autorité qui décide de placer le véhicule en fourrière doit établir un procès-verbal et remettre au conducteur une fiche d’immobilisation en échange de la carte grise. La fiche d’immobilisation doit notamment énoncer l’infraction qui l’a motivé, les noms, qualités et affectations des agents qui la rédigent ainsi que la résidence de l’autorité qualifiée pour lever la mesure (R325-9 alinéa 2).   S’adresser à l’autorité mentionnée sur la fiche d’immobilisation La procédure pour se voir restituer le véhicule dépendra des circonstances ayant justifié cette immobilisation. En effet, pour récupérer le véhicule, il faut prouver que l’infraction ayant entraîné cette immobilisation a cessé (ex : pour un défaut de contrôle technique, procéder à ce contrôle ; pour un défaut d’immatriculation, avoir procédé à l’immatriculation du véhicule…). Pour ce faire, il faut s’adresser à l’autorité compétente mentionnée sur la fiche d’immobilisation. Si cette autorité ordonne la levée de l’immobilisation, la carte grise sera ensuite remise au conducteur.   Si le véhicule a été placé à la fourrière Si le véhicule a été placé à la fourrière, la présentation de la carte grise, du permis de conduire ainsi que du certificat d’assurance doivent être présentés. Le conducteur devra ensuite payer les frais de fourrière afin de pouvoir récupérer son véhicule.   Attention : l’immobilisation du véhicule ne doit pas être confondue avec la peine de confiscation. En effet, la confiscation est une peine complémentaire ordonnée par un juge. Si celle-ci est prononcée, le conducteur ne pourra pas récupérer son véhicule. Celui-ci sera remis au service des domaines en vue de sa destruction ou de sa vente. En revanche, en cas de relaxe, le propriétaire dont le véhicule a été mis en fourrière sur autorisation du procureur de la République peut, selon des modalités précisées par arrêté du ministre de la justice, demander à l’État le remboursement, au titre des frais de justice, des frais d’enlèvement et de garde en fourrière qu’il a dû acquitter pour récupérer son véhicule (L325-1-1 alinéa 4).
Aucune juridiction n’étant saisie, le classement sans suite ouvre droit à restitution des biens saisis   Cour de cassation, Chambre criminelle, 1er février 2023, n°22-80.461   La Cour de cassation a jugé le 1er février 2023 que la restitution d’un bien saisi est obligatoire lorsque l’enquête judiciaire a fait l’objet d’un classement sans suite et qu’aucune juridiction n’a ainsi été saisie pour constater une infraction. En effet, en l’espèce, une perquisition avait permis la découverte d’une somme de 58.600 euros chez le suspect, ayant motivé une procédure incidente pour des faits de non justification de ressources. Cette somme était placée sous scellée. Le suspect avait justifié la présence de cette somme à son domicile par une activité de cambiste à titre accessoire. Le Parquet de Nanterre décidait d’un classement sans suite au motif que l’infraction était insuffisamment caractérisée. Le suspect déposait une requête en restitution de cette somme, qui était rejetée par la Chambre de l’instruction de la Cour d’appel de Versailles, au motif que cette somme était le produit d’une infraction.   La Cour de cassation en a décidé autrement, jugeant que l’article 41-4 du Code de procédure pénale autorisait la restitution des biens saisis lorsque : -aucune juridiction n’a été saisie, -la propriété n’est pas sérieusement contestée, -la restitution n’est pas de nature à créer un danger pour les personnes ou les biens ou qu’aucune disposition n’impose sa destruction.   De sorte que le classement sans suite a pour conséquence qu’aucune juridiction n’est saisie pour constater une infraction. Dès lors, la restitution ne peut être refusée au motif que le bien saisi est le produit d’une infraction ou l’instrument de l’infraction.
Au cours d’une procédure pénale, des objets utiles à la manifestation de la vérité, des objets dont la confiscation est prévue à l’article 131-21 mais également ceux considérés comme nuisibles ou dangereux par la loi, le règlement ou dont la détention est illicite peuvent faire l’objet d’une saisie. Ces biens sont qualifiés de « scellés ».   La personne compétente pour se prononcer sur le sort des scellés varie en fonction du stade de la procédure. En effet, au cours de l’enquête de flagrance ou préliminaire, c’est le procureur de la République qui est compétent si aucune information judiciaire n’a été diligentée. Si un juge d’instruction a été désigné, ce dernier sera compétent jusqu’à la clôture de l’information.   En cas de condamnation, la juridiction de jugement sera compétente pour statuer sur le sort des scellés. A défaut, le procureur de la République retrouve sa compétence.    Devant le tribunal correctionnel :   L’article 478 du Code de procédure pénale prévoit que « le prévenu, la partie civile ou la personne civilement responsable, peut réclamer au tribunal saisi de la poursuite la restitution des objets placés sous la main de la justice.   Le tribunal peut ordonner d’office cette restitution ».   Devant le tribunal de police :   L’article 543 alinéa 1er du Code de procédure pénale dispose que « Sont applicables à la procédure devant le tribunal de police les articles 475-1 à 486 concernant (…) la restitution des objets placés sous la main de la justice et la forme des jugements ».   Devant la cour d’assise :   L’article 373 du Code de procédure pénale prévoit que « la cour peut ordonner, d’office ou sur demande d’une partie ou de toute personne intéressée, la restitution des objets placés sous la main de la justice. Toutefois, s’il y a eu condamnation, cette restitution n’est effectuée que si son bénéficiaire justifie que le condamné a laissé passer les délais sans se pourvoir en cassation, ou s’il s’est pourvu, que l’affaire est définitivement jugée ».   Ainsi, en cas de condamnation, la juridiction de jugement peut décider de restituer les biens saisis au propriétaire. Cependant, cette restitution peut être refusée : Si l’objet présente un danger pour les personnes ou les biens Lorsque le bien saisi est l’instrument ou le produit direct ou indirect de l’infraction Lorsque l’objet est de nature à créer un danger pour les personnes ou pour les biens   Lorsque la juridiction n’a pas statué sur le sort des scellés   Le législateur a prévu à l’article 41-5 alinéa 4 du Code de procédure pénale que si juridiction saisie a épuisé sa compétence sans avoir statué sur le sort des scellés, le procureur de la République peut décider d’ordonner la destruction des scellés dont la conservation n’est plus nécessaire à la manifestation de la vérité, s’il s’agit d’objets qualifiés par la loi de dangereux ou nuisibles, ou dont la détention est illicite.
La nécessité de démontrer un lien direct entre la séquestration de la victime et son suicide   Cour de cassation, Chambre criminelle, 29 mars 2023, pourvoi n°22-83.214   L’infraction de séquestration est prévue par l’article 224-1 du Code pénal comme : « Le fait, sans ordre des autorités constituées et hors les cas prévus par la loi, d’arrêter, d’enlever, de détenir ou de séquestrer une personne, est puni de vingt ans de réclusion criminelle ». Il s’agit ainsi du fait d’enlever et/ou d’enfermer un individu contre sa volonté, sans fait justificatif prévu par la loi. Cette infraction est aggravée en cas de décès de la personne séquestrée, tel que prévu par l’article 224-2 du Code pénal : « Elle est punie de la réclusion criminelle à perpétuité lorsqu’elle est précédée ou accompagnée de tortures ou d’actes de barbarie ou lorsqu’elle est suivie de la mort de la victime ».   La question posée à la Cour de cassation était de savoir si le suicide de la personne séquestrée, donc son propre acte volontaire, entrait dans le champ d’application de cette circonstance aggravante. En l’espèce, une femme avait été séquestrée pendant plus de 15 heures, durant lesquelles le prévenu l’avait menacé de mort, menacé avec une arme, lui avait porté des coups et l’avait changé de lieu à plusieurs reprises. Cette femme avait tenté de s’évader en sautant d’une fenêtre, provoquant de lourdes séquelles. Quinze jours après les faits, elle mettait fin à ses jours. Le prévenu était condamné pour séquestration ayant entraîné la mort de la victime. La Cour de cassation validait cette condamnation, sur le fondement du lien direct entre les faits de séquestration reprochés et son suicide. En effet, il était retenu que le suicide était motivé par la séquestration, mais également par les séquelles provoquées par sa tentative d’évasion, qui avaient détériorées son image. Sa famille constatait qu’elle pleurait et faisait des cauchemars depuis les faits. Dès lors, la Cour de cassation a jugé que le suicide de la victime, même quinze jours après les faits, avait pour cause directe la séquestration, et l’infraction de séquestration ayant entrainé la mort de la victime était caractérisée.
En principe, un individu qui commet une infraction engage sa responsabilité pénale en vertu de l’article 121-1 du Code pénal selon lequel « Nul n’est responsable pénalement que de son propre fait ».  Néanmoins, le législateur a prévu des causes d’irresponsabilité pénale permettant à l’auteur des faits d’échapper à sa responsabilité pénale ou d’obtenir une réduction de sa peine dans certaines circonstances et notamment en cas d’abolition ou d’altération du discernement.   L’abolition du discernement 1.Le principe L’article 122-1 alinéa 1er du Code pénal dispose que « N’est pas pénalement responsable la personne qui était atteinte, au moment des faits, d’un trouble psychique ou neuropsychique ayant aboli son discernement ou le contrôle de ses actes ». Ainsi, en cas d’abolition du discernement, l’auteur des faits ne peut donc voir sa responsabilité pénale engagée. En revanche, par la loi n° 2022-52 du 24 janvier 2022, le législateur a intégré 2 nouveaux articles au sein du Code pénal parmi lesquels le nouvel article 122-1-1 qui prévoit une exception en cas d’abolition du discernement faisant suite à la consommation de substances psychoactives (ex : cannabis, alcool, cocaïne, crack, héroïne…). 2.L’exception prévue au nouvel article 122-1-1 du Code pénal Ce nouvel article prévoit que le premier alinéa de l’article 122-1 n’est pas applicable « si l’abolition temporaire du discernement de la personne ou du contrôle de ses actes au moment de la commission d’un crime ou d’un délit résulte de ce que, dans un temps très voisin de l’action, la personne a volontairement consommé des substances psychoactives dans le dessein de commettre l’infraction ou une infraction de même nature ou d’en faciliter la commission ». En d’autres termes, l’auteur des faits pourra toutefois être condamné, même si son consentement était aboli au moment des faits. Néanmoins, toute la difficulté sera de démontrer que l’agent a volontairement consommé de telles substances dans l’objectif de commettre cette infraction. Le simple fait d’avoir consommé des substances psychoactives est insuffisant pour écarter cette cause d’irresponsabilité pénale.   L’altération du discernement  1.Le principe En ce qui concerne l’altération du discernement, l’article 122-1 alinéa 2 du Code pénal précise que « La personne qui était atteinte, au moment des faits, d’un trouble psychique ou neuropsychique ayant altéré son discernement ou entravé le contrôle de ses actes demeure punissable. Toutefois, la juridiction tient compte de cette circonstance lorsqu’elle détermine la peine et en fixe le régime ». Ainsi, à la différence de l’abolition du discernement, l’auteur des faits sera condamné. Simplement, cette altération du discernement sera prise en compte dans la réduction de la peine.  2.L’exception prévue au nouvel article 122-1-2 du Code pénal   La loi du 24 janvier 2022 a intégré l’article 122-1-2 dans le Code pénal en prévoyant une exception en cas d’altération du discernement faisant suite à la consommation de substances psychoactives. Selon cet article, en cas d’altération du discernement ou du contrôle des actes de l’agent, ce dernier ne bénéficiera pas d’une réduction de peine si « cette altération résulte d’une consommation volontaire, de façon illicite ou manifestement excessive, de substances psychoactives ».
Notion de subornation de témoin Cour de cassation, Chambre criminelle, 12 juin 2019, 18-83.844 Un prévenu est coupable d’avoir subordonné une personne même si cette subornation a eu pour effet de faire dire la vérité à ladite personne. « La subornation étant caractérisée par le seul fait d’inciter autrui à déclarer autre chose que ce qu’il pense » Il en est de même pour le faussaire qui fabriquerait un document pour attester des droits qui sont effectivement les siens.
Qu’est-ce que le Traitement d’Antécédent Judiciaire (TAJ) ? Constitué par tous les évènements judiciaires d’une personne, le traitement d’antécédent judiciaire (TAJ) est alimenté par la police et la gendarmerie. Ce fichier est constitué par tous les événements judiciaires d’une personne. En effet, qu’il soit mis en cause, auteur ou victime, l’individu possède un fichier TAJ, parfois même sans le savoir.   Le fichier est commun à la Police et à la Gendarmerie. Il est accessible par ces derniers, les magistrats et l’administration, dans le cadre de ses enquêtes quant aux « conditions de moralité » (Article R.40-28 du Code de procédure pénale).   Qui est dans ce fichier ? Toutes les personnes mises en cause lors d’une enquête ou d’une instruction d’avoir commis un crime, un délit ou une contravention de 5ème Par exemple, si un salarié a été placé en garde à vue en raison de dégradation lors d’une grève, il figure sur ce fichier. Toutes les personnes victimes de crime, délit ou contravention de 5ème Les informations qui sont sur ce fichier sont : l’identité de la personne, ses surnoms, date et lieu de naissance, son adresse et ses coordonnées, sa nationalité, sa profession, son état matrimonial ou toutes les données relatives à la personne morale si c’est une société. Une photographie est conservée pour els auteurs d’infraction (Article R.40-26 du Code de procédure pénale). Les informations similaires, sans photographie, y sont inscrites concernant les victimes d’infractions.   Qui a accès à ce fichier ? Les agents de police, de gendarmerie et du service des douanes peuvent consulter ce fichier, mais également : -les employeurs dans des domaines spécifiques comme la sécurité privée, le transport de personnes type VTC, le domaine nucléaire, police, gendarmerie, fonctionnaire etc… -la Préfecture lors d’une demande d’obtention de la nationalité française, -le Parquet, afin d’établir un « CV » judiciaire de l’individu suspecté, complétant les données du casier judiciaire. Il peut donc être nécessaire de le faire effacer afin de ne pas être entravé dans le processus d’embauche ou d’obtention de la nationalité.   Quelle est la durée de conservation de ces données ? D’après l’article R.40-27 du Code de procédure pénale : Les données sont conservées 20 ans pour les personnes majeures mises en cause. Par exception, elles sont conservées 40 ans pour certains crimes et délits (enlèvement, prise d’otage, séquestration…). Elles sont conservées 5 ans pour certains délits (par exemple certaines infractions du Code de la route). Les données sur les victimes sont conservées 15 ans. Concernant les mineurs : le délai de conservation est de 5 ans, mais sera de 10 ans pour certaines infractions (vol avec violence, exhibition sexuelle etc) et de 20 ans pour d’autres (viol, torture, meurtre, assassinat, vol avec arme etc). Il convient de noter que l’effacement de ces données, à l’issue des délais précités, est automatique. Vous n’avez pas besoin d’en demander l’effacement. Cependant, la mise à jour du fichier peut prendre du temps.   Comment demander l’effacement de ces données ? Important : l’effacement du fichier TAJ ne peut être demandé que si le bulletin n°2 du casier judiciaire est vierge. D’après les articles 230-8 et R.40-31-1 du Code de procédure pénale : En cas de décision d’acquittement ou de relaxe, les informations sont effacées du TAJ. Le Procureur de la République peut, par exception, décider de maintenir ces informations dans des cas particuliers. Si tel est le cas, le Procureur vous informera et malgré cela, les informations du TAJ ne seront accessibles qu’aux autorités judiciaires et non à l’administration. En cas de classement sans suite ou ordonnance de non-lieu, vos informations restent dans le TAJ jusqu’à la fin du délai précité. Néanmoins, ces informations ne sont accessibles qu’aux autorités judiciaires dans le cadre d’enquêtes pénales et non à l’administration dans le cadre de ses enquêtes de moralité. Exceptionnellement, le Procureur peut ordonner l’effacement total de ces données. En cas de condamnation, il n’existe pour l’instant aucune possibilité d’effacement des données. Néanmoins, le Conseil constitutionnel a jugé cela contraire à la Constitution et a laissé au législateur jusqu’au 1er mai 2018 pour modifier cette situation en créant une procédure d’effacement pour les condamnés. Enfin si votre inscription au TAJ ne vous semble plus justifiée, vous pouvez demander son effacement du fichier par plusieurs biais : Par lettre RAR au Procureur de la République de la juridiction qui a connu votre affaire (formulaire ci-dessous), Par lettre RAR à la Commission nationale information et libertés (CNIL). Attention, la procédure peut être assez longue. En moyenne, elle prend 6 mois pour une personne mise en cause. Si la CNIL refuse l’effacement ou si le Procureur ne vous répond pas dans le délai de 2 mois, vous pouvez saisir le Président de la Chambre de l’instruction à la Cour d’appel dans le délai d’un mois par lettre RAR en motivant votre demande. Ce dernier aura 6 mois pour vous répondre. Attention la demande de non inscription au bulletin n°2 du casier judicaire ou la réhabilitation du casier judiciaire n’emporte pas automatiquement effacement du fichier TAJ. La demande d’effacement devra être réalisée.   Comment faire en cas de refus d’effacement ? Si le Procureur de la République refuse de faire effacer votre fichier TAJ, vous pouvez saisir le Président de la Chambre de l’instruction de la Cour d’appel afin d’en demander l’effacement. Vous pouvez également demander l’apposition d’une mention, c’est-à-dire faire camoufler les données qui y sont inscrites. De cette façon, les autorités judiciaires pourront toujours consulter ces données, mais les administrations et employeurs n’y auront pas accès. Formulaire demande d’effacement du fichier TAJ    
EN MATIERE CRIMINELLE COMME EN MATIERE CONTRAVENTIONNELLE, TOUT PREVENU A LE DROIT DE FAIRE ENTENDRE DES TEMOINS A DECHARGE Arrêt de la Chambre Criminelle de la Cour de Cassation en date du 4 Mars 2014, n°13-81.135 Dans le cadre d’une audience pour usage de téléphone tenu en main par le conducteur d’un véhicule en circulation, le prévenu a fait cité un témoin par acte d’huissier mais le juge a énoncé que la déclaration d’un éventuel témoin passager et ami du prévenu sera rejetée en raison du lien qui les lie. Or, la preuve contraire aux énonciations des procès-verbaux dressés en matière de contravention peut se faire par écrit ou par témoins.
SI LA DEPOSITION EXERCE UNE INFLUENCE, LA PERSONNE DOIT PRETER SERMENT Arrêt de la Chambre Criminelle de la Cour de Cassation en date du 23 Octobre 2013, n°13-83.326 Lors d’une audience, un policier municipal a été entendu à titre de simple renseignement mais il n’a pas prêté serment comme les autres témoins. Or, si la déposition peut exercer une influence sur la décision de culpabilité des prévenus le témoin doit toujours prêter serment, même si celui-ci est assermenté.
  Le Droit à la vie (article 2 CEDH) – BulgarieLa réparation des proches de victimes de meurtres est-elle un principe protégé par la CEDH ? L’article 2 de la Convention européenne des droits de l’homme impose à chacun des Etats ayant signé cette convention de protéger leurs citoyens en déployant les moyens nécessaires à cette protection. Conformément à cet article, il est interdit d’infliger la mort à une personne, sauf lorsque cela est nécessaire, notamment « pour réprimer, conformément à la loi, une émeute ou une insurrection ». Dans le cas où cela se produirait, l’Etat concerné doit pouvoir permettre aux victimes d’obtenir réparation de leurs préjudices, et notamment avoir le droit de se constituer partie civile. Un arrêt rendu par la CEDH le 21 juillet 2020 « Todoroc c/ Bulgarie » (n°31434/15) apporte quelques précisons à cet article. En effet, dans cette affaire, un individu ayant perdu son frère victime d’un meurtre, n’a pas pu se constituer partie civile car le droit bulgare ne le lui permettait pas. Or, la directive européenne 2012/29/UE leur permet pourtant d’obtenir réparation du préjudice subi. En l’espèce, l’individu étant le seul membre restant de la famille de la victime, l’Etat Bulgare a manqué à son obligation de « fournir aux victimes une réparation adéquate ». Enfin, la Cour ajoute que pour éviter de nouveaux faits similaires, les Etats concernés doivent mettre en place une « législation pénale » efficace permettant d’éviter les atteintes à la vie. Le droit à la vie doit donc être encadré par une législation et une administration effective.   Prohibition de la torture, traitements inhumains et dégradants (article 3 CEDH)   Violences commises par personne dépositaire de l’autorité publique – FranceL’article 3 de la CEDH s’applique-t-il à des faits de violences policières ? L’article 3 de la Convention européenne des droits de l’Homme prévoit que « Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ».  Mais qu’en est-il du recours à la force des agents de police ? L’arrêt Castellani c/ France, rendu par la CEDH le 30 avril 2020 (n°43207/16) apporte des précisions. En l’espèce, un homme a été victime d’importantes blessures suite à son arrestation. Il s’est vu reconnaitre 19 jours d’incapacité totale de travail. Durant cette arrestation, l’homme aurait également été victime d’une certaine souffrance psychique. En effet, les faits se sont déroulés devant sa femme et sa fille. Enfin, concernant l’arrestation, l’unité qui est intervenue était le GIPN, unité intervenant dans des situations de crise ou particulièrement difficiles. Cette dernière n’était pas autorisée à réaliser cette intervention. En effet, elle était présente sur les lieux pour procéder à d’autres types d’interpellations, et le commandant de police à l’origine de cette initiative, a profité de la présence de cette unité pour interpeller l’intéressé. Dans sa décision, la Cour estime que l’intervention du GIPN n’était pas nécessaire pour l’arrestation de l’individu. De plus, elle ajoute que les importantes blessures dont a été victime le requérant ne sont pas justifiées. Enfin, concernant le critère psychologique, la Cour relève que l’unité aurait dû prendre en compte la présence de la femme et de la fille du requérant.   Violences familiales – FranceUne requête déposée par des associations de défense de l’enfance suite au décès d’un enfant par violences peut-elle mettre en cause la responsabilité des parents ?     Dans l’arrêt rendu par la CEDH le 4 juin 2020 « Ass. Innocence en Danger et Ass. Enfance et Partage c/France », (15343/15), des associations de défense de l’enfance ont saisi la Cour pour dénoncer des violences familiales. En l’espèce, un enfant est décédé suite aux violences infligées par ses parents. Avant le décès de cet enfant, la directrice de l’établissement de ce dernier avait signalé des faits de maltraitance. Dans sa décision, la Cour rappelle que la responsabilité des parents est établie, peu importe la requête déposée. En ce qui concerne l’Etat, la Cour estime que ce dernier a réagi rapidement après le signalement de la directrice, mais que cette affaire n’aurait pas dû être classée sans suite aussi rapidement. En effet, lors de son audition, l’enfant n’a pas parlé de violences familiales, mais il n’était pas encadré par un psychologue, ce qui aurait pu éviter les faits. Pour finir, la Cour estime que la France a violé l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’Homme en ne protégeant pas correctement cet enfant.   Exploitation sexuelle d’un mineur – TurquieL’intégrité physique des individus peut-elle être compromise par un manque d’effectivité d’une procédure pénale ? Dans un arrêt rendu par la CEDH le 9 février 2021 « N.C c/ Turquie (40591/11), une mineure de 15 ans a été victime d’abus sexuels. Suite à la procédure pénale menée en réponse à la plainte de la victime, la Cour a relevé de nombreux dysfonctionnements. En effet, cette mineure n’a pas bénéficié d’un accompagnement par un psychologue durant la procédure. De plus, elle a été confrontée plusieurs fois avec les accusés durant les audiences, alors qu’elle n’avait jamais demandé ces confrontations. A cela s’ajoute le fait que l’enquête a duré 11 ans, un délai excessif, de sorte que certaines charges ont dû être abandonnées pour prescription de l’action publique. Enfin, le procès n’avait pas été délocalisé alors même que la victime subissait des menaces de la part des proches des accusés. De ce fait, la Cour explique que l’Etat en question n’a pas respecté les articles 3 et 8 de laConvention européenne des droits de l’Homme, obligeant l’Etat à protéger « l’intégrité physique des individus ». En effet, elle explique que la procédure pénale en l’espèce n’a pas été effective, ouvrant droit à réparation.   Le travail forcé (article 4 CEDH) – CroatieComment les policiers peuvent-ils démontrer la contrainte dans des faits de travail forcé ?   L’alinéa 2 de l’article 4 de la Convention européenne des droits de l’Homme prévoit que « Nul ne peut être astreint à effectuer un travail forcé ou obligatoire ». Dans l’arrêt rendu par la CEDH le 25 juin 2020 « S.M/ Croatie » (60561/14), la Cour reprend cette notion de « travail forcé », et juge que « des cas d’exploitation grave, comme la prostitution forcée », rentrent dans le champ d’application de l’article. En l’espèce, une femme à la recherche d’un emploi a été contactée par un proche par l’intermédiaire d’un réseau social. Il lui a proposé de rejoindre son réseau de prostitution. Son réseau a bien été découvert par les autorités. L’enquête a démontré que le proxénète menaçait la victime, et récupérait la moitié des gains qu’elle percevait. Le proxénète a, dans un premier temps, été relaxé. Le juge a estimé que la victime n’avait pas démontré qu’elle avait été forcée à se prostituer, ne remplissant ainsi pas la condition de contrainte. C’est cette condition qui a distingué ces faits d’une situation de travail forcé, autant en première instance que devant la cour d’appel, ainsi que devant la juridiction constitutionnelle saisie. Pourtant, la Cour européenne reproche à l’Etat de ne pas avoir suffisamment tenté de démontrer qu’une contrainte existait : les communications électroniques n’ont pas été assez exploitées. Par ailleurs, la mère de la victime a également été menacée, ce qui n’a pas été relevé par les différentes juridictions saisies. Cette incertitude dans les faits a profité à l’accusé, alors même que la victime n’avait aucun contrôle sur l’enquête et s’est donc vue débouter de sa demande du seul fait que les autorités avaient omis plusieurs éléments significatifs. La Cour reproche donc à l’Etat de ne pas avoir respecté l’article 4 de la Convention européenne des droits de l’Homme, et donc d’avoir eu recours à une procédure non-effective : l’enquête n’ayant pas été correctement menée, la victime n’a pu faire valoir ses droits.   Droit à la liberté et à la sureté (article 5 CEDH)   Droit pénal des mineurs – SuisseUne disposition législative autorisant implicitement le placement en détention provisoire, pendant l’instruction, d’un prévenu mineur au moment des faits, est-elle bien fondée ? L’article 5 de la Convention européenne des droits de l’Homme prévoit que « Toute personne a droit à la liberté et à la sûreté. Nul ne peut être privé de sa liberté », sauf dans quelques cas énumérés par ce même. La question de l’interprétation des dispositions liées à la privation de liberté, en droit pénal suisse des mineurs, s’est posée devant la CEDH. Notamment, pour déterminer si un délinquant, mineur lors de la commission de l’infraction, peut être placé en détention provisoire lors de la procédure de réexamen (CEDH 27 octobre 2020 Reist c/ Suisse, n°39246/15). Le droit suisse autorise, implicitement, le placement en détention provisoire d’un prévenu lors de la procédure de réexamen pour une infraction commise lorsqu’il était mineur : en effet, le Procureur ne peut ordonner une telle mesure que « pendant l’instruction ». La Cour constate que le droit suisse ne donne pas un fondement suffisant à la privation de liberté. Cependant, le Gouvernement a pu fournir des explications, et la Cour a décidé de ne pas se fonder sur une interprétation stricte et littérale de la disposition litigieuse. En effet, des mesures ont été mises en place par le droit suisse pour protéger les personnes concernées par cette disposition. Compte tenu de la spécificité du droit pénal des mineurs, et de l’attention particulière du droit suisse concernant les mineurs incarcérés lors de l’instruction, la CEDH admet le bien-fondé de cette disposition, qui serait dans d’autres circonstances sanctionnable.   Appel non suspensif – SuisseUne détention peut-elle être uniquement justifiée par un risque de fuite, si le mis en cause a déjà été acquitté par le juge de première instance ? L’article 5, §1, de la CEDH autorise la détention d’une personne « s’il a fait l’objet d’une arrestation ou d’une détention régulières pour insoumission à une ordonnance rendue, conformément à la loi, par un tribunal ou en vue de garantir l’exécution d’une obligation prescrite par la loi ». Dans un arrêt rendu par la CEDH le 6 octobre 2020 « I.S c/ Suisse », (n°60202/15), la Cour a pu préciser les modalités de cet article. Il était question en l’espèce d’un requérant, placé en détention avant le jugement de première instance en raison d’un risque de fuite, et n’ayant pas été libéré après celui-ci, car le ministère public avait interjeté appel. La Cour a cherché à déterminer si la détention de 230 jours, jusque l’arrêt d’appel, était justifiée au vu de l’acquittement prononcé par le juge de première instance. En se fondant sur la confiscation des pièces d’identité du requérant, la CEDH a pu déduire que la privation de liberté, en l’espèce, n’était pas justifiée. Une détention aussi restrictive doit donc être spécifiquement justifiée, et ne peut l’être par une crainte générale que l’intéressé commette une nouvelle infraction.   Garde à vue en matière de terrorisme – TurquieDe quelle manière une privation de liberté avant tout jugement peut-elle être justifiée ? La Cour a pu se prononcer sur la validité des soupçons pouvant justifier une privation de liberté avant un jugement (CEDH gr. Ch., Demirtas c/ Turquie (n°2)). En l’espèce, un député kurde avait tenu un discours quatre ans auparavant, discours ayant justifié son arrestation pour terrorisme. Pourtant, ni ce discours ni les écoutes téléphoniques effectuées ne constituaient des éléments assez probants dans l’affaire. De plus, l’intéressé avait remis en question l’authenticité des écoutes, ce qui selon la CEDH impose aux autorités judiciaire la charge de la preuve de leur crédibilité. La liberté d’expression est rappelée dans cet arrêt, et compte tenu de la nature fondamentale de celle-ci, la Cour rappelle la nécessité de rassembler des éléments probants crédibles et valides pour justifier une privation de liberté liée à l’exercice de la liberté d’expression. La CEDH rappelle que cette privation, en raison de l’exercice de la liberté d’expression, ne doit pas résulter d’une manipulation erronée du droit national. Par exemple, des éditeurs ayant participé à des débats publics ne peuvent être privés de leur liberté au motif qu’ils soutiennent des organisations terroristes (CEDH, 10 novembre 2020, Sabuncu et a. c/ Turquie, n°23199/17). De même, un journaliste suspecté de faits terroristes ne peut être sanctionné s’il exerçait uniquement sa liberté d’expression (CEDH, 24 novembre 2020, Sik c/ Turquie, n°36493/17). Enfin, une participation à une manifestation d’opposition ne constitue pas une infraction de terrorisme (CEDH, 19 janvier 2021 Tas c/ Turquie, n°72.17). Dans ces arrêts, la CEDH rappelle donc que la privation de liberté est une mesure qui doit être particulièrement justifiée, et qui ne peut résulter de simples soupçons, surtout en matière de terrorisme. Ce n’est pas le droit national qui a posé problème dans ces exemples, mais son application trop précipitée, effectuée dans un souci de sécurité, mais qui a ce faisant outrepassé les dispositions de la CEDH.   Procès équitable   Principes généraux (article 6 §1 CEDH) : Matière pénale en IslandeComment s’appliquent les critères Engel en pratique ? Pour que le « droit à un procès équitable » soit appliqué en matière pénale, trois critères, « les critères Engel », doivent être étudiés : Premièrement, « l’infraction doit pouvoir être qualifiée en droit interne ». Le deuxième critère se réfère à la « nature de l’infraction », et le troisième au degré de « sévérité de la sanction » (CEDH, 8 juin 1976, n°5100/71, Engel c/ Pays-bas). Ces critères sont ressortis d’une volonté de distinguer le droit pénal du droit disciplinaire, pour que l’un n’empiète pas sur l’autre. Dans un arrêt rendu par la Cour (22 décembre 2020 Jonsson et Halldor Hall c/ Islande n°68273/14), cette dernière a donné un exemple, au regard des faits de l’espèce, d’une infraction qui ne revêtirait pas un caractère pénal au vu des critères Engel. Il était question en l’espèce de plusieurs avocats de la défense qui ont refusé de reprendre une audience, alors que le juge les avait invités à la reprendre. Des amendes ont donc été prononcées à leur encontre pour le motif suivant : « atteinte à l’autorité de la justice ». Les avocats ont saisi la Cour européenne des droits de l’Homme en invoquant l’article 6 de la Convention prévoyant que « Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle ». La CEDH applique les critères Engel à ces faits, et déclare la requête irrecevable : les amendes infligées, quoique d’un montant élevé, ne font pas partie de la sphère pénale. En effet, aucune peine de prison n’a été prononcée, une telle sanction n’est pas inscrite au casier judiciaire des avocats, et s’ils ne règlent pas ces amendes, leurs sanctions ne peuvent être transformées en des peines privatives de liberté. Le degré de sévérité de la sanction n’est pas donc pas spécialement élevé.   Principes généraux (article 6 §1) : Tribunal établi par la loi en IslandeLa nomination irrégulière d’un magistrat porte-elle atteinte au droit au procès équitable ? Dans un arrêt portant sur la nomination de magistrats en Islande, la CEDH a pu rappeler les principes applicables en matière d’établissement d’un tribunal, et notamment l’indépendance de ses membres (CEDH, gr. Ch., 1er décembre 2020, n°26374/18, Astradsson c/ Islande). En l’espèce, le ministre de la Justice avait refusé les nominations de certains magistrats au profit d’autres, alors qu’un juge nommé irrégulièrement influe forcément sur le droit du requérant à avoir accès à un « tribunal établi par la loi », selon l’article 6 paragraphe 1 CEDH. La Cour considère que le critère selon lequel un tribunal doit être « établi par la loi » implique deux fondements : la base légale générale et le droit interne. Ce critère vise à éviter une discrétion arbitraire de l’exécutif, en séparant les pouvoirs, tout en gardant une interaction nécessaire. Selon la CEDH, plus l’importance de la juridiction dans l’organisation judiciaire est haute, plus il est important de « nommer les juges selon leur mérite ». En effet, si un juge est nommé irrégulièrement, cela entache toute la procédure, et porte nécessairement atteinte aux droits du requérant, peu importe si ce juge a influé sur la décision ou non. La Cour a donc considéré que « si l’irrégularité alléguée dans une affaire donnée était d’une gravité telle qu’elle a porté atteinte aux principes fondamentaux susmentionnés et compromis l’indépendance de la juridiction en question ». Trois critères sont dégagés pour déterminer la gravité d’une irrégularité, et si celle-ci a pu affecter le procès : il faut qu’il y ait eu une violation manifeste du droit interne, que l’irrégularité soit telle qu’elle ait empêché le pouvoir judiciaire d’accomplir sa mission sans ingérence, et enfin, une absence de contrôle des juridictions nationales. En l’espèce, la Cour conclue que l’irrégularité a bien porté atteinte au droit du requérant à un procès équitable. Procès équitable – Présomption d’innocence (article 6 §2) : Moldavie.Est-ce que l’acceptation d’une loi d’amnistie renverse la présomption d’innocence ? Un arrêt portant sur un licenciement décidé sur la base du dossier pénal du salarié a donné l’occasion à la CEDH de préciser le droit à un procès équitable, garanti par l’article 6 de la CEDH (CEDH, 20 octobre 2020, n°13112/07, Gutu c/ République de Moldova). En l’espèce, le suspect avait accepté de bénéficier d’une loi d’amnistie. Son employeur l’avait licencié en considérant que cet acte renversait la présomption d’innocence. La Cour sanctionne ce licenciement : la présomption d’innocence ne peut être renversée par un acte d’amnistie, qui n’établit pas la culpabilité du prévenu : « il ne ressort pas non plus avec certitude du libellé de ces dispositions que l’acceptation par un suspect de l’application à son égard de l’amnistie équivalait à une reconnaissance de culpabilité ». La culpabilité du prévenu n’ayant donc pas été établie par son acceptation de cet acte d’amnistie, la Cour a sanctionné les juridictions internes, qui avaient affirmé le bien-fondé de son licenciement.   Procès équitable – Droits de la défense (article 6 §3) : GrèceUn déséquilibre entre les parties lors de l’audience doit-il nécessairement être compensé ? La CEDH a pu rappeler l’importance des droits de la victime et de l’accusé, dans un arrêt portant sur une infraction sexuelle sur mineur (CEDH, 14 mai 2020, n°78085/12, Papadopoulos c/ Grèce). Il convient de concilier les droits de la défense avec les mesures prises pour protéger la victime. En l’espèce, le fils mineur du requérant, entendu en qualité de témoin, était absent lors de l’audience, mais ses déclarations avaient été lues intégralement. L’impossibilité pour le requérant d’interroger ce témoin a été compensée, selon la Cour, par divers éléments : notamment, il aurait pu demander une confrontation audiovisuelle, et principalement, la déposition était certes importante mais pas le seul élément considéré par la cour interne dans sa condamnation. En l’espèce, la CEDH conclue que l’équité globale a été respectée, et le requérant n’a pas subi de préjudice. La CEDH se concentre donc sur « l’équité globale » qui doit être assurée entre les parties, et admet une compensation entre les parties en cas de déséquilibre des armes.   Légalité des délits et des peines (article 7 CEDH) – Avis consultatif : ArménieLa technique de la législation par référence est-elle envisageable selon la Convention européenne des droits de l’Homme ? Dans un avis consultatif rendu le 29 mai 2020, dont le numéro de pourvoi est le n°P16-2019-001, la Cour explique que la méthode de la « législation de référence », c’est-à-dire la possibilité pour une personne ayant commis une infraction de comparer son comportement à une norme référente et une norme référée, n’est pas incompatible avec les dispositions de l’article 7 CEDH, qui établit qu’il n’y a pas de peine sans loi. La technique de la législation de référence consiste à intégrer dans des dispositions légales de fond des renvois à d’autres dispositions, dans le but de donner une définition plus complète de l’infraction. Cependant, il ne faut pas que la norme à laquelle il est fait référence, même si elle se trouve plus élevée hiérarchiquement que la norme référente, étende la portée de l’incrimination. De plus, la Cour consacre le « principe de concrétisation » : « pour établir si, aux fins de l’art. 7 de la Convention, une loi adoptée après la commission présumée d’une infraction est plus ou moins favorable à l’accusé que la loi qui était en vigueur au moment des faits allégués, il convient de tenir compte des circonstances particulières de l’espèce ». La CEDH détermine ici comment apprécier la rédaction de la loi pénale et son application dans le temps, sans pour autant se prononcer sur les faits de l’espèce.   Respect de la vie privée et familiale (article 8 CEDH)   Interdiction de territoire – SuisseComment un Etat peut-il justifier une expulsion de territoire ? La CEDH consacre le droit des Etats contractants d’expulser une personne de leur territoire, mais uniquement si ces mesures sont « nécessaires dans une société démocratique, c’est-à-dire être justifiées par un besoin social impérieux et, notamment, proportionnées au but légitime poursuivi » (CEDH, 7 juillet 2020, n°62130/15, K.A. c/Suisse). La Cour insiste sur l’importance des circonstances et de la proportionnalité de la mesure par rapport du but poursuivi. En l’espèce, un homme a été condamné pour infraction à la législation sur les stupéfiants. La Cour ayant relevé additionnellement que le mis en cause ne fréquentait sa femme que rarement, que l’interdiction de rentrer sur le territoire ne durait que 7 ans, avec des dérogations possibles, elle a pu en conclure que la Suisse a justifié sa mesure d’éloignement. La Cour a eu l’occasion de s’exprimer plus avant sur ce sujet quelques mois plus tard (CEDH, 8 décembre 2020, n°59006/18, M. M. c/ Suisse). En l’espèce, un homme a été condamné pour agression sexuelle sur mineur, assortie de la découverte d’éléments pédopornographiques sur son téléphone, ainsi qu’une consommation d’alcool et de stupéfiants. De plus, le mis en cause n’avait pas fourni d’effort d’insertion en Suisse. La CEDH approuve dès lors l’interdiction de territoire prononcée, étant donné le risque de récidive. Cependant, la Cour saisit cette occasion pour rappeler la nécessité absolue de vérifier la proportionnalité de la mesure, et l’obligation pour l’Etat de démontrer « des raisons très solides pour justifier l’expulsion ».   Déchéance de nationalité – FranceComment un Etat peut-il justifier une déchéance de nationalité ? La déchéance de nationalité concerne le droit à la vie privée et familiale protégé par l’article 8 de la Convention, car la nationalité est un élément d’identité important. Dans un arrêt portant sur des faits d’association de malfaiteurs en vue de commettre un acte de terrorisme, la Cour a pu se prononcer sur la légalité d’une telle sanction (CEDH, 25 juin 2020, n°52273/16, Ghoumid et a. c/ France). En l’espèce, la déchéance avait été prononcée plus de 10 ans après les faits, en opposition avec l’article 25-1 du Code civil, lequel prévoyait à cette date un délai maximal de 10 ans pour prononcer cette déchéance. Cependant, les autorités administratives s’étaient prévalues d’un texte postérieur aux faits, qui étendait le délai jusqu’à 15 ans. La CEDH a conclu que cette application était bien fondée, d’autant plus que « les requérants ont bénéficié de garanties procédurales substantielles », et qu’ils avaient tous une deuxième nationalité. Dans la même affaire, la cour a aussi pu se prononcer sur la question de savoir si cette mesure de déchéance de nationalité équivalait à sanctionner les mêmes faits une deuxième fois. Elle a refusé cette interprétation, au regard de trois éléments : la mesure est administrative en droit français et donc de nature différente à la sanction pénale ; la mesure a une dimension symbolique, en ce qu’elle punit un manque de loyauté vis-à-vis de la France ; la déchéance de nationalité punit « des comportements qui, s’agissant d’actes terroristes, sapent le fondement même de la démocratie ». La déchéance de nationalité n’équivaut donc pas à une expulsion du territoire, mais reste soumise à la même exigence de proportionnalité.   Liberté d’expression (article 10 CEDH)   Appel au boycott- FranceY-a-t-il une différence entre un appel à la différence de traitement et un appel à la discrimination ? Le boycott étant une forme d’expression comprise dans la liberté d’expression, il est donc protégé par l’article 10 de la Convention européenne des Droits de l’Homme. Cependant, la CEDH a pu rappeler que les circonstances des faits déterminent l’application de cette liberté (CEDH, 11 juin 2020, n°15271/16, Baldassi et a. c/ France). Dans les faits, il s’agissait de militants ayant appelé au boycott de produits israéliens. Ils ont été poursuivis pour provocation à la haine raciale. La CEDH conclue qu’en l’espèce, le traitement différencié des boycotteurs était injustifié, car ils étaient coupables d’appel à la différence de traitement des produits israéliens, et non pas d’un appel à la discrimination. Il était donc important de différencier l’appel à la discrimination de l’appel à un traitement différencié : la Cour distingue ces faits de ceux d’un arrêt datant de 2009, où un maire avait appelé au boycott des produits israéliens pour dénoncer la politique du Premier ministre (CEDH, 16 juillet 2009, n°10883/05). En effet, la condamnation des boycotteurs français reposait sur les mauvaises bases : le droit français interdit bel et bien « tout appel au boycott de produits à raison de leur origine géographique », mais les juges internes ont décidé de qualifier ce boycott d’appel à la discrimination. La CEDH réaffirme une fois de plus la nécessité de produire une motivation circonstanciée.   Dénonciation calomnieuse – FranceLa commission d’une infraction est-elle aggravée si l’auteur aurait dû avoir connaissance de l’illégalité ? Le condamné avait adressé une lettre mensongère au président de l’Autorité des Marchés Financiers, proclamant par la suite qu’il ne savait pas qu’il pouvait être poursuivi pour l’infraction de dénonciation calomnieuse (CEDH, 26 mars 2020, n°5936/16, Tête c/ France). La CEDH effectue un contrôle de proportionnalité, car « dénoncer un comportement prétendument illicite devant une autorité est susceptible de relever de la liberté d’expression au sens de l’art. 10 de la Convention ». La CEDH relève lors de ce contrôle que le requérant ne pouvait prétendre ne pas être au courant de ces dispositions spécifiques, car étant avocat, il était censé connaître l’article 226-10 du Code pénal, portant sur les dénonciations calomnieuses. La Cour de cassation est sanctionnée pour son ingérence dans la liberté d’expression du requérant : celle-ci aurait dû faire l’objet d’un contrôle de proportionnalité, qui aurait pris en compte l’infraction, les circonstances l’entourant, et la liberté d’expression de l’article 10 de la Convention.   Parlementaires – TurquieY-a-t-il une limite à la liberté d’expression des parlementaires ? Selon la CEDH, la seule limite à la liberté d’expression des parlementaires se trouve dans les appels à la violence. En effet, dans un arrêt portant sur des réformes incriminantes passées par le gouvernement turc pour se protéger de l’opposition, la Cour a pu rappeler que « la Cour estime important de protéger la minorité parlementaire de tout abus de majorité », dans le respect de certaines limites (CEDH, gr. Ch., 22 décembre 2020, n°14305/17, Demirtas c/ Turquie (n°2)). La Cour rappelle également l’importance du droit de vote, ou du droit de se porter candidat aux élections.   Double degré de juridiction (Protocole 7, article 2 CEDH)Comment évaluer les exceptions au droit à un double degré de juridiction ? Dans une affaire de violation de dispositions tendant à prévenir le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme, la Cour a pu expliquer davantage les critères Engel, à savoir ce qui constitue matière pénale, en se concentrant sur le droit à un double degré de juridiction, c’est-à-dire à ce qu’une affaire soit examinée par une juridiction supérieure après un premier jugement (CEDH, 30 juin 2020, n°50514/13, Iglesias c/ Espagne). En l’espèce, le double degré de juridiction n’aurait pas été respecté. La CEDH s’interroge tout d’abord sur la disposition de la loi espagnole violée en l’espèce et son caractère pénal. Elle constate alors que ces faits constituent une « infraction administrative » en droit espagnol, avant de constater que la disposition ne détaille pas assez son champ d’application, et reste générale vis-à-vis des personnes concernées. Pourtant, le « bien juridique protégé » par la disposition pourrait avoir tant une dimension administrative qu’une dimension pénale. Enfin, la Cour se penche sur le fait que le montant de l’amende appliquée varie en fonction de la gravité de l’infraction, ce qui reviendrait à donner à la disposition de loi une dimension pénale. Le double degré de juridiction s’applique, selon l’article 2 du protocole 7 de la Convention, à toute infraction qui n’est pas « mineure ». La CEDH relève plusieurs critères pour décider si une infraction est « mineure » : il faut par exemple prendre en considération l’existence d’une peine de prison, et il faut également considérer les faits de l’affaire. En l’espèce, la disposition de loi a un « caractère pénal intrinsèque », et le montant de l’amende équivaut à la totalité des économies de l’auteur des faits, alors même qu’il est démontré qu’il n’était pas forcément coupable de blanchiment. La Cour en conclut que les autorités avaient saisi tous les fonds du mis en cause, et en l’absence de contrôle de proportionnalité, l’infraction constatée ne peut pas être vue comme « mineure ». Dès lors, « l’exception au droit à un double degré de juridiction en matière d’infractions mineures, prévue par le § 2 de la disposition invoquée, n’est donc pas applicable dans les circonstances particulières de la présente affaire », et l’Espagne se voit condamnée.
La perte de gains professionnels vise à indemniser la victime de la perte ou de la diminution de ses revenus consécutive à l’incapacité permanente, partielle ou totale, à laquelle elle est désormais confrontée dans la sphère professionnelle (ex : perte de l’emploi, changement d’emploi, emploi exercé à temps partiel…).   La question qui s’est posée était donc celle de savoir si un enfant, qui n’a jamais exercé d’activité professionnelle peut prétendre à une indemnisation sur ce fondement dans la mesure où il sera dans l’impossibilité d’exercer une quelconque activité professionnelle à l’avenir.     Par un arrêt rendu le 24 juillet 2019 (n°4086624), le Conseil d’État a considéré que la victime qui se trouve privée de toute possibilité d’exercer un jour une activité professionnelle en raison d’un accident corporel survenu dans son jeune âge, peut obtenir une indemnisation au titre de la perte de gain professionnel.     En l’espèce, un enfant a gardé de graves séquelles suite à l’accouchement. Il souffrait notamment d’une incapacité totale d’exercer un jour une activité professionnelle.   Le Conseil d’État a considéré que la seule circonstance qu’il soit impossible de déterminer le parcours professionnel que l’enfant aurait suivi ne fait pas obstacle à ce que soit réparé le préjudice qui doit être regardé comme présentant un caractère certain résultant de la perte des revenus qu’une activité professionnelle lui aurait procuré et de la pension de retraite consécutive.     En outre, cette indemnisation ne doit pas obligatoirement être équivalente au SMIC. En effet, par un arrêt du 8 mars 2018 (Cass. crim, 8 mars 2018, n° 17-10.142) la Cour de cassation a cassé l’arrêt rendu par une Cour d’appel qui a décidé d’indemniser la perte de gains professionnels futurs sur la base du SMIC.   La Cour de cassation a considéré que la Cour d’appel n’avait pas expliqué pourquoi elle présumait que la profession à la laquelle la victime pouvait accéder ne lui aurait pas procuré des revenus supérieurs au SMIC, alors que la victime soutenait qu’elle aurait raisonnablement pu percevoir le salaire moyen en France de 1 800 euros mensuel selon l’INSEE.
L’apport de la loi BADINTER de 1985 interprété par la Cour de cassation en 2021   (Cass.civ., 2e civ, 6 mai 2021, n°20-14.551) En l’espèce, une femme se déplaçant en fauteuil roulant électrique a été victime d’un accident de la circulation. L’assureur du véhicule ayant percuté cette femme a refusé de l’indemniser au motif qu’elle a commis une faute exclusive de son dommage. La loi Badinter de 1985 à créé un régime de réparation inégalitaire en fonction de la qualité de la victime. En effet, la faute de la victime n’est pas appréciée de la même manière selon qu’elle soit conductrice ou non d’un véhicule terrestre à moteur (ci-après « véhicule »).   Les victimes non conductrices d’un véhicule Les victimes non conductrices d’un véhicule sont considérées comme des victimes privilégiées. En effet, la loi a posé un principe : « les victimes, hormis les conducteurs de véhicules terrestres à moteur, sont indemnisées des dommages résultant des atteintes à leur personne qu’elles ont subis, sans que puisse leur être opposée leur propre faute ». Les piétons, cyclistes ou encore les passagers d’un véhicule sont concernés. Néanmoins, il existe 2 exceptions. La faute de la victime peut lui être opposée dès lors qu’elle a commis une faute inexcusable qui a été la cause exclusive de l’accident ou lorsqu’elle a volontairement recherché le dommage qu’elle a subi. La Cour de cassation admet strictement l’existence de ces hypothèses et visent notamment les situations où la victime a tenté de se suicider. Il convient tout de même de préciser que dans certains cas, la faute de la victime ne peut jamais lui être opposée même si celle-ci a volontairement recherché le dommage qu’elle a subi. Est visée l’hypothèse où les victimes sont âgées de moins de seize ans ou de plus de soixante-dix ans, ou lorsque, quel que soit leur âge, elles sont titulaires, au moment de l’accident, d’un titre leur reconnaissant un taux d’incapacité permanente ou d’invalidité au moins égal à 80 p. 100.   Les victimes conductrices d’un véhicule Lorsque la victime est conductrice d’un véhicule, sa faute peut lui être opposée et ainsi réduire voire exclure son droit d’être indemnisé. Dans sa décision du 6 mai 2021, la problématique était de savoir si un fauteuil roulant électronique, circulant sur le sol doit être considéré comme un véhicule. Dans l’affirmative, la faute de la victime serait prise en compte et entrainerait une incidence sur le montant de son indemnisation. La Cour de cassation a donc tranché en considérant qu’un fauteuil roulant électrique est un dispositif médical destiné au déplacement d’une personne en situation de handicap. Par conséquent, ce n’est pas un véhicule terrestre à moteur au sens de la loi du 5 juillet 1985.
La victime d’un dommage causé par une chose inerte peut demander la réparation de son préjudice si la chose était anormal (2e civ, 7 avr. 2022, n°20-19.746)   En l’espèce, un individu s’est assis sur le rebord d’une fenêtre de 80 cm de haut, situé au 5ème étage d’un immeuble et à 42 cm du sol de l’appartement. Cette fenêtre ne comportait aucun garde-corps susceptible d’empêcher une chute. Après s’être assis sur le rebord cette fenêtre, l’individu a basculé dans le vide et est décédé. La question qui se posait était celle de savoir si la chose présentait un caractère anormal permettant ainsi aux ayants-droits d’obtenir une indemnisation du préjudice subis. L’article 1242 alinéa 1er du Code civil prévoit qu’on est responsable du dommage causé par les choses que l’on a sous sa garde. Doit-il s’agir d’une chose dangereuse ? La chose est entendue largement par le législateur et il n’est pas nécessaire qu’elle présente certaines caractéristiques. Ainsi, il peut s’agir d’une chose dangereuse ou inoffensive, mobilière ou immobilière, actionnée ou non par la main de l’Homme, en mouvement ou encore inerte. Cependant, la chose doit avoir joué un rôle actif dans la survenance du dommage. Comment prouver ce rôle actif ? En principe, la démonstration de cette preuve incombe à la victime. Cependant, dans l’hypothèse où une chose en mouvement est entrée en contact avec le siège du dommage, il existe une présomption de rôle actif qui entraîne un renversement de la charge de la preuve. Il appartient donc au propriétaire de démontrer que la chose n’a joué aucun rôle dans la survenance du dommage. Dans les autres hypothèses, c’est-à-dire lorsque la chose en mouvement n’est pas entrée en contact avec le siège du dommage ou lorsqu’une chose inerte est entrée en contact avec le siège du dommage, il appartient à la victime de démontrer ce rôle actif. Ce rôle actif doit résider dans le caractère anormal de la chose (position, comportement, défectuosité, fragilité…). C’est ainsi que la Cour de cassation a pu considérer que présente un caractère anormal une fenêtre situé au 5ème étage d’un immeuble, à 42 cm du sol de l’appartement dépourvu de garde-corps susceptible d’empêcher une chute malgré l’étage élevé de l’appartement. Si ces conditions sont réunies, le gardien de la chose sera tenu d’indemniser la victime. Il convient de préciser qu’il existe une présomption de garde à l’égard du propriétaire de la chose. Ainsi, s’il n’avait pas la garde de la chose au moment de la survenance du dommage, il lui appartient d’apporter cette preuve.
Le nouvel article 222-23-1 du Code pénal   La loi n° 2021-478 du 21 avril 2021 visant à protéger les mineurs des crimes et délits sexuels et de l’inceste a facilité l’engagement de la responsabilité pénale de l’auteur d’un viol sur un mineur de 15 ans. Cette loi a introduit le nouvel article 222-23-1 dans le Code pénal selon lequel « Hors le cas prévu à l’article 222-23, constitue également un viol tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit, ou tout acte bucco-génital commis par un majeur sur la personne d’un mineur de quinze ans ou commis sur l’auteur par le mineur, lorsque la différence d’âge entre le majeur et le mineur est d’au moins cinq ans ». A la différence de l’article 222-23 relatif au viol général, la victime n’a pas à démontrer l’usage de violence, menace, contrainte ou surprise pour caractériser l’infraction. L’absence de son consentement est donc présumée.   Quelles sont les conditions exigées par le nouvel article 222-23-1 du Code pénal ? Plusieurs éléments doivent être démontrés par la victime pour pouvoir invoquer ce nouvel article :   L’existence d’un acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit ou d’un acte bucco-génital L’acte doit avoir été commis sur la victime ou sur l’auteur des faits par la victime La victime doit être un mineur de 15 ans La différence d’âge entre le majeur et le mineur est d’au moins cinq ans   Exemple : si une victime âgée de 13 ans a eu une relation sexuelle avec une personne de 18 ans, le nouvel article 222-23-1 peut être invoqué. Cependant, l’alinéa 2 de l’article 222-23-1 du Code pénal précise que la condition de différence d’âge n’est pas exigée si les faits ont été commis en échange d’une rémunération, d’une promesse de rémunération, de la fourniture d’un avantage en nature ou de la promesse d’un tel avantage.   Cet article est-il applicable pour les faits commis avant son entrée en vigueur ? En vertu du principe de la non-rétroactivité de la loi pénale plus sévère prévu à l’article 112-1 du Code pénal, cette nouvelle disposition ne peut être invoquée pour les faits commis avant son entrée en vigueur.   Quelles sont les peines applicables ? Aux termes de l’article 222-23-3 du Code pénal, ce viol est puni de 20 ans de réclusion criminelle.
Sur le principe de l’indisponibilité de notre propre corps Cass. Crim., 25 juin 2019, 18-84.200 La Chambre criminelle a jugé « L’infraction de violence ne disparaît pas lorsque la victime est consentante ». Ainsi, les violences constituent une infraction quand bien même la victime y aurait consentie. Cette décision reste nuancée par l’arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme qui avait considéré « Le droit pénal ne peut en principe intervenir dans le domaine des pratiques sexuelles consenties, qui relèvent du libre arbitre des individus, sauf des raisons particulièrement graves ». (CEDH, KA c/ Belgique, 25 février 2005)
ON PEUT ETRE CONDAMNE POUR VOL D’INFORMATIONS POURTANT EN LIBRE ACCES SUR LE RESEAU INFORMATIQUE D’UNE ENTREPRISE Arrêt de la Chambre Criminelle de la Cour de Cassation en date du 28 Juin 2017, n°16-87.189 Un avocat avait accédé au réseau informatique en libre accès du cabinet pour copier toute la correspondance de son associée avant de la remettre au Bâtonnier. Malgré le libre accès à ces informations pour les membres du cabinet, les juges l’ont condamné pour vol.
La distinction entre un vol, une escroquerie et une extorsion   Le vol, l’escroquerie et l’extorsion sont trois atteintes aux biens qui peuvent être confondues par les justiciables. Il convient donc de les analyser successivement.   I) Le vol 1. La définition Aux termes de l’article 311-1 du Code pénal « Le vol est la soustraction frauduleuse de la chose d’autrui ».   Une chose Le vol nécessite donc qu’une chose ait été soustraite. La chose est entendue largement par le législateur et par la Cour de cassation. Cette dernière a affirmé que « la loi punit la soustraction d’une chose, quelle qu’elle soit, si elle appartient à autrui » (Cass. crim, 14 mai 1957). Néanmoins, la chose ne peut concerner qu’un bien mobilier.   Une chose appartenant à autrui Pour caractériser un vol, il est nécessaire que la chose objet du vol appartienne à autrui. Cependant, il n’est pas nécessaire de connaître le propriétaire de la chose. La mauvaise foi du prévenu pourra être caractérisée dès lors qu’il s’approprie une chose qu’il sait ne pas lui appartenir (Cass. crim, 11 mars 1942). Ainsi, les choses abandonnées et les choses sans maître ne peuvent pas faire l’objet d’un vol.   Une soustraction La chose doit avoir été soustraite frauduleusement par le prévenu. La chambre criminelle a d’ailleurs considéré que « pour soustraire, il faut prendre, enlever, ravir », « la soustraction constitutive du délit de vol implique l’appréhension, l’enlèvement d’une chose qui se trouvait hors de la détention du coupable au moment où elle s’opère ». Ainsi, le vol ne saurait être constitué d’une part, si l’individu s’approprie frauduleusement une chose qu’il a en sa possession et d’autre part, si la chose lui a été remise volontairement. Dans cette seconde hypothèse, l’escroquerie ou l’extorsion pourront toutefois être envisagées.   2.La peine  Selon l’article 311-3 du Code pénal, le vol est puni de 3 ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende.   II) L’escroquerie 1.La définition L’escroquerie est prévue à l’article 313-1 du Code pénal. Cet article dispose que « L’escroquerie est le fait, soit par l’usage d’un faux nom ou d’une fausse qualité, soit par l’abus d’une qualité vraie, soit par l’emploi de manœuvres frauduleuses, de tromper une personne physique ou morale et de la déterminer ainsi, à son préjudice ou au préjudice d’un tiers, à remettre des fonds, des valeurs ou un bien quelconque, à fournir un service ou à consentir un acte opérant obligation ou décharge ».   Un mensonge L’escroquerie ne peut être caractérisée que dans 3 hypothèses :   L’usage d’un faux nom ou d’une fausse qualité Exemples : changer de nom en vue de faire croire à sa solvabilité, se présenter sous le nom réel d’autrui, même avec son accord (ce dernier étant alors complice), faire usage de la fausse qualité d’agent commercial…   L’abus d’une qualité vraie Le simple fait d’avoir fait usage d’une qualité vraie ne permet pas de facto de caractériser l’escroquerie. Il est nécessaire que l’agent en ait fait un usage abusif. La Cour de cassation a précisé que l’abus d’une qualité vraie constitue une manœuvre frauduleuse lorsque cette qualité est de nature à imprimer à des allégations mensongères l’apparence de la sincérité et à commander la confiance de la victime (Cass. crim, 25 juin 1931 ; Cass. crim, 1er oct. 1981). Exemple : un avocat qui se fait remettre de l’argent en affirmant faussement à sa victime qu’il convient de corrompre un administrateur judiciaire pour obtenir de la juridiction commerciale des décisions favorables.    L’usage de manœuvres frauduleuses  Dans cette hypothèse, le simple mensonge ne suffit pas à caractériser l’escroquerie. Celui-ci doit être appuyé d’éléments extérieurs (ex : intervention d’un tiers, mise en scène…). Exemples : intervention d’un notaire donnant force et crédit à de fausses déclarations faites par l’une des parties pour déterminer la signature de l’acte authentique, intervention d’un comptable dont le témoignage personnel confirme l’exactitude d’un bilan cependant faux.   La remise d’une chose A la différence du vol, la chose doit être remise volontairement par la victime. Il peut s’agir de fonds, de valeurs ou encore d’un bien quelconque. En outre, l’escroquerie peut porter sur un bien immeuble (Cass. crim, 28 sept. 2016, n°15-84.485).   Un préjudice Il est nécessaire de démontrer que la victime a subi un préjudice. La Cour de cassation a précisé que le préjudice est établi dès lors que les remises ou versements n’ont pas été librement consentis mais ont été extorqués par des moyens frauduleux (Cass. crim, 7 mars 1936).   2.La peine L’article 313-1 alinéa 2 du Code pénal prévoit que l’escroquerie est punie de 5 ans d’emprisonnement et de 375 000 euros d’amende.   III) L’extorsion 1.La définition L’extorsion est définie à l’article 312-1 du Code pénal « L’extorsion est le fait d’obtenir par violence, menace de violences ou contrainte soit une signature, un engagement ou une renonciation, soit la révélation d’un secret, soit la remise de fonds, de valeurs ou d’un bien quelconque ».   L’usage de violence, menace de violences ou contrainte Pour caractériser l’extorsion, l’agent doit avoir fait usage de violence, avoir menacé de violences ou avoir fait usage d’une contrainte. Cette dernière peut être physique ou morale.   Objet de l’extorsion Après avoir fait usage de l’un de ces procédés, l’auteur des faits doit avoir obtenu de la victime : Une signature Un engagement ou une renonciation La révélation d’un secret La remise de fonds, de valeur ou d’un bien quelconque   2.La peine L’article 312-1 du Code pénal dispose que l’extorsion est punie de sept ans d’emprisonnement et de 100 000 euros d’amende.