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Nécessité d’une information expresse ou non ? Cour de cassation, Chambre criminelle, 7 février 2017, 16-84.353 Les officiers de police judiciaire, sous l’autorité du procureur de la République, ont l’obligation de l’informer des motifs d’un placement en garde à vue afin que celle-ci soit valable. C’est ce qu’a rappelé la chambre criminelle de la Cour de cassation dans un arrêt du 25 juin 2013. La question était plus particulièrement de savoir si l’information donnée au procureur de la République devait être expresse ou si elle pouvait se déduire de la procédure. En l’espèce, deux individus étaient interpellés et placés en garde à vue après la mise en place de surveillances de véhicules, dans le cadre d’une enquête pour trafic de stupéfiants. L’officier de police judiciaire informait le procureur de la République que cette enquête avait abouti à l’interpellation et le placement en garde à vue des individus, sans précision quant à la qualification des faits notifiés. Le procureur de la République lui prescrivait de poursuivre l’enquête. La chambre de l’instruction, saisie d’une requête en nullité, jugeait qu’il se déduisait de ces éléments que le procureur était nécessairement informé des motifs du placement en garde à vue et qu’il opérait donc un contrôle effectif de la procédure et de cette mesure. La Cour de cassation jugeait au contraire, au visa des articles 62-2 et 63 alinéa 2 du Code de procédure pénale, qu’il ne peut se déduire de la procédure que le procureur de la République a connaissance des motifs d’un placement en garde à vue. Ces motifs doivent être expressément mentionnés dans un procès-verbal. Le défaut de cette information expresse fait nécessairement grief à la personne concernée, qui est donc en droit de déposer une requête en nullité. A retenir : Il faut donc rechercher si lors de l’avis à Parquet, une mention expresse des motifs de la garde à vue s’y trouve.
Sous-titre : L’usage de la visioconférence dans le cadre d’une expertise psychiatrique est interdit et fait nécessairement grief, justifiant l’annulation de l’expertise. Cass.crim., 22 novembre 2023, n°22-86.715   L’usage de la visioconférence dans le cadre de procédures judiciaires s’est étendu et concerne aujourd’hui de nombreux actes d’enquête. L’article 706-71 du Code de procédure pénale prévoit les actes d’enquête pouvant faire l’objet d’une visioconférence de manière limitative. Il s’agit notamment de l’interrogatoire ou de l’audition d’un prévenu ou mis en examen, d’une confrontation, la comparution du prévenu devant le Tribunal correctionnel, ou encore l’audition de témoins ou de parties civiles. Cet article prévoit également que l’audition d’experts peut avoir lieu par visioconférence. Cependant, cet article ne prévoit pas l’usage de la visioconférence dans le cadre de la réalisation de l’expertise. La question de cet usage dans ce cadre a été posée à la Cour de cassation.   En l’espèce, un individu a subi des violences et est décédé trois jours plus tard. Une information judiciaire a été ouverte et plusieurs suspects ont été mis en examen. Le Juge d’instruction avait ordonné la réalisation d’expertises psychiatriques des mis en examens, qui se sont déroulées en visioconférence. L’un des mis en examens a déposé une requête en annulation de son expertise, qui a été rejetée par la Chambre de l’instruction. Le mis en examen a dès lors formé un pourvoi en cassation, soulevant que l’article 706-71 du Code de procédure pénale ne prévoyait pas la réalisation d’expertises au moyen d’une visioconférence. Cette visioconférence était dès lors interdite et entrainait la nullité de l’expertise. Plus encore, le respect des règles de procédure était d’autant plus important que l’expertise est essentielle dans le cadre des droits de la défense. Enfin, le mis en examen soulevait que cette nullité n’avait aucun lien avec le fait que la défense n’avait émis aucune observation à la réception de la convocation mentionnant la visioconférence. La Cour de cassation a cassé l’arrêt de la Cour d’appel, au motif que l’article 706-71 du Code de procédure pénale prévoit la liste des actes de procédures pouvant faire l’objet d’une visioconférence. Elle déduit de cet article que l’usage de la visioconférence est interdit dans tout autre cas non prévu par la loi. Or, l’expertise psychiatrique ne fait pas partie des actes de procédure pouvant faire l’objet d’une visioconférence. La Cour de cassation juge dès lors que l’usage de la visioconférence est une cause de nullité de l’expertise, que cette nullité peut être soulevée par toute partie qui y a un intérêt, et que cette irrégularité fait nécessairement grief. Ainsi, en cas d’expertise réalisée en visioconférence, il convient d’envisager l’opportunité de déposer une requête en nullité sur le fondement de l’article 706-71 du Code de procédure pénale :   « Vu l’article 706-71 du code de procédure pénale : Selon le premier alinéa de ce texte, issu de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019, il peut être recouru au cours de la procédure pénale, aux fins d’une bonne administration de la justice, si le magistrat en charge de la procédure ou le président de la juridiction l’estime justifié, dans les cas et modalités prévus par cet article, à un moyen de télécommunication audiovisuelle. Il s’ensuit, d’une part, que l’usage d’un moyen de télécommunication audiovisuelle est limité aux cas prévus par le texte. D’autre part, cette disposition s’applique à tous les actes accomplis au cours de la procédure. Dès lors, le texte susvisé interdit le recours à un moyen de télécommunication audiovisuelle à l’occasion de l’examen de la personne mise en examen, du témoin assisté ou de la partie civile par les médecins et psychologues experts, auquel se réfère l’article 164, alinéa 3, du code de procédure pénale. Constitue une violation des règles relatives à l’établissement et à l’administration de la preuve en matière pénale la méconnaissance dudit texte, qui impose que l’examen d’une personne soit réalisé par l’expert, en sa présence, de sorte que toute partie qui y a intérêt a qualité pour invoquer la nullité tirée de la méconnaissance de ces dispositions. Une telle irrégularité fait nécessairement grief aux parties concernées. En écartant la demande d’annulation de l’expertise psychiatrique du demandeur, dont l’examen a été réalisé par visioconférence, la chambre de l’instruction a méconnu le texte susvisé. La cassation est, par conséquent, encourue».
Les conditions tenant à ce qu’un expert médical prenne part à une expertise toxicologique   Cour de cassation, chambre criminelle, 31 mai 2007, 07-80.928   Les examens scientifiques tels que les analyses toxicologiques requièrent l’intervention d’un expert pour être réalisés. L’article 60 du Code de procédure pénale prévoit que ces experts doivent : -être inscrits sur les listes d’experts des Cours d’appel OU -prêter serment par écrit d’apporter leur concours à la justice en leur honneur et en leur conscience.   Ces conditions d’intervention ont été rappelées par la Chambre criminelle de la Cour de cassation dans un arrêt du 31 mai 2007. La question était plus particulièrement de savoir si une pharmacienne pouvait intervenir sans prêter serment, alors même que la personne inscrite sur les listes des Cours d’appel était le service des urgences médico-judiciaires (UMJ) de l’établissement.   En l’espèce, la pharmacienne du laboratoire de toxicologie du service de pharmacie de l’Hôtel-Dieu a été requise pour réaliser une expertise toxicologique sur un individu placé en garde à vue. Une requête en nullité a été déposée devant la Chambre de l’instruction, selon laquelle seul le service des UMJ était inscrit sur les listes d’experts, de sorte que cette pharmacienne aurait dû prêter serment, ce qui n’a pas été fait. La Chambre de l’instruction a rejeté cet argumentaire au motif que l’Hôtel-Dieu était inscrit sur les listes en qualité de personne morale. Dès lors, la pharmacienne faisant partie de l’établissement hospitalier, elle n’avait pas à prêter serment. La Cour de cassation en a décidé autrement, jugeant que la pharmacienne exerçait dans un service distinct du service inscrit sur les listes d’experts, à savoir le service des UMJ. Elle aurait donc dû prêter serment conformément à l’article 60 du Code de procédure pénale. De sorte, que ces formalités n’ayant pas été respectées, la nullité était encourue.
Une audition libre est-elle nulle si la notification des droits a eu lieu après que le témoin aie reconnu les faits?   Cour de cassation, chambre criminelle, 15 décembre 2015, n°15-80.104   Le Code de procédure pénale prévoit la possibilité pour les enquêteurs d’entendre une personne en audition libre s’il existe des raisons plausibles de penser qu’elle a commis ou tenté de commettre une infraction. Si la découverte de ces raisons plausibles intervient lors d’une simple audition de témoin, il est fait obligation aux enquêteurs d’informer cette personne de ses droits issus de l’article 61-1 du Code de procédure pénale en cours d’audition, et notamment du droit de quitter à tout moment les locaux où elle est entendue. La question posée à la Cour de cassation a toutefois été celle de savoir si la notification de ces droits étaient obligatoires dans le cas où l’audition avait pris fin immédiatement après avoir découvert ces raisons plausibles de soupçonner le témoin. En l’espèce, le propriétaire d’un véhicule dont la vitesse excessive avait été constatée par cliché photographique était entendu en qualité de témoin. Au cours de l’audition, le propriétaire avait indiqué qu’il était possible qu’il soit l’utilisateur du véhicule au moment de l’infraction, et répondait « oui je n’ai pas trop le choix » à la question de savoir s’il reconnaissait les faits. Il était cité devant le Tribunal de Police pour excès de vitesse. Il soulevait la nullité de l’audition pour non-respect de l’obligation de lui notifier son droit de quitter les locaux dès lors que les agents avaient découvert qu’il avait pu commettre une infraction. La Cour d’appel reconnaissait que la notification de ses droits aurait dû être réalisée, mais constatait que l’audition avait pris fin dès la découverte de ces éléments, de sorte qu’il ne pouvait se prévaloir de la violation de ses droits. La Cour de cassation a cependant jugé que la notification de ces droits est obligatoire et que bien que l’audition ait pris fin après ces déclarations, le mis en cause avait été cité à comparaitre sur le fondement de cette audition. Dès lors, la notification aurait dû intervenir lors de l’audition, avant qu’elle ne prenne fin. L’audition libre doit ainsi être annulée, entrainant par voie de conséquence l’annulation des poursuites.
Les contours du secret de l’enquête et de l’instruction   L’article 11 du Code de procédure pénale dispose que « Sauf dans le cas où la loi en dispose autrement et sans préjudice des droits de la défense, la procédure au cours de l’enquête et de l’instruction est secrète. Toute personne qui concourt à cette procédure est tenue au secret professionnel dans les conditions et sous les peines prévues à l’article 434-7-2 du code pénal ».   Les personnes soumises au secret de l’enquête et de l’instruction Seules les personnes qui concourent à la procédure sont tenues au secret de l’enquête et de l’instruction. Peuvent notamment être cités les magistrats, inspecteurs de la sûreté, agents de police, experts, et les agents ou fonctionnaires auxquels les lois spéciales mentionnées à l’article 28 attribuent des pouvoirs de police judiciaire. En revanche, la partie civile, le mis en examen, mais également l’avocat ne sont pas soumis au secret de l’instruction (l’avocat est néanmoins tenu au secret professionnel).   La limite L’article 11 alinéa 3 du Code de procédure pénale prévoit que pour éviter la propagation d’informations parcellaires ou inexactes ou pour mettre fin à un trouble à l’ordre public ou lorsque tout autre impératif d’intérêt public le justifie, le procureur de la République peut, d’office et à la demande de la juridiction d’instruction ou des parties, directement ou par l’intermédiaire d’un officier de police judiciaire agissant avec son accord et sous son contrôle, rendre publics des éléments objectifs tirés de la procédure ne comportant aucune appréciation sur le bien-fondé des charges retenues contre les personnes mises en cause.   Les conséquences de la violation du secret de l’enquête et de l’instruction La violation du secret de l’enquête et de l’instruction entraîne la nullité de la procédure si la violation a été non pas postérieure mais concomitante à l’accomplissement d’un acte de la procédure et s’il en est résulté une atteinte aux intérêts d’une partie (Cass. crim, 25 janv. 1996, n° 95-85.560 ; Cass. crim, 11 juillet 2017, n° 17-80.313). La Cour de cassation a récemment précisé que la violation du secret cause nécessairement atteinte aux intérêts de la personne qu’elle concerne (Cass. crim, 10 janv. 2017, n° 16-84.740).   En outre, la violation du secret est une infraction pénale punie de 3 ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende (article 434-7-2 du Code pénal).
Modalités générales et différentes catégories de nullité en droit pénalLa nullité, de façon générale est la sanction de l’invalidité d’un acte juridique, ou d’une procédure, soit que la cause de la nullité réside dans l’absence de l’utilisation d’une forme précise qui est légalement imposée, soit qu’elle résulte de l’absence d’un élément indispensable à son efficacité.En matière pénale, la nullité sert à sanctionner tout manquement aux règles procédurales susceptible de compromettre l’équilibre des droits des parties. Institué par le législateur et la pratique judiciaire, la théorie des nullités vise donc à inciter les divers agents de la procédure à un meilleur respect des règles. L’article préliminaire du code de procédure pénale dispose en effet : « La procédure pénale doit être équitable et contradictoire et préserver l’équilibre des droits des parties […] » ⇒ Quels sont les différents types de nullité ? Le Code de procédure pénale distingue plusieurs catégories de nullité : • Les nullités textuelles et substantielles • Les nullités d’ordre public et d’ordre privé Les nullités textuelles Les nullités textuelles sont celles dont les textes prévoient la nullité de la violation des dispositions expressément consacrées. Ces dispositions prévues par le Code de procédure pénale peuvent aller de la mise en examen d’un suspect prévue par l’article 80-1 dudit code, à la possibilité pour un suspect de formuler des observations, droit prévu par l’article 77-2 dudit code. Les nullités substantielles En l’absence de précision textuelle, la jurisprudence peut considérer que la violation de cette disposition est susceptible de porter atteinte aux droits fondamentaux. Elle a par exemple considéré comme une nullité substantielle, le défaut d’information au procureur de la République, du placement d’un suspect en garde à vue. (Cass, crim, 10 mai 2001, n° 01-81.441) Les nullités d’ordre public Les nullités d’ordre public sont celles qui visent à sanctionner le manquement aux règles impératives au fonctionnement du système judiciaire. Ces nullités ont la particularité de ne nécessiter aucune démonstration d’un « grief » c’est-à-dire la violation automatique d’un droit fondamental. La jurisprudence a ainsi considéré comme relevant de la nullité d’ordre public :– les règles d’organisation et de composition des juridictions (Cass, crim, 10 janvier 1996 n°95-81591) ou encore les règles de compétence des juridictions (Cass, crim, 22 avril 1986 n°84-95.759) Les nullités d’ordre privé Les nullités d’ordre privé sont celles qui visent à sanctionner les violations qui portent nécessairement atteinte aux intérêts de la personne concernée.Ces nullités contrairement aux nullités d’ordre public, nécessitent la démonstration d’un grief La jurisprudence a ainsi considéré comme relevant de la nullité d’ordre privé : – l’absence de notification des droits à la personne placée en garde à vue (Cass, crim, 30 avril 1996, n°95-82.217) ou encore l’absence de notification au gardé à vue de la prolongation de la mesure (Cass, crim, 30 janvier 2001 n°00-87.155)– le non-respect du droit pour la personne gardée à vue de s’entretenir avec un avocat (Cass,crim, 9 mai 1994, n°94-80.802) – le non-respect de la règle de loyauté des enregistrements s’imposant à un officier de police judiciaire (Cass, crim 27 février 1996 n°95-81.366) ⇒ L’opportunité de la nullité Qui peut agir en nullité ? L’article 171 du Code de procédure pénale dispose : « Il y a nullité lorsque la méconnaissance d’une formalité substantielle prévue par une disposition du présent code ou toute autre disposition de procédure pénale a porté atteinte aux intérêts de la partie qu’elle concerne »Ainsi, la partie qui désire agir en nullité doit démontrer que la méconnaissance d’une règle de procédure a eu pour conséquence de porter atteinte à ses droits. La recevabilité de la requête en nullité L’article 170 du code de procédure pénal dispose : « En toute matière, la chambre de l’instruction peut, au cours de l’information, être saisie aux fins d’annulation d’un acte ou d’une pièce de la procédure par le juge d’instruction, par le procureur de la République, par les parties ou par le témoin assisté. » La chambre de l’instruction est donc la formation de jugement en charge de la recevabilité et de l’examen d’une requête en nullité. Quand la nullité peut-elle être soulevée ? L’article 385 alinéa 6 du Code de procédure pénale dispose que : « Les exceptions de nullité doivent être présentées avant toute défense au fond. » ⇒ Quelle est l’étendue de la nullité ? La jurisprudence a considéré que « l’irrégularité d’un acte de procédure n’entraîne l’annulation d’autres actes postérieurs qu’à la condition que ces derniers aient pour support nécessaire l’acte annulé. » (Cass, crim, 10 décembre 2003 n°03-83.344)Ainsi, « l’annulation d’un acte emporte l’annulation de tous les actes qui en dérivent. » (Cass, crim, 4 janvier 2005, n°04-84.876)
Le Conseil constitutionnel a jugé que l’absence totale de possibilité de soulever des nullités après l’ordonnance de renvoi était contraire à la Constitution.   Décision n°2023-1062 QPC du 28 septembre 2023   La décision du Conseil constitutionnel : une nouveauté dans la procédure pénale Avant cette décision du 28 septembre 2023, le Code de procédure pénale prévoyait un système de purge des nullités en son article 385 : « Le tribunal correctionnel a qualité pour constater les nullités des procédures qui lui sont soumises sauf lorsqu’il est saisi par le renvoi ordonné par le juge d’instruction ou la chambre de l’instruction ». Concrètement, le mis en examen avait l’opportunité pendant tout le temps de la procédure de soulever des nullités devant la Chambre de l’instruction près la Cour d’appel selon l’article 170 du Code de procédure pénale. Il appartenait donc au mis en examen d’être diligent pendant le temps de la procédure d’instruction. Quid alors des nullités une fois l’ordonnance de renvoi rendue ? Le droit antérieur ne prévoyait aucune exception : à compter du renvoi de l’affaire par le Juge d’instruction devant une juridiction de jugement, celle-ci ne pouvait connaitre des nullités de procédure. Cette législation était particulièrement injuste envers les individus qui prenaient connaissance d’un vice de procédure après renvoi de l’affaire et qui n’avaient, de fait, pas pu saisir la chambre de l’instruction durant le temps de la procédure. C’est dans ces conditions qu’une Question prioritaire de constitutionnalité était posée au Conseil, portant sur cette phrase : « sauf lorsqu’il est saisi par le renvoi ordonné par le juge d’instruction ou la chambre de l’instruction ». Le Conseil constitutionnel jugeait cette disposition contraire à la Constitution. En effet, la Constitution prévoit le droit à un recours effectif et la garantie des droits de la défense, ce qui n’est pas compatible avec une purge pure et simple des nullités à compter de la clôture de l’instruction. Il convient de prévoir des exceptions dans les cas où « le prévenu n’aurait pu avoir connaissance de l’irrégularité éventuelle d’un acte ou d’un élément de la procédure que postérieurement à la clôture de l’instruction ». Le Conseil constitutionnel jugeait ainsi que cette disposition devait être abrogée, et laissait une année au législateur pour modifier ses textes.   L’article 385 du Code de procédure pénale modifié L’article 385 du Code de procédure pénale a vu son premier alinéa remplacé par la loi n°2024-1061 du 26 novembre 2024 visant à sécuriser le mécanisme de purge des nullités. Le premier alinéa prévoit désormais que : « Le tribunal correctionnel a qualité pour constater les nullités des procédures qui lui sont soumises. Lorsqu’il est saisi par le renvoi ordonné par le juge d’instruction ou la chambre de l’instruction, il ne peut connaître que de moyens de nullité qui n’ont pu être connus par la partie qui les soulève avant la clôture de l’instruction ou avant l’expiration des délais d’un mois ou de trois mois prévus à l’article 175 ». Désormais, les prévenus pourront donc soulever des nullités devant la juridiction de jugement, à la condition de démontrer qu’ils n’ont pu connaitre ces nullités dans le temps de la procédure d’instruction. Si le Code de procédure pénale ne donne aucune indication sur les éléments de preuve qui pourraient être soulevés, la jurisprudence offrira prochainement des exemples concrets ouvrant les droits de la défense.
Les actes de procédure sont l’ensemble des actes réalisés durant l’enquête de police, ou lors de l’instruction. L’idée du législateur, est que la procédure pénale doit être exempt de tout vices, elle doit respecter des règles de fond et de forme ce qui constituent une garantie pour les justiciables. Ces actes font alors l’objet d’un contrôle, pour vérifier s’ils ne sont pas entachés d’une nullité. Ce contrôle peut être effectuer par la Chambre de l’instruction. La théorie des nullités visent à inciter les divers agents de la procédure à un meilleur respect des règles. L’article préliminaire du Code de procédure pénal dispose en effet : « La procédure pénale doit être équitable et contradictoire et préserver l’équilibre des droits des parties […] » Nous allons essayer de savoir quels sont les effets de la nullité d’un acte de procédure.   I/ Le principe : la suppression des actes de procédure nuls En vertu de l’article 174 du code de procédure pénal : « […] La chambre de l’instruction décide si l’annulation doit être limitée à tout ou partie des actes ou pièces de la procédure viciée ou s’étendre à tout ou partie de la procédure ultérieure et procède comme il est dit au troisième alinéa de l’article 206. Les actes ou pièces annulés sont retirés du dossier d’information et classés au greffe de la cour d’appel. Les actes ou pièces de la procédure partiellement annulés sont cancellés après qu’a été établie une copie certifiée conforme à l’original, qui est classée au greffe de la cour d’appel. Il est interdit de tirer des actes et des pièces ou parties d’actes ou de pièces annulés aucun renseignement contre les parties, à peine de poursuites disciplinaires pour les avocats et les magistrats. » Cet article nous indique que lorsqu’un acte ou une pièce de la procédure est frappé de nullité, ces derniers sont retirés du dossier. S’il y a annulation seulement partielle de l’acte ou de la pièce, la partie concernée est barrer. Il est interdit de tirer des actes et des pièces ou parties d’actes ou de pièces annulés aucun renseignement contre les parties. L’annulation d’un acte ou d’une pièce peut s’étendre à d’autres actes ou pièce, lorsque l’acte qui est annulé n’est pas le support nécessaire des actes ultérieurs.   II/ L’exception : la possibilité de se fonder sur un acte annuler Cependant, un arrêt de la Chambre criminelle est venu troubler l’utilisation de l’article 174.   Cass. Crim., 19 octobre 2021, n°20-82.172 Un journaliste effectuait une enquête sur la possible corruption d’un haut fonctionnaire, par ces révélations le Procureur de la République, prend un réquisitoire et demande à l’opérateur téléphonique d’obtenir la liste des appels téléphoniques du journaliste. Cela a permis de découvrir la personne susceptible d’avoir corrompu le fonctionnaire de police. Le mis en examen pour corruption a été soumis au contrôle de la Chambre de l’instruction visant à l’annulation des réquisitions téléphonique. La Chambre de l’instruction a fait droit à la demande par un arrêt du 24 février 2012. Le journaliste ayant vent de cette affaire porte plainte et se constitue partie civile du chef de collecte de données à caractère personnel par moyen frauduleux, déloyal, ou illicite. Le juge d’instruction a prononcé un non-lieu, mais le journaliste décide de faire appel de cette ordonnance devant la Chambre de l’instruction. Dans son arrêt du 29 novembre 2019, la Chambre de l’instruction confirme l’ordonnance de non-lieu, en se fondant sur l’article 174, en considérant que l’appel repose sur des réquisitions qui ont été annulées. Ce qui signifie qu’ils n’ont plus d’existence et ne peuvent donner lieu à des poursuites pour le délit de collecte de données à caractère personnel. Le requérant forme alors un pourvoi en cassation. La chambre criminelle ne va pas aller dans le sens de la chambre de l’instruction et casse et annule l’arrêt rendu le 29 novembre 20219. La Cour de cassation a jugé qu’il est possible de se fonder sur des actes annulés, en se fondant sur l’article 6-1 du code de procédure pénale. Le principe de l’article 174, s’est de considérer que lorsqu’un acte de procédure est annulé, on le reitre du dossier, ce qui signifie qu’il n’existe plus aux yeux de la justice. Le dernier alinéa de cet article dispose que la pièce annulée ne peut pas être utiliser contre le bénéficiaire de cette nullité. Néanmoins cet article doit s’articuler avec l’article 6-1 du code de procédure pénale qui prévoit la possibilité d’exercer des poursuites dans une procédure future sur une infraction qui implique la violation d’une règle de procédure à condition que le caractère illégal a été constaté par une décision définitive. En l’espèce, le journaliste soulève le délit de collecte de données à caractère personnel par moyen frauduleux, déloyal, ou illicite, en se fondant sur le réquisitoire annulé par la chambre de l’instruction. L’annulation de ce réquisitoire, lui a bénéficié autant qu’au requérant. Sa constitution de partie civile était possible, puisqu’elle ne portait pas atteinte aux droits du requérant à la nullité et qu’il s’agit d’une procédure distincte. On peut en conclure que L’utilisation d’une pièce annulée dans une procédure subséquente est possible lorsque cela ne porte pas atteinte aux droits du requérant à la nullité ayant bénéficié de l’annulation d’actes dès lors, l’interdiction découlant de l’article 174 du code de procédure pénale de tirer des actes annulés ne peut lui être opposée.  
Le Code de procédure pénale prévoit que dans certaines circonstances, l’auteur d’une infraction peut faire l’objet d’un déferrement. Cette mesure consiste à présenter cette personne devant le procureur de la République ou le juge d’instruction à l’issue de sa garde à vue. Le déferrement doit respecter certaines conditions prévues par le législateur.   Tout d’abord, selon l’article 803-2 du Code de procédure pénale, la personne déférée doit comparaître le jour même de la levée de sa garde à vue ou de sa retenue devant le magistrat ou, en cas d’ouverture d’une information, devant le juge d’instruction saisi de la procédure.   Néanmoins, l’article 803-3 du Code de procédure pénale précise qu’en cas de nécessité « la personne peut comparaître le jour suivant et peut être retenue à cette fin dans des locaux de la juridiction spécialement aménagés, à la condition que cette comparution intervienne au plus tard dans un délai de vingt heures à compter de l’heure à laquelle la garde à vue ou la retenue a été levée ».    Peut-on contester l’existence d’une nécessité justifiant une comparution dans un délai de 20h ?   La personne déférée peut agir en nullité de la mesure si elle estime qu’il n’existait aucune nécessité justifiant une comparution dans un délai de 20h. Par un arrêt du 13 juin 2018, la Cour de cassation a précisé qu’il incombe à la juridiction, saisie d’une requête en nullité de la rétention, de s’assurer de l’existence des circonstances ou contraintes matérielles ayant justifié la mise en œuvre de cette mesure (Cass. crim, 13 juin 2018, n° 17-85.940).    Peut-on agir en nullité en cas de non-respect du délai de 20h ?   A l’issue de ce délai de 20 h, si la personne déférée n’a toujours pas fait l’objet d’une comparution devant le juge et qu’elle n’a pas été remise en liberté, elle peut agir en nullité de la mesure. La nullité entraînera, de manière subséquente, la nullité du procès-verbal valant saisine du tribunal étant donné qu’il a pour support nécessaire la rétention du prévenu entaché d’illégalité. C’est ce qu’a affirmé la Cour de cassation dans un arrêt du 6 décembre 2005 (Cass. crim, 6 déc. 2005, n°05-82.450).   En l’espèce, un individu a été placé en garde à vue le 9 avril 2004 à 21h10. Cette dernière a été levée le 10 avril 2004 à 19h30. L’individu a été retenu dans les locaux de la juridiction prévus à cet effet et présenté le 11 avril au procureur de la République qui l’a invité, par procès-verbal, à comparaître devant le tribunal à l’audience du 13 avril. L’avocat du prévenu a invoqué la nullité de la mesure pour non-respect du délai légal de 20h.   La Cour d’appel, confirmé par la Cour de cassation a fait droit à sa demande en affirmant qu’il était impossible de s’assurer de la durée de la rétention, faute de connaître l’heure à laquelle le prévenu a été présenté devant le procureur de la République.   Quels sont les droits de la personne déférée ?   L’article 803-3 alinéa 4 dresse une liste des droits de la personne déférée :   La personne déférée doit avoir la possibilité de s’alimenter A sa demande, de faire prévenir par téléphone une des personnes visées à l’article 63-2 du Code de procédure pénale (ex : une personne avec laquelle elle vit habituellement, un parent, son employeur…) Être examinée par un médecin S’entretenir à tout moment avec son avocat   Un registre spécial doit être tenu afin de mentionner l’identité des personnes retenues, leurs heures d’arrivée et de conduite devant le magistrat ainsi que l’application des dispositions relatives au droit de la personne déférée.   Ce registre est tenu dans le local où la personne est retenue et il est surveillé par des fonctionnaires de la police nationale ou des militaires de la gendarmerie nationale sous le contrôle du procureur de la République.   Par un arrêt du 9 novembre 2021, la Cour de cassation a rappelé que ce registre permet d’effectuer des vérifications lorsqu’est alléguée la violation des garanties prévues par l’article 803-3 (Cass. crim, 9 nov. 2021, n° 21-82.606).  
La nécessité d’indices graves et concordants pour justifier d’une mise en examen L’article 79 du Code de procédure pénale prévoit qu’une information judiciaire doit obligatoirement être diligentée en matière de crime, elle est facultative en matière de délit et exceptionnelle en matière de contravention. Dans le cadre de cette information judiciaire, la personne mise en cause peut être placée sous le statut de mis en examen. Depuis la loi n°2000-516 du 15 juin 2000, l’article 80-1 du Code de procédure pénale impose que « le juge d’instruction ne peut mettre en examen que les personnes à l’encontre desquelles il existe des indices graves ou concordants rendant vraisemblable qu’elles aient pu participer, comme auteur ou comme complice, à la commission des infractions dont il est saisi ». Que signifie « indices graves ou concordants » ? La doctrine a eu l’occasion de préciser ce qu’il faut entendre par indices graves ou concordants : « plusieurs, soit au minimum deux indices accusateurs qui, pour donner une vraisemblance objective à la participation de l’intéressé aux faits reprochés, doivent être soit graves c’est-à-dire présenter une consistance telles qu’ils apportent en eux-mêmes la vraisemblance exigée, soit concordants, la vraisemblance résultant de leur recoupement alors même qu’ils ne présenteraient pas en eux-mêmes une consistante suffisante » (S. Guinchard et J.Buisson, Procédure pénale, 4e éd., LexisNexis, n°1746). Ainsi, selon S.Guichard et J.Buisson, « la simple accusation, non objective d’une victime ou d’un témoin entendus par le juge ou un OPJ en exécution d’une commission rogatoire ne suffit pas, à défaut d’un autre élément venant la corroborer, pour mettre en examen la personne accusée ». Afin de mieux cerner cette notion, la jurisprudence doit être étudiée. En effet, le Code de procédure pénal ne liste pas ces indices. Constituent des indices graves ou concordants : CA Montpellier, ch. instru., 19 févr. 2015, n° 2014/01144 (attouchements sexuels) : Des témoignages ayant constaté l’état de la victime, Le rapport du médecin qui l’a examiné, La découverte sur les lieux des faits de revues à caractère pornographique zoophile appartenant au masseur soupçonné, qui témoignent d’une approche singulière de la sexualité. CA Montpellier, 27 avril 2017, 17/00237 (injure et diffamation) : Les déclarations du mis en examen confirmant qu’il a tenu certains des propos figurant dans les pièces versées par les parties civiles.   CA Montpellier, 30 juin 2016, n°16/00390 (tentative d’assassinat) : Les déclarations accusatrices d’un autre mis en examen, L’exploitation de la téléphonie démontrant que le mis en examen a été en contact avec les autres mis en examen le jour des faits, et que son téléphone a déclenché des relais couvrant le lieu des faits sur la même période de temps, Le rapprochement avec une autre procédure décrivant un mode opératoire similaire, utilisé par les mis en examen.   CA Montpellier 06 novembre 2014, 14/00550 (complicité de trafic de stupéfiants) : La nature des relations liant l’auteur principal et le mis en examen, Des sachets similaires à ceux habituellement utilisés pour le conditionnement de cocaïne ont été retrouvés chez l’auteur principal de l’infraction, Le mis en examen a régulièrement accompagné l’auteur principal sur différents sites où ont eu lieu les transactions.   CA Aix-en-Provence, 4 avril 2006, CT0097 (recel de vol de véhicule) : Le mis en examen avait connaissance de l’achat des véhicules par l’intermédiaire de ses parents (auteurs de l’infraction principale), Il connaissait leur passé délinquant, Le mis en examen ne pouvait ignorer que le véhicule évalué par sa mère 150 000 francs avait été payé 20 000 francs puis revendu 98 000 francs aux parties civiles, Il ne pouvait ignorer que l’annonce de la revente avait été postée au nom de sa mère, Le mis en examen avait exigé le virement immédiat du produit de la vente.   Crim 29 juin 2021 n°21-82.232 (trafic de stupéfiants et association de malfaiteurs) : L’exploitation des sonorisations d’un suspect a mis en cause le mis en examen en le citant nommément, Le suspect a expliqué le rôle du mis en examen dans la commission des faits, Le carnet saisi au domicile du mis en examen a permis de découvrir les noms d’intermédiaires cités par le suspect.   Crim 08 juin 2021, n°21-81.839 (assassinat) : Des témoignages faisant état de relations compliquées entre les deux époux, Un enregistrement dans lequel le mis en examen menace sa femme de défenestration, Des déclarations des ex-compagnes du mis en examen évoquant sa violence envers elles, Des déclarations des parents de la victime décrivant sa violence envers cette dernière, Les déclarations du mis en examen admettant avoir giflé sa femme.   Crim 20 juin 2018, 14-80.543 (complicité d’enlèvement et de séquestration) : Le fils de la victime mettait formellement en cause l’organisation dont le mis en examen était le chef, Le mis en examen reconnaissait connaître le fils de la victime, Il l’aurait connu par l’intermédiaire d’un certain « Karim », prénom apparaissant à deux reprises au cours de la procédure, Lors de son interpellation, le mis en examen avait un ordinateur portable dans lequel était retrouvé une documentation relative aux faits.   Crim 05 juin 2018, n°17-87.524 (complicité de harcèlement moral au préjudice de salariés) : La priorité du mis en examen est de réussir un nouveau projet ayant pour conséquence le départ d’un nombre important de salariés ; cette volonté est corroborée par un document trouvé, La participation du mis en examen à 2 synthèses de tables rondes, l’une d’elles évoquant la nécessité d’organiser 4 500 départs internes chaque année et faisant état de stratégies visant à brusquer les salariés pour favoriser la mobilité externe forcée.   Crim 20 décembre 2017 n°17-81.758 (dénonciation calomnieuse) : Le mis en examen a déposé plainte contre la victime pour des violences volontaires par conjoint avec ITT inférieur à 8 jours, ayant abouti à une décision de relaxe, Il a dénoncé à la brigade des mineurs des faits de détention d’images à caractère pédopornographique, des faits d’agressions sexuelles et viols sur mineurs, classés sans suite, Le mis en examen a dénoncé des faits d’agressions sexuelles et viols sur mineurs de 15 ans, Il a dénoncé des faits d’usurpation de titre ayant conduit à un classement sans suite pour « absence d’infraction ».   Assemblée plénière 10 novembre 2017 n°17-82.028 (chantage et extorsion de fonds) : Le mis en examen était en possession de 2 enveloppes contenant chacune 40.000 euros en espèce et des exemplaires signés par les trois intéressés de l’engagement de renonciation à la publication du livre litigieux.   Crim 02 novembre 2017 n°16-87.260 (infraction à la législation sur les stupéfiants) : L’un des principaux mis en cause rendait fréquemment visite au mis en examen selon un mode opératoire répétitif, vraisemblablement lié à son trafic, Une somme de 15.000 euros en espèce a été découverte chez le mis en examen, Ce dernier a déclaré conserver cette somme pour quelqu’un dont il refusait de fournir l’identité, Le mis en examen n’a pas pu fournir d’explication sur un document découvert dans une enveloppe recensant des données évocatrices d’une comptabilité, Il a admis avoir été en contact avec l’un des principaux mis en cause pour des échanges de cannabis.   Crim 27 juillet 2016 n°16-83.024 (violences) : Le mis en examen était décrit par les témoins, Il se trouvait avec la victime, avec qui il avait un différend lié à des salaires impayés pour des travaux non déclarés, Les blessures supportées par la victime résultent, selon les constatations médicales, de l’utilisation d’une arme, du type de celle décrite par la victime, Les blessures supportées par le mis en examen pouvaient résulter de l’utilisation d’un objet tranchant.   Crim 19 janvier 2015, n°15-81.038 (escroquerie en bande organisée) : L’ensemble des investigations réalisées par le juge d’instruction, L’audition du mis en examen au cours de sa garde à vue.   Cass. crim 08 juillet 2015, n°15-81.192 (viol et administration de substances nuisibles) : Les aveux du mis en examen devant les enquêteurs, La concordance des déclarations de deux plaignantes, Les nombreuses similitudes relevées dans le mode opératoire de leur agresseur, La désignation formelle par les victimes, car elles le connaissaient de longue date, Le témoignage d’une partie civile qui a déclaré avoir constaté l’état second dans lequel s’était trouvée sa mère le soir des faits alors qu’ils dînaient avec le mis en examen, Le témoignage concernant les confidences d’une victime, Le résultat des expertises toxicologiques réalisées sur les victimes révélant l’administration de zolpidem, Les informations transmises par la caisse primaire d’assurance-maladie révélant que ce produit avait été prescrit au mis en examen à cinq reprises en deux ans.   Cass. crim, 19 mai 2015, n°14-88.306 (viols et agressions sexuelles aggravées) : Les déclarations de la plaignante, Les témoignages de ses parents et de ses frères.   Cass crim. 18 mars 2015 n°14-86. 680 (violation du secret professionnel et du secret de l’instruction) : Le mis en examen a produit dans une instance civile des pièces issues d’une instruction pénale en cours, sans y avoir été autorisé, ni même avoir sollicité une telle autorisation.   Cass. Crim. 25 septembre 2019 n°17-84.515 (blanchiment en bande organisée, opérations de placement, de dissimulation, ou de conversion du produit d’un crime ou d’un délit, organisation internationale pour transférer et blanchir des fonds) : L’existence de comptes bancaires détenus à l’étranger démontrant des transactions, L’interpellation du mis en examen lors d’un transfert de fonds entre banques, Les actes d’instruction réalisés au Brésil, démontrant des faits de corruption, de détournement de fonds publics, de faux, et d’association de malfaiteurs.   Cass. Crim. 5 décembre 2018, n°17-86.122 (faux et usage de faux, escroquerie) : L’existence de courriels démontrant que la mise en examen avait connaissance de l’illégalité de son arbitrage, Ces courriels démontraient également qu’elle avait connaissance de l’interdiction des changements de dates qu’elle apposait sur certains documents, L’étendue de la période concernée, La multiplication de ces courriels, Le ton employé portant instructions, La masse des opérations concernées.   Cass. Crim., 21 octobre 2015, n°15-81.032 (association de malfaiteurs en vue de commettre des dégradations punies d’au moins cinq ans d’emprisonnement, dégradations de biens appartenant au service public, pénétration dans une partie de voie ferrée non ouverte au public) : L’existence d’une vidéo YouTube et de photos et documents sur YouTube et Twitter mettant en scène une personne commettant les faits cités, et participant à l’organisation de ceux-ci, La reconnaissance par la mise en cause d’avoir déjà commis des dégradations sous l’identité de la personne visible dans ces fichiers, Une perquisition au domicile de la mise en cause, laquelle a permis de découvrir des bombes de peinture, des tee-shirts et stickers à l’effigie du groupe organisant les faits.   Cass. Assemblée Plénière, 12 mai 2023, n°22-80.057 (torture, crimes contre l’humanité et complicité de ces crimes) : Des actes passifs de complicité dans le cadre de faits de crimes contre l’humanité peuvent constituer des indices graves ou concordants : Le mis en cause s’était affecté volontairement au service militaire du régime syrien, et avait participé à la répression des civils, Il avait connaissance du nombre de morts causés par les sections qu’il avait rejoint volontairement, et que ces sections étaient armées, Il avait connaissance de leur but et de leurs moyens, et avait expliqué que « son travail était d’arrêter les manifestants et de les frapper avec une matraque», Il avait été félicité par ses supérieurs.   Cass. Crim., 24 mai 2018, n°18-81.202 (infractions à la législation sur les stupéfiants, association de malfaiteurs, infractions à la législation sur les armes et détention de faux documents administratifs) : Les conclusions des surveillances physiques, L’existence d’objets découverts lors de la perquisition au domicile du mis en examen, confirmant les faits : produits stupéfiants, sommes en numéraire, compteuse de billets, feuilles de compte, armes et munitions, L’interception des communications de la ligne téléphonique.   Cass. Crim., 11 décembre 2018, n°18-82.854 (tromperie et pratique commerciale trompeuse, travail dissimulé, complicité d’abus de biens sociaux et recel) : La saisie de documents de comptes-rendus et organigramme, démontrant que le mis en examen était haut placé dans la hiérarchie, Des contrats de scolarité signés par lui pour recruter des élèves, L’implication du mis en examen dans des paiements, La désignation des fonctions par le bulletin de paie, Le conjoint était au courant des pratiques dissimulatrices de l’organisation.   Cass. Crim., 20 décembre 2017, n°17-84.574 (corruption passive et blanchiment aggravé) : Les renseignements financiers contenus dans une note, La mise en place d’un avocat en tant que conseiller juridique personnel alors même que l’organisation internationale comptait un service juridique, Cet avocat se serait procuré la liste d’athlètes russes suspectés de dopage, se serait rendu en Russie, où il aurait tenté de retarder les sanctions liées au dopage en échange de sommes, alors que de son côté, le mis en examen aurait affirmé qu’un accord avait été trouvé pour que la Russie ne poursuive pas les athlètes accusés de dopage, Une somme d’argent a été versée sur le compte de l’avocat par deux fédérations sportives, Les deux fils du mis en examen avaient des positions de pouvoir dans ces deux fédérations internationales, L’existence d’un courrier prouvant qu’un des fils était impliqué dans des négociations, Deux des mis en cause ont confirmé qu’il existait un accord tendant à retarder les sanctions des athlètes dopés.   Cass. Crim., 26 avril 2017, n°17-80.979 (association de malfaiteurs, détention et transport de substances ou produits incendiaires ou explosifs en bande organisée, infraction à la législation sur les armes, détention d’arme malgré interdiction et recel) : L’interpellation en flagrant délit, La présence d’une cagoule sur le mis en examen, La présence d’armes et de bombes artisanales dans son véhicule (volé) et à son domicile, Son rythme de vie démontrant une volonté de se dissimuler.   Cass. Crim., 12 juillet 2016, n°16-82.692 (participation à un groupement ou entente terroriste) : Ils étaient armés, Ils agissaient sous la bannière de l’organisation, L’un d’eux a été photographié tenant une tête décapitée.   Assemblée plénière, 23 novembre 2007, n°05-17.975, n°06-10.039 (association de malfaiteurs, blanchiment en bande organisée) : L’utilisation de serveurs localisés en France, Des échanges interceptés sur des téléphones ayant une messagerie cryptée, La position hiérarchique très élevée du mis en examen, lui permettant d’effectuer les opérations litigieuses, L’identification du mis en examen comme collectionneur de liquidités, La présence de la compagne du mis en examen pour échanger une somme en bitcoins auprès d’un acheteur, Le versement de sommes suspectes sur le compte du mis en examen.   Cass. Crim., 13 avril 2005, n°05-80.668 (homicide involontaire) : Le rapport d’expertise judiciaire constatant des problèmes dans la prise en charge de la victime, Le rapport de docteurs constatant des « dysfonctionnements dans l’environnement opératoire», Le rapport d’expertise médicale constatant que la septicémie était une cause possible de décès (alors qu’une infection bactérienne, selon un autre rapport, aurait été la cause), Le rapport collectif et le rapport de témoins.   Cass. Crim., 22 novembre 2011, n°11-84.314 (viols incestueux et agressions sexuelles incestueuses aggravées) : Les déclarations de l’enfant, qui à elles seules ne caractérisent pas l’infraction, Les résultats d’une expertise gynécologique concluant à une compatibilité de l’hymen avec une pénétration vaginale.   Cass. Crim., 2 mars 2004, n°03-87.667 (infraction à la législation sur les stupéfiants) : La découverte d’une forte quantité de cocaïne dans le domicile du mis en examen, La découverte dans son domicile de caféine, d’argent en liquide, de références téléphoniques, de téléphones portables et de puces électroniques.   En revanche, ne constituent pas des indices graves ou concordants : Cass. crim 16 mars 2021, n°20-87.092 et Cass.crim 01 juin 2021 n°21-81.837 : La seule existence de raisons plausibles de soupçonner que la personne a commis les infractions reprochées ne permet pas de déduire l’existence d’indices graves ou concordants de sa participation à ces faits.   Cass. crim, 28 juin 2016, n° 15-86.946 (abandon matériel ou moral de mineurs et homicide involontaire) : Rien ne permettait de penser que le père aurait pu se réveiller plus tôt, s’il n’avait pas été alcoolisé, et rien ne permettait d’affirmer qu’une personne, dans un état normal, endormie dans son premier sommeil dans une chambre dont la porte était fermée, aurait réalisé plus tôt qu’un incendie s’était déclaré dans une chambre également fermée, située de l’autre côté du couloir.   Cass. crim 1er octobre 2003, n°03-82.909 (homicide involontaire) : Il ne pouvait être prouvé que la maladie des victimes trouvait son origine dans la consommation de viande servie dans les restaurants soupçonnés. D’autres sources alimentaires des victimes pouvaient en être à l’origine.   Cass. crim 14 avril 2015, n°14-85.335 et Cass. crim 11 décembre 2018 n°17-85.871 : (homicides et blessures involontaire, affaire de l’amiante) : Aucune négligence des prévenus n’a pu être démontrée. Ces derniers ne pouvaient, compte tenu des données scientifiques de l’époque, mesurer le risque d’une particulière gravité auquel ils exposaient les victimes.   Cass. crim., 19 juin 2019, n°18-85.533 (agression, violences commises avec usage d’une arme par destination, et menaces de mort) : La location prolongée de la voiture, le litige qui opposait les deux parties, et la présence du prévenu sur le lieu des faits le jour des faits ne constituent pas des indices suffisants pour le mettre en examen.   Cass. Crim., 27 novembre 2018, n°18-83.009 (enregistrement ou conservation des données à caractère personnel sensibles sans l’accord de l’intéressé) : La simple consultation de données relatives aux confessions des élèves dans sa commune, afin de parler de ces statistiques à la télévision, ne suffit pas pour incriminer un maire des chefs susvisés.   Cass. Crim., 13 septembre 2022, n°22-83.895 (agression sexuelle) : A l’occasion d’un bain naturiste, le mis en cause nu aurait touché l’entrejambe de la victime, également nue, avec un glaçon, et se collait à lui, avec le sexe en érection, sans le pénétrer. La victime, qui avait déjà refusé les attouchements, a dû se débattre pour s’éloigner. Ces faits, s’ils peuvent constituer une atteinte inappropriée, ne constituent pas des indices graves ou concordants d’une tentative de viol.   Comment contrôler la validité de la mise en examen ? Les indices graves ou concordants sont nécessaires à la mise en examen, à peine de nullité. A défaut, les mises en examen sont injustifiées et arbitraires et doivent faire l’objet d’un contrôle en vue de leur nullité. Ainsi, si le mis en examen souhaite contester l’existence de ces indices, il peut saisir la chambre de l’instruction auprès de la Cour d’appel. Dans un arrêt du 27 novembre 2018 (Cass. crim 27 nov. 2018, n°18-83.009), les juges de la Haute Cour ont considéré que la chambre de l’instruction doit se borner à vérifier s’il existe des indices graves ou concordants rendant vraisemblable que la personne ait pu participer, comme auteur ou comme complice à la commission de l’infraction. Par ailleurs, dans un arrêt rendu le 14 avril 2015, la Cour de cassation a précisé qu’il appartenait uniquement à la chambre de l’instruction de vérifier s’il existait des indices graves ou concordants. Il ne lui appartient pas de rechercher s’il existait un lien de causalité certain à ce stade de la procédure. Lorsqu’elle est saisie d’une demande en nullité, la chambre de l’instruction a uniquement pour rôle de rechercher, de manière objective, s’il existe des indices graves ou concordants permettant de constater l’implication du mis en examen dans la commission de l’infraction. François Cordier a rappelé la problématique principale de ce contentieux en précisant que « le contentieux ne peut porter que sur les indices graves ou concordants et non pas l’existence ou l’absence de charges ». Enfin, il convient de préciser que l’absence d’indices graves ou concordants n’est pas le seul élément pouvant entraîner la nullité d’une mise en examen. En effet, dans une décision rendue le 12 septembre 2018 (Cass. crim 12 sept. 2018, n°17-87.510), la Cour de cassation a jugé que l’absence d’un élément constitutif de l’infraction peut entrainer la nullité de la mise en examen, tout comme l’application du principe de la non-rétroactivité de la loi pénale dans le temps. En conclusion, pour qu’un individu soit mis en examen, il est nécessaire qu’il existe à son encontre des indices graves ou concordants rendant vraisemblable qu’il ait pu participer, comme auteur ou comme complice, à la commission de l’infraction. En cas de contestation, une requête doit être formée devant la chambre de l’instruction qui devra uniquement vérifier, de manière objective, s’il existe de tels indices.
La Cour de cassation, dans un arrêt du 23 janvier 2018, a rappelé l’obligation d’impartialité d’un expert judiciaire   Cour de cassation, Chambre criminelle, 23 janvier 2018, 16-82.523 Selon le principe de la présomption d’innocence, toute personne suspectée ou poursuivie reste innocente tant que sa culpabilité n’a pas été établie (article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme). Ce principe fait obstacle à toute affirmation de la culpabilité du prévenu de manière prématurée, notamment de la part d’un expert judiciaire. L’expert doit en effet être impartial et répondre uniquement aux questions qui lui sont posées par l’autorité judiciaire, conformément aux dispositions de cet article 6 de la Convention. Ce principe a encore été rappelé par la Cour de cassation le 23 janvier 2018. Toutefois, la question est de savoir si le défaut d’impartialité de l’expert judiciaire a pour conséquence la nullité de l’expertise. En l’espèce, l’expert judiciaire avait notamment pour mission de « faire toutes observations utiles à la manifestation de la vérité ». Le rapport d’expertise comprenait des observations sur la culpabilité du prévenu, l’expert expliquait notamment que ce dernier avait « tenté » de lui « faire comprendre qu’il n’y était pour rien », ou encore qu’ « il ne fait aucun doute que M. X…, au prétexte de « vouloir faire du Voltaire » a eu des agissements répétés qui ont eu pour effet une dégradation des conditions de travail. Cette dégradation a porté atteinte aux droits de Mme A… ainsi qu’à sa dignité ». Les assertions malheureuses démontraient une partialité éventuelle de de cet expert. Le prévenu déposait en conséquence une requête en nullité, soulevant que le principe d’impartialité de l’article 6 de la Convention s’appliquait également à l’expert, de sorte que la violation de ce principe devait entrainer la nullité des rapports d’expertise. La Cour d’appel rejetait ce moyen de nullité au motif que les questions posées à l’expert et ses réponses étaient en relation avec la mission qui lui était confiée, à savoir l’examen psychologique du prévenu. La Cour de cassation a au contraire jugé que par ces réponses, l’expert affirmait en réalité explicitement la culpabilité du prévenu. Ces faits étaient de nature à porter atteinte au principe de la présomption d’innocence et de l’obligation pour l’expert d’être impartial, ayant pour conséquence la nullité de cette expertise. Il convient de rappeler que la nullité d’un acte entraine la nullité des actes subséquents, de sorte que les actes de procédure découlant directement d’un rapport d’expertise annulé doivent à leur tour être annulés.
Relaxe dans une affaire de violences involontaires en raison des nullités Arrêt de la Cour d’Appel de Paris  Notre client contrôlé positif à la consommation de produit stupéfiant était poursuivi pour violences involontaires par imprudence avec la circonstance aggravante de la consommation de produit stupéfiant. Il a été relaxé par la Cour d’Appel de Paris en raison des nullités soulevées par notre cabinet.Arrêt de la Cour d’Appel de Paris
Le défaut d’accès à l’intégralité des pièces de la procédure constitue une violation des droits de la défense, entrainant la nullité de la procédure.   Le droit à un procès équitable et à préparer sa défense Toute personne citée à comparaitre devant un tribunal dispose du droit à un procès équitable, comme cela est prévu par l’article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des libertés fondamentales et des droits de l’Homme : « Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle ».   Ce droit à un procès équitable comprend plusieurs composantes, et notamment le respect des droits de la défense : « 3. Tout accusé a droit notamment à : a) être informé, dans le plus court délai, dans une langue qu’il comprend et d’une manière détaillée, de la nature et de la cause de l’accusation portée contre lui ; b) disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense ; c) se défendre lui-même ou avoir l’assistance d’un défenseur de son choix et, s’il n’a pas les moyens de rémunérer un défenseur, pouvoir être assisté gratuitement par un avocat d’office, lorsque les intérêts de la justice l’exigent ; d) interroger ou faire interroger les témoins à charge et obtenir la convocation et l’interrogation des témoins à décharge dans les mêmes conditions que les témoins à charge ; e) se faire assister gratuitement d’un interprète, s’il ne comprend pas ou ne parle pas la langue employée à l’audience». Il ressort de cet article l’importance de permettre à toute personne de pouvoir préparer sa défense, afin de bénéficier d’un procès équitable.   L’accès à la procédure pénale : composante des droits de la défense En droit français, le droit à préparer sa défense passe notamment par le droit à obtenir une copie de la procédure, comprenant les éléments à charge et à décharge contre le prévenu. Il est en effet essentiel que le prévenu connaisse les éléments qui lui sont reprochés afin de pouvoir s’en expliquer, ou les contredire avec des éléments de preuve contraires. L’article R.155 du Code de procédure pénale prévoit en ce sens que tout prévenu ou accusé peut obtenir une copie de la procédure dans son intégralité pour l’exercice des droits de la défense : « En matière criminelle, correctionnelle et de police, hors les cas prévus par l’article 114, il peut être délivré aux parties : (…) 2° Avec l’autorisation du procureur de la République ou du procureur général selon le cas, expédition de toutes les autres pièces de la procédure, notamment, en ce qui concerne les pièces d’une enquête terminée par une décision de classement sans suite. Toutefois, cette autorisation n’est pas requise lorsque des poursuites ont été engagées ou qu’il est fait application des articles 41-1 à 41-3 et que la copie est demandée pour l’exercice des droits de la défense ou des droits de la partie civile ».   Il en ressort qu’un prévenu cité à comparaitre devant un tribunal peut demander une copie de la procédure en vue de préparer l’audience et sa défense, et doit obtenir l’intégralité de la procédure, c’est-à-dire : -les actes d’enquêtes, -les éventuelles annexes. Pour exemple, si la procédure comporte un CD avec les vidéosurveillances sur lesquelles se sont fondés les enquêteurs, le prévenu doit pouvoir en obtenir une copie. La question se pose de connaitre les conséquences d’un défaut d’accès à ces pièces.   Le défaut d’accès à l’intégralité de la procédure entraine la nullité de ladite procédure La jurisprudence a précisé les conséquences d’un défaut d’accès à l’intégralité de la procédure, à savoir la nullité de la procédure. En effet, par deux arrêts de 1996, la Cour de cassation a pris pour fondement de ses décisions le principe suivant : « Qu’il s’ensuit que toute personne ayant la qualité de prévenu ou d’accusé est en droit d’obtenir, en vertu de l’article 6, § 3, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, non pas la communication directe des pièces de la procédure, mais la délivrance, à ses frais, le cas échéant par l’intermédiaire de son avocat, de la copie des pièces du dossier soumis à la juridiction devant laquelle elle est appelée à comparaître ». La Cour juge dès lors que les exceptions de nullité de la procédure fondées sur le défaut de communication des pièces du dossier doivent être accueillies : « Mais attendu qu’en prononçant ainsi, et alors que les dispositions réglementaires de l’article R. 155.2°, du Code de procédure pénale, soumettant à autorisation du ministère public la délivrance aux parties de copie de pièces de la procédure, ne sauraient faire obstacle aux droits de la défense, la cour d’appel a méconnu les textes et principes ci-dessus rappelés » (Cass.crim., 12 juin 1996, n°95-82.735) ; (Cass.crim., 2 octobre 1996, n°95-82.290). Cette jurisprudence a été réitérée le 6 janvier 2010 : « Mais attendu qu’en statuant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si le prévenu avait pu obtenir la copie de l’intégralité des pièces du dossier soumis à la juridiction du second degré, et notamment de celles au vu desquelles le ministère public avait conclu à l’irrecevabilité de l’opposition, la cour d’appel n’a pas justifié sa décision » (Cass.crim., 6 janvier 2010, n°09-83.897).   Il convient dès lors, en cas de défaut de transmission de la copie de l’intégralité de la procédure qui a été sollicitée, de soulever une exception de nullité sur le fondement de ces principes. Les termes « intégralité » n’est pas anodin et incite à notre sens à une application littérale de cette règle issue de la jurisprudence.
Un rappel par la Cour de cassation des limites de la saisine du juge d’instruction, et des recours possibles par le mis en examen   Le 8 juin 2017, la chambre criminelle de la Cour de cassation a rappelé les limites de la saisine du Juge d’instruction, et a rappelé que le mis en examen a qualité pour contester la régularité des actes accomplis par le Juge d’instruction en méconnaissance de ces limites, y compris lorsque les actes ne portent pas sur sa personne directement. Cour de cassation, Chambre criminelle, 8 juin 2017, 17-80.709 Il convient de rappeler que le Juge d’instruction, enquêtant dans le cadre d’une instruction judiciaire, est limité dans ses actions par sa saisine. Conformément à l’article 80 du Code de procédure pénale, le Juge d’instruction ne peut informer que sur réquisitoire introductif du procureur de la République. Ce réquisitoire a pour objet de délimiter les faits dont est saisi le Juge d’instruction. Conformément au même article, en cas de découverte de nouveaux faits, le Juge d’instruction ne peut informer de son propre chef mais doit les transmettre au procureur de la République. Ce dernier pourra prendre un réquisitoire supplétif, pour étendre la saisine du Juge d’instruction, ou prendre un réquisitoire introductif distinct en vue de l’ouverture d’une information judiciaire distincte. Le Juge d’instruction peut toutefois opérer des vérifications sommaires pour établir la vraisemblance de ces nouveaux faits. Dans le cas d’espèce, le Juge d’instruction était saisi de faits de viols aggravés mais découvrait de potentiels faits nouveaux d’enlèvement et de tentative d’assassinat. Il entendait le fils du mis en examen en qualité de témoin, pour obtenir plus d’informations sur ces faits. Il procédait toutefois à une audition complète du témoin qui incriminait le mis en examen, et hors présence d’un avocat. Sur le fondement de ces nouveaux faits et de cette audition, le Juge d’instruction transmettait le dossier au procureur de la République qui délivrait des réquisitions supplétives. Le Juge d’instruction poursuivait dès lors le mis en examen pour ces nouveaux faits. Ce dernier déposait une requête en nullité pour irrégularité de l’audition du témoin et des actes subséquents. La chambre de l’instruction rejetait sa requête au motif qu’il n’avait pas qualité pour agir contre cette audition. La Cour de cassation a infirmé cette argumentation en rappelant le cadre de la saisine du Juge d’instruction, mais plus encore en rappelant que le mis en examen a qualité pour contester tout acte du Juge d’instruction méconnaissant les limites de sa saisine. En conclusion, le mis en examen n’a pas besoin d’être visé par un acte du Juge d’instruction pour en contester la validité, dès lors que cet acte est pris en méconnaissance des limites de la saisine du Juge.
Cass.crim., 19 septembre 2017, n°17-81.016   Seule la chambre de l’instruction de la Cour d’appel est habilitée à examiner la régularité des procédures et peut ainsi prononcer leur nullité en tout ou partie (article 206 du Code de procédure pénale).   La Cour de cassation, dans un arrêt du 19 septembre 2017, a été amenée à rappeler ce principe.   En l’espèce, un individu était poursuivi dans le cadre d’une procédure criminelle et était entendu par le Juge d’instruction lors d’un interrogatoire de première comparution à l’issue duquel il était mis en examen. En matière criminelle, l’article 116-1 du Code procédure pénale impose que ces interrogatoires fassent l’objet d’un enregistrement. Or, l’enregistrement n’avait pas été réalisé. Ainsi, immédiatement après l’interrogatoire de première comparution, le Juge d’instruction a procédé à un second interrogatoire de première comparution, avec enregistrement. Le mis en examen refusait de faire des déclarations dans le cadre de ce second interrogatoire. Le mis en examen et son conseil déposaient une requête en nullité des deux interrogatoires ainsi que de la décision de placement en détention provisoire subséquente, au motif que le second interrogatoire avait pour objectif de se substituer au premier interrogatoire, car le Juge le considérait entaché de nullité. La Chambre d’instruction de la Cour d’appel de PARIS rejetait le moyen de nullité au motif que le Juge d’instruction n’a pas cherché à substituer le second interrogatoire au premier mais a réalisé une simple opération matérielle. Elle considérait également que l’immédiateté et la continuité des deux interrogatoires, reportés sur des procès-verbaux successifs, les rendait indivisibles. Le second interrogatoire était donc en réalité une copie du premier interrogatoire.   La Cour de cassation en a jugé autrement. En effet, elle a cassé l’arrêt de la chambre de l’instruction au motif que seule cette chambre peut examiner la régularité des procédures. Ainsi, le juge d’instruction qui réalise un acte, estime qu’il est entaché de nullité et le réalise de nouveau, empiète sur les attributions de la Chambre de l’instruction et commet un excès de pouvoir.  
L’absence d’identification de la personne ayant accès au traitement des systèmes LAPI et FOVES est-elle susceptible d’annuler les procès-verbaux relatifs aux informations délivrées par ce traitement ? Arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation en date du 5 avril 2022, n°21-84.078 Le système de Lecture Automatique des Plaques d’Immatriculation (LAPI) est un système de reconnaissance optique des caractères des plaques d’immatriculation grâce à des caméras. Le Fichier des Objets et Véhicules volés (FOVeS) est quant à lui une base de données recensant les objets ou véhicules signalés ou volés. Ces deux dispositifs permettent aux services de police, de gendarmerie et des douanes de comparer des plaques d’immatriculation avec les véhicules signalés et de faciliter ainsi la constatation d’infractions, comme le prévoit l’article L.233-1 du Code de la sécurité intérieure. La consultation des traitements de données ainsi récoltées n’est toutefois pas autorisée pour tous les agents de ces services. L’article L.233-2 du Code de la sécurité intérieure prévoit que  seuls « les agents individuellement désignés et dûment habilités des services de police et de gendarmerie nationales spécialement chargés de ces missions peuvent avoir accès à ces traitements ». La question dès lors posée par cet arrêt est de savoir si l’absence d’identification de la personne ayant accédé à ce traitement est susceptible d’annuler les procès-verbaux relatifs aux informations délivrées par ce traitement ? La Chambre criminelle de la Cour de cassation a jugé qu’il importe peu que l’agent ayant recueilli les données issues du traitement soit identifié, car il n’a pas besoin d’habilitation spéciale pour les détenir. L’identité devant apparaitre sur ces procès-verbaux est celle des agents habilités à accéder aux données car il doit s’agir d’un agent dûment habilité à le faire. Dès lors, les procès-verbaux ne mentionnant pas cette identité doivent être annulés.
Qu’est-ce qu’un acte subséquent au sens de la procédure pénale dans le cadre de l’annulation d’un procès-verbal ? La procédure pénale prévoit des règles concernant les actes y figurant, lesquelles, si elles ne sont pas respectées, peuvent faire l’objet d’une annulation des actes visés par les juges. Cette nullité ne porte toutefois pas seulement sur l’acte lui-même mais porte également sur les actes dits subséquents. Il n’existe pas de définition légale de cet acte subséquent, rendant son identification difficile pour les avocats. La question est donc celle de savoir ce qu’est un acte subséquent ? Cour de Cassation, Chambre criminelle, du 4 juin 1969, 69-91.071 L’acte subséquent est défini par cet arrêt comme un acte concomitant ou ultérieur à l’acte annulé, excluant ainsi tous les actes antérieurs à l’acte annulé. L’acte subséquent est également l’acte ayant un lien de causalité direct avec l’acte annulé.   Plusieurs éléments vont permettre d’identifier ce lien de causalité : -l’acte annulé était le préalable nécessaire aux actes subséquents, -les actes subséquents sont les actes faisant référence à l’acte annulé, -l’acte annulé doit avoir été le support nécessaire et exclusif des actes subséquents.   L’acte subséquent est ainsi l’acte concomitant ou postérieur à l’acte annulé, faisant référence à cet acte car il en découle directement, il n’existe que parce que l’acte annulé a existé.   Références : Cour de Cassation, Chambre criminelle, du 8 décembre 1998, 98-85.683 Cour de Cassation, Chambre criminelle, du 28 mars 2000, 00-80.090 Cour de Cassation, Chambre criminelle, du 19 avril 2000, 00-80.357 Cour de cassation, criminelle, Chambre criminelle, 21 juin 2016, 16-80.126
Dans le cas où un expert non inscrit sur les listes nationales est désigné par un juge d’instruction, celui-ci doit motiver cette décision, selon la Cour de cassation   Cour de cassation, Chambre criminelle, 13 novembre 2008, 08-81.446 Par un arrêt du 13 novembre 2008, la chambre criminelle de la Cour de cassation a rappelé le formalisme que doivent respecter les juges d’instruction lors de la désignation d’un expert. En effet, l’article 157 du Code de procédure pénale prévoit que : « Les experts sont choisis parmi les personnes physiques ou morales qui figurent sur la liste nationale dressée par la Cour de cassation ou sur une des listes dressées par les cours d’appel dans les conditions prévues par la loi n° 71-498 du 29 juin 1971 relative aux experts judiciaires. A titre exceptionnel, les juridictions peuvent, par décision motivée, choisir des experts ne figurant sur aucune de ces listes. » Se pose dès lors la question de la motivation nécessaire à la désignation d’un expert non inscrit sur ces listes. En l’espèce, le juge d’instruction avait désigné un expert inscrit sur les listes pour réaliser une mission. Les parties civiles déposaient par la suite une requête aux fins de complément d’expertise. Or l’expert n’était, depuis sa première mission, plus inscrit sur les listes mais était devenu expert honoraire. Le juge d’instruction le désignait malgré tout. La chambre de l’instruction, saisie d’une requête en nullité, jugeait que ce choix était motivé par deux éléments suffisants selon elle : Ayant réalisé la première mission d’expertise, il avait une très bonne connaissance du dossier ; Il était parfaitement qualifié pour remplir sa mission. La Cour de cassation a cependant cassé l’arrêt de la chambre de l’instruction au motif que l’ordonnance de désignation de l’expert ne comportait aucune motivation. En conclusion, le juge d’instruction doit désigner un expert inscrit sur les listes prévues par l’article 157 du Code de procédure pénale, ou motiver sa décision d’en désigner un non inscrit autrement que par sa compétence et sa connaissance du dossier.